français, il semble qu’il y ait deux analyses syntaxiques possibles, selon les locuteurs, l’une
assymétrique, analogue à celle de l’anglais, l’autre qui ressemble davantage à une construction
coordonnée..
Nous présentons enfin une analyse en HPSG basée sur la notion de construction (qui permet
de regrouper des propriétés idiosyncratiques ou non strictement non compositionnelles): une
telle approche nous permet d'une part de prendre en compte les propriétés que ces
constructions héritent du reste de la grammaire et ce qu'elles ont de spécifique; d'autre part de
pointer ce qui est commun entre les deux langues et ce qui est propre à chaque langue.
1. Rappels sur l'interprétation des comparatives corrélatives (CC)
Ces constructions sont parfois appelées "proportionnelles" dans la littérature. Comme l'ont
bien montré Cornulier (1988) pour le français, et Beck (1997) pour l'allemand, on a affaire à
une covariation entre deux éléments (par exemple deux degrés), mais en aucun cas à une
relation de proportionnalité, au sens mathématique du terme. Les exemples de Cornulier sont
les suivants:
(5) a Plus on est chauve, plus on est intelligent
bPlus on a d'enfants, moins on paie d'impôts
Il est clair qu'en (5a), il ne s'agit pas de comparer strictement le nombre de cheveux et le
nombre de neurones (ou le QI...); il s'agit simplement d'exprimer une généralisation
(évidemment provocatrice) sur une corrélation vague entre le degré de calvitie et le degré
d'intelligence. En (5b), on sait bien que l'impôt est dégressif selon le nombre d'enfants mais de
façon non directement proportionnelle (on ne paie pas moitié moins d'impôt quand on passe
de 1 à 2 enfants, ni de 2 à 4 enfants). En revanche, Cornulier indique bien que la relation est
orientée, c'est-à-dire que (5b) indique une implication entre la variation du nombre d'enfants et
la variation du montant de l'impôt mais ne dit rien de l'implication inverse : en effet ce n' est
pas parce que Mr X paie moins d'impôt que Mr Y qu'il a forcément plus d'enfants.
Cette double intuition (la corrélation est vague et il s'agit d'une implication) est aussi à la base
de l'analyse formelle proposée par Beck. Beck analyse la construction CC comme une
conditionnelle, avec la première proposition fonctionnant comme la condition et la seconde
comme la conséquence. A la différence des analyses antérieures, elle propose non une
comparaison entre une valeur dans la première clause et une valeur dans la seconde, mais une
implication entre deux comparaisons, chaque comparaison se faisant entre deux mêmes termes
dans chaque clause. Plus précisément, elle analyse le comparatif initial comme un quantifieur,
qui peut porter sur des individus, sur des degrés, sur des temps ou sur des mondes possibles,
mais à chaque fois sur des paires:
(6) a Plus quelqu'un est grand, plus il a de grands pieds
b Plus Jean court, plus il est fatigué
En (6a), la paraphrase proposée est : pour toute paire d'individus, x et y, si x est plus grand que
y, alors x a de plus grands pieds que y. En (6b): pour toute paire de situations, s1 et s2, si en s1
Jean court plus qu'en s2, alors Jean est plus fatigué en s1 qu'en s2. Donc dans cette analyse, il y
a bien à chaque fois comparaison, mais avec un terme implicite. C'est ce qui explique qu'on ne
puisse introduire un terme explicite de comparaison, ni un complément de mesure: