« Le Christianisme comme style ! » Une manière de faire de la théologie en postmodernité de Christoph THEOBALD Le Père André Ruiz vos propose la suite de ses notes personnelles sur la lecture de cet ouvrage - Février 2014 - Christoph THEOBALD Les deux tomes de Christophe THEOBALD, le « Christianisme comme style – une manière de faire de la théologie en post-modernnité », présentent un double avantage pour les acteurs pastoraux, en ce moment où l’effacement du Christianisme se fait davantage ressentir. Le premier tome, qui avait pour objet d’analyser des diverses causes d’un repliement du Catholicisme, démontre aussitôt comment le Concile Vatican II a su remédier aux raisons internes, alors que l’agnosticisme était déjà présent dans la société occidentale et notamment européenne. Le second tome démontre comment la Mondialisation est touchée par la rationalité moderniste, l’économie néolibérale, l’invasion médiatique et le renversement de comportements éthiques. Mais, l’auteur qui est un Père Jésuite décline toutes les possibilités que le Catholicisme possède déjà comme fruits des 50 dernières années de vie Ecclésiale dans son Universalité. Ces possibilités sont approchées dans cet article. Nous avons seulement à les vivre ... aucun doute que la MISSION FRATERNITE de notre diocèse nous sera un précieux adjuvant, tant elle va dans le sens de fraternité des deux ouvrages du Père Théobald, ... FACE AUX GRANDS PROBLEMES DE L’OCCIDENT, DE L’EUROPE, ET DE LA MONDIALISATION LA FORCE DU MESSIANISME CHRETIEN en référence à l'ouvrage de C. THEOBALD : Le Christianisme comme style Tome 2 1 - Aux pièges de l’AGNOSTICISME L’agnosticisme étend son action, dont les effets souvent méconnus des populations, se concrétisent en contexte occidental comme moyen d’effacement du Christianisme, mais aussi dans les enjeux de la mondialisation. En Occident Le pluralisme religieux, fait apparaitre avec une acuité sans précédent, l’indissociable lien entre la foi et un certain type de présence dans l’histoire, et, du même coup, le caractère exposé de notre intelligence de la Foi et de notre action dans la société. De son côté la critique de la Religion a rendu possible – pour la première fois dans l’histoire de l’humanité- l’attitude athée, voire agnostique qui induit une totale indifférence en matière de Religion, et également des recompositions religieuses multiples avec la question lancinante : comment vivre ensemble sur un espace aux couleurs si bigarrées et menacés par des violences sans nom ? Est-ce la fin de la Religion, se sont écriés certains ? La première fin de la Religion fut ce que l’on appelle la sécularisation. Par-là est désigné l’évènement sans précédent qui marque le début de la modernité occidentale et qui prend au sérieux le fait que dans la tradition judéo-chrétienne, Dieu et sa création ne font pas nombre ; et pour cause, ces deux réalités sont incomparables et hors du champ et des possibilités de la rationalité agnostique. D’où face à la rationalité moderne, le point à retenir est celui-ci : Dieu ne révèle rien de ce que nous pouvons ou nous pourrons un jour savoir par nous-mêmes ; Il se révèle Lui-même comme mystère absolument discret – « voix » pourrait-on dire, au sein même de l’éclosion de notre propre liberté de conscience. C’est la pointe de notre foi en Dieu, pointe qui résiste à toute réduction en une mythologie En Occident, l’effet majeur est l’effacement social du Christianisme, avec l’absence de fondement métaphysique, et l’ambigüité de l’actuel retour du religieux. Mais l’action de l’agnosticisme va plus loin. Ce sont les recompositions agnostiques à partir de données extraites du religieux. Les exemples les plus habituels et déjà connus sont par exemple : le Baptême Républicain – Les Parrains Républicains, les vacances désignées par les fêtes religieuses-clés se sont teintées de couleurs de saison : vacance d’automne, de printemps….Mais plus fondamental, la cohésion sociale et politique du tissu social de l’Occident. L’interprétation agnostique du lien social Quelle est la position agnostique de la philosophie politique contemporaine ? Le point essentiel est le suivant : la société conçue comme société d’hommes libres et égaux, idéalement une et homogène, est cependant incernable ; elle a perdu le leader fort dans lequel elle aurait pu s’incarner. Elle ne saurait plus se rapporter à elle-même avec tous ses éléments et se représenter comme un seul corps. Certains auteurs sont plus sensibles à la fragilité fondamentale du lien social, d’autres essayent d’identifier avec plus de précisions les menaces qui pèsent sur son « caractère énigmatique. Il se vit une triple réduction : - Le modèle stratégique qui fixe les règles de l’orientation vers le succès et le progrès. Les relations se transforment vite en rapport de forces et le politique en techniques de persuasion. - Réduction de la communication en processus d’intercompréhension, sans aucun élément stratégique. Risque de l’utopie progressiste ou de l’eschatologie de certaines déclarations socioreligieuses. - Une troisième mesure de neutraliser le lien social serait de donner finalement dans la communication en investissant un « imaginaire individualiste », religieux ou non. Les récriminations anthropologiques : L’homme d’aujourd’hui est plus marqué par l’angoisse que par la société permissive et hédoniste en matière de moeurs. Ici s’ajoute l’incertitude de nos sociétés – la mobilité sociale – la multi-appartenance des sujets – pressions exercées sur les consciences par la standardisation, les styles de vie – les comparaisons – la compétition Ainsi, la recherche « rationnelle et agnostique» d’un consensus social, en sa forme laïcisée, donne une conscience d’appartenance diffuse. Alain Touraine interprète ce état de chose comme « un changement principiel » dans la compréhension de la Démocratie, qui après les expériences douloureuses des 19°et 20° siècles ( deux guerres mondiales – le nazisme et la shoah – le marxisme et les goulags – la guerre civile espagnole), ne peut plus comprendre l’Etat comme l’expression souvent abusivement utilisée par une oligarchie, de la « souveraineté du Peuple », mais doit attirer l’attention sur la limitation par le droit, et notamment les droits de l’homme, de tout pouvoir étatique. Les caractéristiques du lien social Il fait l’objet d’un débat ininterrompu qui souhaite obtenir une vision commune tout comme un monothéisme peut le procurer et une dynamique polythéiste au service des diverses composantes du lien social et ce dans le cadre de la démocratie. Les analystes de la « sécularisation » insistent sur le caractère indéterminable du lien social actuel. Par ailleurs des travaux historico-politiques sur la « modernité » rejoignent maintenant une conjoncture européenne marquée par de profondes ruptures d’équilibre qui ne cessent de fragiliser le lien social, traversé plus que jamais par une dynamique supranationale et exposé en même temps à être confisqué par les nouvelles religions. L’homme contemporain attend pour sa foi des racines et un asile pour son existence ; or il trouve une exposition à de nouveaux fondamentalismes et phénomènes pseudo-spirituels pour combler un vide spirituel occasionné par la société rationnelle. D’où la répercussion sur la théologie qui se trouve devant un nouveau paradigme « comment peut- elle montrer la plausibilité et la pertinence de la foi trinitaire de l’Eglise dans une société démocratique soucieuse du respect de son auto-institution ? » Dans la mondialisation Le phénomène de la globalisation liée à la globalisation du néo-libéralisme occidental. La mondialisation progressive de tous les échanges de biens, d’idées et de valeurs engendre un tout autre état de conscience : globe immense mais fermé sur lui-même et soumis à la domination systématique de la civilisation technique et médiatique de l’Occident et à la violence du néo-libéralisme. Cette fermeture du « Ciel » aiguise et attise en effet la question lancinante pour tout individu : comment réussir ma vie. Mais très lentement un nouvel esprit semble travailler les humains : ils prennent conscience – plus solidairement – des sources de vie étonnantes cachées dans la matrice qu’est leur histoire et celle de la terre qui les porte. Ce travail souterrain atteint aussi les religions qui réagissent différemment, chacune étant affrontée à une métamorphose provoquée de proche en proche, par l’évènement désigné par la « fin de telle ou telle religion ». Cela amène, un certain nombre de chrétiens à corriger l’idée d’un Dieu créateur qui interviendrait, à tout moment et de l’extérieur dans son œuvre. Posture très nécessaire au moment de la MONDIALISATION : l’avenir du Globe dépend non seulement d’une justice mondiale, mais de figures humaines et de communautés capables de vivre selon la vérité de leur conscience et de s’exposer à la violence sans riposter aux attaques d’autrui. Autre aspect face à la mort : comprendre que sans la clôture de la vie, il y aurait un poids insupportable – l’on découvre aussi et grâce à la rencontre d’autrui que la démesure de sa propre unicité – celle qui lui faisait peur – est en quelque sorte « à sa mesure » : véritable guérison de sa tentation de se comparer et émergence d’une force de la conscience pour accomplir la Règle d’Or. La nouvelle théologie politique s’est explicitée avec Moltmann, comme théologie trinitaire à partir des traces ou des correspondances de Dieu dans le Monde. Mais cette approche ne présente pas une véritable prise en compte du statut agnostique. D’où la nécessité de références théologiques rénovées et ciblées sur les Causes de l’effacement du Christianisme. 2 - La Place de la sainteté est première et indispensable La tradition chrétienne peut en effet être concentrée en un seul point focal : « la sainteté comme mystère du monde. » Par une offrande unique, en effet, Jésus Christ a mené pour toujours à l’accomplissement ceux qui reçoivent de Lui la Sainteté » Hé 10/14 Jésus Christ le Saint de Dieu. La sainteté de certaines figures humaines du passé et du présent, celle de Jésus de Nazareth en premier lieu, semble susciter toujours beaucoup d’admiration souvent au-delà des frontières du christianisme institué, et constituer de ce fait l’ « argument » principal que nous pouvons évoquer en faveur de notre foi en Dieu. Pour cela nous y rencontrons les deux facettes inséparables de la sainteté : « en elles pensées, paroles et actions concordent absolument dans une sorte de simplicité de conscience « oui qui est oui » - « non qui est non » (Mt 5/37 - 2CO 1/17-20 – Jc 5/12) – et la Règle d’Or « tout ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites pour eux ! Voilà la Loi et les Prophètes » Mt 7/12 Cette Règle que l’on trouve dans d’autres confessions religieuses conduit la concordance du sujet avec lui-même, la simplicité de son cœur, et suspend son rayonnement à sa capacité de s’effacer au profit d’autrui. Que veut dire croire en Dieu ? Croire en Dieu signifie que celui qui pose cet acte se laisse atteindre, au cœur de sa propre existence, par ce que Dieu est en lui-même et qu’il se rend accessible en Jésus de Nazareth, grâce à son Esprit de Sainteté : le croyant en vit « dans l’Eglise » dont la raison d’être est de percevoir et de susciter cette sainteté au sein même des sociétés humaines ; ce qui laisse supposer qu’elle se trouve au bon endroit et reste « …. Située dans l’ouverture messianique de la création » Le mot Dieu reçoit pour ceux qui se risquent à Le nommer, une singulière signification inouïe. Une signification qui se forme dans et grâce à l’histoire, au croisement de l’épreuve du silence divin, de la présence de la sainteté dans notre monde et d’un indéracinable désir de bonheur pour chacun de nous et commun à tous. Dieu aurait-il tout livré, y compris Lui-même, sa propre Sainteté, pour que nous puissions grâce à son silence – accéder en nous et par nous-mêmes à la source de sa béatitude ? Pourquoi se référer à Lui, c’est en même temps comprendre de l’intérieur ce que la tradition désigne par le vocabulaire « TRINITE ». Le mystère de la paternité de Dieu Comment comprendre en effet la paternité de Dieu si nous ne recevons pas le monde et notre propre existence comme un don confié – ou une création à continuer– en acquiesçant avec toutes nos fibres au retrait du donateur, à sa discrétion ou à son silence, qui laisse ce qu’il a donné intégralement au bénéficiaire que nous sommes sans vouloir le contraindre à quoi que ce soit ? Dans ce cadre, il y a la possibilité pour l’être humain de vivre de sainteté. Le monde confié à tous et comportant tant d’inégalités et de violences ne peut être porté que par des saints : Jésus et ceux et celles qui, en deçà ou au- delà de nos frontières religieuses, peuvent un jour être reconnus tels selon les critères éthiques et théologaux concernant l’humanité fournis par nos Ecritures et vérifiés comme pertinents en telle situation historique. C’est là, la réalité théologique de la Trinité : le silence appartient au Père. La sainteté est celle du Fils unique et des siens dans notre histoire. La consolation qui rend possible cette sainteté communicative d’elle-même est l’œuvre de l’Esprit Saint. Quand Jésus sera reconnu comme le Saint par les siens, le livre de la sagesse deviendra en effet la matrice de toute future théologie trinitaire. Les lieux de l’expérience trinitaire Le premier lieu est précisément le « lien politique et social » qui fait tenir ensemble non sociétés. Ce lien est traversé et éprouvé plus que jamais par des dynamiques pluriculturelles et supranationales. Ce que le christianisme a su faire au 4° siècle, la société actuelle ne peut se rapporter à elle-même comme en seul corps à cause du pluralisme : le Christianisme est indispensable ! Ce grand récit multiforme de nos sociétés modernes constitue donc le premier lieu d’une expérience trinitaire en quelque sorte anonyme. Se représenter le lien qui constitue notre société, c’est éprouver le travail de l’Esprit. (Rm 8/22- 23 -26) : il y a un lien, une identité structurelle entre le caractère incernable et énigmatique du « lien de société » et la fonction relationnelle de l’Esprit. L’un et l’autre indiquent en effet ce qui tient mystérieusement dans et entre nos sociétés en dépit de l’existence de toutes les forces destructrices. Le deuxième lieu : c’est le déchiffrement que la société réalise et ses interrogations face à la mondialisation. Ce nouveau questionnement porte sur les critères entre ce qui conduit à la mort ou à la démolition de l’univers. L’Eglise ne peut imposer ses critères de jugement à l’ensemble de la société pluraliste, sous peine de se contredire. Mais bénéficiant de l’orientation du Concile Vatican II – elle se donne une figure messianique, ce qu’elle ne peut faire qu’en s’identifiant au Saint de Dieu, Jésus. Ce n’est donc pas la seule confession de la configuration trinitaire de Dieu, mais le travail spirituel qu’elle donne aux communautés d’accomplir au sein de la société : leur style de vie et de communication. Si l’aspiration à la Paix est commune au Judaïsme, au Christianisme et à l’Islam, voire à tous les êtres humains, les communautés chrétiennes s’en font les artisans par le biais d’une expérience singulière chez Jésus : le dessaisissement – « quand est-ce nous t’avons vu avoir faim…. » Mais attention, le mystère de la sainteté messianique a pour source la discrétion : c’est elle qui est la source de son rayonnement paradoxal. Il faut poser aujourd’hui la question de Dieu en terme de style de communication, d’allure évangélique ou encore de manière d’être en Eglise et dans la société. Or, cette forme de vie – l’éthos chrétien – se caractérise en effet par la tradition biblique qui signifie que cela s’appelle SAINTETE. Dire Dieu est alors une manière de désigner la sainteté comme mystère du monde et de l’histoire. Notre entrée à égalité- dans une relation de familiarité avec Dieu, telle que Jésus de Nazareth l’a risquée avec son Père resterait inconcevable ; or c’est cet accès surprenant et même excessif pour nos possibilités humaines que nous attribuons à l’ « Esprit de Sainteté ». Le mot Dieu reçoit alors pour ceux qui se risquent à Le nommer, une singulière signification inouïe. Une signification qui se forme dans et grâce à l’histoire, au croisement de l’épreuve du silence divin, de la présence de la sainteté dans notre monde et d’un indéracinable désir de bonheur pour chacun de nous et commun à tous. Dieu aurait-il tout livré, y compris Lui-même, sa propre Sainteté, pour que nous puissions grâce à son silence – accéder en nous et par nous-mêmes à la source de sa béatitude ? Réaliser dès lors pourquoi se référer à Lui, c’est en même temps comprendre de l’intérieur ce que la tradition désigne par le vocabulaire « TRINITE ». 3 - Le CHRIST, initiateur de la Foi qui l’amène à son accomplissement Lecture théologique d’Hébreux 11/1 à 12/2 L’Epitre aux Hébreux est le texte du N.T. qui a le plus réfléchi la forme propre de la Foi Chrétienne. Pour l’auteur, sa lecture a été décisive pour sa compréhension des enjeux christologiques, eschatologiques et ecclésiologiques d’une approche stylistique du mystère Chrétien L’épitre aux Hébreux dans la Théologie de la Foi selon St Thomas au Concile Vatican I L’on trouve dans la Somme la question décisive pour notre propos : Y a-t-il une bonne définition de la Foi en celle donnée par l’Apôtre Paul : « La Foi est la substance des réalités qu’on doit espérer, l’argument de ce qui n’est pas évident » ? On retrouve cette définition au Concile de Trente (1547) dans le décret sur « la Justification Chapitre III », avant de la retrouver dans la « Constitution Dei Filius » du Concile Vatican I ; elle va alors constituer la base scripturaire de la définition dogmatique de la Foi. Et ce, jusqu’au Concile Vatican II. Du texte à la théologie St Thomas distingue trois sorte de lettres pauliniennes : celles qui sont adressées à des Eglises – celles qui sont adressées à des personnes et enfin l’Epitre aux Hébreux « l’Excellence du Christ » car elle est l’objet premier de cette lettre. Pour mesurer la distance entre ce commentaire médiéval et la lecture des Modernes : « Le sommet est bien la représentation du sacerdoce du Christ, mais le fondement est le Peuple de Dieu en marche ». Quand on passe de sa lecture au traité de la Foi dans la Somme de St Thomas ( 2° paragraphe de la 2de partie) on trouve un autre système de référence., marqué avant tout par une rationalité argumentaire bien que le commentaire soit déjà parsemé de questions, d’objections et de solutions. Son idéal reste la définition aristotélicienne. L’on peut donc retenir que Saint Thomas ne se réfère pas dans la Somme aux « figures de la Foi » si nombreuses dans les chapitres 11 er 12 mais qu’il garde uniquement les versets pouvant entrer dans une définition aristotélicienne de la Foi. Celle-ci utilise les catégories de l’anthropologie aristotélicienne. Dans les deux autres textes retenus : Conciles de Trente et Vatican I, on passe de la définition théologique à la régulation dogmatique de la Foi Catholique dans un contexte polémique de débat avec l’hérésie. Mais au chapitre 12 de la lettre nous retrouvons enfin le lien de la foi entre les membres du Corps et leur Tête : le Christ. D’où l’exhortation à manifester la Foi par des œuvres…. On voit combien il est difficile d’aborder la lettre au Hébreux avec d’autres habitudes de pensée que celles de la théologie officielle du deuxième millénaire latin. La différence subtile avec la théologie paulinienne largement dominante n’a été perçue qu’au XX° siècle, où l’on s’est progressivement sensibilisé aux projets particuliers des auteurs du Nouveau Testament. L’expérience de Foi, visée par la lettre se situe de ce type d’oppositions : La découverte de l’unicité de l’existence humaine (nous n’avons qu’une seule vie et elle est absolument singulière) permet de comprendre l’extraordinaire capacité de la foi à affronter la crainte qui en résulte, à anticiper d’un seul coup le « une fois » de la mort et à recevoir ainsi Dieu et sa création dans une présence réciproque sans intermédiaire et un repos sans inquiétude. On pourrait dire aussi inversement que la foi de Jésus, son accomplissement, lui donne de saisir le véritable enjeu de la vie humaine, inscrit comme promesse dans la création depuis le début. La lettre aux Hébreux ne nie nullement que le péché, la manière de vivre l’épreuve ou d’anticiper la mort est une terrible réalité que la Foi aide à surmonter, elle qui va de pair avec la conversion. Aidé par la personne de Jésus et de son compagnonnage en ce moment initial, entièrement dominé par l’effacement du péché, il faut parcourir l’ensemble de la vie, de la sienne et de la nôtre, et mesurer tout son poids d’humanité, pour comprendre qui Il est et qui nous sommes. Or, la crainte du pélagianisme a fait que la théologie occidentale a eu souvent peur d’un arianisme caché, redoutant qu’une trop grande proximité entre l’humanité de Jésus et la nôtre puisse menacer sa divinité. 4 - Le Messianisme Chrétien L’Evangile amorce donc une tendance universaliste qui relativise la conception d’Israël et les critères d’appartenance des esséniens, des pharisiens et des hérodiens et annonce un nouveau vivre ensemble dans un Royaume aux dimensions mystérieuses de la création. Mais cet universalisme très spécifique, impensable sans référence à l’apocalyptique, reçoit surtout de celle- ci une coloration DRAMATIQUE. Peut-on en effet prendre au sérieux les résistances que rencontre la figuration historique du Royaume par le mouvement de Jésus, et les oppositions qui conduisent finalement à la mort de ces principaux protagonistes, sans s’interroger sur la qualité du lien qui permet aux humains de vivre ensemble ? On comprend que la violence qu’elle finit par susciter questionne le lien entre les hommes de tous les temps, anticipe la fin du monde et renvoie, du coup à son mystérieux commencements : Dieu serait-il celui qui est capable de régénérer le monde des hommes ? D’où l’importance, pour respecter la pluralité des groupes humains et religieux dans une société sécularisée qu’en insistant sur le caractère éthique de la figure et du message du Christ. Le style de vie messianique Il a ses caractéristiques propres : d’abord le développement de la Foi en Christ, à cause de nos sociétés libérales toujours tentées d’oublier les menaces qui continuent à peser sur le Lien Social actuel, en Occident comme dans la Mondialisation. Il s’agit donc d’une transformation personnelle d’une « mue d’identité » qui s’exprime par le passage à un style de vie messianique et à une manière de se situer dans la société globale. Il convient de préciser que chaque Evangéliste propose , une figure de Jésus et de sa manière de vivre, bien au-delà des repères habituels et particuliers du Judaïsme. Evident chez Marc 2/1-3 – 6 puis chez MTT (page 814) – la Règle d’Or…… Mais aussi peut se profiler la spécificité d’un style de vie qui n’est unique que dans la mesure où celui qui l’a inauguré s’efface pour devenir l’incognito de toute rencontre qui excède une réciprocité immédiate. Autonome dans son jugement, la conscience n’est pas seulement obligée par la règle morale de respecter la singularité de chaque sujet ; elle peut encore se laisser blesser par « l’appel » à un « plus » qui lui vient de l’énigmatique lien social entre tous les vivants. Légiférer sur ce surplus est impossible à cause de l’ « excès divin » engagé dans l’accomplissement de la Règle d’Or….et dans le contexte de nos sociétés rien ne garantit leurs survies sinon l’appel à une gratuité purement messianique. Ce style de vie messianique ouvre l « accès pratique au Christ » (Mt 25/37-46) : comme à la dimension eschatologique du récit de l’humanité et lire la fin dans le commencement et le commencement dans la fin. Et en même temps l’on fait sien le secret et l’incognito : le Royaume est préparé depuis la fondation du monde »Mt 13/35. Le messianisme chrétien, une manière de s’introduire dans le processus de la MONDIALISATION. Tout compte fait, le christianisme semble bien s’accorder avec la « mondialisation » Jésus et Paul ont introduit un principe d’universalisation dans l’histoire de l’humanité, le premier par sa manière d’annoncer en parole et en acte, la venue immédiate du Royaume de Dieu et le second en inscrivant toute l’histoire de l’humanité dans la tension typologique entre le premier et le dernier Adam ( I Cor. 15 : 45-47) « Lumen Gentium » écrit : « Ce Peuple messianique, bien qu’il ne comprenne pas encore effectivement l’universalité des hommes et qu’il garde souvent les apparences d’un petit troupeau, constitue cependant pour tout l’ensemble du genre humain le germe le plus fort d’unité, d’espérance et de salut ». C’est à l’Eglise, sacrement de salut, de surmonter cette tension entre les dimensions catholiques de la vérité qu’elle porte en elle et son expansion effectivement limitée. Or durant les années qui nous séparent de la fin du Concile, la mondialisation progressive de tous les échanges de biens, d’idées et valeurs s’est révélée redoutable puissance du relativisme. D’un côté l’ont fait ressortir sa difficulté à se dégager du «seul contexte de la Méditerranée » et l’on soupçonne l’universalisme chrétien d’être générateur de violences. Face à ces graves défis, l’Eglise romaine a réinvesti, depuis une vingtaine d’années, la conception juridique de la catholicité lui permettant de maintenir et même de renforcer l’homogénéité de son espace. § Assise en 1985 – les voyages apostoliques de Jean Paul II et de Benoit XVI. Mais, on analysera d’abord la conception juridique et symbolique de la foi catholique, telle qu’elle s’est imposée à l’Eglise du XX° siècle, en mettant en relief ses implications rationnelles et ses connivences avec la globalisation en cours. Mais honore- t-elle suffisamment la perspective prophétique et messianique du mystère chrétien au moment où nous devons discerner des bienfaits et des conséquences destructrices de la mondialisation ? L’un et le multiple : la Foi catholique La Foi Catholique contient une interprétation des Ecritures et une anthropologie de provenance thomiste. La catholicité de la foi s’exprime avant tout par la tentative de saisir les Ecritures comme totalité spirituelle qui englobe ciel et terre, commencement et fin de l’histoire, les comprenant dans une perspective ecclésiologique construite à partir des deutéro- pauliniennes, de l’Epitre aux Ephésiens en particulier.§ 1/3-14 – 1/15 – 3/21 avec une célèbre récapitulation dans le Christ. (les deux cercles ou univers et le Christ au- dessus). Celle- ci a été tentée dès le début du Christianisme et parallèlement à la Constitution du Canon par Saint Irénée. Elle reçoit aux temps modernes, une signification inédite ; il en est de même pour l’Apocalypse. C’est dans le cadre de cet imaginaire biblique qu’il faut comprendre la conception intégrante de la catholicité de la Foi, qui domine l’enseignement de l’ Eglise tout au long du 20° siècle et en particulier l’ambivalence entre une lecture apocalyptique de l’histoire qui souligne l’imminence d’une fin provoquée par « l’apostasie globale de toute une civilisation » et une version plus sapientielle qui compte sur des forces spirituelles immanentes au genre humain. Les chapitres de la Constitution Conciliaire « Lumen Gentirum » de Vatican II sont d’une toute autre sensibilité que celle de Pie X : (dernier jour – mal dans le monde…). Au chapitre 1°, L’Eglise tente de récapituler l’humanité entière avec tout ce qu’elle comporte de biens sous le Christ- Tête et l’Esprit St – sortie du Dieu Trinitaire – retour eschatologique (7 et 8)- l’Eglise portion de l’ humanité (2) dotée d’une structure ministérielle (3 et 4) dotée d’un dynamisme spirituel de sainteté – la catholicité du Peuple de Dieu dans la Constitution ( Gaudium et Spes)1/36 La catholicité et ses deux fondements Lumen Gentium semble reprendre une idée de Yves Congart qui décrit des deux fondements de la catholicité : le Christ et la sainteté du Peuple de Dieu. Le chapitre accentue la manière concrète de réaliser ce deuxième fondement -(rapport du croyant à une autre vie (surnaturelle) qui laisse ses traces historiques dans sa manière de gérer les rapports de sa foi à la culture.) La catholicité de la foi comme germe d’une vraie mondialisation Certes les effets pervers de la globalisation sont perçus et interprétés en termes de péché. Mais on ne perçoit aucune interrogation sur les images directrices de l’unité du globe ou sur la forme de l’universalisation, ni du côté des processus de mondialisation, ni du côté de la Catholicité de la Foi. C’est sur ce point que les choses ont changé notamment à cause la radicalisation du pluralisme culturel dans la « post modernité » l’investissement grandissant de l’Eglise Romaine dans une conception juridico-spatiale de la catholicité appliquée à tous les niveaux de la réalité. Plus d’un soupçonne l’universalisme catholique de générer en son propre ordre, un type analogue de violence : le principe d’une transformation (assomption- purification- et accompagnement des cultures) mis en oeuvre dans les relations de l’ Eglise aux cultures, religions ou propositions de sens, et dans la gestion de la pluralité des traditions en son sein, n’aura-t-il pas des effets destructeurs s’il s’appuie sur une rationalité juridico – doctrinale ( conséquences sur le concept de vérité). 5 - LE MESSIANISME UNIVERSALISTE DES CHRETIENS D’abord il convient de ne pas donner une unique importance aux lettres deutéro- pauliniennes mais aussi aux Evangiles. Et il est à se demander, et ce à partir de l’histoire de l’exégèse, si les Evangiles n’ont pas joué un rôle secondaire dans la construction du dogme chrétien. C’est récemment à partir du développement de leur forme narrative, qu’a commencé à s’ébranler le système conceptuel de la dogmatique en tant qu’armature intellectuelle du corps ecclésial. Ce qui apparait à la lecture des récits de forme narrative, est que la Foi Chrétienne s’introduit par l’histoire absolument singulière de sujets ou de groupes croyants. Certes ce constat n’exclut ni l’aspect corporel ni une certaine forme institutionnelle du rassemblement ecclésial, mais où se trouve le principe de l’universalisme évangélique. On peut certainement soutenir que le centre du Nouveau Testament – que l’on désigne comme son « mystérium » n’est rien d’autre que l’unique Dieu communiquant à la multitude la sainteté qui le constitue lui-même. Or ce principe théologal fonde un type d’universalisme concret, capable d’affronter les appréhensions de ceux qui soupçonnent le christianisme de produire de la violence, sans pour autant renoncer avec le pluralisme radical, à la question de la vérité. Le royaume de l’incomparable. Pourquoi incomparable ? Cai il s’agit d’une plénitude divine, surabondante et démesurée, offerte à tous et à un chacun selon sa mesure. C’est précisément le Royaume de l’incomparable qui résiste aux définitions. Seule une multiplication de récits en rend compte convenablement. La forme messianique du lien C’est le messianisme de Jésus qui se profile ici, à savoir sa manière unique de prendre sur soi, la violence d’autrui et de se laisser transformer progressivement en don pour la multitude : tout son itinéraire est marqué par cette force d’effacement qui le conduit loin dans certaines situations de violence (la Croix). De l’autre côté, c’est la forme du lien entre disciples de Jésus qui se précise ici. La règle de foi qui émerge dans la littérature épistolaire, se situe exactement à cet endroit. Elle notifie l’invitation adressée par la Foi aux disciples d’aller chacun au bout de son itinéraire d’accomplissement. L’unique engendre une multitude d’uniques La réception de l’unique Christ ne consista pas à établir un rapport passif à un temps d’origine désormais, inaccessible ; « mais en ces temps qui sont les derniers » Hb 1/2 elle fait participer les apôtres activement à l’évènement messianique lui-même selon une synchronie indépassable et dans un compagnonnage à égalité. L’unique Christ et Seigneur n’est l’Unique que s’il engage une multitude d’uniques. C’est au croisement de ces deux vecteurs que l’engendrement messianique du christ et des siens trouve son sens ultime, donnant aux écritures un « centre » une trajectoire passant des psaumes 2/7-9 et 1O9/11O , des chants du Serviteur , des évangiles (Luc 3/22 et AA 13/33…et l’épitre aux H.1/3,5,-5/5 – la règle d’interprétation de Nicée : engendré – non pas créé. Rationalité et Violence A l’âge post-métaphysique où nous sommes, la controverse sur les rationalités et la violence suppose déjà un « théologique » bien établi. Le concept de vérité avec la globalisation entraîne une série d’interprétations. « Dignitatis humanae » ( décret de Vatican II) la définit comme « la vérité ne s’impose que par la force de la vérité qui pénètre l’esprit avec autant de douceur que de puissance » L’universalisme messianique est d’abord et avant tout d’ordre pratique ou stylistique : au sein d’une humanité tendue entre la violence historique et l’utopique paix entre tous,, elle tente d’intégrer les expériences limites de l’intercommunication et de l’argumentation, comme la souffrance des victimes de l’ exclusion et de se laisser affecté par autrui – même par l’ennemi.- ou encore l’expérience humaine de l’inadéquation de l’être humain. Elle se situe dans la mondialisation en y inscrivant son expérience de conversion. On peut traduire la forme messianique de l’universalisme chrétien en terme d’authenticité, de justice et de vérité. Finalement l’universalisme chrétien est d’ordre stylistique : il concerne la forme la cohérence divine de nos manières de croire et de faire. Au fond, à la suite de Bultmann, on peut dégager trois rhèmes qui fondent sa mystérieuse unicité de son être, de ses paroles et de ses actes : l’éthique du Maitre de la Sagesse - -l’annonce eschatologique du Royaume – par le prophète Jésus- et sa vision de la sainteté de Dieu. Ethique : une façon de se situer aux frontières du lien qui tient ensemble les hommes et les sociétés. Ce que la tradition biblique dit de l’unicité incomparables des sujets et des cultures, de relation d’échanges entre eux et, la limite du légiférable, est d’un grand prix aujourd’hui quand il s’agit de défendre des sociétés ouvertes contre la tendance à la fermeture et de proposer en même temps des voies d’humanisation accordée à la sainteté d’un Dieu qui suscité la créativité des sujets, groupes et cultures. Eschatologique : L’universalisme chrétien implique une manière d’éviter l’ idolatrie de l’humanité actuelle, les oubliés de l’histoire, ceux qui sont déjà morts et ceux qui vont naître – aucun discours prescriptif ne semble pas pouvoir nous obliger à économiser nos énormes ressources pourtant limitées, à renoncer à certains possibles pour nous obliger à économiser nos propres ressources pour les générations futures. Lutter contre le désenchantement de nos sociétés Le mystère de la Catholicité et de l’unité du monde qui se fonde sur une réconciliation, impossible et pourtant nécessaire, des cultures et consciences absolument singulières et infiniment diverses. Unité et Catholicité, attributs de Dieu avant d’être des notes de l’Eglise. 6 - UNITE DE DIEU – UNITÉ DU MONDE Repenser « l’unité » dans le contexte de la mondialisation Notre Foi en l’Incarnation du Verbe, insère Dieu lui-même dans l’histoire de l’humanité et de l’univers. Confesser l’unité de Dieu dans cette perspective, aura des conséquences sur notre manière de comprendre et d’envisager l’unité du genre humain et du monde. En revanche l’unité divine concerne d’abord la vie interne de Dieu et désigne sa simplicité. Et la foi peut en effet démontrer que l’unicité divine, certes clairement affirmée par le Nouveau Testament, n’occasionne aucun jugement d’exclusivité. L’affirmation de son unité comme de sa singularité incommunicable, contient aussi que Dieu est en relation avec autrui quel qui soit. Mais reconnaissons aussitôt les erreurs du christianisme en matière de relation à autrui : séparation avec le judaïsme – les innombrables déchirures en son sein. … La mondialisation et la prise de conscience du pluralisme religieux- serait alors une nouvelle invitation à entrer dans une telle démarche et à en mesurer les enjeux pratiques et théoriques. Le discours de l’unification du monde. Le Symbole de Nicée Constantinople proclame l’Unité de Dieu, le Père et du Fils consubstantiel et donne à l’Eglise cette même unité, sainte et apostolique : elle se donne donc des attributs divins qui la situent à la fois dans le dessein de Dieu et par rapport au Monde. L’Eglise se dit Catholique, non seulement par ce qu’elle est partout ou presque mais parce que, de droit, la vérité dont elle est dépositaire concerne tous les êtres humains, en raison de son enracinement dans le dessein de Dieu et de ce que la raison nous apprend de la nature humaine. Elle peut être minoritaire, l’Eglise tire toujours son unité de la Trinité Sainte Mais même révisé par Vatican II, le discours de l’Eglise peut manquer de crédibilité. Qu’en est-il des moyens historiques que l’Eglise se soit donnée pour réaliser son programme. Il semble que le catholicisme occidental fut le ferment principal de la mondialisation par le latin. Une conversion à dimensions historiques Le Concile Vatican II présente une envergure historique. Il permet d’envisager un avenir au sein d’un monde en voie de globalisation, sans faire mémoire de ce qu’il est déjà engendré. Son universalisme a été en effet le moteur d’une globalisation avant la lettre, qui s’est progressivement éloignée de sa source face à une globalisation technique, économique et médiatique émanant de l’Occident rationaliste. D’où la nécessité de s’interroger sur la propre forme messianique et sur la forme d’unité que l’Eglise envisageait pour le monde Le principe théologique de relecture de l’histoire est donné par la conversion continuelle par l’Evangile du Nazaréen dans la destinée du monde. Il lui faut donc non seulement faire place aux mouvements de dissidence et de déchirure au sein de la tradition chrétienne, mais encore à la manière de l’Eglise de se tourner vers les autres religions et forces du globe. L’histoire nous apprend qu’elle a sans cesse oscillé entre exclusion et respect et qu’elle a donc déjà commencé et qu’elle est encore soumise à un long travail de conversion De l’unicité à l’unité : le mystère de la sainteté de Dieu Pour expliciter le travail de conversion, il convient de revenir au vocabulaire de l’Unité dans le Symbole de Nicée - Constantinople : unité, sainteté, catholicité, apostolicité. L’on peut remarquer que seul est commun à Dieu et à l’Eglise, la Sainteté. Or la Sainteté a une vertu spécifique : elle permet la poursuite de l’Unité de l’Eglise et devenir aussi Eglise servante et pauvre. Le vocabulaire autour de l’ « unité » La victoire sur l’Unicité : le grec « monos » (unique-seul) contient solitude et mort comme le grain de blé. La victoire sur l’ambivalence anthropologique rapportée par le don de soi, est clarifiée par la mort librement acceptée – c’est le mot « monogenèse » qui signifie la sainteté au profit de tous. § Jean 6/68 – 17/17. Le soubassement éthique de cette sainteté risque de disparaitre dans une lecture rituelle ou religieuse, or il fonde le lien entre le Saint de Dieu et ceux et celles qui, à sa demande, sont rendus saints. Une sainteté créatrice d’unicité : unité se dit de « nous », de « vous », d’ « eux » ayant le statut d’unique. (Jean 17/12-19 – et 17/21-23) : c’est-à-dire l’immanence réciproque : d’abord celle du Père et du Fils (toi en moi et moi en toi) – ensuite celle du Fils dans ses disciples. Il convient de faire attention à la signification du mot « comme » qui articule les dimensions trinitaire et ecclésiale dans l’unité. Cette immanence mutuelle suppose l’affirmation de l’Unicité du Père et du Fils, et, en même temps pour Lui : la traversée de la tentation – de la solitude – de la vie donnée avec l’unicité. L’acceptation de la disparition et de la mort au profit d’une immanence réciproque des « uniques » - le devenir saint et le rendre saint, est la source d’une fécondité dont le fruit sera effectivement l’unité de tous. Ensuite Ephésiens 4/3-13 - 5/26 : l’appel divin est à l’origine de la sainteté - la quelle définit l’unicité de singularité de chacun. Quand l’Eglise s’attribue donc unité et catholicité comme ses notes distinctives elle ne peut que se singulariser dans l’actuelle mondialisation et par rapport aux moyens techniques, économiques, politiques et culturels de l’unification du globe que, si elle fait œuvre de conversion et laisse paraître dans sa manière d’être que c’est effectivement le Dieu saint qui lui tient à cœur. C’est donc la note de sainteté qui détermine en définitive le sens de l’unicité et de l’unité catholique ; mais c’est inversement l’articulation entre l’unicité et l’unité relationnelle qui permet de distinguer la figure néotestamentaire de la sainteté des autres façons de la concevoir. L’unité de Dieu et l’unification d’un Monde en voie de Mondialisation L’insistance en soi parfaitement correcte, sur la différence entre l’unité de l’identité dans la nature et l’union de la charité dans la grâce ainsi que sur la toujours plus grande dissemblance entre le Créateur et la créature risque de fixer l’intelligence dans une interrogations infinie sur l’unité divine et minimiser de fait que, pour la foi, celle-ci est réellement communiquée au croyant, à l’ Eglise et au Monde…… Cette conversion suppose de critiquer, même au sein du christianisme, toute image « idolâtrique » de l’unification du monde : une conscience planétaire s’est en effet formée et une pluralité de conceptions techniques et économiques, politiques et culturelles s’y affrontent, avec des manière différentes d’engager la rationalité humaine sous des formes différentes de stratégie, de communication stratégique, voire d’ esthétique). Or l’action chrétienne n’a pas de théorie propre à faire valoir. Mais le renoncement à une image globale laisse en même temps la place à une conception pratique ou stylistique de l’unité : entre la violence historique et l’utopique unité de la planète, la tradition chrétienne tente de laisser advenir la souffrance des victimes de toutes sortes d’exclusion et le mal sous toutes ses formes. En dernière instance, l’unité de la planète se constitue donc grâce à la sympathie et la compassion : l’unité entre tous croit dans la mesure où chacun, voire le dernier d’entre nous, accède davantage à sa singularité inaliénable. Enfin, l'actualité récente de la communauté copte nous rappelle encore que le messianisme de l'Eglise n'est pas seulement une approche théologique, mais un ensemble de témoignages qui peuvent aller jusqu'à l'extrême.