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REPORTAGE 5
Dimanche 5 juillet 2015
BOUIRA À L’HEURE DE LA CÉLÉBRATION DE LA FÊTE DU 5 JUILLET
Le récit de la bataille
de Jaffa lu à Bordj Khreis
Ce jeudi a cette
particularité sur les deux
journées caniculaires qui
l’avaient précédé : une
légère brise soufflait,
tempérant ce qu’il avait
d’accablant.
Àl’intérieur de notre véhi-
cule, la température est
idéale grâce à la clim.
L’attaché de presse, homme
pieux autant que de culture a
ramené avec lui une version du
Coran. Assis à côté du chauf-
feur, il lit les sourates avec
application. Le photographe, à
l’autre bout de la banquette
écoute le Coran. Et nous, que
faisions-nous ? Nous contem-
plions ces choses de la nature,
dont Dieu dit qu’elles sont des
versets évidents. Tandis que le
ruban bleu du ciel se déroule
devant nous avec une parfaite
uniformité, nous regardions les
champs de blé des deux côtés
de la route. Ainsi, sommes-
nous arrivés à cette conclusion :
Dieu qui dispense ses biens à
l’infini n’est jamais assez loué
en conséquence. L’homme est
ou trop faible ou trop pares-
seux, quand il n’est pas tout
simplement ingrat. Le travail
étant, dit-on, une prière, beau-
coup de ces champs attendent
d’être moissonnés ! En juillet,
avec les moyens dont disposent
les céréaliers, cela semble
impensable.
CE QUE L'ON VOIT
JUSQU'À BORDJ KHREIS
Le cap est mis ce matin vers
Bordj Khreis. Nous avons un
faible pour ce chef-lieu de
daïra, à une quarantaine de km
au sud de Bouira. Ses mon-
tagnes, ses forêts et ses oueds
en font un lieu de villégiature
rêvé. Nous traversons en flèche
Oued El-Bardi qui semble faire
la grasse matinée en ce mois de
Ramadhan. Ici, les terres sont
fertiles et les champs s’étendent
à pertes de vue. Deux moisson-
neuses-batteuses sont tout de
même à l’œuvre. Un grand
troupeau de moutons pâture.
La zone industrielle de Sidi
Khaled est sur notre droite et
occupe un vaste espace. Au car-
refour qui sert d’évitement à
El-Hachimia, un autre chef-lieu
de daïra, nous fonçons plein
sud. Là-bas, au loin, du côté de
Sour El-Ghozlane, la cimente-
rie qu’enveloppe un léger nuage
de poussière, malgré ses puis-
sants filtres, tourne à plein
régime. Sa capacité est telle
qu’elle fournit en ciment
d’autres wilayas comme M’Sila
et Médéa. Il est seulement
dommage que la roche, que les
concasseurs attaquent nuit et
jour, soient boisés et que la
crainte est de voir ce lieu
enchanteur disparaitre un jour.
Nous n’évoquerons même pas
le problème que pose sa proxi-
mité pour les habitants de ce
coin, ni l’école tout proche ni le
verger d‘amandiers qui se
rabougrit, asphyxié par les éma-
nations poussiéreuses.Quoi
qu’il en soit, en roulant sur ce
chemin de wilaya on a un petit
aperçu sur le développement
local et la diversification de sa
palette économique. En fran-
chissant un petit col, nous bas-
culons dans la daïra de Bordj
Khreis. Un détail accroche
notre regard en éveil : l’impact
de tant de programme, notam-
ment l’aide à l’habitat rural,
s’est déjà concrétisé sous forme
de belles maisons en dur,
témoignant de la volonté de
l’Etat d’éradiquer le logement
précaire et d’élever ainsi le
niveau de vie du citoyen. Jus-
qu’à Méghnine, première étape
de notre déplacement, nous
roulons dans une espèce de val-
lée où domine le pin. Le silence
est impressionnant. Mais la
sécurité est parfaite.
LA BATAILLE DE JAFFA
Le lieu porte un joli nom
d’oiseau qui chante comme lui
:Méghnine. Mais si l’oiseau
aux plumes chatoyantes chante
la joie de vivre, l’endroit chante
une bataille, une bataille
épique. Une stèle élevée sur
une colline en symbolise les
faits d’armes. Une large piste y
conduit. Nous la prenons. Une
délégation de moudjahidine et
de notables de la ville est déjà
sur place pour accueillir la wali.
L’endroit est nu et permet
d’embrasser un vaste panorama
tout aussi pelé, car l’action de
dégradation est à l’œuvre ici. La
forêt se bat pas à pas, mais
recule devant le feu et autre
fléau qui la frappe. L’ombre
vient des seules guirlandes aux
couleurs nationales qui flottent
à la brise légère qui souffle sans
les faire claquer. Trop faible.
C’est sous ce feu du ciel que
nous prenons connaissance de
cette belle page d’histoire écrite
avec le sang de 56 martyrs. La
voix du jeune homme qui lit le
texte qui la raconte vibre
d‘émotion. Un silence religieux
plane sur ces hauteurs. Elle
nous renvoie au 4 mai 1954. Le
lieu n’était peut-être pas aussi
découvert. Sans quoi, la katiba
Rachidia n’aurait pas tenu aussi
longtemps et aurait été anéantie
entièrement. L’ennemi n’avait
pas seulement la supériorité
numérique. Il avait aussi celle
des moyens. Des avions et des
chars avaient participé à ce
combat de géants. Sous les
bombes et les obus, ce coin de
paradis où l’homme vivait en
parfaite symbiose avec la nature
avait dû basculer en quelques
minutes dans l’horreur. Cet
enfer a dû durer toute la jour-
née, car si la katiba perdait son
chef Rachedi, l’ennemi versait
un tribut beaucoup plus lourd.
On a dénombré 79 morts et 83
blessés. On raconte que des
avions furent abattus. De vieux
moudjahidine connaissent cette
grande bataille. Quoi qu’il en
soit, elle intervenait à un
moment clé de notre histoire :
l’accession au pouvoir de De
Gaule et la mise en place de sa
mensongère politique dite « la
paix des braves ». Des opéra-
tions comme Jumelle, Turquoi-
se et tant d’autres qui semèrent
la mort et la terreur sur le sol
algérien démentaient cruelle-
ment les fausses déclarations
du Général. Pressé par les
colons qui voulaient des garan-
ties tout de suite pour conser-
ver leurs biens mal acquis et
une armée jusqu’au boutiste, il
fallait au nouveau président
français montrer de la fermeté.
« Ceux qui croient que De
Gaulle nous a donné l’indépen-
dance se trompent », martèle,
ce matin un moudjahid qui
prend la parole pour raconter à
sa manière la guerre de libéra-
tion en s’appuyant sur cette
bataille. Une gerbe de fleurs est
posée au pied de la stèle, une
prière est dite à la mémoire de
ces glorieux chouhadas et la
solitude s’empare de nouveau
du lieu.
POUR QUE VIVE
L’ALGÉRIE
Le mot est de cet orateur à
l’élocution trébuchante d’émo-
tion. Nous avons du l’illustra-
tion de cette belle phrase en
pénétrant dans cette petite ville
qui était sans doute un tout
petit village au temps de la
France. Elle a aujourd’hui ses
routes, ses établissements sco-
laires, ses salles de soins, sa
bibliothèque, ses structures
sportives, ses programmes de
développement, y compris celui
des Hauts-Plateaux, car Bordj
Khreis fait partie es Hauts-Pla-
teaux, et cela, un élément
propre à cette zone agro-pasto-
rale n’a cessé, depuis que nous
la traversions ce matin, de nous
le signaler : l’armoise de plus en
plus abondante à mesure que
l’on pénètre dans le sud de la
wilaya. Le progrès est sensible
partout et ne fait qu’y entrer,
dans ce chef-lieu de daïra. La
preuve, c’est que le wali, vers
onze heures, inaugure une pis-
cine semi olympique. Elle est
baptisée au nom d’un moudja-
hid disparu le 28 janvier 2002
dans un accident de la route.
Le héros, Madani Mohamed a
traversé la guerre de libération
et la noire décennie l’arme au
poing, mais n’a rie pu faire
contre le fléau de la route. Le
projet a coûté à l’Etat 5 932
880 DA. À l’intérieur, des
jeunes font de natation. La pré-
sence en ces lieux d’une moni-
trice fait penser que la structu-
re a un caractère pédagogique
et sportif et qu’elle est ouverte
aussi aux filles. Selon le direc-
teur de la jeunesse et des
sports, la wilaya compte main-
tenant dix piscines. Ainsi se réa-
lise le projet des autorités qui
est d’ouvrir une piscine de cette
dimension dans chaque daïra
afin de généraliser cette disci-
pline. Selon une autre source
proche de la direction de la jeu-
nesse et des sports, la wilaya se
glorifie d’aligner 365 athlètes
compétitifs dont plus de 113
féminins, alors qu’on enregistre
quelques 8 000 nageurs libres.
Cette volonté, nous l’avions
constaté tout au long des sor-
ties du wali, que ce soit à Souk
El-Khémis, à Bechloul ou El-
Esnam, à Haïzer ,à Aïn-Bes-
sem, et tout récemment (nous y
reviendrons dans un prochain
reportage) à Sour El-Ghozlane.
Le wali a visité également le
stade communal, un projet
lancé le 25 mars 2015.
S’inscrivant dans un contex-
te empreint de gravité et de
recueillement, la visite du wali,
ce jeudi 2 juillet, à Bordj Kreis,
chef-lieu de commune et de
daïra, à une cinquantaine de
km au sud de Bouira, a com-
porté un programme en trois
points : dépôt de germe au pied
d’une stèle élevée à la mémoire
des martyrs au lieu-dit Meghni-
ne, inauguration de la piscine
baptisée au nom d’un moudja-
hid décédé et la visite du stade
communal en cours de réalisa-
tion.
À trois ou quatre kilomètres,
avant d‘arriver d’arriver à Borj
Kreis, le premier responsable
de la wilaya mettait pied à terre,
ce jeudi matin, sur une colline
qui surplombe un vaste panora-
ma : ce lieudit porte le nom
ornithologique de Méghnine.
Une délégation faite de moud-
jahidine et de notables de la
ville l’accueillait. Devoir de
mémoire obligeant, il a écouté
l’un d’eux exalter le sens du
courage et du sacrifice pendant
la guerre de libération. Un
jeune homme, sans doute un
chef de scouts, (car les scouts
étaient présents) a lu un texte
relatant les faits s’étant déroulé
le 4 mai 1958. C’est la bataille
de Jafa, opposant la katiba
Rachidia à l’armée française.
Ce jour-là, nous apprenions
que le chef de cette katiba tom-
bait en même temps que 55
moudjahidine. Du côté de l’en-
nemi, les pertes étaient beau-
coup plus élevées : 79 morts et
88 blessés. Cet exploit justifiait
l’érection de cette stèle à cet
endroit. Avant d’y déposer une
gerbe de fleurs et de s’incliner
devant la mémoire de ces mar-
tyrs, le wali a écouté deux
moudjahidine relatant chacun
un souvenir de guerre.
À bordj Kreis, le wali a inau-
guré la piscine semi olympique
portant le nom du moudjahid
Maani Mohamed. Ayant parti-
cipé très tôt à la Révolution de
54 et pris les armes contre le
terrorisme, il a trouvé la mort
en 2002 dans un accident de la
route à Tablat. Le wali a visité
ensuite cette structure nouvel-
le. Des jeunes nageurs étaient
en exhibition. Nous apprenions
de la direction que c’est la
dixième du genre dans la
wilaya, confirmant la volonté de
l’Etat de construire une piscine
dans chaque chef-lieu de daïra.
La même direction nous rappe-
lait à cette occasion que la
wilaya compte 365 athlètes et
quelque 8 000 nageurs libres,
montrant par là quelle impor-
tance est accordée par les auto-
rités à cette discipline où les
Algériens commencent à
s’illustrer avec brio. La visite au
stade communal, un projet
démarré le 25 mars pour un
montant de 45 272 335, 68
DA. Le wali qui a insisté sur le
respect des délais et des normes
exige qu’il soit livré dans deux
mois.
Le retour est marqué par un
accident de la route, confir-
mant que la sécurité routière
reste, le problème numéro un
du pays. Le véhicule a dû faire
un tonneau sur la route entre le
carrefour qui relie les chemins
de wilaya desservant Bordj
Khreis, Sour El-Ghozlane,
Bouira, El-Hachimia et Aïn-
Bessem et le col de Bordj Kreis.
Le toit étant en bas, l’opération
de sauvetage a dû être difficile.
On pense que le chauffeur
extrait difficilement de son
siège n’est pas mort. Evacué
vers l’hôpital, son cas doit de ce
être sérieux. C’est la deuxième
visite qui est ainsi émaillée
genre de drame. La visite s’est
poursuivie avec la clôture de
l’année universitaire. Au cours
d’une longue et fastidieuse
cérémonie, les meilleurs élèves
ayant obtenu leurs licences et
leurs masters, les meilleurs
profs et docteurs des huit
départements et deux instituts
ont été honorés.À cette occa-
sion, le recteur qui a été du
nombre des honorés a pronon-
cé un petit discours dans lequel
il a rappelé les efforts de l’Etat
consentis dans le secteur de
l’enseignement supérieur, les
progrès réalisés dans le domai-
ne de la recherche et on peut ,
selon lui mesurer les impacts
économiques et sociaux. Créée
le 28 janvier 2012, l’université
Akli-Mohand ou El-Hadj figu-
rerait déjà, grâce à ses profs, ses
étudiants et ses docteurs parmi
les plus prestigieuses du pays.
L’intervenant a annoncé,
d’autre part, l’ouverture, en
septembre prochain, de l’insti-
tut de technologie et l’introduc-
tion dans les programmes de
trois nouvelles disciplines.
Dehors, l’air est tellement
chaud que l’on défaille
presque.
Ali D.
Ph : DR