LES ACTES DU STAGE

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SAISON 2014-2015
LES ACTES DU STAGE
ACCOMPAGNER LES LYCÉENS AU THÉÂTRE
MERCREDI 10 ET JEUDI 11 DÉCEMBRE 2014
PÔLE PUBLIC ET MÉDIATION
Le Grand T, théâtre de Loire-Atlantique, est un EPCC subventionné par le Département de Loire-Atlantique en coopération
avec la Ville de Nantes et la Région des Pays de la Loire. Il reçoit le soutien de l’État – Préfet de la Région Pays de la Loire –
Direction régionale des affaires culturelles – dans le cadre du programme scènes conventionnées.
SIREN 798 868 717 | SIRET 798 868 717 000 17 | CODE APE 9001 Z | LICENCES SPECTACLES 1-142915 2-142916 3-142917
SOMMAIRE
Accueil – Présentation du programme .................................................................................... 3
Les nouvelles de la DAAC et temps d’échanges sur les pratiques expérimentées
avec les élèves .......................................................................................................................... 4
Improviser ne s’improvise pas ................................................................................................. 7
« Penser seulement que votre responsabilité en tant que comédien est de donner la vie à
des êtres humains. » Peter Brook .......................................................................................... 20
Préparation de Platonov ......................................................................................................... 29
Rebonds et résonances .......................................................................................................... 31
Rythmes de cœurs, mise en chœur ....................................................................................... 42
Autres pistes et prolongements ............................................................................................. 49
Compte-rendu réalisé par le pôle public et médiation du Grand T,
avec la collaboration de Charlotte Berthemet.
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ACCUEIL – PRESENTATION DU PROGRAMME
Avec Marion Fraslin-Echevin (directrice du pôle public et médiation)
L’équipe du pôle Public et médiation du Grand T, chargée de vous accueillir et d'accompagner les
équipes artistiques à la rencontre des jeunes est composée de : Marion Fraslin-Echevin (directrice du
pôle), Manon Albert et Olivier Langlois (adjoints à la directrice), Florence Danveau, Caroline Urvoy et
Fabrice Boscherel (chargés de relations publiques).
Depuis 15 ans le Grand T travaille sur des projets d’éducation artistique et culturelle, en partenariat avec
le Rectorat, Catherine Le Moullec, coordinatrice théâtre académique et Florence Beylich coordonnatrice
théâtre départementale seront vos formatrices aujourd’hui. Des formations de ce type sont organisées
pour tous les niveaux de la scolarité.
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LES NOUVELLES DE LA DAAC (Délégation Académique à
l’Action Culturelle) ET TEMPS D’ÉCHANGES SUR LES
PRATIQUES EXPÉRIMENTÉES AVEC LES ÉLÈVES
Avec Catherine Le Moullec, coordinatrice théâtre académique
La DAAC est un service spécifique du Rectorat rassemblant des enseignants. Elle a une mission de
conseil et d’aide aux professionnels de l’Éducation dans la mise en place des projets d’Éducation
artistique et culturelle (spectacle, patrimoine, lecture…). Des ressources ont été mises en ligne sur le site
de l’Académie de Nantes : http://www.ac-nantes.fr / Espace pédagogique / Action culturelle. Des icônes
rassemblant les différents domaines (arts plastiques, cinéma, danse, architecture…) dirigent ensuite vers
les ressources mises à disposition (articles, témoignages d’enseignants, ateliers…). D’autres outils de
travail généralistes autour du théâtre (rédigés par Catherine Le Moullec) sont accessibles sur le site du
Grand T : http://www.leGrandT.fr / Les Ressources / Pour les enseignants / Pistes d’accompagnement.
Les stages comme ceux proposés par le Grand T sont toujours à renouveler, ce ne sont jamais les
mêmes et les participants changent !
Pour ce stage il n’a pas été donné d’ordre de mission. C’est un stage de structure pour lequel le chef
d’établissement donne une autorisation d’absence. Il n’est pas enregistré à la DAFPEN.
L’Action Culturelle au Rectorat :
C’est un service dirigé par M. Yves Bourdin ancien IPR de musique, qui rassemble un nombre
d’enseignants qui ont une mission de coordination dans différents domaines artistiques : théâtre, cinéma,
poésie, lecture, écriture, patrimoine, musée, archives, architecture ainsi que la culture scientifique et
technologique. Ces enseignants peuvent aider à monter des projets, à renseigner sur des dispositifs, à
trouver des solutions pour des financements. Au sein de cette mission, sont organisées des réunions avec
les partenaires, les institutions, et les collectivités.
Pour le développement de l’éducation artistique et culturelle, la loi d’orientation et de refondation de
l’école (2013), a institué le PEAC (Projet d’Education Artistique et Culturel). Cela signifie que l’élève,
au cours de sa scolarité, doit entretenir des liens avec les différents domaines artistiques (dont le théâtre)
et ce, de façon équilibrée, progressive, et cohérente. Des conseils école /collège ont été mis en place
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avec un cycle d’approfondissement, pour les classes de CM1, CM2 et 6 . Des liens vont doncse mettre en
place entre l’école, le collège et le lycée.
Dans un même lycée, par exemple, il peut y avoir un atelier, une option facultative, ou un club théâtre : la
cohérence et la progressivité c’est aussi tenir compte de ce que les élèves ont fait auparavant au collège,
de ce qu’ils font au lycée en classe ou en dehors de l’établissement ; peut-être ont-ils déjà vécu un
parcours de spectateur, suivent-ils des cours dans un conservatoire ou une association ? Et tout cela fait
partie de leur parcours dans le domaine du théâtre bien sûr ! L’idée principale est celle du parcours.
L’important, c’est aussi de faire des liens entre les différents temps de la scolarité de l’élève : temps
scolaire, périscolaire et extra-scolaire.
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Un des fondements du PEAC, est l’équité. Tous les élèves doivent avoir la possibilité de rencontrer à
différents moments de leur scolarité tous les domaines artistiques et culturels. Les propositions de ce type
de projets faites aux élèves sont une source de motivation, de dynamisme qui donne du sens à
l’enseignement, aux apprentissages. Elles sont essentielles à la formation de l’individu. Toutefois, dans
certains établissements par exemple, on aborde surtout une discipline artistique le théâtre ou la musique.
N’oublions pas les autres domaines ! Enfin, il faut penser à monter ces projets en interdisciplinarité au
sein des établissements. Cf : guide pour la mise en œuvre du PEAC (disponible sur le site de l’académie).
Aujourd’hui, les établissements scolaires reçoivent beaucoup de propositions des structures culturelles. Il
va falloir essayer de bâtir des projets avec ces structures et faire des choix cohérents dans la perspective
de la construction d’ensemble du parcours.
Les chefs d’établissements vont être tenus de mettre en place ce parcours. C’est la première fois que
l’éducation artistique et culturelle est inscrite dans la loi de cette façon, ce qui est un grand progrès. Pour
nous, enseignants aujourd’hui c’est un argument solide pour défendre nos projets d’éducation artistique et
culturelle !
Dans ce cadre-là, la région a mis en place des parcours théâtraux, avec l’idée d’accompagner des
classes qui vont au théâtre, de proposer des rencontres avec les équipes artistiques, des visites
techniques des théâtres... Dans un souci d’équité territoriale elle aide les établissements plus éloignés
géographiquement des structures culturelles par des aides aux transports notamment. Cela fait partie du
plan d’action éducative de la région. Pour l’instant, ce plan d’action est très ciblé sur certains territoires,
mais peut évoluer. La région est ouverte à plein de possibilités. Par exemple, l’Atelier Dix par dix du
metteur en scène François Chevallier (basé à Nantes) va cette année travailler avec deux groupes de
lycéens.
 Cf. fiche sur le Parcours théâtre. Ce parcours remplace le dispositif Les Jeunes en Avignon.
Autres nouvelles…
L’Association COMETE, (cf Document Comete) dont sont membres Catherine Le Moullec et Florence
Beylich, permet de développer le théâtre à l’école et les rencontres théâtrales scolaires.
 Voir les Printemps de Guérande, ainsi que les Rencontres Théâtrales de Printemps au Grand T (qui
cette année auront lieu au TU pour cause de travaux), les Rencontres au Centre Culturel de la Gobinière
à Orvault. Ces rencontres favorisent les échanges entre collégiens et lycéens.
Les Jeunes ont du talent
Il s’agit d’un rencontre organisée tous les ans au mois de mai, dans le cadre d’une classe ou d’une
option. Elle offre la possibilité de gagner 600 € pour inviter un partenaire artistique à venir travailler avec
les élèves. Les projets sont de types très divers : danse, théâtre, vidéo. Cette journée donne lieu à un
brassage très intéressant. (Le 20 mai au Mans, les inscriptions sont terminées).
Les stages
Samedi 17 janvier 2015 un stage animé par Lionel Pavageau comédien professionnel (Cie Paq’ la lune)
sur le duo texte - image
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Samedi 21 mars 2015 un stage animé par Yann Josso comédien professionnel sur les auteurs
contemporains (Sylvain Levey...) : comment faire vivre un texte et ses silences
Les stages ont lieux à la salle culturelle du nouveau lycée de l’Ile de Nantes Nelson Mandela : rue
Gaëtan Rondeau 44000 NANTES (Cronobus C5 arrêt Conservatoire)
9h à 17h
Prix : 15 euros (défraiement partiel du comédien)
Adhésion à l’association COMETE : 18€
Il n’est pas obligatoire d’assister aux 2 séances.
Pour tous renseignements, contacter Christiane Bauné ou Clara Mérit : [email protected] /
[email protected]
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IMPROVISER NE S’IMPROVISE PAS
Avec Catherine Le Moullec, coordinatrice théâtre académique
Le travail proposé s’articule autour d’entrées possibles dans Illumination(s), d’Ahmed Madani, destinées à
sensibiliser les élèves au spectacle.
Que faites-vous pour préparer vos élèves à aller voir un spectacle ? Exemples donnés par les
enseignants :
Prendre des répliques phares, sur l’ensemble de l’œuvre, les faire dire aux élèves, en jeu ou en
statues. Le chuchotement marche très bien aussi. Le choix de répliques est alors important (par
thématiques par exemple), avec une mise en espace.
Faire parler les élèves sur les personnages : qui ils sont les uns pour les autres, etc.
Le théâtre image : avec une image arrêtée. C’est une technique facile et rapide à mettre en
œuvre, et qui permet de travailler la forme (les corps dans l’espace, les regards, etc.)
Avoir recours aux images extraites du spectacle : à reproduire dans l’espace, à commenter, à
raccorder à des répliques, etc.
Un travail au plateau sur des petits bouts de textes. Chaque élève doit choisir une réplique
intéressante et doit l’oraliser.
Autour de Platonov : Donner la liste des personnages et faire un petit travail en jeu en action et
en incarnation.
Le travail sur l’affiche qui met en perspective les différents horizons d’attente.
Le travail sur un article critique
La mise en place de missions (demander aux élèves d’être attentifs au travail
d’adresse des comédiens, à l’univers sonore ou encore aux différents états
lumineux).
-
 L’important, c’est de choisir la bonne entrée. Or, il y a un certain nombre de procédures qui se
sclérosent. Autant choisir quelque chose de précis pour entrer dans un spectacle.
Par exemple, pour Platonov, l’entrée par une fiche de personnages est essentielle. Les noms sont
étrangers, et tous les personnages ont des surnoms. Pour Illumination(s), la liste des personnages n’a
aucun intérêt, car tous les personnages s’appellent Lakhdar. Il est cependant intéressant de parler de ce
nom : son origine, sa signification.
Une entrée historique peut être importante pour un spectacle. Pour Illumination(s) par exemple, il est
nécessaire de parler de l’histoire de l’immigration ; il est utile de proposer aux élèves un aperçu rapide et
bien ciblé sur la guerre d’Algérie et plus précisément des harkis. C’est un terme qui est utilisé au début de
la pièce et qui déclenche une bagarre.
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Les différents types d’improvisation
Cf. annexes 3 et 4
Il n’est pas toujours si facile pour les enseignants de trouver une entrée pour un spectacle ! L’improvisation peut
constituer un des axes de travail. Et il y a plusieurs façons de la concevoir :
- L'improvisation autour des fondamentaux du théâtre. Avec des improvisations corporelles sur le déplacement ;
des exercices physiques, pour déverrouiller le corps ; un vocabulaire commun (comment fonctionne un espace
scénique, un texte, etc.). Les fondamentaux constituent la base du théâtre. Les livres d'exercices illustrent de
nombreuses propositions de ce type. C’est un outil essentiel de formation pour les groupes et les comédiens.
Constantin Stanislavski (1863-1938) utilisait cette méthode. C’est la base dans toutes les écoles.
- L'improvisation sur des textes, sur un personnage. Plein de possibilités à explorer (cf. Coups de théâtre en
classe entière, ouvrage avec de nombreux conseils). Exemple : monter une improvisation sur le conflit ou une scène
de ménage pour entrer dans le texte Le Médecin malgré lui. Cette improvisation travaille sur les situations : pas de
généralités mais un travail ciblé pour mieux comprendre un texte ou un personnage.
- L’improvisation sur un thème donné.
- L'improvisation pour entrer dans un spectacle. À partir du dossier de la compagnie et de la fiche de présentation
du spectacle de la structure culturelle, découvrir et inventer des petites improvisations à faire face aux camarades.
Consignes de rejeu : pour que le jeu s’améliore, attention à donner des consignes efficientes, concises et précises.
Outils en annexe : la fiche de présentation du spectacle et le dossier.
Au Baccalauréat, les professeurs de théâtre donnent des consignes de « rejeu ». Par exemple : « vous
aller le jouer comme un western ». Est-ce une bonne consigne, efficiente ? Ce n’est pas toujours facile. Il
faut bien adapter la consigne.
Dans l’histoire du théâtre
L'improvisation a sans doute toujours existé. Le premier format connu de théâtre improvisé est peut-être
la comédie atellane qui se jouait à Rome au IIIème siècle av. J.-C. On peut aussi évoquer les joutes
oratoires (dialectica) qui existaient au Moyen-Age et étaient utilisées pour la formation des étudiants à
l’université même si elles n’étaient pas spectaculaires (enseignement de la rhétorique par les jésuites). En
France, c'est au XVIème siècle que l'improvisation acquiert ses premières lettres de noblesse avec la
Commedia dell'arte. Improvisation partielle des textes mais fortement encadrée/ entravée ? par les
canevas et les personnages types.
Dans les années 50 à Chicago, Paul Sills, inspiré par les travaux de sa mère, Viola Spolin (qui développe
ces jeux dans ses cours de théâtre pour enfants) a créé un genre de "Commedia moderne" qui ferait
appel aux gens ordinaires.
Ensuite l’improvisation se retrouve comme outil de formation des comédiens chez Stanislavski ou Lee
Strasberg, avant de devenir une forme artistique à part entière.
Dans les années 70, deux formats de spectacles improvisés apparaissent en même temps au Canada. Le
premier, le Theatersports (forme de spectacle entre deux équipes d’improvisateurs mais comme le texte
du spectacle ne pouvait pas être approuvé à l’avance par le Censeur Officiel, le Royal Court Theatre en
interdit les représentations), de l'anglais Keith Johnstone se développe dans les pays anglophones. Le
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second, le Match d'improvisation, inventé par les québécois Robert Gravel et Yvon Leduc, conquiert
rapidement les pays francophones.
1964 : Augusto Boal crée le Théâtre de l’Opprimé (aussi appelé Theâtre-Forum) au Brésil. Il utilise les
techniques d’improvisation pour explorer cette nouvelle forme de théâtre contemporain, dont les
représentations servent à mettre en lumière des sujets problématiques au sein d’une communauté.
Ce courant du théâtre par l’improvisation se développe aussi dans les établissements scolaires français.
Par exemple : Jamel Debbouze a développé une association pour faire des improvisations dans les
établissements scolaires sensibles. L’ex-ministre de la Culture Aurélie Filipetti est allée voir son travail, et
en est ressortie avec l'idée de faire dans les établissements scolaires des « options improvisation ».
Attention néanmoins les matchs d’impro instituent le « prêt à tout pour gagner ». Avec les jeunes, il faut
faire attention à la rivalité, qui pose souvent des problèmes.
Aujourd’hui l’’improvisation est utilisée pour créer par de nombreux artistes : par l’écriture au plateau, par
un metteur en scène ou par une écriture collective.
Pour un historique très complet sur l’improvisation théâtrale voir le Manuel d’improvisation théâtrale de
Christophe Tournier, aux Editions de l’Eau Vive ou son site http://www.improse.net/
Improviser pour créer : l’accident comme principe de création
Exemple 1: le collectif D’ores et déjà, avec Sylvain Creuzevault (spectacles : Notre terreur, Le père
tralalère)
Ils ont travaillé et lu des textes révolutionnaires ; ils se sont fait une trame, un cadre. Et tous les soirs, ils
improvisaient, avec le désir de ne surtout pas figer leur spectacle : c’est pour eux la mort du théâtre. Le
spectacle était donc tous les soirs différents, avec parfois une quinzaine de minutes de plus que le soir
précédent! Ce principe de création et d’improvisation crée une présence incroyable au plateau. Pour le
metteur en scène, cette méthode met les comédiens dans un état de tension et d’attention particuliers.
« Et même, en demandant à des acteurs d'improviser, d'enlever cette chose très belle, qui est une part
possible de l'exercice de l'acteur, qui est le geste travaillé, ciselé, préparé, répété, refait, ce qu’on ne peut
pas faire à vitesse réelle en improvisation. Ce qui fait que c'est un acteur qui est vu plus comme un enfant
en train de jouer, terriblement exposé, c’est la personne, avant le métier d’acteur qui s’expose, dans notre
théâtre. Souvent, quand tu joues comme un enfant, exposé, risqué, tu vas trop loin, tu cries trop fort, tu
rates un peu la scène : tu exposes l’imperfection, la chute, autant que le beau geste… Il y a un effet
beaucoup moins impérissable dans cette façon de travailler que je considère plus politique, plus
dangereuse, où l'expérience sensible du spectateur est rendue plus forte, où l'acteur n'est pas considéré
comme sacré mais comme événementiellement profane en réalité. »
« Un exemple : j'ai écrit des chansons, Vladislav change les paroles sans me le dire le soir, ou Eric écrit
un truc juste avant d’entrer... On a pris le risque de ne pas sacraliser les gestes de créativité de chacun,
de ne pas dire : j'ai une propriété intellectuelle et artistique individuelle, sur le geste que je viens
d'accomplir, j'ai un droit d'acteur, mon geste, ou mon geste d'écriture, tu ne peux pas y toucher. Nous
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sommes très libres dans cette parole-là. Parfois, ça donne des tensions bien sûr. Cette mise en commun
de l'écriture, cette désacralisation, et des figures historiques et des rapports de créativité, le fait que les
acteurs improvisent, et que les acteurs sachent, au moment où ils font un geste que peut-être ce geste
aurait pu être mieux s'il avait été répété, ou pourrait être mieux s'il avait été refait, mais on ne va peut-être
pas le refaire... Nous sommes en train de réfléchir à une ouverture du rapport au théâtre qui désacralise
évidemment tout ce qui avait été sacralisé... »
« Chaque acteur entre de plus en plus en improvisation, apporte de plus en plus de propositions, que ce
soit une phrase ou que ce soit une idée, une action, qui ouvrent un nouvel espace donc qui rajoutent du
temps, et moi chaque jour j'en enlève moins que ce qui est rajouté chaque soir. »
Extraits de la revue Agon (entretien avec le metteur en scène http://agon.ens-lyon.fr/index.php?id=1174)
Exemple 2 : Les Chiens de Navarre
Jean-Christophe Meurisse est le chef de la meute, mais un chef pas comme les autres. Acteur, il
s'ennuyait et refusait « un théâtre figé, élitiste et poussiéreux ». Alors, en 2005, il réunit huit comédiens de
sa génération, aujourd'hui âgés d'une quarantaine d'années. Ces artistes, qu'il aime à la ville comme sur
le plateau, viennent des écoles de théâtre, de l'université, du cirque, de la danse et partagent une même
envie de faire du théâtre autrement, de raconter des histoires autrement, de jouer autrement. « Comme
metteur en scène, Jean-Christophe nous laisse la plus grande liberté, témoigne le comédien Jean-Luc
Vincent. Il nous invite à la désobéissance, à surtout ne pas faire ce qu'on a appris, à nous jouer des
codes, à exprimer notre singularité et à ne jamais nous installer dans la routine. » Ensemble, ils créent
plusieurs spectacles, dont quatre tournent encore dans toute la France : Une raclette (2009), Nous avons
les machines (2012), Quand je pense qu'on va vieillir ensemble (2013) et Les danseurs ont apprécié la
qualité du parquet (2012). Des titres qui piquent la curiosité !
« Au départ d'un spectacle, aucun texte dramatique. Quand « le désir de plateau devient fort », JeanChristophe Meurisse réunit la bande, propose des bouts de dialogues, des situations, des images. Puis,
durant un long temps de travail, constitué d'improvisations, d'observations, de discussions, « le plateau
devient un terrain vague, un lieu poétique sur lequel une écriture s'invente sans qu'on sache ce qu'elle va
nous raconter ». Une sorte d'écriture scénique automatique. L'expression s'impose pour cet artiste qui se
réfère souvent aux surréalistes et à Artaud. Il souligne d'ailleurs l'importance des associations libres et le
rôle de l'inconscient dans l'élaboration des pièces. Puis, parmi toutes les situations travaillées, il en choisit
une dizaine qu'il juge « saisissables, celles qui nous font rire ou nous émeuvent et sur lesquelles
tacitement nous sommes d'accord ». Meurisse s'explique : « Ma place est celle d'un chef d'orchestre qui
accompagne et soutient l'écoute des acteurs solistes. » A la fin d'une période de travail qui peut durer des
mois, il retient un canevas de quatre à cinq pages qui sera, sur la durée, le garde-fou des comédiens. Car
ceux-ci continuent d'improviser chaque soir, cherchent à se laisser surprendre par l'inconnu, guettent
leurs partenaires... » (Extrait d’un article de Télérama, février 2014)
« Ce refus de fixer une forme et de « re-présenter » soumet le spectateur à l’énergie suicidaire de
propositions plus explosives les unes que les autres, et dont le résultat est souvent la pure hilarité, ou bien
l’ébahissement, celui qu’on éprouve devant les folies futuristes ou dadaïstes. » dit Tanguy Viel sur le site
de présentation de la compagnie...
Extrait d’un article de Télérama.
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Exemple 3 : Boris Charmatz avec Flip book (50 ans de danse, œuvre de Merce Cunningham)
« Tout d’abord, l’idée que l’improvisation peut être entièrement nourrie et guidée par un travail de
mémoire. Au lieu d’essayer de faire du nouveau, on peut se laisser flotter au gré d’une mémoire (ici
sensorielle et littéraire) pour donner libre cours à l’improvisation. Dès lors, l’improvisation n’est pas un
instantané posé sur la page vierge mais, au contraire, une archéologie au présent, une fouille qui
réarticule le passé du corps à son écriture en temps réel. C’est ce qui m’a instantanément plu dans ce
travail : sortir de la contemporanéité mystique pour réarticuler passé, présent et futur à l’occasion d’un
geste qui embrasse large. La mémoire comme ferment de l’improvisation, y compris la plus débridée.
L’improvisation-archéologie ».
On peut se poser la question : qu'est-ce que c'est le théâtre vivant aujourd'hui ? Peut-être que c'est
justement défendre ce risque que certains metteurs en scène mettent en avant.
Aujourd’hui, Le théâtre se doit d’exister comme une forme forte d’adresse au public.  Voir notamment le
travail de Vincent Macaigne (Au moins j’aurai laissé un beau cadavre et Idiot ! Parce que nous aurions dû
nous aimer, et le spectacle Les particules élémentaires, mis en scène par Julien Gosselin, de la Cie Si
vous pouviez lécher mon cœur. L’adresse, c’est aussi dans la provocation, ça harangue, ça vient chercher
le public, jusqu’à le déranger. Avec l’envie d’être tout le temps sur le fil, et contre les spectacles trop bien
léchés.
Il y a des metteurs en scène qui font en sorte de créer des conditions d’accidents sur scène. Afin que « ça
bouge », et que les acteurs soient très présents.  C’est un principe très intéressant à développer avec
les adolescents, qui ont tendance à s’installer, et donc ne sont plus présents à ce qu’ils fonts.
Exemples de conditions favorables aux « accidents » de jeu, à l’imprévu : des décors pas stables,
l’utilisation de robots ou machines, la présence d’animaux sur scène, d’enfants, le mélange entre
amateurs et professionnels, une distribution avec des handicapés. Tout ça insuffle beaucoup plus de vie
sur scène !
Voir Article de Barbara Métais-Chastanier à ce sujet : http://agon.ens-lyon.fr/index.php?id=1087
En pratique avec les élèves
Cf. annexe 5
Les enseignants seront amenés à avoir un regard sur l’improvisation : c’est un travail sur le lâcher prise,
sur la confiance. Il faut savoir l’observer ; ne pas forcément s’en charger, mais savoir y être attentif.
L’improvisation c’est un travail sur le jeu d’acteur : espace, corps, spontanéité, capacité à construire
ensemble, écoute, percuter. C’est un très bon outil pédagogique.
La première règle de l’improvisation c’est le « oui ». Quand quelqu’un me propose, j’accepte. Je ne suis
pas toujours obligé de dire oui, ce n’est pas ce que ça veut dire. Par exemple à la question « tu plonges
avec moi » ? Ne pas forcément dire « oui je plonge » mais dire « oui je suis dans le canoë avec toi,
mais… »
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2. Travail de l’improvisation – Echauffement – Exercices
 On trouve énormément d’exemples d’exercices d’improvisation dans de nombreux ouvrages
Courte bibliographie :
-300 exercices d’improvisation et d’exploration théâtrale, Christophe Tournier Editions de L’Eau-vive,
-Manuel d’improvisation théâtrale Editions de L’Eau-vive, Christophe Tournier
-Jeux pour acteurs et non-acteurs, Augusto Boal, éditions La découverte
-Coups de théâtre en classe entière, Chantal Dulibine et Bernard Grosjean, Sceren, Créteil.
-Improvisation et théâtre : Keith Johnstone, Ipanema éditions
-Les carnets d’atelier : Caterine Morrisson, Actes Sud Junior
-Livre des exercices à l’usage des acteurs : Patrick Pezin, L’entretemps éditions.
A/ Échauffement
S’installer dans l’espace : debout, se regarder. Marcher dans l’espace, sortir les mains des poches,
secouer les bras, se rencontrer, se saluer du regard. S’arrêter sur place. Garder le regard droit devant soi.
Les bras pendent de chaque côté du corps. Tranquillement, explorer du regard l’espace, en tournant
seulement les yeux de gauche à droite. Prendre conscience de ce qu’on regarde, de droite à gauche, de
gauche à droite, étaler le plus loin possible son champ de vision. Prendre conscience de ce que le regard
rencontre, et ne pas être mécanique.
Porter le regard sur la gauche, ce qui va entrainer le visage, et permettre d’aller chercher un peu plus loin
ce que le regard va pouvoir rencontrer. Faire un panorama de droite à gauche puis de gauche à droite.
Les regards, les visages se croisent. Prendre conscience de qui on voit. Attention à ne pas bloquer sa
respiration. Dans l’improvisation, l’écoute est capitale.
Puis, dans le même mouvement, entraîner une rotation des épaules. Le bassin doit rester dans
l’alignement des pieds. Aller regarder un petit peu plus loin derrière soi. Respirer pour permettre le pivot
au niveau de la taille, un petit peu plus loin encore. Souffler pour que les torsions ne fassent pas mal.
Enfin, avec les yeux, le visage, les épaules, tourner le bassin, porter son regard à 360 degrés. Avoir la
sensation de tout voir, de redécouvrir cet espace, ces visages, ces corps. Ne pas oublier de respirer.
Bras en l’air, s’étirer le plus possible, et relâcher. Recommencer.
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B/ Les marches
Marcher dans l’espace. Une marche dynamique. Bien décider de ses lignes de direction. Ne pas tourner
en rond, faire des traversées franches de l’espace. Assumer sa direction, harmoniser la marche en
gardant un rythme soutenu. Ne pas éviter le regard des autres. Prendre conscience des autres et de sa
propre trajectoire.
Cette marche est la vitesse n°1.
Marche n°2 : lente
Marche n°3 : rapide
L’animateur propose de passer d’un rythme de marche à un autre : 1 – 3 - 1- 3 - 2- 3 - 2
Ne pas subir l’exercice, le vivre vraiment. Rester précis dans les directions, prendre en compte les autres.
Pour chaque type de marche, trouver un rythme commun et passer d’un rythme à l’autre le plus
rapidement possible sans faire d’arrêt. Sentir ce que cela signifie que de passer d’un rythme lent à
soutenu.
En gardant le dernier rythme, s’arranger pour former un cercle immobile.
C/ Le bâton
C’est l’objet fétiche de tout exercice théâtral, il se transforme en n’importe quel accessoire.
Former un cercle, à l’intérieur de celui-ci, quelqu’un marche avec le bâton et imagine une action (exemple
pagayer) s’arrêter devant quelqu’un d’autre qui à son tour va prolonger cette action et la faire évoluer vers
une action nouvelle. Ne pas faire de coupure, ni casser l’action quand on passe le relai, choisir un rythme
être précis. Au fur et à mesure le bâton devient crayon, canne à pêche, javelot, pelle, longue vue,
carabine, rennes, rames, bâton de majorette, baguette de chef d’orchestre, bâton de Kung Fu …
Transmettre par le geste la proposition, le lien se fait par l’action.
C’est important avec les élèves d’apprendre à maîtriser la gestion du bâton, de l’objet.
 Un des principes de l’improvisation : l’autre nous inspire, pour relancer l’histoire, l’improvisation.
 On peut proposer des mouvements chorégraphiques, ainsi que des détournements de l’objet.
 Quand on est dans un exercice comme celui-ci, il ne faut surtout pas anticiper l’utilisation de
l’objet ! Il faut lâcher prise, et prendre la proposition de l’autre pour nourrir la sienne.
 Le grand principe de l’improvisation, c’est d’accepter ce que l’autre propose.
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D/ La matière imaginaire
Former un cercle plus resserré, passer à son voisin une matière, qui au fur et à mesure va évoluer (plus
lourde, légère, visqueuse, rebondissante, chaude, liquide, forme nouvelle etc.). Reprendre d’abord la
matière, donnée par son voisin avant de la transformer, être attentif aux indices donnés et être très précis
dans ses gestes.
 On se passe le relai de l’histoire, puis on l’accommode ; mais avant tout, on la reçoit. Je prends la
proposition de l’autre, je la renforce.
3. Improvisations préparées
A/ Expressions liées au théâtre
cf. annexe 6
Par groupe de 3 (2mm de préparation)
L’animateur donne aux stagiaires une expression liée au théâtre. Ils doivent proposer une improvisation
muette pour illustrer cette expression et faire deviner les expressions au reste du groupe.
Cet exercice permet de découvrir du vocabulaire de manière ludique.
Outil : voir l’excellent livre Dictionnaire de La Langue du Théâtre (Mots et mœurs du théâtre),
d’Agnès Pierron
Si les élèves ne connaissent pas les expressions théâtrales, ils peuvent aller en chercher le sens dans le
livre.
Dans l’improvisation, penser à soigner son démarrage, et sa fin. Proposer par exemple une entrée, à
partir des coulisses. On peut aussi démarrer par une immobilité, ou dos au public. Même principe pour
finir.
-
ère
1
impro : « avoir un rôle dans les jambes » = maîtriser son rôle
>> C’était intéressant, car le groupe était très à l’écoute. Et on a retrouvé l’idée du relai, dans le
geste.
ème
impro : « se prendre une veste » ou « ramasser une veste »
ème
impro : « rester en carafe » ou, la version de Sarah Bernhardt : « avoir l’air d’une huître »
ème
impro : « faire des ménages » = courir les cachets, accepter n’importe quel rôle
-
2
-
3
-
4
Autres expressions : Faire la claque, mordre sur une réplique, planter un partenaire, faire un filage, tirer la
couverture à soi …
14
 C’est amusant car souvent il faut prendre ces expressions au pied de la lettre pour en trouver le
sens.
B/ Histoire du théâtre
L’animateur assigne à chaque groupe une « époque » du théâtre, que le groupe devra prendre en charge
dans une improvisation. L’improvisation est muette, à l’exception d’une seule réplique dite et imposée par
l’animateur, sans rapport avec la période illustrée. (15 minutes de préparation).
 Outil : documents et ouvrages sur l’histoire du théâtre. Histoire du Théâtre et Petite Chronologie de
l’histoire du théâtre d’après André Degaine Histoire du théâtre dessinée. Edition Nizet 1992 Cf Annexes 7
http://anne.fillon.free.fr/Francaispourtous/FichesGenerales/HistoireduTheatre.pdf (annexe 3)
ww.aveyron-culture.com/download/Petite_chronologie_historique_09___partie_2.pdf
cf. annexe 8
Au sein du groupe, s’entendre sur l’identité des personnages, le lieu et l’action.
e
1 impro : Période de Tchékhov /réplique : et Jean Jacques, qu’est-ce que tu as fait de Jean Jacques ?
Commentaires après la présentation : La réplique induisait l’idée de la chute, l’utilisation du comique de
répétition était intéressante, le jeu des portes. On développe obligatoirement un jeu expressif. Attention à
bien construire les espaces.
e
2 impro : Tragédie grecque / réplique : M’accompagnerais-tu si je repartais dans mes folies ?
Commentaires : période très lisible, improvisation bien construite, l’entrée du chœur et du coryphée avec
son bâton apportaient de la solennité. Le geste soutenu par la rythmique était très beau. Travail sur le
masque antique très clair. Il est intéressant d’avoir pris le temps de faire plusieurs tours. La proposition
était assumée, la tenir la rend convaincante.
e
3 impro : Le Théâtre médiéval / Le miracle de Théophile/ réplique : Pourquoi ne peux-tu pas le faire ?
15
Commentaires : les enseignants sont allés vers le mime pour raconter l’histoire. Attention une
improvisation muette ne signifie pas qu’il faille user d’un jeu trop expressif type cinéma muet.
e
4 impro : le Théâtre de l’absurde : jeu de chaises, puis de chaussures impossibles à enlever.
Commentaires : Les suspensions étaient intéressantes, au milieu du gros bric à brac.
e
5 impro : La Tragédie antique le sacrifice rituel du bouc / Bêêêê , On peut sortir maintenant, vous êtes
sûrs ?
Commentaires : Attention à être toujours à l’écoute de ce qui est joué quand on est sur scène ; les oreilles
ne suffisent pas, il faut rester en lien avec le regard et l’ensemble du corps, pour ne pas rater ce qui se
passe.
e
6 impro : La Farce personnages brutaux, grossiers, ivres. / Crois-tu que ce soit vraiment la solution ? »
La farce s’inscrit comme intermède au milieu des grands mystères, des longues représentations
interminables ; d’où son origine venue d’un terme culinaire. C’est à la fin du Moyen-Âge que la farce a été
plus travaillée, écrite (exemple : La Farce de Maître Pathelin, une pièce anonyme composée au milieu du
XVème siècle).
Commentaires : Il ne faut pas avoir peur des clichés. Au contraire, ne pas hésiter à s’en amuser. C’est
une entrée possible et agréable dans l’histoire du théâtre, et dans son apprivoisement dans le jeu.
 C’est important dans ces exercices de bien parler des espaces au théâtre. Les expliquer, en
fonction des différentes périodes, et comment ils sont utilisés aujourd’hui.
4. Construire une consigne d’improvisation
Imaginer la consigne à donner à des élèves, en vue de la préparation à un spectacle. En l’occurrence
aujourd’hui, proposer une entrée possible sous la forme d’un exercice, à partir du spectacle
Illumination(s). Essayer de rédiger précisément les consignes à donner aux élèves.
Outil : le dossier du spectacle Illumination(s).
-
Groupe 1
Consigne : Une phrase dans le dossier dit : Ils vibrent, ils vivent, ils rient, et ils pleurent. Prendre cette
phrase comme source d’inspiration avec la consigne supplémentaire d’avoir un moment passé et un
moment présent.
Improvisation du groupe 2 : « Ce serait comment là-bas ? – T’as peut-être un grand père qui est là-bas
toi ? – Une fois on m’a raconté l’histoire d’un camion, avec un corps dessus… – Alors on pleure ? – On
pleure, on rit, tu choisis. »
Retours :
16
-
Passer d’un temps à l’autre est difficile. Il y avait peut-être trop de paroles dans l’impro. Les
premiers déplacements étaient brouillons, et l’écoute est venue quand les corps se sont
davantage posés dans l’espace.
Aussi, attention aux refus de jeux dans l’improvisation. Mais dire « non » n’est pas un refus, s’il
est accompagné d’une proposition de jeu.
Attention à ne pas forcer les émotions ; mais les laisser venir.
C’est très difficile de sentir le moment où il faut s’arrêter.
-
Groupe 2
-
-
Consigne : Un groupe de trois jeunes d’aujourd’hui ressent de la détresse, une forme de résignation
désespérante qui les empêche de s’exprimer. Arrive le père, qui leur raconte une histoire terrible, et leur
redonne espoir.
 Pour les consignes, il vaut mieux essayer d’être simple et précis. Ne pas chercher quelque chose
de trop compliqué.
Improvisation du groupe 3 : « Quelle heure il est ? – Oh j’suis fatiguée… – On pourrait aller casser une
bagnole ? – Non ! – Oh ça y est, il se met à parler en arabe… »
Retours :
-
La consigne était difficile, lourde de sens, écrasante.
Le murmure, avec la voix grave de la comédienne, était très fort.
C’est compliqué de s’accorder les uns les autres sur l’émotion.
-
Groupe 3
Consigne : Les mauvais garçons, que cachent-ils derrière leur masque ?
Improvisation du groupe 1 : « Putain t’as vu la salope là-bas son boule comment elle le bouge ? –
Regarde-moi ça, que des salopes et des grognasses… – Bah, c’est pas si facile. De kiffer toutes les
meufs. – Oh l’autre, il fait son pédé ! Comment il parle, « ça t’engage ! » – Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Tu
t’es ramassé une veste ?! – Tu peux lui dire, heu, « tes yeux ils sont beaux comme la mer ! » – Allez, on
va boire un coup en attendant ? – Un coca ! »
Retours :
-
L’écoute était très bonne.
L’entrée, des quatre cowboys, était réussie mais les poses corporelles se sont perdues pendant
l’impro, avec l’ajout de la langue.
(Même exercice réalisés par le ½ groupe du mercredi 10 déc matin)
-
Groupe 1
Improvisation proposée par le groupe 1 à effectuer par le groupe 2
17
Improvisation du groupe 2 /Consigne : Scènes d’adolescence de trois générations d’immigrés
Improviser sur la 1ère génération d’immigrés : leur adolescence vécue en Algérie dans une situation de
guerre. La seconde génération qui a quitté l’Algérie pour vivre en France et la troisième génération qui a
toujours vécu en France. A la fin de chaque scène, intégrer la phrase : « Si vous saviez ce qu’il y a dans
nos têtes, vous nous regarderiez autrement ».
Retours :
-
La 1ere scène est trop longue par rapport aux deux suivantes.
Le groupe qui propose l’improvisation n’a pas d’idées sur le rendu du groupe.
Ne pas hésiter à user des clichés (capuche de sweat shirt).
-
Groupe 2
Improvisation du groupe 3 /Consignes : 6 expressions tirées des notes de mise en scène,
A partir de ces mots inventer une bande-annonce du spectacle. Les 6 expressions sont un point d’appui
(aventure, espoir, cité du Val Fourré…)
Retours :
-
Le personnage du grand-père était très intéressant.
Le personnage de la sœur qui ne trouve pas sa place au début, elle a fait des études et s’en
sortira dans la vie.
-
Groupe 3
Improvisation du groupe 1/ Consignes d’improvisation : déambuler dans l’espace, être dans sa bulle,
explorer diverses émotions : l’abattement, la tristesse déclinés dans une marche ralentie et le bonheur :
dans une marche plus dynamique.
Distribuer un n° aux membres du groupe : n° 1 et n° 2
Au top : Les n°2 jouent la tristesse, au top les n° 1 jouent le bonheur. Jouer une rencontre entre les N°1 et
2 et aspirer l’émotion de l’autre. S’immobiliser en statue avec l’émotion aspirée.
Retours :
-
Ce ne sont pas réellement des improvisations.
Manque de clarté des consignes, devaient-ils développer ou pas les émotions ?
Il est très difficile d’explorer des émotions en un temps si court.
Il aurait mieux valu donner la phrase et laisser le groupe improviser.
Dans Illumination(s), il y a un travail de vidéo, d’images, de projections très impressionnant : on voit des
visages terribles. Et, tout à coup, ils sourient ! On met en jeu et l’on casse alors les représentations , les
clichés sur les jeunes de banlieue par cette proposition de gros plan.
18
 Voir la vidéo de la création du spectacle à Avignon.
La difficulté dans cette pièce, Illumination(s), c’est la manière d’aborder les clichés. Car ils sont utilisés
dans le spectacle. C’est pourquoi c’est bien de les aborder dans un travail d’avant spectacle, de les
traverser sans limites.
Catherine Le Moullec évoque le souvenir d’un spectacle dans lequel un élève jouait un arabe avec
un accent très caricatural. Cela partait d’une bonne intention de la part de l’enseignant qui mettait en
scène ce spectacle avec ses élèves mais le public a très mal reçu ce parti pris maladroit.
 Les clichés et caricatures sont délicats à aborder sur une scène. Il est nécessaire de les traverser
dans le travail, mais leur représentation doit être subtile et bien réfléchie.
-
-
Les principes de l’improvisation : voir notamment les différents types d’improvisations, qui
permettent de travailler des choses en particulier chez les élèves (le corps, la parole, etc.). Cf.
annexe 11
Les expressions liées au théâtre. Cf. annexe 14
19
« PENSER SEULEMENT QUE VOTRE RESPONSABILITÉ EN
TANT QUE COMÉDIEN EST DE DONNER LA VIE À DES
ÊTRES HUMAINS. » PETER BROOK
Avec Ahmed Madani, auteur et metteur en scène d’Illumination(s)
Cet atelier avec des enseignants, est une expérience nouvelle pour Ahmed Madani, qui n’a jamais fait ce
genre de stages. La séance, très courte pour aborder sa manière de travailler, sera divisée en deux
temps : un travail individuel, puis un travail collectif. L’idée est de travailler ensemble et d’apprendre à se
connaître.
Le premier exercice est dense et compliqué, il peut prendre du temps (ou en tous cas, plus de temps que
prévu).
Dans son travail, Ahmed Madani a arrêté tout ce qui concerne les échauffements et trainings. Il en a
pratiqués jeune acteur mais préfère aujourd’hui travailler directement au plateau.
20
1. Exercice / jeu – « Je m’appelle… Pour moi l’amour c’est… Chanson… »
C’est avec cet exercice qu’Ahmed Madani a démarré le travail avec les acteurs d’Illumination(s), dont
certains n’avaient jamais fait de théâtre de leur vie.
Dans Illuminations, et souvent dans le travail d’Ahmed Madani, il y a un rapport entre l’individu et le
groupe, le chœur et le coryphée. C’est pourquoi il faut obligatoirement un passage par l’individu, l’intime.
Consigne : Se mettre en coulisse. A partir du mot « Action ! » dit par le metteur en scène, le comédien
entre sur scène quand il se sent prêt. Il faut entrer avec beaucoup de simplicité, le plus naturel et proche
de soi possible. Avancer, avec le visage un peu droit, jusqu’à l’avant-scène. Et dire : « Je
m’appelle ______ », « Pour moi, l’amour c’est ______ », puis faire un geste, simple, n’importe lequel.
Enfin, chanter une chanson, celle qui vient à l’esprit. Sur cette chanson, engager la sortie, en chantant.
Démarrer le rideau fermé, et terminer le rideau fermé.
Le principe de cet exercice, c’est d’abattre le mur du théâtre. La principale chose à travailler c’est
l’adresse au public.
 Pour l’exercice, être bien attentif au placement du regard. Il faut regarder droit devant au lointain. Dès
l’entrée sur le plateau, le regard vient en face, il faut le donner au public. C’est déjà une part de soi.
 Tout se fait dans un temps paisible, sans précipitation. Il faut que cela soit habité. Venir parler de soi,
en soi. Respirer. C’est tranquille. On n’est pas dans une compétition, mais dans une paix intérieure. Le
don est important. C’est donc inutile de s’échauffer.
 Essayer surtout de ne pas anticiper. Ne pas préparer ce qu’on a envie de dire. Ne pas préparer le
mouvement mais laisser les choses venir à soi. Des choses incroyables vont surgir, nous surprendre. Il
faut laisser venir la chose à l’intérieur. Ne pas préparer une chose spectaculaire. Ne pas chercher à se
montrer. Il faut aller à un autre endroit, de son intimité, pour le donner et le partager avec les autres. C’est
très beau.
 C’est une chose très simple, et qui comprend une complexité qui nous dépasse. C’est un exercice
stressant, mais jouissif !
1er groupe
Action !
Je m’appelle Valérie. Pour moi l’amour c’est « youpi ! ». / Un petit poisson un petit oiseau, s’aimaient
d’amour tendre, mais comment s’y prendre, quand on est dans l’eau…
Il faut respecter les temps, entre chaque étape : texte, texte, geste, chanson, départ. Ne pas se presser,
prendre bien le temps de finir les choses. Assumer ses actions.
21
Ne pas se débarrasser des choses. L’émotion vient de cette totale simplicité qu’il faut essayer d’avoir.
C’est un don au public. Essayer de se déshabiller de soi, en étant pourtant profondément soi.
La chanson aurait même pu continuer derrière le rideau…
Je m’appelle Anne. Pour moi l’amour c’est une rivière avec plein de courant, de poissons, de vagues, qui
nous emportent. / A la pêche aux moules aux moules aux moules, je ne veux plus y aller maman…
C’était très bien, car ça formait un tout.
Bonjour, je suis Frédéric. Pour moi l’amour c’est l’autre, c’est toi que je connais déjà, toi que je ne connais
pas encore, c’est toi qui m’accueille, et c’est donner à l’autre et aussi apprendre à recevoir. Donner,
recevoir. … / Volare, oh oh, cantare, oh oh oh oh …
Le geste a été fait en parlant. Or, il faut un vrai temps de silence sur le geste.
L’émotion arrive très vite. On n’a pas besoin de faire quelque chose. Plus on est présent, et plus l’émotion
arrive. Du coup, il y a un partage. Les choses ne sont pas masquées par les mécanismes du théâtre.
e
Comme il y a eu une reprise, la 3 fois la chanson n’est pas venue de la même façon.
Je m’appelle Christine. Pour moi, l’amour c’est quelque chose qui est « instinctuel », et qui est sans
conditions. / Ashley baby don’t say a word…
C’est du théâtre déjà !
Je m’appelle Charlotte. Pour moi, l’amour c’est toi mon chéri, c’est nous. / Ah vous dirais-je maman, vous
dirais-je mon tourment…
Charlotte s’est un peu débarrassée de la chose, mais cette tension était belle, car on pouvait la lier à ce
qui venait juste d’être dit avant, et au geste.
Je m’appelle Evelyne. Pour moi l’amour c’est partager, c’est donner, c‘est la vie. / Donner pour donner,
c’est la seule façon de vivre, c’est la seule façon d’aimer…
22
C’est bien, mais il faut éviter de regarder le metteur en scène. Car la consigne, c’est de regarder devant.
Sinon, la concentration se perd.
Le chant relève de l’intime. Ne pas hésiter à s’imaginer dans sa salle de bain. Pour Ahmed, le théâtre n’a
aucun intérêt s’il n’arrive pas à travailler avec l’intime de ses acteurs sur le plateau. C’est un acte
d’abandon. Quand le comédien s’abandonne, vraiment, que le silence se fait dans la salle, les autres sont
saisis par celui qui réalise la performance.
On commence à créer du lien entre les participants, dans le groupe, au fur et à mesure de l’exercice.
C’est ce qu’il faut rechercher avec une classe. Créer une petite communauté avec le groupe, se faire
confiance, et « lâcher » les choses.
Je m’appelle Béatrice. Pour moi l’amour, c’est ce que j’ai perdu. / Au clair de la lune, mon ami Pierrot…
C’est très beau .
Je m’appelle Isabelle. Pour moi l’amour c’est croire qu’on sait tout de l’autre et découvrir que ce n’est pas
vrai. / J’aime ta couleur café, tes cheveux café…
Bien respecter la consigne ! Il faut un cadre. Sans « Action ! », ne pas entrer.
Penser à bien poser les choses, à bien isoler le geste, qui est une vraie étape dans le discours : laisser le
corps parler. Le geste, qui arrive dans cet instant-là, prend une vraie puissance. C’est un autre mode de
discours. Le corps se met à parler et nous surprend. Car il n’y a pas d’anticipation.
Je m’appelle Corinne. Pour moi l’amour, je ne sais pas quoi en dire. C’est simple et compliqué. / Parlezmoi d’amour, ô dites-moi des choses tendres…
C’est beau de se laisser aller. C’est très bien, car elle a pris tous ses temps de respirations à l’intérieur,
c’était très habité, avec une grande puissance dramatique.
Je m’appelle Aurélie. Pour moi l’amour c’est un regard, des papillons dans le ventre, les montagnes
russes. / L’amour est enfant de bohème, qui n’a jamais, jamais connu de loi…
Il faut se décomplexer sur la chanson. La maladresse fait partie de l’émotion. C’est très fort. C’est une
fragilité très jolie, touchante. Des fois certains se réfugient aussi derrière leur facilité à chanter.
23
Je m’appelle Sabine. Pour moi l’amour c’est le 20 octobre 2013. C’est une dévastation. / Aimer, à perdre
la raison…
On rentre dans l’être ; c’est un ravage.
Je m’appelle Anne. Pour moi l’amour c’est comme des essuie-glaces. / Mon bel andalou, au si joli maillot,
me monte au ras du cou, qui s’agrippe à votre cou…
Tout le monde parvient à placer parfaitement sa voix. On entend ce qui est dit, c’est articulé. Parce que
c’est lâché, c’est direct.
Je m’appelle Cathy. Et pour moi, l’amour c’est un petit peu chaque jour de ma vie, c’est mon grand chéri,
mon petit chéri. / One day baby we will be old…
Je m’appelle Manon. Pour moi l’amour c’est notre rencontre, inattendue. / J’ai accepté par erreur, ton
invitation, j’ai dû m’gourer dans l’heure, j’ai dû m’planter dans la saison…
e
2 groupe
Je m’appelle Rémi. Pour moi l’amour c’est mes parents, mes enfants, ma femme, mon petit-fils. 4
générations qui se retrouvent. / Regarde ta montre il est déjà huit heures, embrassons-nous tendrement,
c’est une journée idéale pour marcher dans la forêt … Le lundi au soleil
Ne pas chercher à faire du théâtre, faire une entrée en tout simplicité attention au regard il faut l’assumer.
Je m’appelle Hélène. Pour moi l’amour c’est beau et c’est tout. / Au clair de la lune mon ami Pierrot…
Je m’appelle Agnès. Pour moi l’amour c’est super.
Quand on est dans le mouvement ou la chanson, ne pas hésiter à les faire exister, bien prendre ce tempslà.
Moi c’est Evelyne. Pour moi l’amour c’est ma respiration. / Voici des fruits des fleurs des arbres et des
branches et puis voici mon cœur qui ne bat que pour vous.
Ne pas chercher à s’imiter, la chanson n’est pas forcément une chanson d’amour.
Je m’appelle Denis. Pour moi l’amour c’est tout ce que je peux donner et tout ce que j’arrive à recevoir. / Il
travaillait dans une usine il faisait toujours chaud…
Je m’appelle Véronique. Pour moi l’amour c’est mystérieux, c’est difficile à dire. / 3 p’tits chats, 3 p’tits
chats…
24
Il faut qu’il y ait une intentionnalité dans le geste, c’est un élément du discours qui doit être assumé.
Attention à ne pas regarder le metteur en scène, garder son regard au lointain.
Je m’appelle Mylène. Pour moi l’amour c’est la surprise. / Tourne ton dos contre mon dos, qui vois-tu je ne
te vois plus, si c’est ainsi qu’on continue.
C’est la profondeur du sens qui fait que l’on a de l’empathie, que l’on est ému, attention au geste, c’est
comme un mot !
Je m’appelle Isabelle. Pour moi dire ce qu’est l’amour c’est pas facile, je sais pas trop, juste une petite
lueur de temps en temps comme ça au quotidien, des lueurs gaies , des lueurs tristes. / Hirondelle qui
s’envole vole vole vole , hirondelle qui n’a qu’une aile vole vole dans les bois.
Isabelle a trouvé le lien, l’émotion s’est déplacée, c’était profond ! On se rend compte à quel point chanter
c’est engageant, c’est très intime.
Ce qui est intéressant dans cet exercice, c’est le travail sur la présence, la technique importe peu.
Je m’appelle Raïssa. Pour moi l’amour c’est une force qui me vient de ma famille de mes parents, mes
enfants. / Ça sent la banane, la vanille et le cumin, le sucre de canne, la mangue et le tamarin.
On fluctue entre les différentes émotions.
Je m’appelle Géraldine. Pour moi l’amour c’est comme une évidence et en même temps indéfinissable. /
L’amour est enfant de bohême qui n’a jamais connu de lois…
Le geste doit venir compléter ce qui a été dit avant, il est comme un texte qui existe en soi et qu’on peut
transmettre.
Je m’appelle Marion. Pour moi l’amour c’est celui que j’ai la chance de partager, celui que je n’ai pas eu et
que je n’ai pas pu donner. / Je vois la vie en rose…
Je m’appelle Anne. Pour moi l’amour c’est compliqué. / Il était un petit homme pirouette cacahuètes, sa
maison est en carton…
Je m’appelle Philippe, pour moi l’amour c’est précieux, fragile. / Dans la chaleur du soir…
 Avec des adolescents, il n’est pas nécessaire de dire « Pour moi l’amour c’est… » ; on peut
trouver une autre phrase. Mais pour le geste, c’est très simple, ils auront plein d’idées.
 Cet exercice permet de briser la glace. C’est beaucoup mieux qu’un tour de prénoms dont on
ne se souviendra évidemment pas.
2. Travail de mémoire – Gestes chœur / coryphée
 Constitution de deux groupes (7 ou 8 personnes par groupe).
25
Consigne : Entrer tous ensemble. Se mettre au centre. Regarder en face. Prendre possession de
l’espace, en demi-cercle. Celui qui se trouve à l’extrémité, à cour, vient face au groupe (donc dos au
public) : c’est le coryphée. Il fait son geste (celui inventé dans l’exercice précédent). Tout le groupe le
reproduit, ainsi que le coryphée. Puis il vient se replacer.
A tour de rôle, chacun vient exécuter son geste et devient coryphée. Quand tout le monde l’a fait,
recommencer en partant par la personne à l’extrémité jardin. Faire les mouvements de chacun, dans
l’ordre du premier passage. Il faut donc être attentif et mémoriser le mouvement des autres.
 Il s’agit de se faire confiance. Garder en mémoire toutes les choses vues dans l’exercice précédent :
regard, présence, simplicité.
 Attention, c’est un travail de groupe. Si une seule personne regarde par terre, cela annule tout le reste !
Il n’y a plus de théâtre.
 Bien se détendre dans l’exercice, sinon cela ne marchera pas.
 C’est bien, dans le demi-cercle, de réussir à se voir tous, pour ne pas se perdre.
 Pour le metteur en scène, penser à bien dire « Action ! » avant l’entrée du groupe sur scène.
 C’est un exercice simple, sur la transmission, qui peut se compliquer avec un plus grand
nombre de participants par groupes.
 Aussi, on peut travailler en amont les gestes. Mais c’est également intéressant d’utiliser les
gestes bruts, non réfléchis.
3. Travail de textes
Outil : un texte en cours d’écriture d’une amie écrivain d’Ahmed Madani, Douna Loup. C’est un texte
d’amour très poétique : un long poème. De cette auteure, vous pouvez lire le roman L’Embrasure, une
histoire d’amour très forte (publiée chez Mercure de France). A lire également, Les Lignes de ta paume,
qui retrace la relation d’une grand-mère avec une jeune fille, et son parcours.
Constitution de deux groupes, de deux chœurs sur le plateau. Un premier groupe travaille sur les pages 1,
2 et 3. L’autre groupe travaille sur les pages 4, 5 et 6.
Consigne : se distribuer le texte, des passages. Toutes les possibilités sont permises ! Ensuite,
probablement qu’un re-travail de distribution sera fait, pour faire travailler le chœur.
Temps de préparation : 15 min.
Consignes pour la lecture :
-
Pour le « dire » : le dire, c’est le rapprocher de soi : c’est à dire, comme pour le premier
exercice.
26
-
Placement : un groupe forme un chœur, en quinconce, celui de ceux qui ne vont pas parler
dans un premier temps. Pendant ce temps d’écoute, il devra réutiliser les gestes et chansons.
Le deuxième groupe forme aussi un chœur, en quinconce, un peu plus en avant-scène, avec le
texte en main, il prend en charge la parole.
-
Prise de parole : la plus simple possible. Etre concentré, et le plus proche de soi.
 Il va falloir être en même temps dans la lecture, dans la mise en scène, et dans l’invention des
intentions.
Déroulé de l’exercice de lecture
Action !
Le groupe 1 murmure doucement la chanson « Couleur café » : prendre le temps de trouver le murmure
ensemble, de s’assurer, de s’amuser. Le groupe 2 reprend le murmure, avec le groupe 1.
Arrêt de la chanson. Lecture du début du texte par le groupe 2.
 Bien articuler, mâcher le texte, et y mettre de l’intentionnalité !
 Etre là, présent, avec le visage et le regard au maximum face public.
 Augmenter un maximum l’intention, mais ne pas crier.
 Prendre le temps, de vraiment dire les choses.
 Ne pas perdre la dynamique du chœur dans les passages en solo.
 Quand on a une intention, ne pas la lâcher !
Un membre du groupe 1 se place en avant-scène, dos au public, et fait un geste que tous vont reproduire.
Bien repérer tous les détails du mouvement, pour que tout le monde soit bien ensemble. Ce geste sera le
début de la lecture.
Action !
Les gestes sont faits par les deux groupes. Puis le groupe 1 murmure la chanson, reprise par le groupe 2.
Ça doit monter assez vite. Puis, le groupe 2 débute la lecture, et interrompt ainsi la chanson.
27
 Par manque de temps, on ne va pas jusqu’au bout de la lecture. Inversion : le groupe 1 devient
lecteur. Pendant qu’Ahmed fait travailler la lecture au groupe 1, le groupe 2 travaille les gestes à
reproduire ensuite.
Action !
Le groupe 1 entame la lecture, pendant que le groupe 2 enchaîne tous les gestes.
 Pour se détendre, faire les gestes doucement.
Action !
Reprise de toute la séquence travaillée jusque-là …
Quand le groupe 2 finit sa partie lue, un membre du groupe entonne sa chanson. C’est le moment pour
les membres du groupe 2 de se débarrasser de leurs feuilles, et pour le groupe 1 c’est le signal pour
entamer la lecture. Après la lecture, le groupe 1 reprend ses mouvements, et s’approche, au même
niveau que le groupe 2. Après le dernier mouvement, revenir au neutre.
Avec un peu plus de temps, ça aurait été parfait de finir sur un chœur des deux groupes, avec les mêmes
gestes.
 Amusez-vous !
 La poésie, avec les élèves, c’est le succès garanti ! Pour Illumination(s), Ahmed a travaillé sur
Le Dormeur du val, d’Arthur Rimbaud. C’est un travail formidable à faire avec les élèves de par
la langue très soutenue. Le travail du chœur permet plein de choses.
 Pour contacter Ahmed Madani : [email protected]. Il ne faut pas hésiter à lui
transmettre, par exemple, des commentaires sur le texte de Douna Loup.
28
PRÉPARATION DE PLATONOV
Avec Florence Beylich coordonnatrice théâtre départementale
Platonov, la vérité vers quelle liberté ?
Le personnage de Platonov va constamment à la recherche d la vérité chez les autres, il cherche à leur
faire admettre, à leur asséner. Les dialogues sont tendus et ne peuvent finir que mal. Il dit lui-même que
les histoires qui finissent bien ne l’ont pas comme personnage.
Tchekhov montre aussi que les rapports que Platonov entretient avec les autres personnages sont tous
imbriqués les uns aux autres et finissent par l’emprisonner, l’enserrer jusqu’à la strangulation, jusqu’à
l’anéantissement.
Chaque conversation est une hémorragie de sentiments, de ressentiments que rien n’arrête surtout pas
Platonov lui-même.
Platonov est suffisamment intelligent pour appréhender le point de vue de l’autre et, une fois qu’il détient
la vérité de l’autre, il jongle et cela se traduit par des répliques décousues, virevoltantes, aux registres
variées. Il en sort épuisé de lui-même.
Oralisation des personnages
Exercice 1
Faire un cercle. L’animatrice distribue un papier à chacun sur lequel est inscrit le nom et le statut social
d’un personnage. Proférer ce nom. C’est un bon moyen pour s’acclimater aux patronymes et prénoms
russes. Puis lors d’un second tour de cercle, donner le nom et l’identité du personnage.
Avec les élèves, il serait possible de proposer une déambulation, et demander à effectuer des
regroupements : les hommes, les femmes, les époux, les serviteurs, etc.
Dans la pièce de Tchekhov, il y a beaucoup de personnages. Le collectif Les Possédés a resserré la
distribution et certains personnages ont disparus.
Exercice : chacun dit une réplique de la pièce. Pour varier l’exercice, on pourrait dire les répliques avec
des défauts de langage (bégaiement), des particularités (cri, grognement), ainsi qu’avec des intentions.
« Heu… c’est l’épilogue ? ou c’est encore la comédie ? »
Platonov
29
Quelques rappels sur Le Collectif Les Possédés
« Vous êtes au théâtre. Pas de noir dans la salle, pas de rideau, pas de distance formelle ou esthétique.
C’est sur ce pied d’égalité avec le public, que les Possédés conçoivent le métier de comédien.
Créée en 2002, la troupe se compose de 9 comédiens qui pratiquent un théâtre à nu,
cinématographique. Les répétitions commencent à table, tout le monde participe, trouve les enjeux
cachés du texte, le sous-texte, sur le fond comme sur la forme. Puis on passe au plateau, de l’intellect à
l’organique.
« Le notion de personnage n’existe pas », explique Rodolphe Dana, le metteur en scène.
« Nous partons de nous, avec nos défauts et nos qualités (…). Le but suprême étant de privilégier le
sentiment du Ici et Maintenant. Nous défendons un théâtre intimiste, en communion avec le public ».
La salle est donc accessoire. Les comédiens accueillent les spectateurs en camarades, avec simplicité,
sans fard. Peu importe le lieu, pourvu qu’il permette ce jeu intime : un appartement privé, une
médiathèque, une salle de classe…
Les Possédés sont entrés dans la ville, avec un concept nouveau ».
Depuis sa création en 2002, le Collectif Les Possédés, constitué de 9 comédiens, suit la voie d’un théâtre
qui s’intéresse profondément à l’humain : ses travers, ses espoirs, ses échecs, ses réalisations, sa
société…
Prospecter, creuser, interroger ce que nos familles, ce que nos vies font et défont, ce qui rend si
complexe et si riche le tissu des relations humaines qui enveloppe nos existences.
Ainsi, pour les textes qu’il monte, le collectif creuse l’écriture : c’est d’abord l’approche par une vue
d’ensemble qui s’affine en fonction de la richesse des regards de chaque acteur, du degré d’intimité créé
avec la matière en question et de la singularité des perceptions de chacun. Une aventure intérieure
collective vers les enjeux cachés d’un texte, ses secrets et ses mystères. Approcher l’auteur et son œuvre
pour, alors, s’en détacher, se délivrer de sa force et de son emprise afin de faire apparaître sa propre
lecture, son propre théâtre.
Les membres du collectif se connaissent depuis longtemps, presque tous issus du Cours Florent, et la
relation étroite qui les unit sert un jeu qui laisse la part belle à leurs propres personnalités. C’est
certainement leur marque de fabrique : un théâtre qui privilégie l’humain et la fragilité qui le constitue.
C’est donc assez naturellement que des auteurs comme Jean-Luc Lagarce ou Anton Tchekhov, grands
explorateurs de la condition humaine de leurs époques respectives, ont pris place dans le répertoire du
collectif.
Les membres permanents du collectif sont : Laurent Bellambe, Julien Chavrial, David Clavel, Rodolphe
Dana, Katja Hunsinger, Émilie Lafarge, Nadir Legrand, Christophe Paou et Marie-Hélène Roig
30
REBONDS ET RÉSONANCES
Avec Catherine Le Moullec
 Voir sur le site du Grand T (Ressources / Pour les enseignants), le document « De l’émotion et
l’analyse », pour animer un temps d’échange après le spectacle.
1. Réveil
A/ Le corps
Appui musical : musique douce.
Se déplacer dans l’espace. S’étirer en marchant. En profiter pour expirer et tenir l’expiration au moment
où l’étirement est au maximum. La respiration se déroule sur le long temps d’étirement des bras. Penser à
étirer le dos, les jambes, les pieds. Petit à petit, comme l’espace est occupé par des corps, privilégier
l’étirement dans les espaces libres autour de soi. Puis repartir dans la marche, en pensant toujours à
l’étirement. Attention à ne pas marcher de manière mécanique. Penser à ouvrir la bouche et se laisser
bailler. Prendre dans la marche le temps de rencontrer le regard des autres, d’être attentif à l’autour.
Prendre des temps plus personnels, dans sa bulle, pour s’étirer.
Se frotter les mains, quand la paume est bien chaude, masser la nuque, en laissant la tête pencher en
avant. Penser à bien respirer. Chauffer les doigts, les frotter, chauffer les articulations, les poignets, les
coudes, les épaules. Faire des petits mouvements continus.
Il faut prendre soin de son corps, on le sollicite beaucoup. C’est important de prendre le temps de
l’écouter et de s’en occuper.
Après avoir frotté, masser tout le corps, bien vérifier qu’il n’y a pas des petites parties qui soient encore
froides ; s’en occuper. Finir par les joues, le menton, le tour de la bouche en utilisant le bout des doigts.
Appuyer tout doucement sur les paupières. Passer sur les sourcils, frotter derrière les oreilles et le dessus
des lobes.
Reprendre la marche. Faire des jetés de mains en utilisant les espaces libres autour de soi. Ne pas être
dans la mécanique, mais regarder ce que l’on fait. Faire la même chose avec les pieds. Puis agiter pieds
et mains, en même temps, tout en se déplaçant.
Marcher, puis s’arrêter à un endroit, tranquillement. Prendre conscience de l’énergie qui circule dans le
corps, quelles sont les parties irriguées. Relâcher la tête, bien répartir le poids du corps sur les pieds.
Déverrouiller un petit peu les genoux. Puis s’enrouler lentement, en avant, vers le bas. Une fois en bas,
faire « non » avec la tête, pour bien la relâcher. Allonger les cervicales. Souffler.
Puis reconstruire lentement le dos, en partant du bas. Quand on est arrivé en haut, vérifier qu’on a bien
accompli sa « reconstruction », que les épaules sont bien descendues, et que le menton est bien sur une
ligne horizontale. On est grand, et beau.
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Refaire la même chose, chacun à son rythme, dans ses sensations personnelles. Pour la reconstruction,
avoir vraiment la sensation de s’élever : grâce à de micros ajustements qui permettent d’avoir un corps
qui soit prêt à avancer. Avoir un regard et un front bien ouverts, c’est essentiel. Une fois que cet état de
corps est atteint, reprendre la marche.
B/ La feuille de papier
Prendre une feuille de papier A4, la poser sur la main, et la faire bouger dans l’espace. Trouver la façon
de bien équilibrer la feuille, sentir le poids de l’air et la pression sur la feuille. Commencer lentement, pour
ensuite devenir plus ample dans ses gestes. Petit à petit, on peut passer la feuille d’une main à l’autre et
se déplacer.
Dans les espaces, mouvants, toujours avec un regard large, saisir les opportunités d’espaces et de
mouvements. Sentir les possibilités d’accélérations. Si la feuille tombe ce n’est pas grave, la reprendre et
recommencer. Ne pas être trop pressé, prendre le temps d’apprivoiser l’objet, jouer avec. La main et le
regard marchent ensemble.
Continuer, en étant sensible à ce qui se passe autour de soi. Garder un contact privilégié avec son objet,
élargir le regard sur l’espace et sur les propositions des autres, que l’on peut reprendre et renchérir
dessus (une façon de se déplacer, de porter la feuille, etc.). Se nourrir des autres, de leurs propositions
de jeu corporelles, et de l’espace.
Passage de relai des feuilles :
Poursuivre l’exercice, certains stagiaires ont une feuille, d’autres pas. Conserver la même qualité de
geste, en sentant bien le poids de l’air, la résistance. Il est possible de passer la feuille à quelqu’un
d’autre, dans la continuité du geste. C’est un chemin, avec des itinéraires à tracer dans l’espace, avec ou
sans feuille. Dans les passages de relai, être bien ouvert à la proposition de l’autre. Faire en sorte que les
feuilles voyagent le plus possible. Le regard sur la main, fait exister l’espace, ou une feuille imaginaire.
Progressivement, trouver une fin collective à l’exercice.
Exercice qui reprend le travail des marches effectué la veille
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C/ 1, 2, 3, 4, 5 – Vocabulaire corporel commun
Adopter une marche commune, soutenue, dynamique. Ouvrir l’espace avec le corps. Ce n’est pas
mécanique. Sentir l’air. C’est la marche 1.
Puis adopter une marche lente, la 2.
L’arrêt, c’est le 3. Trouver comment « s’écrouler de l’intérieur » ; trouver chacun sa façon d’illustrer dans le
corps cette expression (ça peut être juste la tête qui penche, par exemple). Puis revenir à la position
neutre. S’écrouler à nouveau de l’intérieur, mais lentement. Le 4, c’est s’embrasser au sens propre,
énergiquement. Surtout, ne pas « psychologiser » l’embrassade. C’est un geste, une action.
Le numéro 5, c’est repousser l’autre. Pour cela, il faut être bien attentif à l’espace autour et aux autres. Il
faut bien saisir le regard de quelqu’un avant de provoquer la rencontre. Ne pas vouloir tout faire en même
temps.
L’animatrice donne ensuite les numéros, à suivre par le groupe pour adopter la marche demandée, l’arrêt,
ou l’embrassade. 1, 3, 2, 5, 1, 4, etc. Le faire plusieurs fois, pour bien trouver les différents moments. Pas
d’affolement. Tout le monde dans les rencontres n’est pas forcément au même rythme. Quand quelqu’un
propose une embrassade, ne pas la refuser.
Ne pas commenter, c’est un exercice muet.
Variante :
Les stagiaires sont libres d’utiliser les 5 possibilités de gestes, c’est un vocabulaire commun, à utiliser par
chacun, dans le temps qu’il veut, celui qui initie est suivi par l’autre. Jouer avec les rythmes, pour voir ce
que ça provoque, des choses peuvent se produire en écho, des émotions vont naitre. Il faut les laisser
venir, plutôt que de mettre un masque sur un geste et fabriquer une fausse émotion. Etre attentif à ce que
l’on crée collectivement, dans l’espace, le rythme, les corps.
Petit à petit t ajouter des sourires, des regards, les laisser venir de l’intérieur, ne pas les forcer. Sentir
l’équilibre de rythme du plateau. Si cela ne fonctionne pas avec quelqu’un, essayer avec quelqu’un
d’autre.
Cet exercice reprend les schémas émotionnels et physiques de la mise en scène de Platonov vue la veille
au soir.
Faire le même exercice, en divisant le groupe en deux ; pour permettre à chacun d’avoir un regard sur
l’exercice.
Appui musical : musique douce, cordes, envolées. Piano.
Ne pas se laisser piéger par la musique. Petit à petit, considérer le groupe. Laisser les choses se faire et
penser à ce qui se passe, au niveau du rythme des propositions, avec des possibilités de ruptures.
Laisser le temps aux émotions de venir. Penser aux possibilités d’échos dans les gestes. Etre toujours
présent aux autres, à l’espace. Bien tenir ses propositions. Finir dans l’immobilité, quand la musique
s’arrête.
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Il est possible de tenir l’immobilité. Tenter de donner les émotions brutes et de ne pas les rendre
anecdotiques. L’anecdotique, c’est le commentaire qui pourrait venir après, pour compléter ce qui vient de
se passer.
Passage du second groupe, sur autre musique : plus rythmée, un peu angoissante qui induit une
dramatisation.
Ce qui pourrait être bien, au début de l’impro, c’est que les corps soient déjà en position, dans un état
d’immobilité ou de contact avec un autre.
Bien penser au rythme, c’est très important quand on évolue à plusieurs. Après un contact, bien repartir
dans la neutralité ; sans trace ou commentaire. Tenir, parfois, des immobilités, et créer des ruptures plus
nettes. Accentuer les choix. C’est important de passer nettement d’une proposition à une autre. Il faut
faire des choix rythmiques et d’espace bien nets.
2. Les objets
A/ Je me souviens
Disposer les objets (amenés par les enseignants, en lien avec le spectacle Platonov), en ligne sur le
plateau. Tourner autour, et les regarder. Possibilité de les toucher, de les explorer un peu : leur matière, la
sensation provoquée, etc. Petit à petit, essayer de voir ce qu’ils évoquent pour soi. Pour chaque objet,
essayer de voir si on comprend pourquoi quelqu’un l’a apporté.
Former deux lignes, de chaque côté des objets, faire en sorte d’avoir quelqu’un en face de soi, en vis-àvis. Chacun à son tour, venir prendre un objet (pas le sien), et l’associer à un souvenir du spectacle. Aller
prendre l’objet, dire à haute voix « Je me souviens… », et plonger dans son souvenir. ils peuvent être
subjectifs (en expliquant une sensation éprouvée par exemple).
Exemples :
« Je me souviens du personnage habillé en ours. (…) Il devait avoir chaud, allongé sur le plateau. »
« Je me souviens des talons hauts que les femmes portaient dans le spectacle, et ça m’a gênée car je ne
regardais que leur façon de marcher. »
« Je me souviens des boules de pétanque qui étaient au milieu de la scène, sous une table, et qui n’ont
servi à rien. »
« Je me souviens des divers jeux disponibles sur le plateau susceptibles de rompre l’ennui mais l’ennui
est constant ».
« Je me souviens du tissu imprimé biche, de l’effet de trompe-l’œil, la comédienne l’utilisait en
camouflage ».
« Je me souviens de l’actrice dans la piscine qui se renversait des bouteilles d’eau sur la tête, et des rires
appuyés du public scolaire »
« Je me souviens des allusions à Hamlet ».
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« Je me souviens de la partie d’échec au début avec la Générale » .
« Je me souviens du feu d’artifice, la générale qui piétine du plastic à bulle pour simuler les pétards des
fusées. »
« Je me souviens de la boite-banc qui traversait tous les actes ».
« Je me souviens de la sirène d’alarme incendie, on ne savait pas si c’était sérieux, si on devait évacuer
la salle».
« Je me souviens du danseur un peu voyou rentrant de Paris dans un style vestimentaire un peu minet
qui revient en Russie pour raquetter son père et qui chante à la manière d’Elvis Presley ».
« Je me souviens des journaux qui jonchaient le plateau et la comédienne qui a utilisé une machine
spéciale pour nettoyer le plateau ».
« Je me souviens de toutes les chaises sur le plateau et la manière très élégante qu’avait la Générale de
s’asseoir ».
 Le « Je me souviens » fait émerger des choses. On peut aussi faire cet exercice en se contentant
simplement du « Je me souviens », sans détailler le souvenir.
B/ La fresque humaine
Remettre tous les objets au centre du plateau.
Penser à un mot qui résume tout le spectacle. Choisir un objet en fonction de ce mot. A tour de rôle,
prendre une position, en mettant en scène son objet, et proférer son mot. Etablir un point de contact
physique avec son voisin pour compléter la fresque.
« violence, dégringolade, quotidien, loufoque, se cacher, assis, échange, surprise, prozit, ennui,
impossible de résister, force de vie, désir, inaction, multitude, chaises, pathos, chaos général, coupure ».
Il ne faut pas trop penser, mais encore une fois s’appuyer sur la proposition de l’autre.
 Avec les élèves, c’est bien de construire l’exercice de la fresque « à plat », pour bien le comprendre,
puis de l’appliquer au spectacle.
 Pour les élèves, ce sont des exercices qui convoquent des compétences (qu’est-ce qu’un objet,
un accessoire ? qu’est-ce qu’il signifie ?).
 Les « Je me souviens » permettent de faire émerger les images.
 C’est toujours important, après un spectacle, d’avoir un temps de paroles, d’échanges. Puis un
travail de remémoration.
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3. Remémoration guidée
S’installer chacun à un endroit du plateau, s’assoir. Fermer les yeux.
« Repensez à la soirée de la veille, en un rapide travail de visualisation. Visualiser très précisément la
place à laquelle vous étiez assis(e) pendant le spectacle : elle est très importante car elle dirige votre
point de vue sur l’espace scénique, et dans une salle comme celle du Grand T, les places sont plus ou
moins proches de la scène. Se rappeler à côté de qui vous étiez assis ; les gens autour ont aussi eu de
l’influence sur votre perception du spectacle.
Essayer de visualiser de façon précise, avec un regard « scanner », la première image que l’on a quand
on entre dans la salle. Quelle est la scénographie ? Repenser à tout ce qui était sur scène. Avoir un
regard panoramique, en s’efforçant de se rappeler tout ce qu’il y avait de jardin à cour sur la scène, au
tout début de la pièce : les objets, leur répartition ; car ce qui va être important ensuite c’est la façon dont
ils seront déplacés. Essayer de visualiser tous les jeux (de société, de jardin, d’intérieur et d’extérieur) qui
étaient proposés sur le plateau.
Repenser à l’espace de jeu créé sur le plateau. Comment était-il défini ? Par quoi ? Par des éléments de
décor, le rôle des éclairages ? Comment a-t-on su que le spectacle commençait ? Quel changement
d’éclairage s’est produit, par exemple.
Beaucoup de spectacles aujourd’hui commencent avec des comédiens déjà présents sur le plateau. Pour
Platonov, où étaient les comédiens ? Comment est-ce que ce tout cela a commencé ? Ce sont des choix
importants de mise en scène.
Visualiser de manière chronologique les différents espaces scénographiques de jeu qui ont été proposés,
pour les changements d’actes. Penser à la disposition des différents éléments. Peut-être certains ont-ils
disparu ? Penser également aux lumières.
Penser à la musique qui accompagnait ces changements (manière de traduire les didascalies de
Tchekhov). Quel type de présences sur le plateau cela impliquait ? Essayer de comprendre ce que les
espaces voulaient traduire ; quels lieux étaient figurés ?
Jusqu’au dernier espace. Ce qui est intéressant dans un spectacle, c’est de voir d’où on part, et où on
arrive. Que restait-il sur le plateau ?
Tranquillement, ouvrir les yeux. Ne pas échanger avec les autres. »
 La remémoration guidée est un moment important avec les élèves ; selon ce que vous voulez
plus précisément travailler ensuite, vous pouvez orienter la remémoration.
4. Écriture
A/ Souvenirs personnels
Se remémorer et écrire sur une feuille de papier :
- un son ou une musique,
- un objet de décor ou un accessoire (qui n’aurait pas encore été évoqué ou utilisé dans les exercices
précédents),
36
- un élément de costume (la couleur peut être une entrée possible dans les costumes par exemple),
- 3 actions précises d’un personnage (par forcément le même),
- 3 sentiments éprouvés liés à un moment précis.
Cf. l’inventaire d’après Yannick Mancel.
Sur l’autre côté de la feuille :
Platonov : Qu’est-ce que ça raconte ?  Faire trois entrées, en commençant par « C’est l’histoire de … »
 Pour Platonov c’est une question importante car c’est une pièce foisonnante dont le sens n’est pas
évident.
Les enseignants qui n’ont pas assisté au spectacle prennent en note les réponses proposées et rédigent
une petite présentation du spectacle, ou un article critique.
Proposition des enseignants
Sons :
Les coups de feu,
Le sifflement et l’éclatement des sacs en plastique,
La guitare- voix,
La balalaïka,
La locomotive,
Le feu d’artifice,
La musique de la fête entendue du jardin,
Les cris de la femme hystérique,
La chanson russe festive.
 C’est intéressant de voir les différents types de sons utilisés dans le spectacle (in /off, effets
spéciaux, voix, musiques, etc.)

Objets :
Les lampes et guirlandes électriques,
La selle de cheval,
La tenture qui se lève,
Le jeu de croquet,
Les lampes de chevet,
Les petites lampes allumées dans tous les coins,
Les hérons décoratifs,
Les piscines en plastique bleu,
Les chaises d’école,
L’armoire qui perd ses cloisons,
Le raz de marée du tapis qui se lève,
La tête de lit par terre,
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L’argent qui vole,
Les tasses à café qui servent à boire du vin,
Les gants de boxe.
 C’est intéressant de se poser la question des espaces de jeu : quel est l’intérieur / l’extérieur ?
Comment joue-t-on les changements de lieux ? Quels sont les codes spatiaux au théâtre ?
 Ces codes sont souvent questionnés dans les pièces où le théâtre se joue dans le théâtre,
référence à Tchekhov lui-même dans La Mouette et référence à Hamlet.
Costumes :
Le slip à poids de Platonov.
La robe rouge d’Emmanuelle Devos.
Le costume parme de l’usurier Bougrov .
La robe rouge de la Générale.
La belle robe verte de Sofia.
Le spencer écossais de Sergueï quand il va à la chasse.
Les chaussures des femmes.
Le costume tronqué du fils qui rentre de Paris.
La matière des robes et du chemiser.
La veste sans pantalon de Platonov.
Le combi-short de la générale en catwoman.
Le col en fourrure de Sacha en décalage par rapport à la saison.
Le pull noir de Sofia, la cravate foulard de Kolia avec laquelle il s’étrangle.
 Le mélange des costumes est surprenant. Et on peut en faire une lecture différente après une analyse
de la pièce.
 Le dessin des costumes, au départ très « propre », s’est mué en un mélange chaotique. A l’image du
décor et du chaos sentimental qui règne.
3 actions
La générale qui fume pour tromper son ennui au début de la pièce.
Le jeune fils du propriétaire terrien qui porte son père.
Sophie qui s’arrose dans la piscine.
Le docteur qui défonce la porte/armoire.
Le sourire de Sacha quand Platonov évoque leur solitude après leur long hiver.
Anna chevauchant Platonov.
Serguei qui place deux pièces d’échec sur ses yeux au début de la pièce.
La générale qui s’assoit sur un siège pliant.
La gifle donnée par la générale au fils du propriétaire terrien.
La générale qui veut posséder Platonov et se jette sur lui en déshabillé.
Le suicide au fusil manqué.
Grékova qui est envoyée par la générale dans la bibliothèque et qui est assise derrière un meuble.
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Sacha qui veut se jeter sous le train.
Le propriétaire terrien qui jette les billets.
Le médecin qui entre chez sa sœur déguisé en ours.
3 sentiments :
Amusement pour l’aisance du docteur à incarner son personnage.
Gêne par rapport à l’inégalité de jeu des différents comédiens.
Admiration pour Grékova quand elle joue l’hystérie.
Curiosité de voir une vedette en vrai.
Déception de l’utilisation de l’espace, plus d’attente au niveau du jeu.
Agacement à l’égard de ces amoureuses du même homme qui ne se décide pas.
Amusement dans la scène des chaises.
Ennui dans les moments où il ne se passe rien.
Admiration après la coupure suite à l’alarme incendie, les comédiens ont repris presque comme si de rien
n’était.
Joie devant le médecin en ours.
Emotion quand le braconnier parle d’amour.
Impatience devant le choix de Platonov : ira /n’ira pas chez la générale ?
Ennui pour la scène d’exposition.
Enervement contre Platonov pour son indécision.
Admiration pour le jeu de la comédienne qui interprète Sacha quand elle est dans sa chambre
désespérée.
Emotion pour les chants guitare –voix.
Empathie avec Platonov quand il exprime son désarroi.
Emotion face à la détresse de Sofia quand elle s’arrose dans la piscine.
Perplexité, incertitude au moment du déclenchement de l’alarme incendie.
C’est l’histoire de :
La Russie, de la vie remplie de choses diverses et parfois inutiles.
D’un homme sans volonté.
De femmes qui aiment les hommes.
D’une nana qui passe à côté d’une histoire d’amour.
De gens qui cherchent à tromper l’ennui et vivre à tout prix.
De Platonov amoureux chronique.
D’un homme qui n’arrive pas à se décider et engendre la mort de trois femmes.
D’amitiés masculines.
De personnages qui tentent de combler leur vide de l’existence.
D’un homme impuissant qui reste à un niveau platonique sans réussir à concrétiser sexuellement.
De plusieurs façons d’aimer (ou pas).
D’amours impossibles.
D’un séducteur qui n’assume pas ses désirs de conquête.
De la fin d’un mode de vie.
D’Anna, une veuve ruinée qui rêve d’une autre vie avec Platonov.
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D’une femme appréciée de tous mais qui veut vivre plus intensément.
De personnages qui cherchent à combler le vide de leur existence.
De bourgeois et de nobles qui s’ennuient.
D’amours croisées, vraies, fausses, déçues.
De Platonov qui voudrait être un être extraordinaire mais qui ne sait être que médiocre.
De la Russie et de la fin de la domination des aristocrates qui se retrouvent inadaptés à leur monde.
De femmes toutes fascinées par le même homme et toutes déçues.
De personnes oisives.
D’un groupe de personnes qui voudraient tous une autre vie.
D’un génie raté.
De la décadence de l’aristocratie russe.
D’un homme brillant qui s’effondre.
 Le sous-titre qu’avait donné Tchekhov à sa pièce est : L’Absence des pères. Le rapport père/fils
est très important pour lui, et souligné dans le texte, pourtant ce n’est pas ce qu’on retient de la
pièce telle que Les Possédés l’ont mise en scène. Or quand on la lit, c’est notable.
B/ En jeu
Constituer 4 groupes, pour mettre en jeu, dans une improvisation, les différents types de souvenirs
récoltés.
2 groupes travaillent une improvisation écrite et 2 groupes une improvisation corporelle. Réutiliser les
principes de rythmes expérimentés auparavant, aller vers l’immobilité pour le final.
Exemples d’improvisations proposées par les enseignants:
e
1 forme :
5 comédiens sur scène, qui déambulent. Ils miment des actions (boire, fumer, etc.)
4 comédiens sont assis : c’est le chœur parlé de lecteurs = « C’est l’histoire de … » reprise des
propositions faites précédemment.
Appui musical : musique entêtante, répétitive, assez joyeuse.
 Etre précis dans les gestes, dans les changements de rythmes. La répétition peut être bien, quand on
a trouvé quelque chose d’intéressant, pour prendre le temps de l’explorer et de la donner à voir.
 Finir l’impro en allant vers une immobilité, progressivement.
 Il y a des accidents qui sont heureux. Par exemple, dans ce groupe, d’avoir un Platonov avec trois
femmes.
 On ne sait jamais où on va, mais il faut profiter de toutes les opportunités !
40
e
2 forme :
Le chœur parlé est assis au centre du plateau.
6 comédiens déambulent, se regardent, se touchent, s’embrassent, se sautent dans les bras, se
partagent un châle.
Consigne pendant l’impro : accélérer les gestes, sans interruption.
Appui musical : même musique que pour l’improvisation précédente.
 Quelques fois, le choc des mots et des gestes ne fonctionne pas.
e
3 groupe – scénographie :
3 titres sont proposés pour l’exercice de la rédaction d’un article : Bric à brac, Chaos, Un savant bric à
brac ?
 Dimension de contrastes permanents : intérieur/extérieur, situation de chaos, de fin du monde, des
personnages qui sont dans l’idée d’autodestruction.
 Réflexion sur l’idée d’un collectif, tel que celui des Possédés. Il faudrait se renseigner sur leurs
méthodes de travail.
e
4 groupe – le jeu des acteurs :
Points marquants : Quel lien entre le jeu et le texte ? / Un travail de partition musicale. / La partie d’échec
sans cesse interrompue était à l’image de tout le spectacle. Tout comme les cigarettes allumées, éteintes,
échangées, etc.
Mot clé : tourbillon. Recherche d’ivresse, folie des personnages qui courent après un idéal.
 Les Possédés travaillent très longtemps à la table. Pour Platonov, ils ont une vraie maitrise de la
rupture. Avec une dextérité incroyable, et un naturel percutant. Une grande humanité fait que l’on n’a pas
l’impression qu’ils habitent un personnage, mais qu’ils sont les personnages. La langue de Tchekhov est
devenue la leur, dans tout le respect du texte (et dans la traduction d’André Markovicz).
 Chez Tchekhov, c’est difficile souvent de jouer les différentes conversations qui s’échangent en même
temps. Or dans cette mise en scène, la question ne se pose pas, grâce notamment à l’utilisation de
l’espace, et des sorties qui n’en sont pas vraiment.
41
RYTHMES DE CŒURS, MISE EN CHŒUR
Avec Florence Beylich coordonnatrice théâtre départementale
À propos du spectacle
Illumination(s), c’est la petite histoire de chacun qui se retrouve dans la grande histoire. Des individus
déracinés se sont retrouvés dans une histoire commune, regroupés sur le territoire français en
communautés, voire en ghettos, d’où ce tiraillement entre l’individu et le groupe.
Dans le texte d’Illumination(s), un unique prénom est utilisé : Lakhdar. Tous les personnages sont clonés
en un seul.
Ahmed Madani a interrogé ses acteurs dans leur individualité, puis il en a réalisé un texte. Il a travaillé
avec des comédiens professionnels et amateurs. Il signe une mise en scène très carrée, chorale, très
structurée, au millimètre.
 Ce travail de chœur, sera le fil conducteur du travail avec les stagiaires.
1. Échauffement
A/ Respiration
Appui musical : musique zen, des cordes, lyrique.
Former un cercle resserré, les uns derrière les autres. Poser sa main droite sur la colonne vertébrale de la
personne devant soi. Fermer les yeux. Petit à petit, ralentir sa respiration et en prendre conscience.
Augmenter la respiration, dans le souffle, expiration / inspiration. A chaque souffle, envoyer l’air dans le
dos de la personne touchée, devant soi. A chaque inspiration, aspirer l’air vers soi. Passer à l’autre
comme un courant, une énergie bienveillante. Faire le lien. Petit à petit, aboutir à une respiration
commune au groupe. Sentir le mouvement du dos, et s’y accorder. Visualiser l’énergie, qui passe, dans le
cercle. Amplifier la respiration. Sans casser le contact physique, ramener sa main gauche et la poser sur
le ventre de la personne devant soi. Petit à petit, ouvrir les yeux et regarder autour de soi, la chaîne
formée. Prendre contact visuellement avec la personne que l’on touchait.
B/ Le Pantin au centre d’un cercle
Exercice de confiance en soi, de lâcher prise.
En groupe (de 4 ou 5 personnes), se mettre en cercle, une personne au centre. La personne au milieu est
bien plantée sur ses pieds, yeux fermés. Elle se laisse balancer entre les bras des uns et des autres. Petit
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à petit, augmenter l’ampleur du balancier, exercer des balancements d’avant en arrière et de gauche à
droite. Intervertir les rôles. L’exercice se fait en silence.
 Avec les élèves, il est bon de placer 4 élèves dans l’espace, de leur demander de fermer les
yeux, et ensuite vient se former le cercle des autres élèves autour ; ainsi l’élève balancé ne sait
pas par qui il est balancé.
 Quand on forme le cercle, on a la responsabilité de l’autre. Cet exercice s’appuie sur un esprit de
groupe, de solidarité.
C/ Qui-vive solidaire
Marcher dans l’espace, d’un pas vif en silence. Se souvenir des exercices de la veille sur la position de
corps et de regard dans l’espace. Avoir un regard périphérique. Dans sa tête, se choisir un numéro entre
1 et 10. Quand l’animatrice dit un numéro, ceux concernés par le numéro doivent s’évanouir, assez
lentement, en criant « Aaaaah ! ». Les autres autour font en sorte que la personne qui tombe n’arrive
jamais au sol. Après quelques numéros, l’animatrice a la possibilité de nommer plusieurs numéros à la
fois.
 Ces exercices d’échauffement préparent le travail de groupe : écoute de l’autre et attention portée à
l’autre par la respiration et l’engagement du corps, sentiment d’appartenance au groupe par l’écoute et
l’attention que les autres portent sur soi. Ces exercices introduisent aussi quelques grands thèmes
véhiculés dans le spectacle.
2. Dans l’univers d’Illumination(s)
A/ Vocabulaire thématique
Constituer 5 groupes. Tirer 2 papiers. A partir de ces 2 mots il faudra construire une image, dans la
connotation / dénotation, construire aussi une image à partir du mot « illuminations ». Prendre quelques
minutes d’échanges.
Avec une contrainte pour chaque groupe :
-
Une image fixe
Une image mobile
Utilisation du grommelo (= langue imaginaire, inintelligible)
Garder un point de contact
Un accessoire
 C’est un exercice compliqué, car on est dans la définition, la représentation et la connotation ; il est
facile de tomber dans certains clichés.
er
1 groupe : guerre d’Algérie et identité – grommelo
e
2 groupe : bidonville et nationalité – image fixe
43
e
3 groupe : mémoire et transmission – image mobile
e
4 groupe : art engagé et décolonisation – garder un point de contact
e
5 groupe : sans papier et discrimination – accessoire
 Autres mots possibles : décolonisation, guerre d’Algérie, chômage, demandeur d’asile, origines,
banlieue, bidonville, stéréotypes, réfugié, nationalité…Tous ces mots apparaissent dans le dossier de
présentation du spectacle.
 Autre exercice possible pour décliner le concept : tout le monde se met en ligne, et au « top », se
retourner, chacun propose son image du mot.
Cet exercice permet d’entrer dans le vif du sujet du spectacle en convoquant les connaissances et les
représentations sur le thème de l’immigration et la période de la Guerre d’Algérie.
 Voir le site du Musée de l’Histoire de l’Immigration : http://www.histoire-immigration.fr
B/ Histoire d’identification : derrière le masque
Un premier groupe de 7 personnes se place sur le plateau, en ligne, de dos. En position neutre. Puis,
quand l’animatrice le demande, se retourner. Petit à petit, le regard vers le secret (de face, au lointain)
des comédiens va se colorer.
Consigne : regarder le monde avec méfiance. Que se passe-t-il à l’intérieur de soi pour pouvoir nourrir ce
regard ? Quelles idées nourrissent ce regard ? Aider ce regard avec le reste du visage : la position du
visage, les mâchoires, la position de la tête. Penser aux épaules, aux coudes, aux bras complets avec les
mains, les poings. Penser à son ventre : la méfiance s’y loge aussi. Dans la poitrine. Dans le bassin.
Penser à son ancrage dans le sol avec les genoux, la position des pieds. La respiration.
Deuxième groupe : une fois retourné, installer un regard posé sur le monde, qui va évoluer.
Consigne : regarder le monde avec défi. Défier le secret. Pour cela, s’aider d’idées, se raconter une
histoire, ou se rappeler quelque chose. Habiter son regard. Impliquer tout le visage, la tête, le menton, le
front, les mâchoires, le cou. Votre cou porte-t-il le défi ? Les épaules ? Puis la poitrine, avec le cœur.
Penser à son ventre, et à l’ancrage dans le sol avec les hanches, les genoux. Les bras sont prêts.
Evolution de la consigne : petit à petit, son défi au monde s’amoindrit, et tranquillement entre dans l’esprit
un souvenir plaisant, attendrissant , qui va faire relâcher la tension par une détente progressive du corps.
Sourire. Il n’est plus besoin de défier le monde.
Troisième groupe : commencer par le regard au secret : se retourner. Consigne : regarder le monde avec
haine. Penser à sa bouche. Rester dans la sincérité, avec la respiration, les épaules, les coudes, qui
peuvent être pointus. Le ventre, les genoux (qui pourraient cogner peut-être). Se nourrir de choses
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détestables auxquelles chacun peut penser. L’image de soi est comme un écran de cinéma où on y fait
passer la haine.
Evolution de la consigne : petit à petit la haine va diminuer. Penser alors à quelque chose de vraiment
drôle, qui va détendre. Relâcher les tensions. Puis rentrer dans le rire mais sans proférer un seul son, le
rire sonore reste dans la tête mais il se montre par tout le corps.
 Pour nourrir les clichés, qui vont tomber, on peut avoir recours à des masques : de défi, de haine,
de méfiance. Mais derrière ces masques il existe autre chose, qu’il est intéressant et nécessaire
de chercher et de développer.
: Il est possible de voir des extraits de la captation du spectacle Illumination(s), dans sa création à
Avignon, avec l’installation vidéo réalisée par Nicolas Clauss. Cette installation ne sera pas visible en
tournée à Nantes.
C/ Banlieues et cités
Se mettre debout, en cercle, tous ensemble. Mise en voix des noms de banlieues.
Chacun, donne un nom de banlieue ou de cité qu’il connaît, et explique ce que cela évoque pour lui, son
expérience, ce qu’on en pense, comment il en a entendu parler.
Exemples donnés par les enseignants :
-
-
Quartier Bagatelle, à Toulouse. A côté de la fac, des émeutes, une tension.
Bellevue, pendant les vacances.
Ménimur, à Vannes, c’est tout petit autour du centre, et on se disait « c’est peut-être dangereux ».
Mais non.
La cité Monplaisir à Angers, où j’ai enseigné ma première année en stage.
Malakoff, à Nantes, le collège Georges De La Tour, avec le cliché / réalité des pneus troués dans
la cour.
Bellevue, car j’ai habité à Chantenay, juste à côté. Les quartiers sont très hermétiques.
Une banlieue à Lyon, avec une maison communiste des années 50.
« Tu ne recommences pas, je vais te déchirer, je vais t’éclater ». Une mère à son enfant, dans un
parc, près d’un bassin.
C’est quoi la baguette magique du 93 ?
La rue de la Convention, à Nantes, dans la grande tour HLM : une odeur de shit, d’urine et de
soupe au choux dans l’ascenseur.
Le quartier Maurepas à Rennes. Mes grands-parents pieds noirs étaient parqués dans des
grandes tours du XVe. Souvenirs d’odeurs pas agréables mais qui ne supplantaient pas les
pâtisseries de la grand-mère.
10 ans passés en collège de banlieue, les années les plus dures, mais certainement les plus
belles de ma carrière.
Malakoff à Nantes ; j’ai habité à côté. Souvenir d’un retour, le soir, avec des jets de pierre sur la
voiture ; c’est le seul mauvais souvenir du quartier.
e
Barbes / Château-Rouge, Paris 18 . Sur un trottoir du quartier rouge, je croisais un dealer de
crack. Et il y avait couscous gratuit le mercredi !
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-
Chêne des anglais, à Nantes. Le meilleur ami de ma fille habite dans cette cité. J’y suis allée, et
j’ai eu l’impression d’être sur une autre planète. Je me sentais tellement vue. Je ne me sentais
pas chez moi. Mais j’avais quand même honte de mon malaise. »
 Beaucoup d’humanité se dégage de ces témoignages.
D/ Mise en voix
Distribution d’une liste qui figure dans Illumination(s), et projetée en fond d’écran pendant le spectacle. Ce
sont des noms de banlieues ou de cités.
Moulin Roux – Les Darcins – La Goutte d’or – Porte de Clichy – Les Chartreux – Le Tricot – La Vigne
Blanche – La Conte – Saint Jacques – Saint-Charles –Port Charneil – Saint Jean – Saint Pierre – Les 20
Arpents – Les Pyramides – Les Minguettes – Beisson – le Village - La Zup 92 – Fauconnière – L’Epine –
Le Pont des Chèvres – Point-du-Jour – La Cité tapie – Le Désert – Corsy – Beauval – La Cité des Brebis
– Les Epinettes – Les 4000 – L’Enclos – La Cité 212 – La Grande Pature – Le Moulin des Loups –
Trévoix – Les Sénardes – Jas de Bouffan –Le Roc – La Cité Maroc –La Cité d’Or – Vouldy – Maugout –
Jules-Guesde – Champs de la Nation – Le Val Fourré – Les Tarterets – Reyssouze – Le Nouveau Romilly
– Chantereigne Montvilliers
Avant la mise en voix par groupes, faire une lecture à haute voix pour toute la classe : chaque élève prend
en charge un nom.
Puis, constitution de 3 groupes. Chaque groupe doit préparer une mise en voix d’une partie de la liste. Il
est possible de faire une lecture chorale, de chantonner, d’y mettre des rythmes différents, des canons…
Penser aux mises en espaces.
 Cet exercice permet un très beau travail de chœur, et permet de réinvestir d’autres exercices vus
pendant le stage.
3. Les valises
Consigne : Travail de chœur,
En groupe, élaborer un travail de chœur, une gestuelle chorégraphiée, avec les valises. Faire un passage
de relai de coryphées. Le coryphée est devant, il propose et le chœur suit le geste et le mouvement.
Utiliser les valises, les porter de diverses manières, les secouer, les ouvrir, les faire rouler, explorer toutes
les possibilités…choisir des mouvements, des regroupements, des rythmiques.
A partir d’extraits du texte de Madani « Je me souviens », chaque groupe va en proposer une lecture en
chœur.
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Le coryphée change à chaque « je me souviens »
Madani raconte l’histoire d’un peuple déchiré qui, par le déracinement, devient communauté, et qui, par la
difficulté de l’intégration, perd son identité. A l’échelle de l’individu ou à celle du groupe, Madani met en
scène le questionnement sur le qui suis-je/qui sommes-nous ? dans un destin commun. Ce
questionnement se retrouve dans la plupart de ces autres pièces avec des cadres narratifs très différents.
Improvisations proposées par les enseignants pendant le stage :
Les mots en gras sont ceux dits en chœur pendant l’improvisation.
Groupe 1 :
Je me souviens. Je me souviens. Je dis souvent à mes enfants, vous n’êtes pas d’ici. / Je me souviens.
Je me souviens. Mes enfants me répondent avec la langue de la France. / Je me souviens. Je me
souviens. Je ne dors plus à cause des enfants perdus. / Je me souviens. Je me souviens. Mes cheveux
sont devenus blancs. / Je me souviens. Je me souviens. J’ouvre la fenêtre et je crie. / Je me souviens.
Je me souviens. Je suis fatigué.
Groupe 2 :
Je me souviens. Je me souviens. Vous les arabes et les noirs, j’en ai marre de vous. / Je me souviens.
Je me souviens. Je respire, mal. / Je me souviens. Je me souviens. Je n’arrive plus à dormir à cause
des enfants perdus. / Je me souviens. Je me souviens. Mon fils Lakhdar, il ne travaille pas. / Je me
souviens. Je me souviens. Mes cheveux sont devenus blancs. / Je me souviens. Je me souviens. Mes
enfants me répondent avec la langue de la France. / Je me souviens. Je me souviens. J’ouvre la
fenêtre, et je crie. / Aaaaaah !
Groupe 3 :
Je me souviens. Je me souviens. Je ne vais plus au cinéma. / Je me souviens. Je me souviens. Je me
souviens. Je me souviens. / Je rembourse mes dettes. / Je me souviens. Je me souviens. A la fin du
mois, il ne reste presque rien. / Je me souviennnns, la la la laaa ! / Je me souviens. Je me souviens.
Je me souviens, je ne vais jamais au restaurant. / Je me souviens. Je me souviens. Je baisse toujours la
tête. / Pfffouuuu ! / Je me souviens. Je me souviens. Je suis invisible.
 Le choix de la phrase pouvait vraiment être fait en association avec les gestes, ou complètement
déconnecté.
 Il y avait des images très justes, qui auraient besoin d’être retravaillées. Mais collectivement les
choses se créent vite.
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 De la difficulté à former un chœur tout un restant individuellement fort. Chaque individu dans le
chœur doit avoir son existence propre, collectivement des choses intéressantes se créent.
 L’adresse face public était très intéressante. Ce passage, « Je me souviens », dans le spectacle,
est extrêmement long ; il faut savoir le soutenir !
 Avec les élèves, c’est très bien de travailler l’adresse et le chœur. On peut également travailler
d’autres extraits du texte de Madani.
 C’est intéressant dans le travail avec les élèves de partir des représentations des jeunes dans les
banlieues ; de tous nos aprioris.
Commentaire des enseignants : c’était extrêmement difficile de se mettre d’accord en groupe. Aussi, la
place du coryphée n’était pas claire.
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AUTRES PISTES ET PROLONGEMENTS
Avec Florence Beylich et Catherine Le Moullec
 Sur l’analyse de spectacles, il y a plein de fiches disponibles sur les différents sites (DAAC, Grand T)
+ Voir la fiche transmise par Catherine Le Moullec le jour du stage, et adressée plus spécifiquement aux
lycéens.
 Voir avec les élèves la vidéo vue ensemble : le travail du plasticien Nicolas Crauss qui a accompagné
le spectacle Illumination(s) à Avignon. Tout le spectacle s’appuie sur la projection en gros plan de ces
visages.
 Consulter le site du Musée de l’Histoire de l’Immigration : www.histoire-immigration.fr. Cliquer sur :
-
Histoire de l’immigration  Le film : vous y trouverez des vidéos classées selon les périodes.
Histoires singulières : vous y trouverez des portraits vidéos
 Ré-exploiter l’exposition Mémoires de nantais ; le questionnaire figure dans le CR en annexe ;
Nantais venus d’ailleurs.
Cf. annexe 9
Prolongement de lecture CF Bibliographie annexe N°17 Textes de théâtre autour de la guerre d’Algérie et
de l’immigration maghrébine.
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PÔLE PUBLIC ET MÉDIATION
CONTACTS :
Manon Albert
02 28 24 28 08
[email protected]
Florence DANVEAU
02 28 24 28 16
[email protected]
LE GRAND T
BP 30111
44001 Nantes Cedex 01
Tél 02 28 24 28 24
Fax 02 28 24 28 38
De nombreuses pistes ou ressources
pédagogiques sont à votre disposition sur le
site du Grand T à la rubrique « Pour les
enseignants ».
Rendez-vous sur :
50
http://www.leGrandT.fr/ressources/pistes
-daccompagnement
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