engagement de respecter les lois maçonniques, contre-pouvoir d’un officier appelé orateur
en cas de transgression, formalités pour l’examen du candidat, le tout étant plus ou moins
collectif.
En outre, si les deux traditions spirituelles ont en commun de n’être pas dogmatiques mais
de comporter une méthode progressive dans le but de développer le progrès intérieur, la
franc-maçonnerie ne s’appuie que sur quelques principes alors que le bouddhisme se fonde
sur une doctrine très structurée et élaborée, même s’il importe de ne pas y adhérer sans
expérience intime, sur la seule autorité de maîtres. La franc-maçonnerie dit, de son côté, par
Oswald Wirth : « En initiation, rien ne compte hors ce qui s’accomplit intérieurement. » Mais
elle n’a que des principes. Tels que l’homme est perfectible : sans cela, comment espérer
progresser ? Ou la vertu. Et, du moins dans la franc-maçonnerie traditionnelle : la foi en la
transcendance. En raison de ses origines judéo-chrétiennes, la franc-rnaçonnerie exigeait la
croyance en un Dieu créateur et en l’immortalité de l’âme. Mais la franc-maçonnerie
traditionnelle, sous ses différentes formes obédentielles, accepte en son sein des
bouddhistes, comme vous pouvez le constater, et même au R.E.R. qui est un rite
spécifiquement chrétien. Il faut d’ailleurs considérer que la franc-maçonnerie, d’origine plus
ancienne que le christianisme, puisqu’elle remonte aux collèges de constructeurs romains,
comme l’a démontré Paul Naudon, historien de la franc-maçonnerie, a été christianisée. Il
est conforme à sa vocation qu’elle s’ouvre aux grandes spiritualités de son temps et de sa
géographie qui est aujourd’hui pratiquement mondiale.
Enfin, parmi les grands principes maçonniques : la bienfaisance, parfois malheureusement
abaissée en solidarité, qui implique réciprocité, alors que la bienfaisance, comme le don
bouddhiste (la première pararnita), est gratuite, sans attente de retour. Notre frère Henri
Dunant, par application de ce principe et par compassion envers les blessés des champs de
bataille, fonda la Croix Rouge. Bienfaisance, comme don, est un premier pas vers la
sagesse.
La méthode maçonnique est, certes, une méthode de progrès spirituel, mais elle ne définit
pas le but. Elle fait appel à l’étude et à la réflexion ainsi qu’à la pratique de la vertu, bien que,
sur ce point, elle n’ait pas de remède particulier pour combattre chaque vice, comme le
bouddhisme pour les émotions conflictuelles. Disons qu’elle s’en remet à la pratique
religieuse (ou philosophique) de ses membres. Elle n’a pas non plus de méditation, au sens
oriental du tenne. Tout juste peut-on évoquer que le récipiendaire est invité à penser à la
mort et à l’impermanence et à faire un retour sur lui-même dans le cabinet de réflexion (ou
chambre de préparation, au RER, où l’on retourne à chaque augmentation de salaire).
Ou encore que la très grande discipline de la loge exige l’immobilité de celui qui à été
autorisé à parler, les signes d’ordre évoquant les lieux de certains chakras ou même les
gestes que l’on retrouve dans la représentation de certains yidams. Ou enfin, le silence de
l’apprenti pour lui apprendre à faire taire son petit moi jacasseur et à s’ouvrir à la
transmission initiatique.
Il y a en, franc-maçonnerie, quelques éléments de la méditation, mais rien de comparable ni
à chiné, ni à chiné-lhaktong, ni aux méditations sur les yidams. Il n’existe aucune
visualisation en franc-rnaçonnerie. Mais la mise en scène des réceptions, ouvertures et
fermetures des travaux, peut s’apparenter -d’assez loin parce qu’elle n’est pas intériorisée- à
une certaine forme de visualisation avec ténèbres, lumière plus ou moins dense, batteries,
invocations et prières, dans des temples qui évoquent le macrocosme avec leur voûte ou
dais étoilé et, dans certains rites, la représentation du Soleil et de la Lune.
On peut donc dire que la franc-rnaçonnerie prépare ou incite à l’éveil (ou au salut) mais n’est
pas suffisante pour y mener et ne le prétend d’ailleurs pas. Elle se situe plutôt en
complément d’une voie spirituelle, lui apportant éventuellement, comme cela fut si souvent
nécessaire dans notre dans notre Occident ou Proche-Orient monothéiste, la tolérance, la
liberté dans la recherche de la vérité, la relativité des croyances et des rites par rapport à
l’ultime, le respect des diverses formes spirituelles et religieuses.