De la nécessité pour l`école primaire d`une révision du curriculum

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DOI 10.1051/shsconf/20140801026
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Congrès Mondial de Linguistique Française – CMLF 2014
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De la nécessité pour l’école primaire d’une révision du
curriculum grammatical
Meinertzhagen, Lionel
Université libre de Bruxelles – Centre de recherche LaDisco
Plateforme internationale de recherche Gramm-R
[email protected]
1
Introduction
Chaque pays dispose de son propre système éducatif et, à l’exception des évaluations externes qui
établissent des classements entre établissements, il n’est pas question de les hiérarchiser. Tout au plus, se
dégagent certaines conditions matérielles plus ou moins favorables mais, à aucun moment, n’est mis en
cause l’organigramme même du découpage scolaire ni, à plus forte raison, la forme sous laquelle il
parvient aux professionnels de l’éducation. Nous voudrions, dès lors, attirer l’attention sur la réception de
ces documents officiels (décrets, dispositions, etc.) une fois transposés en outils pour l’enseignement
(Socles, programmes, etc.) et, en particulier, observer la cohérence qui régit la progression curriculaire du
cours de français et, plus précisément encore, de grammaire dans les différents pays de la francophonie du
nord (Belgique, France, Suisse Québec). Même si nous balayons large, nous éviterons les généralités afin
que notre étude conserve son caractère contrastif.
2
Méthodologie
Pratiquement, pour rendre compte de la manière dont chaque pays envisagé organise son système
éducatif, nous avons choisi d’examiner les documents qu’il met à disposition, comme les socles, les
programmes et les progressions, dans une triple lecture. Premièrement, nous allons nous intéresser aux
documents officiels et au découpage en paliers, degrés ou cycles ; en deuxième lieu, nous montrerons
comment y est présentée la grammaire ; enfin, nous approcherons le contenu disciplinaire par le biais, en
guise d’exemple, de l’attribut du sujet. Ce point de grammaire retient notre attention tant il ne trouve,
dans la bouche des enseignants qui en traitent, aucune justification autre que celle de la présence du point
au programme. Pour notre part, différencier ce complément des autres compléments du verbe ne nous
paraît en rien pertinent. En conclusion, nous croiserons nos observations obtenues à chacune des trois
phases.
Pour cette étude ont été retenus les documents suivants. La lecture qui en est faite est sans doute hâtive et
imparfaite compte-tenu de ce que la seule réalité belge est directement appréhendable par nous. Elle
n’empêche, toutefois, pas de dessiner certaines tendances.
Belgique :
o
o
BE1 : Fédération Wallonie-Bruxelles. Programme des études 2009 pour l’enseignement fondamental
(2009). Belgique.
BE2 : Ministère de la Communauté française. Socles de compétences – Français (1999). Bruxelles.
France :
o
o
o
FR1 : Ministère de l’éducation nationale. (2006). Socle commun de connaissances et de
compétences. Bulletin officiel, 29 (20 juillet 2006).1
FR2 : Ministère de l’éducation nationale. (2008a). Cycle des apprentissages fondamentaux Progressions pour le CP et le CE1. Bulletin officiel, 3 (hors série du 19 juin 2008).2
FR3 : Ministère de l’éducation nationale. (2008b). Cycle des approfondissements - Progressions pour
le CE2 et le cours moyen. Bulletin officiel, 3 (hors-série du 19 juin 2008).
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FR4 : Ministère de l’éducation nationale. (2008c). Cycle des apprentissages fondamentaux Programme du CP et du CE1. Bulletin officiel, 3 (hors série du 19 juin 2008)3.
FR5 : Ministère de l’éducation nationale. (2008d). Cycle des approfondissements - Programme du
CE2, du CM1 et du CM2. Bulletin officiel, 3 (hors série du 19 juin 2008).
FR7 : Ministère de l’éducation nationale. (2011). Grilles de références pour l’évaluation et la
validation des compétences.
FR8 : Ministère de l’éducation nationale. (2012). Livret personnel de compétences. Bulletin officiel,
35 (27 septembre 2012).
Québec :
o
o
QC1 : Gouvernement du Québec - Ministère de l’Éducation. Programme de formation de l’école
québécoise - Français, langue d’enseignement (2006).
QC2 : Gouvernement du Québec - Ministère de l’Éducation. Progression des apprentissages au
primaire – Français, langue d’enseignement (2011).
Suisse
o
3
3.1
CH : Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin (CIIP).
Plan d’études romand (PER) (2010).4
Documents et organisation du cursus
Belgique
Depuis 1997 et le décret dit “Missions” qui redéfinit le paysage de l’enseignement, ses missions et ses
moyens – les compétences –, il existe un socle de compétences par matière (8 socles au total) reprenant
celles à aborder et le niveau auquel elles doivent être acquises. Les programmes, de quelque pouvoir
organisateur qu’ils émanent, se doivent de respecter ce document de référence et, par conséquent, de
répartir les apprentissages dans le canevas imposé. Pour ce qui concerne le français, les quatre macrocompétences disciplinaires sont LIRE - ECOUTER - ECRIRE - PARLER, ce qui dans les faits, en
boutade, revient souvent à “lire, écrire, s’écouter parler”. Mais ce qui retiendra notre attention, c’est avant
tout le découpage de la matière qui s’opère sur cette base, la répartition en niveaux, en âge.
Le Socle se répartit en trois étapes, chacune divisée en deux cycles.
Tableau 1. – L’organisation en étapes et en cycles5
Le programme (7 points6) — prenons celui du réseau Officiel Neutre Subventionné organisé par la
Fédération Wallonie-Bruxelles — quant à lui, se fonde sur les cycles et opère donc déjà une première
réduction parce que ce que les socles disent pour deux (étape 3), quatre (étape 2) ou cinq ans (étape 1), les
programmes le transposent pour des cycles de deux ans ; et pour le primaire cela correspond à une étape
et demi mais trois cycles. Donc, pour un enseignant de 1e et 2e primaire, les socles deviennent un
document illisible puisque que le programme sur lequel il aura à fonder son enseignement aura fait le tri
dans la première étape selon un critère qui lui échappera. La manière dont il aurait voulu organiser
l’exercisation de compétences jusqu’au terme de l’étape 1 ne relèvera en rien de son expertise didactico-
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pédagogique et remet donc en question sa fonction et sa formation. Et il ne sera pas beaucoup plus utile
pour celui de 3e cycle qui, s’il travaille en équipe avec son collègue de 4e cycle pour appliquer le Socle,
risque de contrevenir à la répartition du programme. Disons que c’est le programme qui décide puisqu’il a
la vision la plus parcellaire...
En fin de programme, qui détaille chaque étape, même certaines notions, l’on trouve la table des
correspondances notions/cycles (BE1 : 385) qui reprend de manière synthétique le cycle auquel tel savoir
doit être acquis. Parce que c’est bien de savoirs dont il est désormais question. Ce qui, dans le socle est
intitulé Utiliser les unités grammaticales, dans la compétence ECRIRE ou Tenir compte des unités
grammaticales dans la compétence LIRE (BE2 : 4), devient, dans les programmes un outil dont le but est
d’assurer la correction et la précision d’un message oral ou écrit (BE1 : 260) – l’oral est maintenant
considéré également – pour, dans la table de correspondances, se trouver sous la forme de Accord du
participe passé (l’) – cycle 3 (BE1 : 402). Les transitions nous échappent…
3.2
France
Depuis 2005, le système éducatif français s’articule autour du socle commun de connaissances et de
compétences, dont l’une des sept compétences est la Maitrise de la langue française, laquelle est à son
tour composée de connaissances (vocabulaire, grammaire, orthographe), capacités (lire, écrire, s’exprimer
à l’oral, utiliser des outils) et attitudes. Le socle reste très succinct dans l’explicitation de l’entrée
grammaire, dont il rend compte en quelques points
la ponctuation ; les structures syntaxiques fondamentales ; la nature des mots et leur
fonction ; les connecteurs logiques usuels (conjonctions de coordination, conjonctions
de subordination, adverbes) ; la conjugaison des verbes ; le système des temps et des
modes. (FR1 : 5-7).
Pour avoir plus de détails sur ce que recouvrent ces entrées, il faut regarder du côté des outils
d’évaluation : le Livret personnel de compétences, explicité par les Grilles de références pour l'évaluation
et la validation des compétences. Il y a trois paliers de certification du livret dont seuls les deux premiers
concernent le primaire, le premier devant être validé au terme du CE1, le second en fin de CM2. Ces
données sont, au niveau du Socle, le seul étagement disponible. Où le socle assume finalement que la
grammaire n’est pas une compétence mais une connaissance (FR1 : 5), le livret personnel la replace au
même niveau que les capacités (dire, lire, écrire), sous l’intitulé étude de la langue – grammaire (FR7 :
2). Alors que la découpe est similaire pour les deux premiers paliers, ceux qui nous concernent, nous
sommes toutefois en droit de nous demander pourquoi, au troisième palier, l’ordre des capacités est
inversé (lire, écrire, dire), ce qui rend la lecture plus difficile et peut laisser supposer un choix réfléchi par
le rédacteur. Les grilles de référence explicitent les critères de chaque item du livret et donnent des
indications pour l’évaluation de chacun d’entre eux, ce qui correspond à un morcèlement de la matière du
type de celui ci-dessous.
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Socle commun :
Compétence : Maitrise de la langue française
- Connaissance : grammaire > les structures syntaxiques fondamentales
Livret :
Compétence : Maitrise de la langue française
- Grammaire > Repérer le verbe d’une phrase et son sujet
Grille :
Compétence : Maitrise de la langue française
- Etude de la langue - grammaire
-- item : Repérer le verbe d’une phrase et son sujet
-- explicitation de l’item : Connaître et appliquer la règle de l’accord du verbe avec
son sujet.
-- indications pour l’évaluation : Elle porte sur la capacité à repérer le verbe dans une
phrase simple ;
Il y a donc, avant toute intervention de l’enseignant, un passage de la compétence à la connaissance,
jusqu’à l’assimilation de l’une à l’autre et une surinterprétation non commentée des items. En effet, le
repérage du sujet et du verbe devient l’accord entre les deux, voire l’identification dans la seule phrase
simple. Sans développer davantage que les entrées de la grille d’évaluation, le programme du cycle
élémentaire consacre ce passage de la phrase à la seule phrase simple.
À propos des programmes, leur structure pose question. Les entrées y sont disciplinaires, non basées sur
les compétences, et la hiérarchie diffère entre le cycle élémentaire (4. Grammaire) et celui des
approfondissements (3.2 Grammaire). Leur contenu est une liste de notions à connaitre, lesquelles ne
répondent pas lisiblement aux indications pour l’évaluation présentes dans les grilles de référence
associées au livret. On se retrouve dans un écueil assez ressemblant à celui rencontré en Belgique, à
savoir que l’enseignant peut amener les élèves à obtenir validation de leur livret en faisant l’impasse sur
plusieurs notions au programme. L’identification de l’attribut du sujet en est un exemple. En fin de
programme, figurent les compétences attendues à la fin du CE1 mais, là non plus, le lien n’est pas clair
avec ce qui est attendu dans le livret. La confusion est totale quand le programme stipule, comme attendu
de l’élève de fin de CE1, qu’il soit capable d’écrire sans erreur sous la dictée un texte de 5 lignes en
utilisant ses connaissances lexicales, orthographiques et grammaticales. La limite de 5 lignes et les
connaissances énumérées ne relèvent pas du même niveau. Si l’élève doit être capable d’écrire un texte de
cinq lignes, c’est d’abord en termes de pertinence, de lien et de cohérence, car s’il est supposé détenir
certaines connaissances, il n’y a aucune raison que celles-ci ne soient applicables que dans pareilles
limites. L’interface compétences-connaissances parait évidente quand énoncée de telle manière mais elle
a tout de factice.
3.3
Québec
Les documents disponibles pour l’enseignement primaire du Québec sont le Programme de formation de
l’école québécoise et la Progression des apprentissages au primaire Français, langue d’enseignement.
L’un et l’autre reposent sur une répartition des données en cycles, trois cycles de deux ans, mais là où le
programme procède par cycle, la progression privilégie l’année, sans doute par pragmatisme.
Le programme de français s’organise en quatre macro-compétences (lire des textes variés ; écrire des
textes variés, communiquer oralement, apprécier des œuvres littéraires), chacune divisée en cinq
composantes et accompagnée de cinq critères d’évaluation, dans une parfaite illusion d’homogénéité et de
cohérence. Mais le rapport entre les composantes de compétence (verbe) et les critères d’évaluation (nom)
n’est pas aussi évident que la découpe ne le laisse paraitre ou, au contraire, relève de la seule
reformulation (compétence : Réagir à une variété de textes lus ; critère d’évaluation : Réactions
pertinentes aux textes littéraires et aux textes courants) (QC1 : 75). Enfin, pour chacun de ces critères
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d’évaluation est précisé le cycle devant y correspondre, ce qui n’est pas d’une grande aide puisque tous
s’appliquent aux trois cycles. À la suite des compétences, le programme liste une série de repères
culturels - chacun aussi à envisager aux trois cycles - et de savoirs essentiels, mieux répartis en niveaux.
Les savoirs essentiels sont divisés en connaissances, stratégies et techniques. Dans cette organisation, les
notions grammaticales apparaissent au niveau des Connaissance liées au texte et, à plus forte raison, des
Connaissances liées à la phrase (QC1 : 88-90). À considérer que l’on démarre de ces connaissances entrées les plus évidentes pour l’enseignant en préparation de son cours - le cheminement vers la
compétence - objectif final - reste obscur. Quel trajet prendre pour relier la Reconnaissance et utilisation
des fonctions syntaxiques : Groupe du verbe > Attribut à, par exemple, Écrire des textes variés ? En quoi
la connaissance de l’un implique une meilleure maitrise de l’autre ? Il y a, d’une certaine façon, abus de
confiance envers le professeur qui suppose, de droit, l’efficacité de la continuité qu’il enseigne.
La progression est un document de 93 pages qui s’organise autour des quatre compétences du
programme dont seule Ecrire des textes variés est divisée en sections (6 sections : lexique, orthographe
d’usage, conjugaison, accord, syntaxe et ponctuation, organisation et cohérence du texte) (QC2 : 2). Il est
donc implicitement établi – ce qui ne l’est pas dans le programme – que l’analyse syntaxique ne sert que
l’écriture. La progression procède par morcèlement au plus fin des notions envisageables dans un cours
de français. Le caractère presque exhaustif rend d’ailleurs le document peu lisible et difficile d’accès. De
surcroit, les entrées dans l’un et l’autre document ne se font pas écho et, vu que l’un procède en cycle – le
programme – et l’autre en années et avec trois niveaux d’appréciation (apprend à faire, fait, réutilise) – la
progression –, ne sont pas réparties de la même manière en niveaux.
3.4
Suisse
Contrairement aux autres pays, la Suisse réunit en un unique document, soit-il peu lisible, ce que les
autres répartissent en plusieurs.
Le Plan d’études romand (PER) organise l’enseignement des différents cantons francophones. C’est un
projet global de formation de l’élève fondé sur l’intersection de trois entrées : la formation globale (5
composantes) ; les domaines disciplinaires (5 domaines) ; et les capacités transversales (5 capacités)...
dans une parfaite illusion d’équilibre. La progression repose sur une répartition en deux cycles de deux
parties de deux ans (4-8 ans ; 8-12 ans) chacune et un cycle d’une partie de trois ans (12-15 ans). Le
domaine disciplinaire des langues doit répondre à quatre grandes finalités (de 5, 4, 5 et 0 composantes)
et, pour sa composante français (langue de scolarisation), la découpe se fait en huit axes, dont celui
intitulé Fonctionnement de la langue retiendra notre attention, et quatre visées prioritaires, communes à
chaque langue mais différentes des quatres grandes finalités. Cet axe Fonctionnement de la langue,
s’intitule, au cycle I, Observer le fonctionnement de la langue et s'approprier des outils de base pour
comprendre et produire des textes… et, au cycle II, Construire une représentation de la langue pour
comprendre et produire des textes… se répartissant en 6 composantes (grammaire de la phrase,
orthographe lexicale, orthographe grammaticale, vocabulaire, conjugaison, du texte à la phrase et de la
phrase au mot) au cycle I, et 7 composantes au cycle II (grammaire de la phrase, orthographe,
orthographe lexicale, orthographe grammaticale, vocabulaire, conjugaison, de la phrase au texte) en
gardant 6 et 8 intentions différentes en perspective. La progression des notions à enseigner repose sur les
parties de cycles et s’assortit d’attentes fondamentales et d’indications pédagogiques, voire de précisions
cantonales. Au final, des multiples objectifs et visées, il ne reste que des notions grammaticales à
enseigner à un moment précis — dont la logique de découpage et de répartition reste confuse—, sans
garantie de leur utilité, ni de l’articulation entre elles.
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De manière figurée et pour les comparer, voici la confrontation des découpages proposés dans les
différents documents :
Tableau 2. – Découpage des niveaux d’enseignement en francophonie du Nord
On observe globalement que :
o
Les années sont groupées en cycles qui – l’on pourrait croire – développent une continuité interne
voire correspondent à des stades de développement.
o
Il y a continuité entre les maternelles et le primaire – sauf peut-être au Québec – mais une séparation
nette entre les 5 ou 6 ans du primaire et le secondaire.
Mais aussi que :
o
La répartition des programmes ne correspond pas à celle des progressions.
o
Un élève de 10-11 est s’inscrit en début de troisième cycle belge, fin de celui des approfondissements
français, début de troisième cycle québécois et milieu de deuxième cycle suisse.
Dès lors, il y a de quoi se demander si ces découpages correspondent véritablement à une cohérence en
matière disciplinaire et développementale et, dans l’affirmative, pourquoi elle diffère d’un endroit à
l’autre.
4
Plusieurs conceptions de la grammaire
Compte-tenu de l’hétérogénéité observée ci-dessus, l’idée selon laquelle les curriculums d’apprentissage
de la langue – par la grammaire – seraient en corrélation avec le développement de l’enfant et son accès à
l’abstraction doit être questionnée. Peut-être trouverons-nous quelque indice lors de la confrontation de
contenus disciplinaires, lesquels dénoteraient une construction calquée sur une progression des capacités
mentales. Avant cela, nous voudrions vérifier le statut de la grammaire dans les différents parcours
scolaires dessinés. Est-elle à considérer comme un savoir ou une compétence ? Même si nous n’aurons
pas l’occasion d’en traiter ici, de la réponse à cette interrogation devrait découler le traitement qui en est
fait en classe.
Voyons par quel biais elle est renseignée dans les documents officiels, donc prescriptifs. Nous observons
qu’en Belgique déjà son statut est assez problématique. À rapprocher de la compétence dans les Socles,
où les unités grammaticales sont à observer ou utiliser au service des compétences lire et écrire (BE1 : 4),
l’analyse grammaticale est explicitement un outil dans le programme (BE2 : 260), contribuant tant à
l’oral qu’à l’écrit.
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En France, le Socle commun range la grammaire parmi les connaissances (FR1 : 5) tandis que dans tous
les documents qui en découlent, dont le livret personnel de compétences et le programme, elle figure sur
le même plan que les capacités comme dire ou langage oral. Seule la progression CE2-CM2 peine à
trancher et intitule la section où il en est question Éléments de connaissances et de compétences pour la
grammaire ; pour autant, elle reste au même rang que, par exemple, le langage oral (Éléments de
connaissances et de compétences pour le langage oral).
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La situation n’est pas plus claire au Québec. Dans le programme, la grammaire est indiquée comme
savoir essentiel (QC1 : 88) mais, dans la progression, elle est une connaissance directement associée à la
compétence Ecrire des textes variés, laquelle ne semble être qu’une addition de connaissances (QC2 : 2).
Ensuite, dans le Plan d’études romand, l’activité grammaticale est un objectif d’apprentissage dans celui,
plus englobant, du Fonctionnement de la langue, lui-même situé au même rang que la compréhension et
la production, plutôt de l’ordre de la compétence (CH : 20).
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Alors que
Dans ces différents pays [Belgique, Suisse, Québec], un relatif consensus s’établit
aujourd’hui pour définir la compétence comme la capacité de mobiliser différents
savoirs, savoir-faire et savoir-être en vue d’effectuer une tâche complexe dans un
contexte motivant, et pour assigner à toutes les disciplines scolaires la tâche prioritaire
de développer de telles aptitudes chez tous les élèves. (Collès, Dufays, Maeder
2003 : 7)
l’instabilité du rattachement de l’activité grammaticale au savoir ou à la compétence d’un document à
l’autre, d’un pays à l’autre, pourrait être figurée comme suit :
BE
FR
QC
CH
Socle
Compétence (Lire – Écrire)
Connaissance
Programme
Outil (oral – écrit)
Capacité
Savoir essentiel
Livret
Progression
Capacité
Compétence / connaissance
Connaissance (compétence
écrire des textes variés)
Compétence/connaissance
Tableau 3. – Conception de la grammaire en francophonie du Nord
Mais outre l’incapacité de préciser ce que sert précisément la grammaire et son statut, c’est l’articulation
même entre le savoir et la compétence attendue qui pose question. Il est implicitement établi qu’une
notion comme l’attribut du sujet, par exemple, est utile aux compétences de compréhension et
d’expression. Or, rien n’est moins clair. En quoi le fait de savoir étiqueter tel complément attribut aide à
l’encodage ou au décodage ? Voyons d’ailleurs que le contenu recouvert par le point n’est pas clairement
défini, pas plus que la progression de son apprentissage.
5
Le cas de l’attribut du sujet
Si l’on regarde le tableau synthétique suivant, on s’aperçoit que chaque pays entame l’apprentissage de la
notion d’attribut du sujet, vers les 8 ans de l’élève. Or, si l’on considère que l’existence de la fonction
attribut du sujet est pertinente et qu’elle peut se définir comme un complément se rapportant au sujet par
l’entremise d’un verbe copule, son instabilité théorique la rend inappréhendable en si bas age.
La revue de ces manuels scolaires démontre que l’attribut constitue un point sensible,
point d’équilibre et de déséquilibre de la terminologie grammaticale : il se trouve lié
aux termes de verbe, de proposition, d’auxiliaire, de complément ou régime du verbe,
de participe. Autour de lui le terme attributif a changé de signification, le terme
épithète a surgi et la notion d’attribut de l’objet a été définie. Et surtout, le sort
réservé à être a radicalement changé. (de Gaulmyn 1991 : 38)
Et l’attribut du sujet ne convoque pas le seul verbe être. À considérer paraitre, autre membre de la
célèbre litanie de verbes dits copules, il se révèle que lui aussi revêt différentes acceptions,
représentatives de la diversité des valeurs associées au verbe, [lesquelles] présentent en outre l’intérêt de
relever de l’une ou l’autre des quatre constructions syntaxiques qu’admet paraître (Thuillier 2004 : 16).
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Tableau 4. – L’attribut du sujet en francophonie du Nord [synthèse]
Mais ce qui frappe, à ce stade, ce sont davantage les discordances entre programmes en termes théoriques,
certes, mais aussi d’étagement des apprentissages.
o
En Belgique et en France, la notion d’attribut est construite en regard de celle d’épithète.
o
En Belgique et en Suisse, l’approche contrastive repose sur la distinction entre adjectif et nom mais
tandis que la première inscrit cette distinction dans une succession de deux cycles (8-10 ans/10-12
ans), l’adjectif attribut étant étudié deux ans plus tôt que le nom attribut, la seconde envisage les deux
cas de manière synchronique (8-10 ans).
o
Il n’y a qu’en Belgique que le critère de la suppressibilité est envisagé et qu’il est précisé que
l’attribut actualise le sujet.
o
Il n’y a qu’au Québec que l’on enseigne l’attribut comme pouvant être un pronom.
o
Ce n’est qu’en Suisse qu’il est dit s’accorder avec le verbe.
o
La France enfin est la seule à stipuler que l’étude de l’attribut ne se fera que dans le cadre de la
phrase simple et “en ordre” (S-V-O) mais que l’attribut, toutefois, s’accorder avec le nom (non le
sujet).
o
...
6
Discussion : la question des contenus
La lecture et la confrontation de ces documents officiels laissent manifestement à penser qu’ils ont été
rédigés sans concertation entre groupes de travail, ni sur le plan international. S’il y a bien un fil rouge
qui guide les contenus et leur progression, tout national et criticable soit-il, la question même des
contenus n’est que trop peu souvent soulevée :
S’il est un domaine dont tous les acteurs du système éducatif contestent le
déroulement au long de la scolarité, c’est bien celui de l’enseignement de ce qu’on
appelle communément l’orthographe grammaticale. Il est jugé tout à la fois
démotivant et peu efficace, du fait de son caractère répétitif. Pourtant, c’est sans doute
celui qui a enregistré le moins de transformations dans ces quarante dernières années
au moment même où la discipline du « français » se modifiait en profondeur. (Laparra
2010 : 35)
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La grammaire a longtemps été une matière spécifique et ce n’est que depuis les années 1960 qu’il est
question d’éviter de faire de la grammaire pour la grammaire ; une prise de conscience récente, donc. Il y
a eu le structuralisme, la didactique des langues étrangères, mais l’enseignement de la grammaire n’a pas
réussi à se renouveler. Echec qui est aussi dû au fait que
La rénovation n’a quasiment jamais été appliquée de façon systématique et
cohérente : aspects novateurs et continuité ont constamment cohabité ; les textes
officiels et bon nombre de manuels ont toujours maintenu une part plus ou moins
importante de la tradition, qu’il s’agisse des méthodes, des contenus, des progressions.
(Combettes 2009 : 42)
Ce sont précisément des réformes de fond qui doivent précéder toute réfection de la progression des
notions. Quand depuis trop longtemps, pour palier des résultats, performances ou compétences perçues
commes toujours plus médiocres, les décideurs tentent de frayer des chemins grammaticaux nouveaux par
un jeu sur les différentes étapes, ou la position des pions, ils en perdent de vue les répercussions sur le
terrain où
la grammaire n'est pas obtenue par transposition didactique de savoirs savants, mais
par recomposition de savoirs hétérogènes, certains obtenus à partir de la linguistique
par emprunts-modifications, d’autres conservés de la grammaire scolaire déjà-là. Par
recomposition, nous entendons que ces savoirs issus d’horizons très différents, ne sont
pas véritablement articulés, synthétisés, mais sont juxtaposés, alors même qu’ils
peuvent être inconciliables entre eux. (Vargas 2009 : 29)
Et l’enseignant doit composer avec cela, avec la superposition de traditions, aucune n’ayant été
durablement avalisée, aucune n’ayant été capable d’offrir une progression acceptable, aucune n’ayant
répondu aux besoins ou attentes des acteurs de l’enseignement. Même si la question de la progression
curriculaire ne concerne pas seulement les savoirs langagiers mais également la littérature (Dufays 2012 :
619-20), seulement pour les premiers semble-t-elle corélée aux contenus d’apprentissages non à leur seule
organisation. Les tentatives d’obtention de meilleures résultats florissent, en multipliant les approches ou
en les rendant toujours plus originales, mais aucune ne s’attaque au cœur du problème.
[Les réformes curriculaires] n’osent pas affirmer que le changement radical ne
consiste pas à nommer compétences tous les objectifs traditionnels de l’éducation
scolaire, mais à repenser les rapports entre le curriculum et ce qui est censé le
légitimer : la vie des gens. (Perrenoud 2008 : 12)
Pour les enseignants, du coup, l’enseignement grammatical devient un mal nécessaire, qu’ils ont eu à
subir et devront infliger (Cogis, Elalouf, Binker 2009 : 72) ; il s’assortit, de surcroit, d’un tel sentiment
d’inefficacité (Laparra 2010 : 35) qu’il est à craindre qu’il ne rencontre pas même les missions de l’école
(Meinertzhagen 2014). Des observations réalisées dans les classes (Gramm-R Scola 2009-14), au même
titre que les évaluations externes de type PISA, quelque criticables que soient ces dernières, montrent en
effet que ce malaise existe, qu’il se traduise par de faibles résultats, d’incessantes redondances ou une
réduction de la motivation (Ryan & Deci 2000 ; Bloch & Gerde 2009). Les premiers travaux de Bronckart
(1980) mettent en évidence l'inutile complexité des notions enseignées et la difficulté qu'éprouvent les
élèves à construire des stratégies de traitement adéquates. De même, Van Raemdonck (2011 : 16)
affirme que
si le savoir a du sens pour l’apprenant, si le système présenté est organisé de manière
cohérente et ne se réduit pas à une classification ou un étiquetage décalés de l’usage et
de la construction ou de l’interprétation de la signification, la grammaire apparaîtra
plus en phase avec la langue telle que l’exploitent les divers usagers, et ne sera plus
vue comme un discours abstrait inappropriable car inadapté.
Aux questions de contenus et de leur finalité s’ajoutent enfin celles de leur progression et de la maturité
cognitve des élèves à qui il est demandé de connaitre telle ou telle notion à un moment donné. PanchoutDubois (2011) note par exemple, concernant le PER suisse, que toute analyse grammaticale constitue une
manière de représenter et de catégoriser des énoncés qui ne va pas de soi, comme le prouve d’ailleurs le
fait que les catégories et les découpages changent avec les programmes d’enseignement. Or, à aucun
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moment, la préférence d’un modèle pour un autre n’est justifiée selon des critères de facilitation de
l’apprentissage ou en termes cognitifs. Il n’est pas évident, par exemple, que l’enfant, avant neuf ans, ait
pour schème canonique la phrase du type sujet – verbe – complément (Clark 1998 : 52 ; Combettes 2009 :
54). L’accord au pluriel ne relève pas lui non plus d’une simplicité sans équivoque : la progression allant
du nom au verbe développe chez les élèves une procéduralisation qui requiert un important cout cognitif
pour s’en départir (Totereau, Barrouillet, Fayol 1998 : 459-60). Il en est de même, par exemple, pour un
apprentissage aussi essentiel que l’accord entre le sujet et le verbe
In short, the results of this experiment show that, as expected, old adults highly
educated and having practiced written language for a long time make the same types
of error as younger and less experienced people: they tend to agree the verb with the
closest noun especially when this noun is plural. (Fayol, Hupet, Largy 1999 : 170)
Par ailleurs, Carol Chomsky (Goldblum 1972) montre qu’entre 6 et 8 ans, de nombreux enfants se
trompent dans l’interprétation de Jean est difficile à comprendre et Jean promet à Pierre de venir. De
plus, il existe encore des erreurs au-delà de 10 ans dans les interprétations possibles de Jean demande à
Pierre de partir. En revanche, les enfants manipulent très tôt, avant même d’être scolarisés, la tournure
dite passive (Clark 1998 : 52).
En d’autres termes, rien n’est moins définitif que ce qui pourrait pourtant paraitre évident concernant la
nécessité de l’apprentissage de certaines structures, ni même, dans l’affirmative, le moment de susciter
celui-ci. Les enseignants eux-mêmes n’ont pas droit au chapitre tant le prescrit grammatical fait autorité
et pèse comme véritable paradigme culturel. Or, en l’état, il n’est autre qu’un construit hybride passéiste,
étalon d’intégration sociale et jauge de docilité scolaire.
7
Conclusion
Observateur de classes de grammaire française depuis plusieurs années, nous nous posions la question de
savoir si les différents pays francophones du nord l’envisageaient de manière similaire. En ce qui
concerne la progression d’abord, nous aurions pu nous attendre à ce que, pour l’enseignement d’une
même discipline, la découpe en cycles, donc en stades développementaux, soit reprise d’un pays à l’autre.
Or, c’est loin d’être le cas et certains cycles se terminent là où d’autres sont en cours, voire débutent.
Même au sein d’un seul système éducatif, le découpage proposé par certains documents ne répond pas
lisiblement à celui indiqué par d’autres.
De manière générale, la tendance est au cycle de 3-4 ans quand il s’agit des intentions d’enseignement
(acquisition de compétences) et à la réduction à l’année dès qu’il s’agit de la notion. Mais à ce
pragmatisme ne répond aucune articulation tangible, les enseignants eux-mêmes sont écartelés entre la
volonté de donner de la finalité à long terme, échéance et processus sur lesquels ils n’ont pas d’emprise,
et la nécessité de transmission immédiate à l’échelle du cours et en vue de l’évaluation. De surcroit, le
statut de la grammaire n’est pas clair et oscille lui-même, parfois de manière contradictoire, entre les deux
pôles, ou échelons, que pourraient être la compétence et la connaissance. Enfin, ce sont les points de
grammaire eux-mêmes qui ne paraissent en rien répondre au découpage en cycles ni à un référent
commun.
Par conséquent, nous sommes en droit de nous demander la raison de l’existence des cycles, sans la
contester pour autant, et leur signification. Il en découle la question du découpage même de la notion
puisqu’il diffère d’un pays à l’autre et ne semble pas répondre à une progression pertinente ou
scientifiquement fondée. D’ailleurs, qui arbitre l’étagement, et selon quels critères ? Qui peut démontrer
que la connaissance de la notion d’attribut du sujet profite à l’acquisition d’une compétence de maitrise
de la langue ? Enfin, si les programmes et les socles ne se correspondent pas dans leur contenu,
qu’évaluer et à quelle fin ?
Ces différentes observations, valables pour ce point grammatical comme pour les autres, montrent
l’importance de repenser le curriculum, et de manière concertée entre pays. Outre qu’il soit actuellement
non recevable scientifiquement, il est illisible par les acteurs de terrain et remis en cause une fois
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confronté, pour une même matière, à celui des autres pays. En d’autres termes, les prescrits actuels, ceux
qui conduisent à l’évaluation des savoirs et savoir-faire des élèves, ceux qui organisent la formation, ne
reposent sur aucun, ou sur bien trop peu, de fondements théoriques scientifiquement valables.
Ce nouveau curriculum se devra donc d’être le résultat tant de l’observation de classes et du dialogue
avec les enseignants, que d’une recherche de type fondamental, nécessaire et parallèle, sur le
développement méta-cognitif des élèves afin d’évaluer quel savoir peut être co-construit à quelle étape de
l’évolution de l’élève et d’interroger comment la dimension métacognitive, ici appliquée au langage, peut
être impliquée dans les actions d’enseignement, les situations d’apprentissage et les processus cognitifs à
l’œuvre dans les activités des apprenants. Ceci est d’autant plus crucial que la littérature
psycholinguistique, abondante pour ce qui concerne l’acquisition de la grammaire chez le très jeune
enfant (0 à 3 ans) est, par contre, très peu diserte en ce qui concerne la poursuite des apprentissages
correspondant aux âges préscolaires et scolaires.
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1
Le Socle commun en brochure : http://goo.gl/z13omx [pdf]
Progressions disponibles en ligne : http://goo.gl/ISualP et http://goo.gl/APgr0Q [pdf]
3
Programmes disponibles en ligne : http://goo.gl/8SDSwb et http://goo.gl/6WmKqo (consultés en aout 2013)
4
Présentation accessible en ligne : http://www.plandetudes.ch/per
5
Tableau figurant sur le site officiel de l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles.
[http://www.enseignement.be/index.php?page=24223&navi=944 – octobre 2013]
6
Remarquons déjà la non-correspondance entre les 8 socles et les 7 points du programme. Même si, en ce qui
concerne ce dernier, il y a des sous-points, la logique de subdivision diffère.
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