Actu SES © Hatier – Joëlle Bails Fiche d’exploitation pédagogique De l'agriculteur au distributeur, la guerre des marges fait rage Alexandre Mirlicourtois, Xerfi Canal, 23 février 2016 De l’agriculteur au consommateur, la pression sur les prix s’exerce à tous les stades de la filière. Et le piège de la déflation se referme chaque jour un peu plus avec des victimes en cascade dans le monde agricole et les industries agroalimentaires. Exploitation pédagogique 1. Pourquoi les prix alimentaires mondiaux sont-ils orientés à la baisse ? Cherchez à identifier des facteurs qui ont pu influencer l’offre et la demande ces dernières années. 2. Les agriculteurs français sont-ils affectés par l’orientation des cours mondiaux ? Justifiez votre réponse. 3. Montrez que l’industrie agroalimentaire (IAA) française subit une double pression sur ses prix, à la fois externe et interne. 4. Pourquoi et comment la grande distribution fait-elle pression sur les prix ? 5. Justifiez le titre de l’émission. 1 Actu SES © Hatier – Joëlle Bails Fiche d’exploitation pédagogique Corrigé 1. La baisse des prix est le reflet d’un excès d’offre sur la demande mondiale. La demande est en berne à cause notamment du ralentissement dans les pays émergents tandis que l’offre alimentaire est favorisée par la baisse des cours du pétrole qui, par son impact sur le prix des engrais chimiques et des carburants, réduit les coûts de production des denrées alimentaires. Peuvent aussi jouer les conditions climatiques qui influent sur l’offre. 2. Oui, comme le montre la similitude des courbes des indices de prix mondiaux (FAO) et des prix des produits vendus par les agriculteurs français. Les agriculteurs français subissent dorénavant de plein fouet les aléas des cours mondiaux du fait du démantèlement de la politique agricole commune européenne depuis les années 1990. Ces mécanismes de protection intervenaient en cas de baisse des cours mondiaux pour garantir des prix sur le marché européen en régulant la production (stockage, quotas…). 3. Les entreprises françaises de l’agroalimentaire doivent faire face à la concurrence des IAA d’autres pays européens, notamment l’Allemagne et plus récemment l’Espagne. La compétitivité-prix des entreprises allemandes repose sur un large recours aux travailleurs détachés, en particulier dans les abattoirs ; ces travailleurs, originaires des pays d’Europe de l’Est à moindre protection sociale, coûtent nettement moins cher que des travailleurs locaux puisque les cotisations sociales appliquées sont celles du pays d’origine et non du pays d’accueil. La concurrence espagnole résulte, elle, de la baisse des salaires dans le contexte de chômage massif et de politiques d’austérité à partir de la crise de 2008. En plus de cette pression externe à la baisse sur ses prix, venant de la concurrence étrangère, les IAA françaises subissent la pression en interne de la grande distribution qui impose à ses fournisseurs de comprimer leurs prix. 4. Face à la contraction du pouvoir d’achat des consommateurs, la grande distribution mène des stratégies de compression de ses prix de vente. Parallèlement, les marges qu’elle retire du placement financier de son fonds de roulement (décalage entre paiement au comptant des clients et paiement différé aux fournisseurs) sont érodées par la baisse des taux d’intérêt. Pour maintenir ses marges tout en pratiquant des prix bas, elle cherche à obtenir toujours plus de rabais de ses fournisseurs. Cela la pousse à se concentrer davantage pour accroître son pouvoir de négociation sur les industriels en amont, avec notamment des regroupements de centrales d’achats (Auchan-Système U, Intermarché-Casino, CarrefourCora). 5. De l’amont à l’aval de la filière, on trouve les agriculteurs, les industries agroalimentaires et la grande distribution. La pression sur les prix s’exerce à tous les stades de la filière pour défendre les marges, c’est-à-dire l’écart entre le prix auquel on vend sa production et les coûts de production. Dans cette « guerre des marges », chacun s’efforce de reporter la baisse des prix en amont pour limiter ses coûts d’approvisionnement mais les acteurs sont dans des positions inégales, le rapport de force étant nettement défavorable aux agriculteurs ainsi qu’à certaines entreprises de l’agroalimentaire. 2