Jour de Noël 2016 — Dieu est l’Inconnu qui se fait connaître Après l’exultation, la joie infinie de cette Nuit, après avoir chanté avec les anges : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux ! », nous sommes en ce matin – moins nombreux qu’hier soir… – devant la crèche. Désormais, le Fils de Dieu est là, parmi nous, et nous Le contemplons ; comme nous imaginons bien que Marie et Joseph ont dû Le contempler, et prendre petit à petit la mesure de cet événement incroyable. Le matin de Noël est le temps de la prière, de l’adoration et de la méditation ; c’est pourquoi l’Église nous propose un passage de l’Évangile, le « prologue » de saint Jean, qui est en même temps très méditatif, et (il faut bien le dire) un peu difficile à comprendre ! La naissance d’un enfant à Bethléem est une chose toute simple, et nous ne voyons pas très bien la signification de toutes ces considérations sur le « Verbe » par lequel « tout est venu à l’existence »… Saint Jean, l’auteur de cet Évangile, est le plus contemplatif des Évangélistes : il nous faut donc écouter ce qu’il dit, pour entrer nous aussi dans la contemplation de Dieu. Qui est ce « Verbe » de Dieu, celui qui s’est fait chair ? Le Verbe, dans la philosophie grecque, c’est le « Logos », la Parole. Mais c’est en même temps bien plus qu’une simple parole (composée de mots mis à la suite les uns des autres) : c’est aussi la pensée, l’intelligence. Les Anciens croyaient qu’il y avait une intelligence dans le monde, une cohérence, une logique qui faisait que tout était compréhensible. Si le soleil se lève tous les matins à peu près au même endroit, s’il fait froid l’hiver et chaud l’été, si les animaux savent où trouver leur nourriture, c’est qu’il y a une intelligence qui donne un ordre à ce monde. C’est cela, le Verbe : ce qui fait que les choses ont un sens, et que nous pouvons comprendre leur signification. Nous chrétiens, nous croyons en Dieu ; nous croyons que Dieu nous a créés, qu’Il a créé ce monde avec sagesse et intelligence. Et nous croyons aussi que la Sagesse infinie de Dieu n’est pas un mystère incompréhensible : « le Verbe s’est fait chair, Il a habité parmi nous ». Ce que nous voyons, l’ordre admirable du monde, la beauté de la Création (que le Pape François, à la suite de saint François d’Assise, nous invite à contempler), tout cela a un sens que nous pouvons comprendre. Nous ne sommes pas dans un monde livré aux forces du mal, un monde hasardeux et terrifiant peuplé de démons ; mais dans un monde ordonné par Dieu. Et même, un monde conduit par l’Amour de Dieu : Noël, c’est l’Amour infini d’un Dieu qui a voulu se faire homme au milieu de nous. Notre foi nous dit donc que tout ce que nous sommes, tout ce qui nous entoure, est le fruit de l’Amour de Dieu : nous sommes créés par Amour, et chacun de nous personnellement est aimé de Dieu depuis le premier jour. Voilà donc ce que vient nous révéler la naissance de Jésus : Il vient habiter dans une Création qu’Il a faite par Amour. C’est pour cela, je crois, que devant la Crèche nous ressentons tant de joie : parce que nous saisissons que c’est là, près de Jésus, que se trouvent toutes les réponses à nos questions. Près de Lui nous recevons l’Amour dont nous avons besoin ; près de Lui nous savons où nous diriger, comment conduire notre vie ; près de Lui nous comprenons qui est Dieu. Jésus est la Parole de Dieu ; Il nous dit non seulement qui nous sommes, mais qui Il est. Dieu Se dit à travers son Fils. Nous avons tous des souvenirs de grands-parents (ou d’arrièregrands-parents) qui nous racontaient des « histoires des temps anciens »… et nous sentions bien que ce n’étaient pas simplement des histoires, mais aussi des portraits : chacun dit un peu qui il est dans ces histoires. Dieu, Lui aussi, ne veut pas simplement nous révéler des choses, mais Il veut nous dire Qui Il est. Sa Parole, sa Sagesse, nous sont révélées par Jésus. Comme Il le dira Lui-même à l’Apôtre saint Philippe, « qui m’a vu, a vu le Père » (Jn 14,9). Nous l’avons aussi entendu dans la deuxième lecture (Lettre aux Hébreux) : Dieu a parlé autrefois par les prophètes, Il a révélé des choses importantes, mais Il ne s’était pas révélé Lui-même. Avec Jésus, l’immense nouveauté c’est que Dieu nous révèle Qui Il est : le Dieu Père, le Dieu Trinité, le Dieu Amour. Et comme le dit le Concile Vatican II (Dei Verbum 4), « aucune nouvelle révélation n’est à attendre » : Dieu nous a désormais tout donné, Il ne peut pas aller plus loin dans son Amour ! Dieu est infini, Dieu est inconnu… mais Dieu se fait connaître. C’est cela la joie insurpassable de Noël : connaître Celui qui nous crée et ne cesse de nous conduire par Amour. Le monde entier est transformé par la présence du Fils de Dieu : Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’Il aime !