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Résumé
Personnage central du néoconfucianisme contemporain, Mou Zongsan (1909-1995)
a écrit un nombre impressionnant de livres philosophiques. Loin d’ignorer les penseurs
d’autres courants, il les intègre à ses théories pour en utiliser les forces. Ainsi, il s’intéresse
au concept d’enseignement parfait (yuanjiao 圓教). Cette notion fut introduite par l’école
bouddhique Tiantai (Tiantai 天台). Après une classification de tous les enseignements
bouddhiques, il fut conclu que l’enseignement parfait consiste en un enseignement complet
reflétant parfaitement l’intention ultime du Bouddha. Mou considère quatre critères pour
déterminer quelle doctrine est conforme à cette idée : la préservation de tout ce qui existe,
la possibilité pour tous d’atteindre l’illumination, englober tout sans distinction et utiliser
un langage qu’il qualifie de non analytique.
Dans cette étude, nous allons examiner l’utilisation faite par Mou du concept
d’enseignement parfait. Il démontre la nécessité pour l’être humain d’avoir un esprit qui
saisit à la fois la sphère phénoménale et nouménale. De cette façon, tout ce qui compose la
réalité, pur et impur, est conservé. Il emprunte ensuite le concept du summum bonum
kantien, c’est-à-dire le ratio proportionnel entre la vertu et le bonheur, et le révise à l’aide
de l’enseignement parfait. Le résultat est tout à fait étonnant : l’être humain possède
l’intuition intellectuelle, normalement réservé à Dieu chez Kant, et est ainsi responsable de
son propre bonheur grâce à l’accomplissement d’actions morales. Cependant, le
bouddhisme ne fournirait pas le cadre théorique idéal pour la notion très importante du
summum bonum puisque l’aspect moral n’y serait pas assez développé. Mou affirme que,
malgré leur origine bouddhique, les critères qui définissent un enseignement parfait peuvent
être appliqués à d’autres courants de pensée. Il propose donc le confucianiste Wang Longxi
王龍溪 (Wang Ji 王畿 1498- 1583), dont les théories correspondent aux caractéristiques de
l’enseignement parfait, pour établir un concept du summum bonum novateur.
Mots-clés : Mou Zongsan, néoconfucianisme contemporain, enseignement parfait,
summum bonum, Bien parfait, bonheur, moral, créativité morale, Wang Longxi, Kant.