Commission NAT NOTE À L'ATTENTION DE M. KARL-HEINZ LAMBERTZ Vice-Président du Comité européen des régions Conférence conjointe CESE-CdR «Cork+20: on ne peut plus se permettre de laisser de côté les zones rurales» Le 9 novembre 2016 Mesdames, Messieurs, C'est avec plaisir que je vais clôturer cette conférence conjointe sur la politique de développement rural. J'ai constaté avec une grande satisfaction que les préoccupations et les positions de la société civile rejoignaient celles des autorités locales et régionales et en grande partie également celle du Parlement Européen. Je pense que cette journée d'échange a confirmé qu'il était nécessaire d'aller au-delà d'une simple déclaration et qu'il était urgent de prendre des engagements concrets pour le développement des zones rurales en Europe. Pour le Comité des régions, ce n'est que par une approche intégrée des politiques publiques que pourront être relevés les défis économiques, environnementaux et sociaux qui se posent à chaque territoire européen et plus particulièrement aux territoires ruraux. Il est donc urgent : 1. d'accroître le soutien financier de l'Union Européenne en faveur du développement rural; 2. de diversifier les points d’entrée et d'insérer le rural dans toutes les politiques européenne; 3. de poursuivre l’harmonisation des règles de fonctionnement des Fonds structurels à travers le cadre stratégique commun afin de faciliter la programmation et la gestion du développement rural. L'avis d'initiative que nous avons élaboré sur "l'innovation et la modernisation de l'économie rural" détaille nos propositions sur ces trois axes de travail. 1|Page 1. Accroître le soutien financier de l'UE en faveur du développement rural L'étude du Comité des Régions sur les budgets européens consacrés au développement rural, montrent qu'ils sont très insuffisants au regard du poids des zones rurales en Europe mais plus inquiétant qu'ils sont en diminution importantes par rapport à la précédente période de programmation1. Dans ses avis sur l'innovation et la modernisation de l'économie rurale, le Comité des Régions demande une augmentation du budget FEADER, qui est en diminution par rapport à la précédente période de programmation2, pour contrebalancer la concentration croissante des productions agricoles engendrant de fortes disparités régionales comme l'a rappelé M Buchanan dans son propos introductif. Cette augmentation du budget FEADER doit être orientée prioritairement vers la promotion de l'inclusion sociale, la réduction de la pauvreté et le développement économique dans les zones rurales qui ne bénéficie pour le moment que de 15% des fonds FEADER. Dans le cadre d’une agriculture compétitive et multifonctionnelle, une place importante doit être accordée à la diversification. Mais la multifonctionnalité de l’agriculture, si elle contribue efficacement au développement rural, n’est pas une réponse suffisante; les autres secteurs socioprofessionnels doivent en effet être mobilisés pour un développement durable, diversifié et équilibré de la société rurale. Le développement local doit également être davantage soutenu. Seulement 5% de l'enveloppe FEADER est réservée pour le programme LEADER ce qui est insuffisant pour proposer un plan de relance des investissements dans les zones rurales où reviennent les personnes qui se trouvent dans des situations difficiles en ville et veulent réduire les dépenses et améliorer leur condition de vie grâce à l'auto-entreprenariat. Seulement 5% de l'enveloppe FEADER est réservée pour le programme LEADER ce qui est insuffisant pour proposer un plan de relance des investissements dans les zones rurales où reviennent les personnes qui se trouvent dans des situations difficiles en ville et veulent réduire les dépenses et améliorer leur condition de vie grâce à l'auto-entreprenariat. Pourtant grâce à LEADER, 150.000 emplois ont été créés depuis 1991 et c’est pratiquement le seul instrument qui soutient l'emploi et maintient vivant le tissu économique et social. Dans les zones à dominante rurale, 82% de 1 2 Il est passé de 17.1 % du budget européen pour la période de programmation 2007-2013 à 12.2% dans cette période de programmation 2014-2020. Etude du CDR sur les budgets européens consacrés à la politique de développement rural. Novembre 2016 Il est passé de 9.9 % du budget européen pour la période de programmation 2007-2013 à 9.2% dans cette période de programmation 20142020. Etude du CDR sur les budgets européens consacrés à la politique de développement rural. Novembre 2016 2|Page l’emploi et 95% de la valeur ajoutée proviennent de secteurs non agricoles. Avec une moyenne de 2,5 millions d'euros par programme, LEADER fait en sorte que, les entrepreneurs ruraux multiplient souvent la mise communautaire initiale par un facteur allant jusqu'à 4 ou 5. Il est donc essentiel de maximiser l'impact des projets de développement locaux, malgré la faiblesse des capacités d'ingénierie et des fonds disponibles Il est également urgent de réorienter les fonds FEDER vers les zones rurales. Les premières estimations montrent que seul 11,6% du budget FEDER serait consacré aux zones rurales contre 25.8 % dans la précédente période de programmation et alors qu'elles représentent 52% du territoire européen. Le Fonds européen de développement régional (FEDER) doit compléter le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) comme le prévoit le traité européen afin de satisfaire à l'objectif de cohésion territorial. Comme l'a expliqué M Buchanan il faut rapidement améliorer l’offre de formation professionnelle dans les zones rurales. Or alors que seulement 9 % du FES était consacré aux zones rurales dans la précédente période de programmation, ce budget est tombé 7% pour la programmation 2014-2020 ce qui est notoirement insuffisant pour répondre au besoin de ces territoires et pour lutter contre l'exode rural et le vieillissement de la population agricole. Ces demandes doivent être prises en compte dans la mesure du possible dans le cadre de la révision à mi-parcours du Cadre Financier Pluriannuel et dans leur intégralité dans la programmation post 2020. 2. Insérer le rural dans toutes les politiques européennes Les besoins des territoires ruraux dépassent largement ce que peut faire la politique développement rural mais l’offre de l’UE n’est pas à la hauteur quantitativement et qualitativement. La déclaration sur le développement rural adopté en septembre à Cork mentionne que3 la politique de développement rural doit être prise en compte dans toutes les politiques européennes. C'est particulièrement le cas pour les politiques structurelles qui devraient faire du développement rural leur objectif prioritaire conformément à l'objectif de cohésion territoriale inscrit dans le Traité de Lisbonne. 3 Rural and agricultural policies must interact with the wider context of national and regional strategies and work in complementarity and coherence with other policies" 3|Page Une des premières priorités devrait être l’accès à des réseaux de télécommunications à haut débit qui est un facteur clé de compétitivité et de croissance économique Bien qu’admise comme une donnée majeure à prendre en compte, l’interdépendance rural-urbain ne bénéficie d’aucune politique de l’UE et se trouve même fortement handicapée par l’approche sectorielle des DG de la Commission ce à quoi il faut remédier au plus vite. Il est indispensable et urgent de diversifier les points d’entrée et d'insérer le rural dans toutes les politiques européennes, comme c’est le cas actuellement pour les villes. Ce chemin ne sera pas facile à emprunter car il doit surmonter de nombreux obstacles liés à la taille des projets ruraux et aux préjugés, mais il permettra d’assurer une meilleure connexion et intégration des activités rurales avec les autres. 3. Approche territorialisée dans le cadre des programmes opérationnels Au-delà des moyens budgétaires disponibles, la mise en œuvre d'une approche territorialisée dans le cadre des programmes opérationnels reste marginale alors que les études montrent que l'adoption d'une approche territorialisée et d'une plus grande sensibilisation du territoire sont considérées comme des conditions permettant de garantir une exécution plus efficace de la politique de cohésion et de mieux rejoindre les objectifs de la stratégie Europe 2020. Si le Cadre Stratégique Commun et les contrats de partenariat créent un environnement favorable pour la coordination et l'intégration et peuvent donc être considérés comme deux innovations intéressantes du nouveau cadre des politiques européennes, elles restent insuffisantes pour assurer un développement durable des territoires ruraux. En effet le développement local mené par les acteurs locaux et les Investissements Territoriaux Intégrés sont les seules dispositions du règlement portant dispositions communes qui prévoit de réelles synergies pour la mise en œuvre conjointe des fonds structurels. De plus la mise en œuvre de ces principes reste un défi, en particulier dans certains domaines stratégiques qui prennent traditionnellement peu en compte les spécificités territoriales. Enfin la conception et la mise en œuvre d'une véritable stratégie de développement rural basée sur une approche territoriale intégrée suppose également des moyens humains dont les territoires ruraux les plus en difficulté peuvent manquer. Dans son avis sur "le développement local mené par les acteurs locaux" le Comité des Régions avait d'ailleurs souligné 4|Page que le renforcement des capacités était un élément clé du développement local mené par les acteurs locaux et qu'il faudrait prévoir des moyens suffisants pour permettre aux acteurs locaux d'élaborer et de mettre en œuvre leur stratégie locale. Conclusion Les travaux préparatoires à la programmation post 2020 vont débuter très prochainement. Il est important qu’une réflexion étayée sur la ruralité puisse être menée pour donner un socle plus fort à la politique en faveur des territoires ruraux après 2020. La valeur ajoutée et le potentiel de créativité et d’innovation que peuvent apporter les territoires ruraux sont considérables, mais leurs contributions à la croissance sont sous-exploitées. Alors que le concept de Smart City s'est imposé auprès des décideurs comme la voie qui permettrait de répondre aux défis du futur, le Comité des Régions estime au contraire que rencontrer les objectifs de la Stratégie 2020 tout en maintenant la cohésion territoriale en Europe ne saurait se réussir sans associer aux efforts tous les potentiels de croissance, y compris ruraux. Merci de votre attention. 5|Page