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NÉGATION
Les confessions, de Jean-Jacques Rousseau – de 1765 à 1770
On ne m’a pas compris. On a tout mélangé. J’avais pourtant tout dit, tout écrit,
sans rien cacher, avec sincérité. On n’a pas voulu de moi. Je n’aurais pas dû tout
raconter. On n’a pas le droit de me faire ça, c’est de la cruauté. Il ne me reste que le
silence. Je retourne à mon jardin. La nature, elle, ne ment jamais. (72 mots)
J’aurais dû faire comme les autres, étaler mon savoir, épater, pontifier, me
réconcilier avec la société. Je n’ai pas pu. Je suis trop sauvage, trop pur, trop naïf
aussi. J’ai tenté la transparence. On n’arrive pas à la vérité en se contentant de
vagues souvenirs fumeux. On ne peut pas comprendre ce que l’on est si l’on n’accepte
pas d’au moins rechercher l’entière vérité. Dans mon autobiographie, j’ai avoué le
mal que j’ai causé et le bien que j’ai pu faire dans ma vie. J’ai voulu ne rien cacher,
pas même les détails scabreux dont on a rougi. (98 mots)
On a détruit mon projet. On n’a retenu que ce qui me condamnait, mes
contradictions, mes lâchetés. On m’a ridiculisé. C’est un échec. Je ne veux plus
parler. Du reste, je n’ai plus rien à dire. La solitude et le rêve valent bien la
renommée. (45 mots)