Pourquoi en parler ? Analgésie et sédation chez le patient aux soins intensifs CHUM Janvier 2011 Révision : Août 2011 PLAN Principes d’évaluation de la douleur chez le patient capable ou non de communiquer Mécanismes de la dépression respiratoire et clientèle à risque Modalités de la surveillance des analgésiques opiacés Principaux agents utilisés pour l’analgésie aux soins intensifs Gestion concomitante analgésie-sédation Recommandations émises par le MSSS suite à de nombreux décès survenus en milieu hospitalier (2006) Avis sur la surveillance clinique des clients qui reçoivent des médicaments ayant un effet dépressif sur le SNC (OIIQ, 2004, 2009) Définition de la douleur selon l’IASP La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable résultant d’une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite en termes d’un dommage semblable. IASP 2011 Définition de la douleur selon l’IASP (suite) Douleur aux SI La douleur est toujours subjective La majorité des patients (sinon tous!) éprouvent de la douleur durant leur séjour aux SI (Erstad & al., 2009). La signification du mot douleur est en lien Impacts considérables au plan physique et psychologique: 44% des patients capables de communiquer rapportent des symptômes sévères de douleur, et 55% de ces patients ne reçoivent pas d’analgésie sous forme d’opiacés (Honiden & Siegel, 2010). Sources majeures de douleur: positionnement et retrait de drains (Puntillo et al., 2001), mais aussi au repos. avec nos expériences antérieures et notre perception de la situation IASP 2011 1 Objectifs thérapeutiques Optimiser le confort du patient Atténuer la réponse de l’organisme à la douleur – – – – Complications potentielles – Anxiogène pour le patient et sa famille – Inconfort – Syndrome post-traumatique hypermétabolisme consommation augmentée d’O2 hypercoagulabilité atteinte du système immunitaire Complications potentielles (suite) Au niveau physiologique: Complications potentielles (suite) – Augmentation des catécholamines: tachycardie, hypercoagulabilité, intolérance au glucose, immunosuppression, perturbation du sommeil, delirium, et catabolisme persistant. – Augmentation de la consommation (besoins) en O2 – Asynchronie avec le ventilateur – Interférence aux traitements: retrait accidentel de tubes, cathéters – Durée de la VM prolongée 2 mécanismes de douleur – Nociceptif Somatique Viscérale Autres: – Séjour aux SI prolongé – ↑ Coûts Physiologie de la douleur (suite) Physiologie de la douleur Au niveau psychologique: 2 types de douleur: – Douleur aiguë (plus fréquente aux SI) – Douleur chronique – Neurophatique 2 Perception & Intégration Fibres de la douleur: 1- Fibres A δ (1ère douleur) 2- Fibres C (2ème douleur) Nociception: Recommandations La douleur chez la personne âgée Description de douleur plus sourde et diffuse que des sensations vives et aigues Réponse plus lente aux stimuli nociceptifs Il n’y a pas d’évidence que l’intensité ressentie diminue avec l’âge Peut se manifester sous d’autres formes Exemple: délirium (Helms et Barone, 2008) Toute personne mérite la reconnaissance rapide de ses symptômes de douleur et un traitement optimal La douleur doit être évaluée, réévaluée et bien documentée pour faciliter le traitement de la douleur La douleur et autres causes corrigeables doivent être traitées avant de répondre aux besoins en sédation Herr et al. 2006; Erstad & al., 2009 Recommandations (suite) L’évaluation de la douleur, de la sédation et du délirium doivent se faire de manière rapprochée (sinon concomitante) Il est plus simple de prévenir l’escalade de la douleur plutôt que d’intervenir alors qu’elle est hors de contrôle Rechercher l’avis d’un proche Évaluation de la douleur Évaluation subjective: nécessite la collaboration du patient (autoévaluation) Seule autorité en la matière Évaluation objective: patients intubés conscients et inconscients 3 Évaluation de la douleur (suite) Indicateurs de douleur (Gélinas et al., 2005 ) Évaluation des causes potentielles de douleur (analgésie préventive): – – – – – – Condition médicale existante Blessure traumatique Procédures médicales ou chirurgicales Interventions invasives Mobilisation Installation/retrait drains OBJECTIF SUBJECTIF Sensoriel Émotionnel Présence de - Anxiété douleur - Peur - Localisation - Intensité - Autres facteurs aggravants /atténuants (temps/ qualité) - Fréquence de l’évaluation et documentation Cognitif Perception face à la douleur - Concentration sur la douleur - Âge, sexe, culture, éducation etc. - Comportemental Physiologique Expression faciale - Mouvements corporels - Tension musculaire - Interaction avec le ventilateur - Autres: mordre TET, qualité repos/sommeil TA, Pls, FR, diaphorèse, SaO2, CO2 - PIC, toux, T°, tremblements, etc. - - Procédure de l’évaluation Lors d’une 1ère évaluation (l’admission ou une nouvelle douleur) – PQRSTU – Échelle de 0-10 (Sur une échelle de 0 à 10, 0 étant aucune douleur et 10 la pire douleur imaginable, à combien évaluez-vous votre douleur actuellement?) – Échelle comportementale Épisodes subséquents: – Intensité de la douleur À chaque plainte formulée par le patient Lors de procédures nociceptives Avant et après (au pic d’action) l’administration d’un médicament analgésique Notes au dossier Manifestations comportementales observées PQRSTU, si disponible Interventions posées Résultat des interventions: le patient est-il soulagé? DÉPRESSION RESPIRATOIRE 4 Clientèles à risque de dépression du SNC suite à la prise d’opiacés Schématisation de la progression de la dépression du SNC (OIIQ, 2009) Atteinte de l'état de conscience Signes précoces observables: augmentation du degré de sédation plus de 70 ans naïve à un opiacé (prise d’un nouvel opiacé débutée depuis moins d’une semaine) MPOC Apnée du sommeil Insuffisance rénale ou hépatique Douleur intense qui cesse subitement Traumatisme crânien Obésité (IMC > 35) Prise concomitante d’autres dépresseurs du SNC Atteinte de l'état respiratoire Signes précoces observables: ↓ fréquence, du rythme ou de l'amplitude Atteinte grave de l'état respiratoire Signes tardifs observables: ↓ saturation, ronflements Atteinte systémique résultant notamment d'un apport insuffisant en O2 et d'une accumulation de CO2 Signes tardifs observables : altération du pouls et de la tension artérielle Arrêt cardiorespiratoire imminent Soulagement de la douleur Opiacés à forte dose = effet sur la respiration > effet sur le S.N.C. Dose létale Arrêt respiratoire et inconscience rapide Arrêt cardio-respiratoire Dose suprathérapeutique Dose thérapeutique Respiration inadéquate chez patient conscient (lente ou superficielle) Règle de soins CHUM PCO2 et pH = acidose respiratoire Ronflements forts Hypoxie sévère Rapport du coroner du Québec, 2001 FV et asystolie Prévention de la dépression respiratoire Administrer régulièrement la coanalgésie Débuter les opiacés à la plus faible des doses prescrites ↑ la dose de façon graduelle → ne pas dépasser plus de 50% de la dose précédente Éviter, si possible, l’administration simultanée de plusieurs médicaments dépresseur du SNC Combiner avec une méthode non pharmacologique Les paramètres de surveillance clinique Le niveau de somnolence La fréquence et l’amplitude respiratoire (FR) La présence de forts ronflements La SpO2 L'intensité de la douleur Le diamètre des pupilles 5 Gestion de l’analgésie et de la sédation Évaluer la douleur – Échelle numérique – Échelle comportementale – Causes potentielles Évaluer le niveau de sédation Dépistage du délirium – Échelle de RASS – Échelle IC-DSC Échelle de RASS (Richmond Agitation Sedation Scale) RASS Description Définition +4 Combatif Très combatif, danger immédiat envers l’équipe +3 Très agité Tire, arrache tubes et cathéters et/ou agressif envers l’équipe +2 Agité Mouvements fréquents sans but précis et/ou désadaptation au respirateur Ne tient pas en place Anxieux, craintif, mouvements orientés, peu fréquents, non vigoureux, non agressifs +1 Pourquoi un protocole de sédation-analgésie? 0 Éveillé et calme -1 Somnolent Éveil à l’appel avec contact visuel à l’appel ( > 10s) -2 ↓ légère de la vigilance Reste éveillé brièvement avec contact visuel à l’appel ( < 10s) -3 ↓ modérée de la vigilance N’importe quel mouvement à l’appel mais pas de contact visuel -4 ↓ profonde de la vigilance Aucun mouvement à l’appel, n’importe quel mouvement à la stimulation physique (friction non nociceptive de l’épaule ou du sternum) -5 Non éveillable Aucun mouvement, no à l’appel, i à la stimulation physique (friction non nociceptive de l’épaule ou du sternum) – ↓ de la durée d’intubation de 2,4 jours – ↓ de la durée de séjour aux soins intensifs de 3,5 jours – ↓ du recours aux examens diagnostiques neurologiques Kress et al. 2000 Pourquoi un protocole d’analgésie-sédation? (suite) Avantages d’un plan d’éveil quotidien… – Augmentation significative du succès à une extubation planifiée de l’ordre de 90% – Réduction des doses quotidiennes d’agents sédatifs et analgésiques Avantages d’un plan d’éveil quotidien selon l’étude de Hall: Pourquoi un protocole d’analgésie-sédation? (suite) Avantages d’un plan d’éveil quotidien… – ↓ significative de 50% des complications majeures reliées aux soins intensifs Bactériémie Pneumonie Thromboembolie Saignement digestif, etc. 6 Pourquoi un protocole d’analgésie-sédation? (suite) Conclusion Durée moyenne de l’arrêt quotidien: 5,3 heures – Pas d’↑ significative de retrait accidentel de cathéter ou d’extubation non planifiée – Exige une surveillance plus étroite du patient – Plus grande autonomie du personnel infirmier – Pas de conséquences psychologiques à l’arrêt quotidien Références (suite) Références Akgun, K. & Siegel, M.D. (2007). Sedation and neuromuscular blockade in the ICU. CHEST, retrieved August 3rd, 2010 from: http://www.chestnet.org/accp/pccsu/sedation-andneuromuscular-blockade-icu American Society of Anaesthesiologists Task Force. (2002). Practice guidelines for sedation and analgesia by nonanaesthesiologists. Anaesthesiology, 96, 1004-1017. Arnand, K.J.S. & Craig, K.D. (1996). New perspectives on the definition of pain. Pain, 67, 3-6. Coyer, F. M., Wheeler, M.K., Wetzig, S.M. & Couchman, B.A. (2007). Nursing care of the mechanically ventilated patient: What does the evidence say? Part two. Intensive and Critical Care Nursing, 23, 71-80. Erstad B. L. & al. (2009). Pain management principles in the critically ill. CHEST, 135, 1075–1086. Références (suite) Gordon et al. (2005). American pain society recommendations for improving the quality of acute and cancer pain management. Archives of Internal Medicine, 165, 15741580. Helms, J.E. & Barone, C.P. (2008). Physiology and treatment of pain. Critical care nurse, 28, 38-48. Herr, K. & al. (2006). Pain assessment in the nonverbal patient: Position statement with clinical practice recommendations. Pain Management Nursing, 7, 44-52. Honiden, S. & Siegel, M. D. (2010). Managing the agitated patient in the ICU: Sedation, analgesia, and neuromuscular blockade. Journal of Intensive Care Medicine, 25, 187-204. Trois volets à monitorer au chevet: – Analgésie – Sédation – Délirium Arrêt et ajustement quotidien de la sédation pour éviter le sous/surdosage Consigner les évaluations et résultats des interventions Approche interdisciplinaire… toujours aux SI Gélinas, C. & Arbour, C. (2009). Behavioral and physiologic indicators during a nociceptive procedure in conscious and unconscious mechanically ventilated adults: Similar or different? Journal of Critical Care, 24, 628.c7628.e17. Gélinas, C., Fortier, M. Viens, C., Fillion, L. & Puntillo, K. A.(2004). Pain assessment and management in critically ill intubated patients: A retrospective study. 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