Contre-indication cardiaque et pratiques des activités subaquatiques – maladies cortonariennes Docteur Alain Duvallet Année 2011-2012 6 février 2012 Insuffisance coronaire et reprise de la plongée Reprise de plongée après infarctus reconnu cliniquement On ne traite pas le sujet des coronaropathies asymptomatiques (ECG effort systématique chez plongeur à risque ?) Ni le problème du bilan avec épreuve d’effort lors de la reprise après 50 ans Infarctus du myocarde Pathologie fréquente surtout chez l’homme après 40 ans (et la femme après 50 ans), engageant le pronostic vital Facteurs de risque - ATCD familiaux coronariens - Hypertension artérielle - Tabac - Sédentarité, surpoids - Dyslipidémies - Diabète Facteurs de risque de pathologies coronariennes facteur Âge (homme) Âge (femme) augmentation du risque > 40 ans > 50 ans pathologies des artères coronaires dans l’histoire familiale fratrie et/ou parents fumeur quelque soit le mode, type et nombre hyperlipidémie LDL > 100 hypertension TA > 140/90 diabètes HbA1c > 7 surpoids IMC > 25 Mécanisme de Infarctus du Myocarde: la plaque d’athérome et la rupture de plaque - Plaque d’athérome - Fragilité de plaque (cœur lipidique-chape fibreuse) - Fissuration de la plaque - Formation de thrombus occlusif Conduite à tenir: Infarctus du myocarde en phase aigue 1 – urgence, hospitalisation 2 – traitement: Reperfusion la plus précoce possible par: - Fibrinolyse -Angioplastie avec mise en place stent - Stents nus ou actifs Les artères du cœur : artères coronaires Les territoires vasculaires des artères coronaires La clinique: Le symptôme principal de l’infarctus est le plus souvent une douleur intense dans la poitrine, dite « en étau ». La douleur peut remonter vers le cou et se limiter à cette région, ou remonter dans les mâchoires, voire dans le bras gauche. Elle s’accompagne d’une angoisse, d’une impression de mort imminente. Parfois, la douleur apparaît dans l’abdomen et fait penser, à tort, à un problème digestif, d’autant plus que l’infarctus est souvent accompagné de nausées et de vomissements. La sensation de malaise peut être intense, et la perte de connaissance est possible. Une fièvre apparaît souvent le lendemain et persiste quelques jours. Infarctus et Plongée - Problème de plus en plus fréquent: Vieillissement population Style de vie (sédentarité, tabac, alimentation) - De plus en plus de plongeurs loisirs ont plus de 50 ans (anciens plongeurs, découverte de plongée lors de retraite) Incidence des décès de causes cardio-vasculaires dans les activités subaquatiques en fonction de l’âge D’après Caruso J. et coll, undersea hyperbar med, 2001 Problèmes posés par la plongée chez coronarien 1 - Les évènements coronariens constituent la 2ème cause de décès lors des plongées. (Bove A, Chapt 12 Bennett and Elliot’s Physiol and Med of diving 2003) 2 - La plongée constitue un « stress » pour le myocarde lié à: Exercice physique Immersion Température Stress psychologique (milieu aquatique) (Harrisson, Curr Sports Med Resp. 2005 oct; 4(5):275-81) stress en plongée contraintes sur l’homéostasie réponses adaptatives Réponses physiologiques Réponses non-physiologiques, risque coroanrien (Environnement, habitus et équipement) Essai de la physiopathologie des contraintes coronariennes en plongée. Variation de la consommation d’oxygène en fonction de l’intensité du travail La pratique des activités subaquatiques nécessite une bonne condition physique A: personne en bonne condition physique B: personne en médiocre condition physique (d’après A.A.Bove, Diving Medicine 2004) Réserve de débit coronaire en fonction de la surface de section de l’artère coronaire En cas de diminution du lit vasculaire l’irrigation sanguine peut être insuffisante. (d’après A.A.Bove, Diving Medicine 2004) Variation de la consommation d’oxygène en fonction de la vitesse en nage subaquatique. Les activités subaquatiques sont des pratiques à haute consommation d’oxygène Vitesse de nage (d’après A.A.Bove, Diving Medicine 2004) Coût énergétiques des activités humaines Activités aquatiques Nage avec palmes et tuba 5 Mets = 17,5 ml O2 / min / kg Plongée en apnée 7 Mets = 24,5 ml O2 / min / kg ou plongée bouteille faible Plongée en apnée 12 Mets = 42 ml O2 /min / kg ou plongée bouteille militaire Plongée en apnée 12,5 Mets = 43,75 ml O2 / min / kg ou plongée bouteille modéré Plongée en apnée 16 Mets = 56 ml O2 / min / kg ou plongée bouteille intense d’après Ainsworth 1992 Hyperbarie Activités aquatiques Nage avec palmes et tuba Plongée en apnée ou plongée bouteille faible Plongée en apnée ou plongée bouteille militaire Plongée en apnée ou plongée bouteille modéré Plongée en apnée ou plongée bouteille intense 5 Mets = 17,5 ml O2 / min / kg 7 Mets = 24,5 ml O2 / min / kg 12 Mets = 42 ml O2 /min / kg 12,5 Mets = 43,75 ml O2 / min / kg 16 Mets = 56 ml O2 / min / kg Autres activités en comparaison Football en compétition Boxe en match sur un ring Bicyclette : de 16 à 19 km/h supérieure à 32,2 km/h 9 Mets 12 Mets 6 Mets, 16 Mets d’après Ainsworth 1992 Hyperbarie COÛT ENERGETIQUE m at ch en Bo xe Na ge av ec du ru n pa lm es rin g 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0 Relation linéaire entre la consommation d’oxygène et la fréquence cardiaque (d’après T.J.Doubt Med.Sci.Sports exerc. 1996) Immergé, les données sont obtenues au repos et à l’exercice, à 1 ATA et à 5,5 ATA Modifications hémodynamiques liées à plongée - Augmentation du retour veineux central à l’origine d’une augmentation de la précharge (loi de Starling) et du débit cardiaque - Vasoconstriction périphérique (froid et immersion) augmentant la post-charge (loi de Starling) Contraintes spécifiques de l’environnement 1 - Le froid peut induite une temporaire arythmie sinusale 2 – l’eau est 800 fois plus dense que l’air Un travail rétrospectif de Eldridge (1979) observe une plus haute incidence des décès par incident cardiaque lors de plongée en eau froide. De plus cette incidence touche surtout des plongeurs âgés. Risques pour le myocarde L’augmentation de la pré et post-charge peut favoriser une décompensation cardiaque L’augmentation du débit cardiaque peut favoriser une ischémie myocardique Effet sur le rythme cardiaque - Tendance à la bradycardie d’origine vagale (diving réflexe) - Risque de dégénérescence en tachycardie, voir en fibrillation ventriculaire, chez le patient coronarien (Wilmshurst P. Cardiovascular problems in divers. Heart 1998; 80:537-8) - Augmentation de la fréquence cardiaque due aux déplacements Les facteurs de la bradycardie gaz diluants condition physique reflexe d’immersion effet pression per se hyperoxie - - - troubles du rythme - COEUR débit coronaire + thermorégulation + + + + + Exercice musculaire hypercapnie stress âge Réponse vasculaire Hyperbarie Dépense d’énergie thermorégulation Déplacement f(densité) f(vitesse) Activité physique stress Dépense énergétique des muscles respiratoires Augmentation du travail respiratoire pression Mécanique des appareils respiratoires Densité des gaz Risques liés à la plongée chez le coronarien - Ischémie myocardique d’effort, voir rupture de plaque, avec syndrôme coronarien aigu - Bradycardie, voir troubles conductifs - Troubles du rythme ventriculaire - Insuffisance cardiaque Conduite à tenir pour la pratique de la plongée chez le coronarien 1 - Absence de consensus international (ou de lignes de conduite) concernant l’aptitude à la plongée chez des patients ayant des antécédents d’infarctus du myocarde (qu’ils aient été ou non revascularisés) (Harrisson, Curr Sports Med Resp. 2005 oct; 4(5):275-81) 2 - Annexe 3-2-1d2 du règlement intérieur de la commission nationale médicale et de prévention (FFESSM) : Coronaropathie et plongée - 27-28 octobre 2007. Conditions autorisant la pratique de la plongée subaquatique de loisir pour les sujets présentant une coronaropathie. Liste CI médicales plongée FFESSM - Mai 2005 CI Définitives CI Temporaires - Coronaropathie : à évaluer* Insuffisance -Traitement par b-bloquants CI par voie générale ou locale: Cardiaque Cardiologiques symptomatique à évaluer* -Traitement par antiarythmique Toutes les pathologies affectées d’un (*) doivent faire l’objet d’une évaluation, et le certificat de non contre indication ne peut être délivré que par un médecin fédéral. Septembre 2008 Qualité des médecins habilités à délivrer des certificats de non contre indication à la pratique des activités subaquatiques (règlement intérieur, commission médicale et de prévention nationale, FFESSM) (Rappel) Qualité des médecins habilités à délivrer des certificats de Non contre indication en fonction des disciplines pratiquées Médecins diplômés de médecine subaquatique Médecins fédéraux Médecins du sport Tout médecin inscrit à l’ordre ou médecin du Service de Santé des Armées Certificat préalable à la délivrance de la 1ère licence Oui Oui Oui Oui Pratique des sports subaquatiques en exploration Oui Oui Oui Oui Passage brevet plongeur Niveau 1 Oui Oui Oui Oui Passage brevet plongeur Niveau 2 et supérieur Oui Oui Oui Non Jeunes plongeurs (8-14 ans) Oui Oui Non Non Plongeur de plus de 12 ans ayant réussi le niveau 1 Oui Oui Oui Oui Plongeurs asthmatiques ou insulinodépendants Non Oui Non Non Pratique des sports en compétition Oui Oui Oui Non Pratique de la plongée par les Handicapés moteurs (*) Oui Oui Non Non Reprise de l’activité plongée après accident Oui Oui Non Non FFESSM : Reprise de la plongée après un infarctus 1 - Recommandations de bon sens, avec évaluation au cas par cas et information du patient 2 - Reprise de plongée possible, mais de façon à rendre le risque acceptable: après évaluation de sa capacité de réponse à une charge de travail constante et en pointe, pour répondre à une intervention sur un autre plongeur et être en mesure de nager sur une longue distance. Evaluation du risque cardiovasculaire en post-infarctus 1 - Type revascularisation post-infarctus ? 2 - Anatomie et état des coronaires 3 - Evaluation des capacités à l’effort +++ 4 - Recherche de signes d’insuffisance cardiaque 5 - Troubles du rythme ? 6 - Facteurs de risque associés Type de revascularisation et délai évaluation - En cas d’angioplastie coronaire avec pose de stent, intérêt d’une réadaptation cardiaque; attendre 6 mois avant une éventuelle reprise - En cas de pontage aorto-coronaire, réadaptation cardiaque pendant 3-4 mois après la chirurgie; puis reprise de la natation. Epreuve d’effort à 6 mois (Bove 2004) Reprise de plongée après infarctus - Délai après Infarctus ? - Influence du traitement ? - Modalités de reprise et types de plongées autorisées à définir Epreuve d’effort à 6 mois indispensable - Conditions moyennes de plongée = VO2 de l’ordre de 24 ml/kg/min Epreuve d’effort: effort soutenu mené à 60% VO2 (rester en dessous seuil anaérobie) VO2 max de l’ordre de 40 ml/kg/min soit 13 Mets (1 Met = 3-3.5 ml/kg/min) Absence d’ischémie d’effort, profil tensionnel d’effort correct (Cardiovascular disorders and diving, Bove 2004) Evaluation de la fonction ventriculaire gauche à 6 mois -Absence de signes cliniques d’insuffisance cardiaque à distance de infarctus - Absence de signe de dysfonction ventriculaire gauche objectivée à l’échocardiographie (FE < 50%) Sinon : Contre-indication à la reprise (FFESSM-insuffisance cardiaque symptomatique …) Troubles du rythme à distance de infarctus - Etude après le 10 ème jour par holter rythmique - Si troubles du rythme, surtout ventriculaires, contreindication à la plongée (cf FFESSM) Problèmes posés par le traitement médical -Béta - bloquants ++ : Contre Indication classique - mais si possibilité d’effectuer 13 METS sous traitement et sans fatigue importante, la plongée peut-être autorisée (Bove 2004) - Et arbre de décision de la commission médicale de la FFESSM pour les médicaments béta-bloquants Problèmes posés par le traitement médical Aspirine et clopidogrel : risque d’aggravation en cas de saignements (problème des barotraumatismes …). Information du patient +++ Anti-arythmiques – Dérivés nitrés – Inhibiteurs calciques – Anti-HTA Hygiène de vie: Indispensable !! - Sevrage tabagique +++ - Régime alimentaire - Hypocholestérolémiant - Contrôle du poids - Activité physique régulière Conclusion Examen au cas par cas après une évaluation cardiologique rigoureuse (capacités d’effort, fonction VG, troubles rythme) Attendre au moins 6 mois après l’événement aigu Reprise sous certaines conditions … un coronarien avéré n’est pas un plongeur lambda … information, participation +++ Propositions de modalités pour la reprise 1 – certificat signé par le médecin de plongée après avis du cardiologue traitant 2 - Lettre type au cardiologue: Capacités effort (13 mets) à EE (épreuve d’effort) Fonction ventriculaire gauche (échographie) Troubles du rythme à distance de la phase aïgue ? 3 - Reprise activité physique progressive (natation en piscine) 4 - Reprise de la plongée avec une période de réadaptation progressive (retrouver ses marques) 5 - Prérogatives restreintes ? Pas de fonction d’encadrement Courbe de sécurité (espace médian ?) Nitrox ? Température eau > 15°C Bonnes conditions environnement : visibilité, courant, mises et sorties de l’eau … Lettre type pour le plongeur coronarien Patient coronarien désirant pratiquer la plongée sous marine Délai de 6 mois depuis le dernier évènement coronarien (épisode aigu ou revascularisation) - Pas d’atteinte du tronc coronaire gauche ou atteinte tronculaire (même revascularisé) – pas de spasme coronarien documenté – fonction VG conservé avec FEVG > 50% (avec compte rendu d’examen postérieur au dernier évènement coronarien mais sans daté de plus de 1 an). - Traitement conforme aux recommandations des sociétés savantes (y compris bétâbloquants selon les indications mais sans utilisation des médicaments hypoglycémiants) Contrôle optimal des facteurs de risques, selon les objectifs préconisés par les sociétés savantes avec sevrage définitif du tabac. Test d’effort sans ischémie ni trouble du rythme (sous traitement béta-bloquants s’il y a indication) démontrant un entraînement physique régulier avec une capacité physique supérieur à la normale pour l’âge et dans tous les cas >à 10 METS pour une homme de plus de 50 ans ou une femme de moins de 50 ans et > 6 Mets pour une femme de plus de 50 ans. Certificat médical délivré par un médecin fédéral, de non contre-indication à la pratique de la plongée sous-marine sans utilisation de mélanges hypoxiques. Pas d’encadrement. Enseignement limité à l’espace proche (0à6 mètres) sans réalisation de baptême. Renouvellement annuel sous réserve d’un suivi régulier attesté par au moins un ECG d’effort par an. Bibliographie succinte: Energetics of underwater swimming with SCUBA. D.R.Pendergast, M.Tedesco, M.Nawrocki, N.M.Fischer. Med.Sci.Sports Exerc., vol28, n°5, pp.573-580 Cardiovascular and thermal responses to SCUBA diving. T.J.Doubt. Med.Sci.Sports Exerc., vol28, n°5, pp.581-586 Medical aspects of sport diving. A.A.Bove. Med.Sci.Sports Exerc., vol28, n°5, pp.591-595 Time series analysis of heart rate variability during submaximal exercise. G.E.Billman, R.S.Hoskins. Circulation 80:146-157, 1989 Arrhythmia and vago-sympathic equilibrium in athletic divers. A.Bonneau, F.Friemel. Arch.Mal.Coeur Vaiss 82:99-105, 1989 Transient cardiac sinus dysrythmia occuring after cold water immersion. T.J.Doubt. D.M.Mayer, E.T.Flynn. Am. J. Cardiol 59:1421-1422, 1987 Sudden unexplained death syndrome in cold water SCUBA diving. L.Eldridge. Undersea Biomed.res. 6(suppl.):41, 1979 Contribution of environmental factors in development of hyperbaric bradycardia. K.K.Shida, Y.C.Lin. J.Appl. Physiol. 50, 731-735, 1981