4. La polychromie
L’état actuel de la plupart des sculptures grecques, que ce soit la ronde-bosse ou la
sculpture architecturale, dissimule la grande importance qu’avaient dans l’Antiquité les effets
de couleurs. Il faut en effet imaginer l’ensemble de la statuaire antique vivement coloré.
Une première série d’effets est obtenue par le mélange des matériaux : les statues
chryséléphantines en sont un exemple ; l’ajout de pièces en bronze sur des statues en marbre
en est un autre. C’est surtout dans la sculpture architecturale qu’un certain nombre d’éléments
ou d’accessoires étaient rapportés en bronze, dans les frontons et dans les frises : roues de
char, lances, boucliers, mais aussi des barbes peuvent être rapportés en bronze. Les statues en
bronze possèdent elles aussi des pièces plus colorées : les lèvres ou les mamelons sont
constitués d’une masse de cuivre rouge, qui tranche par rapport à l’aspect doré du cuivre non
patiné, tandis que les dents peuvent être revêtues d’argent.
Une seconde série d’effets est obtenue par la peinture. Dans l’art grec, la frontière entre
sculpture et peinture n’existe pas. Certaines stèles funéraires étaient en partie sculptées, tandis
que les détails étaient rendus en peinture. Quand les circonstances de conservation sont
favorables, bien des marbres grecs ont conservé des traces de couleurs. Les statues en marbre
étaient peintes de couleurs vives : les vêtements, les yeux, la bouche et les cheveux étaient
généralement peints. Certaines statues de marbre étaient par ailleurs entièrement dorées, afin
de retrouver l’aspect du bronze non patiné. C’est la sculpture classicisante qui depuis la
Renaissance a habitué le goût européen à des sculptures où le marbre, parfaitement poli, laisse
éclater toute sa blancheur. C’est là une conception tout à fait étrangère à la statuaire antique.
D. Lʼanatomie et le vêtement
Les statues masculines de l’époque archaïque sont généralement nues ; c’est la nudité
héroïque. Le sport, qui distingue le citoyen du non-citoyen, se pratique en effet nu dans le
cadre de la palestre. D’autres types masculins, vêtus, sont également attestés, surtout à partir
de l’époque classique, en particulier les statues de « politiciens » ou d’« hommes de lettres »
(Démosthène, les Tragiques…). Pour décrire une statue nue, il est donc nécessaire de
connaître le vocabulaire de la musculature masculine. Néanmoins, les Grecs n’avaient pas
pour objectif de représenter cette musculature d’une manière réaliste et certains détails ne
correspondent parfois à rien du point de vue anatomique. À l’époque archaïque, le type
statuaire masculin majoritaire est le kouros, qui a la jambe gauche avancée. À partir de
l’époque classique, le souci des sculpteurs est d’élaborer de nouvelles formules d’équilibre, de
« pondération », qui se concurrencent et se succèdent. L’une des solutions trouvées est le
contrapposto ou chiasme, qui introduit le hanchement en répartissant le poids du corps
inégalement entre les deux jambes.
Les statues féminines sont généralement vêtues. Au VIIe siècle, les Grecs ont réalisé des
statuettes en terre cuite de divinité nue : les plaquettes estampées crétoises reproduisent le
motif oriental de la déesse de la fertilité Astarté. La première statue féminine nue fut sculptée
au IVe siècle ; c’est l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle.
Les vêtements grecs, masculins ou féminins, sont des pièces d’étoffe rectangulaires,
retenues par des fibules ; ils ne sont cousus que très exceptionnellement. Les deux textiles
usuels sont la laine et le lin. Le péplos est un vêtement de laine, ouvert sur le côté droit,
retenu aux épaules par deux fibules ; une ceinture le serre à la taille et, en général, l’étoffe
forme bouffant au-dessus. Le haut de l’étoffe est replié et tombe plus ou moins bas. Le
chitôn, ou tunique, est un vêtement plus fin, de lin. Il est généralement court chez les