LES PASSEREAUX DE MONTAGNE par ROBERT HAINARD
extrait -les pics-, Notre Terre Sauvage, 20 mai 1958
Les pics sont un élément essentiel des forêts de montagne.
Le plus caractéristique est le grand pic noir , à calotte rouge, complète chez le mâle,
occipitale pour la femelle, à bec et œil d'ivoire. C'est un oiseau des forêts profondes, dès
le pied des montagnes. Au vol il pousse un « trru, trru, trru » et posé, un « quien »
traînant, à sonorité de cornette, et ceci, je crois, sans exception.
Par les pics bigarrés, noirs et blancs à calotte rouge chez le mâle, le vigoureux pic
épeiche est le plus abondant, en montagne comme en plaine.
Le pic tridactyle à calotte jaune chez le mâle, est un oiseau nordique, relique dans
les Alpes de l'époque glaciaire. Il ne s'y trouve que par place, et il lui faut des forêts peu
parcourues et riches en bois mort.
Le pic vert aime les boqueteaux plus que la forêts dense. C'est surtout un oiseau de
plaine, mais on le rencontre jusqu'à 2000 m.
Le pic cendré semble la forme atténuée du pic vert, comme taille, comme couleur et
comme voix. Il aime les bois tendres et par conséquent, les lieux humides, mais il habite
aussi par endroits la forêt de montagne.
A lire ou à relire, « l'appel des pics », dans la « Salamandre n° 191 avril et mai 2009 »
et n'oubliez pas d'emmener le miniguide dans vos balades !
Un film à voir absolument !
Les pics ont besoin des arbres pour vivre. Ils y creusent leurs loges. Ici, un pic épeiche en vol. Dans le tronc, son petit attend le ravitaillement.
Le temps d'un film documentaire, les pics sortent de leurs loges. Six mois durant, le
cinéaste et ornithologue vaudois Vincent Chabloz a promené sa caméra à travers la Suisse
pour saisir, en images, les différentes espèces présentes. Alors qu'on en dénombre un
peu plus de 200 à travers le monde, la Suisse en recense neuf : pic noir, pic-vert, pic
cendré, pic épeiche, pic mar, pic épeichette, pic à dos blanc, pic tridactyle et torcol
fourmilier. Si tous habitent notre territoire à l'année, dans les forêts et les vergers
généralement, le torcol fourmilier se distingue de ses cousins par le fait qu'il est le seul
migrateur. A l'automne, il s'envole pour l'Afrique où il passe l'hiver.
Ils vivent à la verticale
« Depuis toujours, j'aime les pics, confie Vincent Chabloz. Ils occupent une place à part
dans le monde des oiseaux. Quand ils ne volent pas, ils vivent à la verticale contre le tronc
des arbres grâce à des adaptations morphologiques, tant au niveau de leurs pattes que
de leur queue. Cette position verticale, unique chez les oiseaux, est ce qui les caractérise,
en plus de leurs tambourinages qui, chez eux, remplacent le chant très souvent. Le
tambourinage leur sert aussi à marquer leur territoire ainsi qu'à chercher les insectes qui
se trouvent sous l'écorce des arbres et dont ils se nourrissent. Avec leur bec, véritables
ciseaux à bois, ils creusent des loges dans les arbres plutôt que de construire des nids. Ce
sont des bosseurs. Dans ces cavités, qui représentent à chaque fois trois semaines de
labeur pour un couple, ils vivent, se reproduisent, abritent et nourrissent leurs petits. »
Vincent Chabloz les a filmés de février à juin, la période pendant laquelle ils sont le plus
actifs, occupés aussi bien aux parades amoureuses - « une sorte de danse » - qu'aux
accouplements, aux forages de leurs loges et aux nourrissages de leurs petits. Un
magnifique spectacle.
On peut repérer, grâce à leurs tambourinages, et observer la présence de pics un peu
partout, aussi bien dans le Jura que dans les Alpes et sur le Plateau. Mais par rapport à
autrefois, leur nombre a diminué. Des espèces sont rares, voire en danger, ce qui a
d'ailleurs amené l'Office fédéral de l'environnement à envisager des mesures de
préservation, dont un plan d'action pour sauver le pic mar, sur la liste rouge des espèces
menacées.
Pour ce qui est du pic à dos blanc, il amorce un discret retour en Suisse depuis une
dizaine d'années, aimant nicher dans les forêts de montagne inexploitées. « C'est le plus
rare de tous, souligne Vincent Chabloz. L'année du tournage il n'y avait que deux couples
recensés sur l'ensemble du territoire. Nous avons été le filmer aux Grisons, un moment
incroyable et des images sans doute uniques. » Chaque espèce occupe un territoire
répondant le mieux à ses besoins spécifiques, quand il n'est pas généraliste, à l'instar du
pic épeiche que l'on rencontre de la plaine aux Alpes.
Les forêts, leur biotope
En raison de l'évolution des forêts, leur habitat, et des modes d'exploitation de celles-
ci surtout, les pics ne cohabitent plus nécessairement. Coproducteur de L'Eloge des pics
et auteur des textes, Laurent Willenegger de souligner : « Les forêts sont
malheureusement devenues en Europe centrale au cours du siècle passé des usines à
bois. On a favorisé le plantage d'essences uniques au détriment de la biodiversité qui
prévaut à l'état naturel. Le bois mort et les arbres morts sont par ailleurs encore trop
souvent évacués, alors qu'ils sont nécessaires et utiles à plein d'animaux, dont les pics. »
La présence ou non de cette famille d'oiseau dans un lieu en dit long sur l'évolution des
écosystèmes forestiers et de leur biodiversité. Faire l'éloge des pics, c'est une manière de
le rappeler.
LÉO BOLLIGER, TERRE & NATURE, 19 MARS 2009
+ D'INFOSL'ÉLOGE DES PICS, FILM DE VINCENT CHABLOS PRODUIT PAR LA SALAMANDRE. RENSEIGNEMENTS ET COMMANDES : TÉL. 032 710 08 25 OU WWW.SALAMANDRE.NET
Couverture du DVD
Le pic est venu dans mon jardin !
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