Chapitre 10 OSPH La quantité de mouvement et l’impulsion 48
10. La quantité de mouvement
Vers le milieu du XVIIesiècle, on savait q'un corps qui n'est soumis à aucune influence
extérieure se déplace à vitesse constante. Quelle est donc «l'influence extérieure» qui fait
varier sa vitesse ? René Descartes suggéra que c'était l'impact d'un autre corps subissant lui
aussi une variation de vitesse. De plus, selon lui, ces variations n'étaient pas arbitraires.
Descartes adhérait à la théorie «mécaniste» : Dieu avait créé l'univers à l'image d'un
mécanisme d'horlogerie parfait et immuable, comportant une quantité fixe de «matière» et de
«mouvement». Par exemple, dans une collision entre deux particules, la vitesse de chacune
d'elles peut changer mais la «quantité de mouvement» totale, qu'il définit comme le produit de
la masse et du module de la vitesse, reste constante.
Descartes présenta plusieurs autres règles relatives aux chocs, et la plupart étaient incorrectes.
Il affirma par exemple que, lorsqu'un petit corps en frappe un plus grand, il rebondit avec la
même vitesse, le plus gros des deux corps restant immobile. Cette hypothèse est
approximativement correcte pour la collision d'une balle de tennis de table avec une boule de
quilles, mais elle n'est pas rigoureusement correcte. Les lois régissant l'impact nécessitaient
donc une étude plus approfondie.
Ainsi, pour corriger les insuffisances de la théorie de Descartes, les scientifiques
introduisirent la notion de quantité de mouvement, grandeur vectorielle:
p mv
 
Les chocs satisfaisant la règle de conservation de la quantité de mouvement totale. Ainsi, si
1
p
et
2
p
sont les quantités de mouvements de deux corps, on a
1 2
p p
 
 
ou 1 2
0
p p
 
 
Par la suite, Newton réalisa toute une série d'expériences sur les collisions entre des
substances très diverses (verre, bois, acier et mastic) et s'aperçut que le vecteur
mv
était
toujours conservé, mais que le scalaire
2
mv
n'était conservé que dans le cas particulier des
collisions entre des sphères dures.
En 1752, le mathématicien L. Euler modifia la définition de Newton pour tenir compte
explicitement du facteur temps. L'énoncé moderne de la deuxième loi de Newton est donc
dp
F
dt
La force résultante agissant sur une particule est égale à la dérivée par rapport au temps de sa
quantité de mouvement.
Si la masse du corps est constante, alors dmv dv
F m ma
dt dt
 
 
10.1. La conservation de la quantité de mouvement
La figure représente une collision entre deux particules de masses m1et m2de vitesses
initiales
1
v
et
2
v
et de
vitesses finales
1
v
et
2
v
respectivement. Au cours
de leur interaction, les
deux particules peuvent
entrer en contact, comme
le feraient deux boules de
billard, ou simplement se
repousser comme le
feraient deux charges
électriques de même
m1m1
m2m2
Chapitre 10 OSPH La quantité de mouvement et l’impulsion 49
signe. La relation entre les vitesses initiales et finales est donnée par le principe de
conservation de la quantité de mouvement :
1 1 2 2 1 1 2 2
m v m v m v m v
 
 
   
Puisqu'il s'agit d'une équation vectorielle, la conservation de la quantité de mouvement vaut
pour chaque composante :
1 1 2 2 1 1 2 2
1 1 2 2 1 1 2 2
1 1 2 2 1 1 2 2
x x x x
y y y y
z z z z
m v m v m v m v
m v m v m v m v
m v m v m v m v
 
 
 
 
 
Pour pouvoir appliquer le principe de conservation de la quantité de mouvement, il faut que la
résultante des forces extérieures agissant sur le système soit nulle. Sur un système de
particules, les forces qui agissent sur l’une d’entre elles sont les forces extérieures ainsi que
les forces dues à chaque autre particule. Si on en considère la somme, l’influence mutuelle de
chacune des particules s’annule (3eloi de Newton) et il reste :
ext
dP
F
dt
ext
F
est la force extérieure résultante agissant sur le système et
P
est la quantité de
mouvement totale des particules.
Si la force extérieure résultante sur un système est nulle, la quantité de mouvement totale est
constante.
Si une force extérieure résultante agit dans les directions x et z, par exemple, mais pas dans la
direction y, la composante en y de la quantité de mouvement est encore conservée.
Le principe de conservation de la quantité de mouvement est remarquablement simple et
général. Il est valable pour tous les types d'interaction et peut s'appliquer à des phénomènes
aussi divers que les chocs, les explosions, la désintégration radioactive, les réactions
nucléaires, l'émission et l'absorption de lumière. Il permet également d'étudier certains
phénomènes courants comme le recul d'une arme à feu et la propulsion d'une fusée.
La conservation de la quantité de mouvement peut même s'appliquer, en première
approximation, à des cas la force extérieure résultante n'est pas nulle. Cela est possible si
les forces intérieures, comme celles qui interviennent lors d'une explosion ou d'un choc, sont
beaucoup plus intenses que la force extérieure, par exemple la force de gravité. Si le
phénomène est de courte durée, la force extérieure n'agit pas suffisamment longtemps pour
modifier de façon significative la quantité de mouvement totale du système.
Dans toute collision de courte durée, on peut affirmer que la quantité de mouvement du
système juste avant la collision est égale à la quantité de mouvement du système juste après
la collision.
Les quantités de mouvement des particules juste après l'événement sont déterminées
principalement par les forces intérieures.
10.2. Types de collision
Avant d'appliquer le principe de conservation de la quantité de mouvement, nous devons
d'abord préciser ce qu'est une collision et faire une distinction entre trois types de collisions.
Le terme «collision» désigne en général une interaction brève et intense entre deux corps. La
durée de l'interaction est suffisamment courte pour nous permettre de limiter notre étude à
l'instant précédant immédiatement et à l'instant suivant immédiatement l'événement.
Toutefois, la durée d'une collision dépend de l'échelle de temps qui nous intéresse. Une
collision entre particules élémentaires peut durer 10-23 s, alors qu'une collision entre galaxies
dure des millions d'années. Les collisions peuvent être élastiques, inélastiques ou encore
parfaitement inélastiques ; la quantité de mouvement se conserve dans les trois cas.
Chapitre 10 OSPH La quantité de mouvement et l’impulsion 50
Par définition, une collision élastique est un choc dans lequel l'énergie cinétique totale des
particules se conserve également:
2 2 2 2
1 1 1 1
1 1 2 2 1 1 2 2
2 2 2 2
m v m v m v m v
 
 
Soulignons que cette équation est une équation scalaire. Durant une collision élastique,
l'énergie cinétique des particules est totalement ou partiellement emmagasinée sous forme
d'énergie potentielle, puis complètement restituée sous forme d'énergie cinétique. Les chocs
entre billes d'acier sont pratiquement élastiques. Dans les systèmes atomiques et nucléaires,
les collisions élastiques sont assez courantes. Si vous voulez savoir si la collision entre une
super balle et le sol est élastique, vous n'avez qu'à la lâcher sans vitesse initiale. Si la collision
est élastique, la balle reviendra à sa hauteur initiale.
Lors d'une collision inélastique, l'énergie cinétique totale des particules varie. Une partie de
l'énergie cinétique est emmagasinée sous forme d'énergie potentielle correspondant à une
variation de la structure ou de l'état interne et n'est pas restituée immédiatement. Une partie de
l'énergie cinétique peut servir à faire passer le système (par exemple, un atome) à un niveau
d'énergie plus élevé, ou bien être convertie en énergie thermique de vibration des atomes et
des molécules ou en énergie lumineuse, sonore ou en une autre forme d'énergie (l'énergie
totale, qui comprend toutes les formes d'énergie, est toujours conservée). Par exemple, la
collision entre deux boules de bois est accompagnée d'un bruit: une partie de l'énergie
cinétique est transformée en énergie sonore, et la collision est donc inélastique.
Lors d'une collision parfaitement inélastique, les deux corps mis en jeu s'accouplent ou
restent liés.
On rencontre également des chocsau cours desquelsil y a augmentation de l'énergie cinétique
totale. Cela peut se produire lorsqu'un ressort comprimé ou une charge explosive libère de
l'énergie emmagasinée.
Méthode de résolution de problèmes
1. Faire un schéma figurent les directions de toutes les vitesses avant et après
l’événement. Utiliser
1
v
et
2
v
pour désigner les vitesses avant le choc,
1
v
et
2
v
pour
celles après le choc. Choisir les axes du système de coordonnées.
2. Ecrire la loi de conservation pour chaque composante du vecteur quantité de
mouvement. Ecrire la loi de conservation de l’énergie cinétique si le choc est
élastique.
3. Le signe donné à chaque composante de la quantité de mouvement doit être en accord
avec le sens des axes. Le signe de
1
v
et
2
v
sera donné par la résolution du problème.
Exemples
1. Une limousine Cadillac de masse 2000 kg roulant vers l'est à 10 m/s entre en collision
avec une Honda Prelude de masse 1000 kg roulant vers l'ouest à 26 m/s. La collision
est parfaitement inélastique. (a) Trouver la vitesse vcommune des véhicules
immédiatement après la collision. (b) Quelle est la fraction d'énergie cinétique perdue
pendant la collision ?
2. Une carabine Winchester Super X de masse 3,24 kg, initialement au repos, tire une
balle de 11,7 gdont la vitesse a un module de 800 m/s. (a) Quelle est la vitesse de
recul de la carabine ? (b) Quel est le rapport des énergies cinétiques de la balle et de la
carabine ?
3. Soit une rondelle de masse ml= 3kg et de vitesse initiale 110
m
v
s
et orientée à 20°
sud par rapport à l'est. Une deuxième rondelle de masse m2= 5kg a une vitesse
Chapitre 10 OSPH La quantité de mouvement et l’impulsion 51
25
m
v
s
orientée à 40° ouest par rapport au nord. Elles entrent en collision et
demeurent liées. Trouver leur vitesse commune après le choc.
4. En 1742, Benjamin Robins mit au point un dispositif simple mais ingénieux appelé
pendule balistique pour mesurer la vitesse d'une balle de fusil. Supposons qu'une balle
de masse m= ____ g et de vitesse
1
v
soit tirée dans un bloc suspendu de masse M=
____ kg. En pénétrant dans le bloc, la balle le fait monter d'une hauteur H = ____ cm.
(a) Comment peut-on déterminer
1
v
à partir de H? (b) Quelle est l'énergie thermique
produite ? (c) Calculer la force de frottement sur la balle en supposant qu'elle parcourt
____ cm avant de s'arrêter.
Au début des années 20, le physicien américain et pionnier
de l'espace Robert H. Goddard (1882-1945) travaillait sur la
propulsion des fusées. Dans un article paru en 1919, il
suggérait qu'une fusée pouvait voyager dans l'espace et
même atteindre la Lune. Voici ce qu'on pouvait lire dans
l'éditorial du New York Times du 13 janvier 1920: «Il serait
absurde d'affirmer que M. le Professeur Goddard, malgré
qu'il occupe une «chaire» au Clark College et qu'il bénéficie
de l'appui de la Smithsonian Institution, ne connaît pas le
principe d'action et de réaction et ne sait pas qu'il faut avoir
un milieu, autre que le vide, contre lequel réagir.
Évidemment, sa méconnaissance des principes
fondamentaux inculqués chaque jour dans les collèges aux
élèves n'est qu'apparente.» La presse populaire fit même de
lui une caricature, l'affublant du surnom d'«homme lunaire».
Pour contrer de tels arguments, Goddard attacha un pistolet
de calibre 22 à un axe libre de tourner à l'intérieur d'une
cloche en verre d'où l'air avait été évacué. Lorsqu'il tira une
balle à blanc, l'arme recula dans le sens opposé à celui de
l'échappement des gaz. L'analogie avec la fusée était
évidente.
Le 16 mars 1926, il réussit à lancer la première fusée à
carburant liquide (oxygène liquide et essence). Elle resta
allumée pendant 2,5 savec une vitesse moyenne de 96 km/h.
Elle s'éleva jusqu'à une hauteur de 12,5 met atterrit 56 m
plus loin dans un carré de choux. Le 17 juillet 1969, lorsque
Neil Armstrong, Edwin Aldrin et Michael Collins
entreprirent la première mission sur la Lune, le Times se
rétracta en publiant ce qui suit : «Des recherches et des
M
mH
L
Chapitre 10 OSPH La quantité de mouvement et l’impulsion 52
expériences plus approfondies ont confirmé les résultats obtenus au XVlIe siècle par Isaac Newton, et il est
maintenant définitivement établi qu'une fusée peut fonctionner dans le vide aussi bien que dans l'atmosphère. Le
Times regrette son erreur.»
10.3. L'impulsion
L'impulsion
J
à laquelle est soumise une particule est définie comme étant la variation de sa
quantité de mouvement :
f i
J p p p
 
 
L'impulsion est une grandeur vectorielle ayant la même unité que la quantité de mouvement.
Son sens est déterminé par la variation de la quantité de mouvement. On peut établir une
relation entre l'impulsion et la force résultante agissant sur la particule à l'aide de la deuxième
loi de Newton sous la forme
dp
F
dt
. Comme
pdp Fdt
 
 
 
, on a
f
i
t
t
JFdt
 
Cette équation est valable pour tout intervalle de temps
f i
t t t
 
mais on l'utilise le plus souvent dans le cas des forces
que l'on qualifie d'impulsives (voir figure). Les forces impulsives
agissent durant un intervalle de temps très court et sont très
grandes par rapport aux autres forces en présence. On dispose en
général de peu de renseignements sur la variation de la force
impulsive en fonction du temps; il est donc commode de définir
la force moyenne agissant sur la particule par
moy
J p F t
 
 
Cette équation n'est rien d'autre qu'une variante de la deuxième loi de Newton. En fait, on
remplace la variation réelle de la force par une valeur constante produisant la même aire pour
l'intervalle de temps donné, soit celle du rectangle représenté à la figure.
Une variation donnée de la quantité de mouvement peut être produite par une force intense
agissant durant un court intervalle de temps ou par une force plus faible agissant durant un
intervalle de temps plus long. Pour arrêter un objet, comme une balle venant vers vous, il vaut
mieux prendre un temps aussi long que possible: au lieu de raidir les bras, vous devez les
garder souples lorsqu'ils entrent en contact avec la balle. La même observation s'applique dans
le cas d'une chute. Vous pouvez réduire les risques de blessures si vous prolongez la chute en
fléchissant les genoux ou en roulant sur le sol.
10.4. Exercices
1. Un objet au repos explose en trois morceaux de masse égale. Un des morceaux se
déplace vers l'est à 20 m/s, et le deuxième vers le nord-ouest à 15 m/s. Trouvez le
module et la direction de la vitesse du troisième morceau.
2. Une bombe de 6 kg se déplaçant à la vitesse de 5 m/s dans la direction 37° sud par
rapport à l'est explose en trois morceaux. Un morceau de 3 kg est projeté à 2 m/s selon
un angle de 53° nord par rapport à l'est, alors qu'un morceau de 2 kg est projeté vers
l'ouest à 3 m/s. Trouvez le module et la direction de la vitesse du troisième morceau.
On suppose que tous les mouvements ont lieu dans un plan horizontal.
3. Une balle de masse ml= 3 kg se déplaçant vers le sud à 6 m/s entre en collision avec
une balle de masse m2= 2 kg initialement au repos. La première balle est déviée selon
un angle de 60° sud par rapport à l'ouest et la balle cible est projetée à 25° est par
rapport au sud. Quels sont les modules des vitesses finales ?
1 / 6 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !