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mais la majeure partie des populations arabes modernes ne parle, ne lit, ou n’écrit pas en
Arabe Classique8. Nous sommes confrontés à ce que les linguistes nomment un
phénomène de « diglossie », situation d'un groupe humain qui pratique deux langues en
leur accordant des statuts hiérarchiquement différents, même si ces langues ou variétés
linguistiques sont apparentées et partiellement inter-compréhensibles9. Ici, les variétés
linguistiques sont le « Haut » Arabe, appelé « Arabe Littéraire Moderne » ou « Arabe
Standard Moderne », dérivé directement de l’Arabe Classique, et le « Bas » Arabe, « Arabe
Courant » qui regroupe en fait les dialectes communément parlés.
L’Arabe Standard Moderne est appris à l’école, au même titre que le Sanskrit ou le Latin
sous d’autres latitudes. Il est (en principe) employé à l'écrit et à la communication dans des
situations très formelles (sermons, cours magistraux, journaux parlés, une partie de la
presse écrite…).
Ci-contre, illustration de la complexité des variétés arabes contemporaines10. Le
MSA (Arabe Standard Moderne) est dérivé de l'Arabe Classique mais ne permet
pas de comprendre les conversations quotidiennes.
L’Arabe Courant est utilisé dans la vie de tous les
jours (en famille, avec les amis, en radio et télévision
pour les divertissements,…). Cependant, comme le
note Alan Kaye11, « les différences entre les
nombreux dialectes de l’Arabe Courant et l’Arabe Standard sont telles qu’un fallah (paysan)
qui n’a pas été à l’école peut à peine en comprendre quelques mots et expressions sans
éprouver de grandes difficultés. On pourrait assembler une douzaine de fallahin qui,
n’ayant jamais été exposés à l’Arabe Standard, auraient beaucoup de peine à se
comprendre mutuellement ».
Enfin, les érudits qui affirment que « quiconque pouvant lire un journal en Arabe Standard
Moderne n’aura pas de difficulté à lire l’Arabe Classique du Coran ou d’autres textes
8 Sans même parler du problème de l’analphabétisme touchant ces régions – et, par exemple, près de 50%
des Egyptiens…
9 Charles Ferguson, “Diglossia”, Word, Vol.15, No.2 pp325-340, Aug.1959; William Marçais, “La diglossie
arabe”, L’Enseignement public –Revue Pédagogique, tome 104, no 12, 1930, pp.401-409
10 Ce schéma ne se trouvait pas dans l’article original d’Ibn Warraq, mais est issu de http://www-
personal.umich.edu/~andyf/digl_96.htm.
11 Alan S. Kaye, “Arabic” , in “The Major Languages of South Asia, The Middle East and Africa”, ed. Bernard
Comrie, London, Routledge, 1990, p.181