GUINÉE
2016
www.africaneconomicoutlook.org
Olivier MANLAN / o.manlan@afdb.org
Mamadou Bobo SOW / mamadou.sow@undp.org
Guinée
Guinée
2Perspectives économiques en Afrique © BAfD, OCDE, PNUD 2016
GUINÉE
• La n de l’épidémie Ebola en décembre 2015 laisse un pays exsangue, avec une
croissance quasi-nulle, un décit budgétaire de plus de 7 % du PIB et de fortes
contraintesdecapacitéspouraccélérerlesréformesindispensablesàlarelancedu
développementetàlatransformationstructurelledeléconomie.
• Lesprogrèstardentàseconcrétiserdanslessecteurssociaux,alorsquelapauvreté
s’accroît, exacerbée par l’impact négatif d’Ebola sur les activités génératrices de
revenus,ainsiqueparlesdépensesliéesauxélectionsprésidentielles.
• Faceàuneurbanisationaccéléréeetmalcontrôlée,lespressionssocialesdeviennent
plusfortesetlamiseenœuvredelaPolitiquenationaledel’habitat(Visionhabitat
2021)constituel’unedesprioritésnationalesquidevraitmettrelesjeunesaucentre
desdésetdesenjeux.
Vue d’ensemble
Pour la troisième année consécutive, la Guinée a enregistré en 2015 un bilan économique en
forte régression, avec une croissance du produit intérieur brut (PIB) estimée à 0.1 % en termes
réels (soit une baisse du PIB par habitant de 2.7 %), contre 1.1 % en 2014 et 2.3 % en 2013. En
cause : l’épidémie Ebola qui a frappé la sous-région, notamment la Guinée, la Sierra-Léone et
le Libéria, entre décembre 2013 et décembre 2015. Lattentisme lié à l’élection présidentielle du
11 octobre 2015 y a également contribué, ainsi que la conjoncture économique internationale
défavorable, qui se traduit notamment par une baisse des cours des produits d’exportation.
Outre cette baisse drastique de la croissance, le pays a connu un relâchement de la discipline
budgétaire, lié notamment à l’accroissement des dépenses d’investissement dans les secteurs des
infrastructures (routes, énergie, etc.). Conjugués à la faible mobilisation des recettes, intérieures
et extérieures, cela a conduit à une aggravation du déficit budgétaire (7.5 % du PIB en 2015 contre
4.1 % en 2014), ainsi quà une réduction des avoirs extérieurs en devises (équivalent de 2 mois
d’importations, contre 4 mois en 2013). Alors que de bonnes performances ont été enregistes
depuis 2011 dans la mise en œuvre du programme de Facilité élargie de cdit (FEC) du Fonds
monétaire international (FMI), la plupart des critères de performances et objectifs indicatifs de
l’année 2015 n’ont pas été atteints.
Néanmoins, les perspectives de développement devraient saméliorer à partir de 2016 grâce à
l’apaisement du climat politique et à la déclaration de la fin de l’épidémie Ebola, le 29 décembre 2015.
En outre, l’engagement du gouvernement à redresser la situation macrconomique et la forte
amélioration de l’offre d’électricité, grâce à la mise en service du barrage hydro-électrique de
Kaleta, contribueront à améliorer le cadre des affaires. Ainsi, à partir de 2016, le pays devrait
renouer avec la croissance, avec un taux de 4.0 % en termes réels en 2016 et de 4.8 % en 2017.
À l’instar de nombreux autres pays en développement, la Guinée est confrontée à des défis
majeurs liés à son urbanisation. En 2014, la population urbaine était évaluée à 3.7 millions
d’habitants, soit 34.7 % de la population totale, contre 30.6 % en 1996. La croissance de la
population urbaine résulte d’un accroissement naturel de la population, de l’exode rural et de la
transformation des périphéries des centres urbains. Les villes ont évolué avec une accentuation
du déséquilibre de l’armature urbaine, confirmant le poids prépondérant de la capitale qui
comptait 1 667 864 en 2014 (15.7 % de la population du pays). Au nombre des principaux défis à
relever, il faut noter le chômage des jeunes, l’aggravation de la pauvreté urbaine (l’incidence est
passée de 23.5 % en 2002/03 à 30.5 % en 2007 et 35.4 % en 2012) et l’offre insufsante de services
publics de base, dont l’éducation, la santé, la sécurité et l’habitat décent.
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32 Perspectives économiques en Afrique
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Graphique 1. TauxdecroissanceduPIBréel
-2
0
2
4
6
8
10
2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015(e) 2016(p)2017(p)
Taux de croissance du PIB réel (%) Afrique de l'Ouest Afrique (%)
%
Source: BAfD, Département Statistique PEA. Estimations (e) ; prévisions (p).
Tableau 1. Indicateursmacroéconomiques
2014 2015(e) 2016(p) 2017(p)
Croissance du PIB réel 1.1 0.1 4.0 4.8
Croissance du PIB réel par habitant -1.6 -2.7 1.3 2.1
Inflation 9.7 8.0 8.5 8.8
Solde budtaire (% PIB) -4.1 -7.5 -5.0 -4.6
Compte courant (% PIB) -26.1 -23.6 -28.4 -25.6
Source : Dones des administrations nationales; calculs des auteurs pour les estimations (e) et les prévisions (p).
Développements récents et perspectives
La situation économique de la Guinée ne cesse de se dégrader depuis 2013. Déjà ts marqués
en 2014 par l’épidémie Ebola et ses multiples conséquences, les résultats économiques se sont
détériorés en 2015, avec une croissance du PIB en termes réels estimé à 0.1 %, contre 1.1 % en
2014 et 2.3 % en 2013. Par tête d’habitant, le PIB s’est contracté de 2.7 %. Plusieurs secteurs clés
de l’économie ont enregistré une croissance négative. C’est le cas notamment du secteur minier,
dont le poids dans le PIB se situe en moyenne à 15 % et qui s’est contracté de 3.4 %. Cest également
celui du secteur tertiaire – commerce, transports, administrations et autres – (environ 36 % du
PIB), qui a enregistré une croissance de -1.5 %. Pour le secteur des bâtiments et travaux publics
(BTP), qui est pourtant l’un des plus dynamiques de ces dernières années avec une croissance
annuelle moyenne de plus de 5 %, la croissance s’est limitée à 1 % en 2015.
Cette situation résulte de plusieurs facteurs dont la persistance de l’épidémie Ebola,
l’attentisme des investisseurs lié à l’élection présidentielle d’octobre 2015 et la baisse des cours
des matières premières d’exportation. En particulier, entre janvier et juin 2015, les exportations
totales d’or se sont établies à 410.3 millions de dollars américains (USD), en baisse de 4.8 % par
rapport au second semestre de 2014 et de 25.9 % en glissement annuel. De même, la valeur des
exportations de diamant a baissé de 28.8 % en glissement annuel.
Dans ce contexte, la politique expansionniste de dépenses publiques mise en œuvre en 2015
dans une période électorale s’est soldée par de fortes tensions sur le cadre macroéconomique.
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Ainsi, le total des dépenses publiques est passé de 24.9 % en 2014 à 27.1 % du PIB en 2015,
conduisant à un déficit budgétaire global de 7.5 % du PIB en 2015, contre 4.1 % en 2014. Par ailleurs,
les réserves de change ont baissé de moitié entre 2013 et 2015 pour ne plus représenter que 2 mois
d’importations. Au nombre des conséquences, il convient de citer la dépréciation du franc guinéen
(GNF) de 7 % par rapport au dollar en 2015.
Ainsi, la plupart des critères de performances et des objectifs indicatifs de 2015 au titre du
programme appuyé par la FEC nont pas été réalisés. Si la tendance à la baisse de l’inflation s’est
poursuivie (8.0 % à fin décembre 2015, contre 9.7 % à fin décembre 2014), cette évolution tient
en partie à la baisse continue et soutenue des prix pétroliers sur le marché mondial et au faible
niveau de lactivité économique.
Toutefois, les perspectives 2016 s’annoncent favorables. Cela tient à la fin officielle de
l’épidémie Ebola, déclae le 29 décembre 2015, et à un climat politique plus apaisé avec la tenue
récente de l’élection présidentielle et les mesures d’ouverture prises par le gouvernement. A cela,
il convient d’ajouter l’amélioration sensible de l’offre d’électricité depuis la mise en service du
barrage hydro-électrique de Kaleta. Ce barrage a permis d’atteindre une production électrique
de 333 470 mégawatheures (MWh) au cours du troisième trimestre 2015, contre 183 580 MWh le
trimestre précédent et 175 060 MWh un an plus tôt.
En 2016, la croissance du PIB devrait atteindre 4.0 % en termes réels, tirée principalement
par l’agriculture (taux de croissance prévu de 5.3 %), les mines (5.7 %), l’eau et l’énergie (10.0 %),
ainsi que le secteur des BTP (4.0 %). En dépit de la conjoncture défavorable des cours des produits
primaires, le secteur minier devrait se redresser, notamment grâce à l’entrée en production de
deux nouvelles sociétés d’exploitation et d’exportation de la bauxite. Cette dynamique pourrait
s’accélérer au cours des années à venir avec l’extension des capacités de production de plusieurs
sociétés (notamment Compagnie des bauxites de Guinée – CBG, Société minière de Boké – SMB)
et l’entrée en production d’autres sociétés. En progression constante conformément au Plan
d’investissement dans le secteur minier, la production totale de bauxite devrait doubler dans les
années à venir.
À moyen terme, le pays s’attend également à une reprise des investissements privés,
particulièrement dans le secteur minier, ainsi quà des investissements publics soutenus à travers
le Plan de relance post-Ebola et la poursuite des efforts de développement des infrastructures de
base, notamment lénergie et les routes. Dans cette perspective, les autorités guinéennes tablent
sur l’assainissement de la gestion macroéconomique, lamélioration du cadre des investissements
privés et le développement des partenariats public-privé.
Mais le défi lié à la diversification et à la transformation structurelle de l’économie reste
entier. Alors que près de 70.0 % de la population vit en milieu rural, le secteur primaire, y compris
l’élevage, contribue à l’économie nationale à hauteur de 23.8 % (année 2015). Lénorme potentiel du
secteur reste sous-exploité, dans la mesure où il est essentiellement caractérisé par des pratiques
traditionnelles, avec des rendements parmi les plus faibles de la sous-région. Quant au secteur
manufacturier, sa part dans le PIB n’excède guère les 5 %. Par ailleurs, en 2015, on estime à 74 %
la part du secteur minier dans les exportations de biens et services du pays, ce qui traduit la forte
dépendance du pays à l’égard de l’industrie extractive pour ses rentes de devises.
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Tableau 2. PIBparsecteur(enpourcentageduPIB)
2010 2014
Agriculture, foresterie, pêche et chasse 22.1 18.0
Dont pêche 0.9 0.9
Activités extractives 25.4 16.9
Dont extraction de pétrole brut et de gaz naturel
Activités de fabrication 7.3 8.6
Production et distribution d'électricité, de gaz et d'eau 0.4 0.6
Construction 11.6 15.4
Commerce de gros et de détail; réparation de véhicules
automobiles et hôtels et restaurants 17.8 23.8
Dont hôtels et restaurants
Transports, entreposage et communications 5.7 6.2
Intermédiation financière, immobilier, locations et activités de
services aux entreprises 2.8 4.1
Administration publique et défense; sécurité sociale
obligatoire 6.8 6.5
Autres services … …
Produit intérieur brut aux prix de base / au ct des facteurs 100.0 100.0
Source : Données des administrations nationales.
Politique macrconomique
Politiquebudgétaire
La politique budgétaire a été conduite dans le contexte de la sixième et septième revue du
programme économique et financier appuyé par la FEC du FMI. La pression fiscale s’est réduite à
14.1 % du PIB en 2015, contre 16.2 % en 2014 et 16.8 % en 2013. Les recettes non fiscales représentent
une faible part, 4.3 % des recettes courantes en 2015. Dans le même temps, les recettes fiscales
connaissent une amélioration de la part des impôts sur les biens et services, et sur le commerce
international. En revanche, la part des recettes sur le secteur minier a baissé régulièrement
(17.0 % en 2015 contre 18.6 % en 2013 et 25.0 % en 2011).
En 2015, les dépenses ont été évaluées en hausse à 25.6 % du PIB, avec un écart de
3 604.26 milliards GNF par rapport à 2014. Le déficit primaire s’est creusé pour se situer à 6.3 %
du PIB contre 2.9 % en 2014, du fait du rythme accéléré des dépenses d’investissements (9.7 %
du PIB contre 7.8 % en 2014), notamment dans la mise en œuvre des infrastructures routières
et énergétiques. Le ratio dette extérieure/PIB est passé de 22 % en 2013 à 26 % en 2014 et devrait
encore s’accroître pour atteindre 31 % en 2015, à la suite des contre-performances économiques
et de l’augmentation des emprunts à court terme. Ainsi, le taux de surendettement reste faible,
tandis que la dette intérieure se situe à 14 % du PIB.
Les dernières estimations indiquent une exécution du budget à hauteur de 89.8 %. Le
financement public en faveur des secteurs de l’éducation (12.8 % du budget national), de la santé
(3.9 %) et de l’agriculture (13.4 %) reste relativement modeste.
À moyen terme, d’après les projections, le ratio des recettes intérieures sur le PIB devrait s’établir
à 14.7 % en moyenne sur la période 201617. En moyenne, le total des dépenses représenterait 23 %
du PIB et les dépenses d’investissement devraient passer de 7.2 % du PIB en 2016 à 8.1 % en 2017.
Mais les incertitudes liées au contexte national et à la conjoncture sur le marché international de
matières premières assombrissent les perspectives à court terme.
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