Quand le luxe s`en prend à l`art

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Stratégies marketing horloger
Quand le luxe s’en prend à l’art
Valeurs. Les marques ont souvent essayé de s’approprier des œuvres ou des artistes.
Cette voie n’est pas sans risque.
Sylvie Jeanbourquin
Extériorisé. Dans le domai-
ne de la promotion de l'art,
le partenariat est une liaison
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PME Magazine / janvier 2009
DR
A
rt et luxe ont évidem ment
des
valeurs communes: la beauté, la
rareté qui lui est si souvent
liée, l’exception dont on rêve.
Dès lors, il est très tentant
pour de nombreuses marques
horlogères de promouvoir
l’art, d'y faire référence, ou
tout simplement de créer. Le
mécénat, qui se rapproche le
plus de la finalité de l'art pour
l’art, est d’ailleurs répandu
dans la branche.
La Fondation Cartier pour
l'art contemporain passe
commande à des artistes. La
Fondation d'entreprise Montblanc soutient des mécènes.
Le Rolex Institute propose
de coacher de jeunes artistes par des maîtres dans leur
discipline, comme Martin
Scorsese pour le cinéma. En
matière d'architecture, Breguet a investi 5 millions de
francs dans la restauration
du Trianon de Marie-Antoinette à Versailles, en lien avec
sa montre mythique.
«Le mécénat a en premier lieu
une vocation philanthropique.
Cet investissement permet
toutefois à la marque d'améliorer son image en choisissant d'agir dans la durée, d'effectuer des choix pérennes»,
commentait Marie-Noëlle
Letellier, fondatrice d'atelierLUXE, lors de la Journée
internationale du marketing
horloger à La Chaux-deFonds.
Communication. Les montres Tudor font appel à l'artiste new-yorkais Ron Ferri pour créer
leur visuel publicitaire.
commerciale extériorisée
qui peut être assimilée à du
sponsoring de manifestation
culturelle. On pense à Chopard au Festival de Cannes,
Parmigiani au Festival de
Jazz de Montreux, Rolex à
la Scala. La marque accroît
ou consolide sa notoriété en
s'associant à un événement.
En général, elle analyse les
retombées pour se faire une
idée des retours sur investissement.
L’industrie du luxe aime également faire référence à l'art
dans sa communication,
en s'associant à des artistes
«ambassadeurs» (cinéma,
danse, musique). En matière
de publicité, cette association
est moins fréquente mais bien
présente. Girard-Perregaux
métaphorise sa manufacture
sur le thème du temps qui
valorise («Le temps apporte
de la valeur»). La marque
entoure son garde-temps
d'un tableau de Gauguin, ou
de bois brut transformé en
précieux Stradivarius. «La
référence à l'art pictural est
la plus délicate. Un tableau
placé à côté d'une montre
peut lui faire concurrence. Le
tableau doit clairement, mais
discrètement se rattacher aux
valeurs de la marque. L'œuvre de Gauguin n'occupe pas
le devant de la scène.»
Soft cannibalism. L'horlo-
gerie veut être considérée ellemême comme un métier d'art.
Elle doit donc faire attention
de ne pas trop insister sur les
chefs-d'œuvre. Le risque de
cannibalisation apparaîtrait
aussitôt. Certaines marques
préfèrent s'affirmer ellemêmes comme créatrices
d'art en mettant par exemple
en scène leur patrimoine dans
des musées privés. Le plus
célèbre est sans conteste celui
de Patek Philippe à Genève. Il
regroupe 1000 pièces. Depuis
quelques années, les musées
privés se multiplient, comme
s’ils voulaient devenir une
sorte de passage obligé vers la
vraie légitimité du luxe.
Certaines pubs horlogères
accèdent au statut de véritables œuvres d'artistes. Tudor a
mandaté l'artiste new-yorkais
Ron Ferri − qui travaille à l'encre noire sur les photographies
− pour créer son visuel publici-
Stratégies
taire. Une initiative très remarquée, qui a tout simplement
fait connaître la marque. Dans
le même état d'esprit, Piaget a
confié aux artistes français
Pierre & Gilles − qui mêlent
peinture et photographie − la
conception de leur campagne.
L’opération peut être considérée comme réussie puisqu’elle
a permis à Piaget d'affirmer
son esprit moderne et décalé
à travers le style des artistes.
Sans cannibalisation.
Autre succès: Cartier, qui fait
appel à sept signatures prestigieuses de la bande dessinée
pour le lancement de son
modèle Ballon bleu. Cette série
de BD a fait l'objet d'un coffret très original qui a marqué
l'événement. «Dans ces trois
exemples, la publicité devient
un lieu privilégié de création,
d'émotion, de magie. Ou l'art
en soi. La communication est
inventive, inédite, elle permet
de se démarquer dans un environnement concurrentiel.»
Subversif. Certaines pubs res-
sortent par leur ton subversif.
Ce fut le cas de la campagne
2005 de la marque de prêt-àporter Marithé et François Girbaud, aux frontières du luxe,
et qui a détourné «La Cène» de
Léonard de Vinci, en remplaçant les hommes par des femmes. Ce choix avait provoqué
l'ire des évêques français qui
avaient déposé plainte pour
injure envers la religion, et
qui l'avait faite interdire. Les
médias se sont emparés de l'affaire évoquant, et affichant, la
publicité dans de nombreuses
publications. Et en 2006, un
nouveau jugement l’a finalement autorisée...
L'art a pour
vocation d'être
pérenne.
La communication
publicitaire est
éphémère.
Les rapports entre art et communication ne sont pas toujours aussi aboutis. Ils sont
en fait contradictoires. L'art a
pour vocation d'être pérenne,
la communication publicitaire est éphémère. L'art a un
caractère unique, la pub fait
référence à quelque chose
de quantifiable; le geste d'un
artiste est en principe désintéressé, la raison d'être de la
communication est avant tout
commerciale (sauf peut-être
en matière de mécénat).
Le choix de l'art pour communiquer n'est-il pas trop risqué?
Il faut en tout cas un lien identifiable du côté des valeurs.
«Quand Citroën a sorti son
modèle Picasso en faisant référence à l'artiste, elle a tenté de
récupérer la notoriété du grand
maître pour sa marque. Mais
le grand public voit bien qu'il
n'y a pas de lien entre les deux.
Dans les produits de grande
consommation, où l'on n’est
pas dans les mêmes valeurs
que l'art (beauté, rareté, exception), la communication risque
fort de ne pas atteindre son
objectif.» 
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«En tant que client d’UBS
titulaire d’un contrat hypothé­
caire, j’ai toujours pu me fier
entièrement à UBS. En outre
je ne crois pas qu’UBS com­
mettra à nouveau de telles
erreurs. UBS va retourner aux
bons principes typiquement
suisses. J’en suis convaincu.»
0ETER7/TTIGER
Client d’UBS depuis 1978
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