Les chercheurs se sont alors penchés sur les causes d’un tel déclin.
L’analyse conjointe de l’évolution du glacier et des variations du climat
depuis 1850 leur a permis de montrer que ce recul fort et continu était
principalement dû à la sécheresse majeure qui sévit aux Kerguelen depuis le
milieu des années soixante et qui s’est très largement accentuée depuis
1975, conduisant à la disparition progressive des chutes de neige sur la
calotte. Par ailleurs, il s’avère que si le réchauffement atmosphérique
concomitant aux Kerguelen a aggravé le processus, il n’a joué que pour un
quart dans la perte de glace de la calotte depuis les années 1960.
Les chercheurs ont également démontré que cette sécheresse était liée à un
déplacement des dépressions se propageant sur l’océan Indien : alors que
celles-ci circulaient exactement au-dessus de l’archipel en 1950, elles
évoluent aujourd’hui plus au sud et n’alimentent plus la calotte. Or, ce
changement de circulation résulterait de l’évolution des pressions
atmosphériques aux moyennes et hautes latitudes de l’hémisphère sud, en
lien avec le réchauffement climatique et la variabilité de la couche
d’ozone en Antarctique.
Les pertes record de glace aux Kerguelen seraient donc finalement une
conséquence du changement climatique et du trou d’ozone, tous deux
d’origine anthropique (consommation toujours croissante des combustibles
fossiles et utilisation des gaz fréons dans le passé).
Enfin, les chercheurs ont montré que la calotte devrait continuer à reculer
au cours du XXIe siècle, jusqu’à disparaître au cours des prochains siècles.
Néanmoins, ces travaux de modélisation montrent que les modèles de climat
actuellement utilisés pour effectuer les projections d’évolution du climat
sous-estiment très largement l’assèchement observé à Kerguelen. Les
chercheurs estiment que l’avenir des glaciers de la région sub-Antarctique,
où l’assèchement devrait se poursuivre, pourrait donc être plus sombre que
prévu et que, d’une manière plus générale, les projections d’évolution des
glaciers sont à considérer avec précaution dans les régions marquées par
d’importants changements de précipitation, ceux-ci étant très difficiles à
reproduire.
(1) Les organismes étrangers impliqués sont les suivants : Barcelona Super
Computing Center (Espagne), Cooperative institute for research in
environmental sciences (États-Unis), University of St Andrews (Écosse),
Référence
Favier, V., Verfaillie, D., Berthier, E., Menegoz, M., Jomelli, V., Kay, J.
E., Ducret, L., Malbéteau, Y. , Brunstein, D., Gallée, H., Park, Y. H. and
Rinterknecht V.: Atmospheric drying as the main driver of dramatic glacier
wastage in the southern Indian Ocean. Sci. Rep. 6, 32396; doi:
10.1038/srep32396 (2016) www.nature.com/articles/srep32396
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