VOLUME 5, NUMÉRO 1, 11 SEPTEMBRE 2008 3
Transformation des services de santé mentale
Le témoignage de Lorna Knight, elle-même
atteinte de troubles de santé mentale, illustre bien
les grands bénéfices que ces personnes peuvent
tirer de la vie dans la communauté:
Mon plus long
séjour a duré dix ans. J’étais tellement habituée de
vivre à l’hôpital que, lorsque j’avais la chance de
sortir pour passer quelques heures à l’extérieur,
je me ruais rapidement dans l’unité. (…) J’ai obtenu
mon congé du Douglas en mars 1998. Depuis,
je n’ai été traitée qu’à titre de patiente externe. (…)
J’habite aujourd’hui dans la communauté dans la
meilleure résidence au monde. Je travaille à temps
partiel. Je n’ai pas honte d’avoir un problème de
santé mentale. C’est comme si j’avais reçu de
mauvaises cartes dans le jeu de la vie. Mais qui
sait, si je les joue prudemment, (…) je pourrais
peut-être gagner la partie1.
Grâce à la désinstitutionalisation et malgré
ses problèmes de santé mentale, Lorna est
aujourd’hui en mesure de vivre une vie normale…
ou presque. Et c’est là l’objectif visé ! En effet, on
sait, depuis les années 1960, que la vie en établis-
sement ne permet pas aux gens d’atteindre leur
plein potentiel. La désinstitutionalisation, qui
consiste à privilégier la vie en communauté plutôt
qu’à l’hôpital, a permis d’importantes avancées
en ce sens, et les avantages sont nombreux. Ainsi,
les personnes « désintitutionalisées » ne voient
pas leurs symptômes se détériorer, jouissent
d’une plus grande autonomie, requièrent moins
de soins psychiatriques et sont moins souvent
hospitalisées, montre une étude effectuée à
l’Hôpital Louis-H.-Lafontaine2. En outre, cette
approche est plus respectueuse des droits de la
personne.
Cependant, vivre dans la communauté n’est
pas en soi garant du rétablissement. Pour y parve-
nir, les personnes atteintes de problèmes de santé
mentale doivent pouvoir bénéficier de services
adaptés à leur situation et à leurs besoins. Ces ser-
vices sont peu connus et peu répandus à Montréal.
Un des objectifs du plan de transformation est
d’ailleurs de les développer davantage.
C.D.
1.
Traduit de l’ouvrage
Le Douglas en 125 histoires et dessins,
publié
par l’Hôpital Douglas à l’occasion de son 125eanniversaire.
2.
Lesage, Alain,
La désinstitutionalisation dans un grand
hôpital psychiatrique québécois depuis 1989: analyse des
besoins de soins, des coûts et des aspects organisationnels,
Centre de recherche Fernand-Séguin, Hôpital Louis-H.
Lafontaine, juillet 1999, 32 pages. Pour consulter l’étude:
www.hlhl.qc.ca/pdf/desinstitutionnalisation.pdf
Dans les prochains numéros: les divers types de soutien
offerts dans la communauté.
DR
LE MILIEU DE VIE COMME
LIEU DE TRAITEMENT
Le plan de transformation des services de santé mentale donne une large place aux services
de première ligne et au maintien dans la communauté. De fait, le maintien dans la communauté –
soutenu par des services adéquats et suffisants – est reconnu comme un élément clé du rétablissement
des personnes aux prises avec un problème de santé mentale.
Désinstitutionalisation et
maintien dans la communauté
n’égalent pas itinérance
S’il est vrai que les personnes itinérantes sont souvent atteintes de pro-
blèmes de santé mentale ou de dépendance, il est faux de prétendre que
désinstitutionalisation égale itinérance. En effet, selon l’étude d’Alain
Lesage, qui a suivi une centaine de patients désinstitutionnalisés1pendant
dix ans, 90 % d’entre eux vivaient alors en appartement supervisé, 8 % en
logement autonome, et seulement 2 % n’avaient pu être retracés et pour-
raient donc être déménagés ou seraient devenus itinérants.
1. Ces patients avaient tous connu de longs séjours en hôpital psychiatrique (au moins 10 ans),
et la plupart étaient atteints de schizophrénie.
Lors de sa rencontre,
le 17 juin dernier, le conseil
d’administration de
l’Agence de Montréal
a adopté les
recommandations
contenant le plan de mise
en œuvre de la phase 2
du PASM à Montréal.
À consulter
www.santemontreal.qc.ca,
sous Plans régionaux