LES INÉGALITÉS DE REVENU
Ladoption d’un rapport salarial fordiste dans laps-guerre et la mone en puis-
sance de l’État-providence ont permis une réduction progressive des inégalités de
revenu jusque dans les anes 1970, mais à partir des anes 1980 la politique écono-
mique contribue au renforcement des inégalités.
qUne réduction des inégalités de revenu jusque dans les années 1970
Dans les années
1970, lindexation offi-
cieuse des salaires
sur les prix et la dis-
tribution des presta-
tions sociales se sont
traduites par une
progression rapide
des revenus salariaux
(directs ou non),
autorisant des aug-
mentations de pou-
voir d’achat pour les
salariés. Nombre de
ces derniers ont alors
pu se constituer un
patrimoine modeste
en devenant propr-
taires à moindre frais
de leur habitation
principale. Les inéga-
lis de revenu et de
patrimoine subsis-
taient, mais se dui-
saient sous leffet de
la « machine égali-
taire », notamment
par le biais de la fiscalité et de la redistribution.
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LES INÉGALITÉS DE REVENU
ET DE PATRIMOINE
23
S’il est un sujet sensible dans la société française, c’est celui des inégalités,
en particulier les plus visibles d’entre elles : celles qui touchent le revenu et le
patrimoine. Les inégalités de revenu sont celles qui sont le plus mal
acceptées ; elles ne sont pas pour autant les plus lourdes.
DISTRIBUTION DES SALAIRES* ANNUELS NETS DE
PRÉLÈVEMENTS PAR SEXE DANS LE SECTEUR PRIVÉ
ET SEMI-PUBLIC (SALARIÉS À TEMPS COMPLET)
D1 11430 12511 12055
D2 12680 14018 13466
D3 13745 15409 14753
D4 14893 16892 16166
Médiane (D5) 16310 18622 17802
D6 18073 20805 19813
D7 20299 23850 22498
D8 23425 28769 26788
D9 29436 38832 35513
D9/D1 2,6 3,1 2,9
* En 2004, en euros.
• Lecture : chaque décile correspond à une valeur qui partage l’effectif en 10 groupes
égaux ; ils sont classés par ordre croissant. Par exemple, en 2004, 10 % des
salariés à temps complet du secteur privé et semi-public gagnent un salaire
annuel net inférieur à 12 055 , 20 % inférieur à 13 466
Le rapport interdécile (D9/D1) constitue une mesure des inégalités : « 3,1 »
signifie que les 10 % d’hommes les mieux payés perçoivent en moyenne un
salaire 3,1 fois plus élevé que les 10 % d’hommes les moins bien payés.
Source : INSEE, DADS 2004 (fichier semi-définitif).
Femmes Hommes Ensemble
qUn nouvel âge des inégalités
Le tournant du scle laisse apparaître
un « nouvel âge des inégalités », comme
l’affirment Jean-Paul Fitoussi et Pierre
Rosanvallon dans louvrage éponyme (paru
en 1996). Outre des inégalités liées à l’ori-
gine des revenus, se dessinent aujourd’hui
de nouvelles formes d’inégalités à l’in-
rieur de catégories qui semblaient parta-
ger auparavant un destin commun : les
jeunes, les cadres, les ouvriers, les
femmes… Ces igalités, que ces auteurs
qualifient de résiduelles, sont liées aux tra-
jectoires singulières des individus. Par
exemple, une insertion professionnelle
ratée (sortie du système éducatif
entre 1992 et 1994) a pu conduire un diplômé à accepter un emploi sous-qualif, le
condamnant à monter petit à petit dans la hiérarchie professionnelle, alors quun jeune
diplômé sorti de lécole en 1998 ou 1999 a pu accéder directement au même emploi, peut-
être me avec un niveau de formation plus faible, compte tenu de lévolution du marc
du travail. Ces igalités dun nouveau type font donc peser sur les individus une pression
beaucoup plus forte, puisquune erreur initiale se paie plus lourdement que naguère.
LES INÉGALITÉS DE PATRIMOINE
Lévolution des igalités peut être interptée comme le passage dun mole de régu-
lation qualif de fordisme à un nouveau modèle, dit de croissance patrimoniale, qui repose
sur la péminence de la finance sur l’économie.
qL’évolution des revenus du capital favorise sa concentration
Lévolution divergente des revenus du travail et du capital aboutit à une augmentation
des inégalités de patrimoine. En effet, la faible progression des salaires oblige les salariés à
renoncer à une partie de leur consommation sils souhaitent se construire un patrimoine par
lépargne, alors que les rentiers voient leurs revenus progresser rapidement. De plus, les
transformations des systèmes financier et productif permettent des effets daubaine pour
les détenteurs de patrimoine élevé (privatisations) qui renforcent encore ces inégalités.
qLe résultat du passage à une croissance patrimoniale
Naguère, le travail ponctionnait la part la plus importante de la valeur ajoutée, ensuite
étaient servis les actionnaires, avec le solde de richesse créée, en recourant éventuelle-
ment à l’inflation pour rendre le partage tolérable. Aujourd’hui, l’inflation est proscrite, car
son retour raboterait les revenus du capital, et les actionnaires sont servis en premier.
Revient alors aux salariés un solde oscillant entre 60 % et 63 % de la valeur ajoutée, le
niveau précis dépendant de la capacité de ceux-ci à imposer un rapport de forces, en fonc-
tion de l’état du marché du travail.
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Le creusement des
inégalités de revenu à partir
des années 1980
À partir de 1982-1983, l’orientation de
la politique économique contribue au ren-
forcement des inégalités. En effet, l’ob-
jectif de lutte contre l’inflation entraîne
un ralentissement de la progression des
salaires (qui n’augmentent plus aussi
vite que les gains de productivité) et un
accroissement des taux d’int dans le
but de ralentir la création de monnaie.
Ainsi les revenus salariaux stagnent,
alors que ceux du capital augmentent.
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