‘En’ : de la préposition à la construction
composants ne soient plus reliés à leurs usages dans d’autres constructions, mais
il s’avère qu’il est impossible de décrire ces éléments sans tenir compte des
constructions dont ils font partie.
Les constructions sont au moins de trois grands types :
–
des locutions figées, dont aucune partie ne peut être modifiée et/ou rempla-
cée ; par ex. en français sur ces entrefaites,tout à coup ; ce sont des « substantive
constructions » dans la terminologie de W. Croft et A. Cruse (2004) ;
–
des locutions en partie figées en partie variables (les « semi-schematic
constructions » de Croft & Cruse 2004) ; par ex. les structures comparatives
du type [X plus ADJ. que Y] ou les structures à complément adnominal
introduit par de, dans lesquelles N2 est un nom nu [N1 – de – N2] (ex. meute
de loups,verre de bière) ;
–
des constructions au sens traditionnel, dans lesquelles tous les constituants
sont des variables (les « schematic constructions » de Croft & Cruse 2004),
comme par exemple la construction transitive directe (Verbe-COD) ou la
construction passive.
Il découle de ce qui précède que les constructions peuvent présenter différents
niveaux d’abstraction : alors que la dernière ne comporte que des variables, les
deux premières contiennent des constantes. Partant, les constructions peuvent
former des réseaux hiérarchisés, dans lesquels une construction schématique est
instanciée par une ou plusieurs constructions (semi-)schématiques lorsque les
variables de la construction schématique sont remplacées par des constantes.
Dans cette contribution, nous partirons de ces principes pour d’abord étudier
des constructions dans lesquelles le complément introduit par en est dans la
dépendance d’un verbe [V (SN) en N], et nous distinguerons trois grands types
d’interprétations, la localisation (§ 2), l’attribution d’un état à un objet ou à un
sujet (§ 3) et l’expression d’une propriété (§ 4), chacune de ces interprétations
étant à associer à une ou plusieurs constructions, celles-ci se déclinant elles-
mêmes en sous-constructions. Le but de ces trois premières parties sera de
montrer que le sens des constructions identifiées excède à chaque fois le sens des
constituants qui saturent les variables, même si une certaine compositionnalité
existe dans tous les cas. Nous étudierons ensuite (§ 5) la construction gérondive
[en V-ant], et nous montrerons que celle-ci est, en français moderne, inanalysable
(on n’y retrouve ni compositionnalité, ni le sens de la préposition en). Cette
dernière construction ne pourra donc s’intégrer au réseau des constructions
étudiées précédemment.
2. INTERPRÉTATIONS LOCALISANTES
Nous distinguons trois grands types d’interprétation, la localisation stricte (§ 2.1),
la localisation qualifiante (§ 2.2) ou le mode de locomotion (§ 2.3), liées chacune
à (au moins) un type de construction.
LANGUE FRANÇAISE 178
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“LF_178” (Col. : RevueLangueFrançaise) — 2013/8/19 — 19:31 — page 23 — #23
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