dans l’objet perçu serait rendre possible l’objectivité pure. Ceci est bleu, ou ceci est
bien vert. Si je le perçois comme tel, alors tout le monde doit en faire autant. Ce
serait ne laisser aucune place à l’erreur ou à l’illusion. D’autre part, instituer les
qualités secondes uniquement dans le sujet percevant, serait rendre tout subjectif.
Deux individus ne perçoivent jamais le même objet, même si de fait ils regardent le
même objet. Tout dépendrait ainsi du point de vue. Nous devons aller plus loin et
dépasser cette opposition qui ne va pas sans rappeler celle entre le réalisme et
l’idéalisme.
Le réalisme logique s’oppose, en effet, au nominalisme
1
. D’un côté, les noms sont
des entités, de l’autre des abréviations qui désignent collectivement des particuliers.
Le réalisme métaphysique a pour antithèse l’idéalisme, que Berkeley désigne comme
immatérialisme et qui consiste à nier l’existence d’une matière des corps,
indépendante de nos perceptions. D’autre part, le matérialisme, entendu comme
réalisme physique, doit comporter un postulat supplémentaire : il identifie matière et
réalité sans être capable d’élucider la nature de la matière.
Les théories platoniciennes qui attribuent aux idées formes une réalité indépendante
(tant des substrats qui les portent que des individus qui en acquièrent une
connaissance), sont considérées à la fois comme un idéalisme et un réalisme. La
transformation d’une entité logique en réel doué d’existence (ailleurs que dans
l’esprit d’un sujet connaissant), est aussi nommée réalisme.
Le réalisme affirme que les concepts tels que ceux de substance, d’infini, de cause ne
sont pas seulement des déterminations mentales ou des produits de l’entendement. Il
admet cependant outre une substance universelle, un découpage de cette substance en
essences, donnant lieu à des substances particulières (ou individuation). L’idéalisme
critique les « abstractions réalisées », et ne voit pas que la science « réalise » des
concepts en supposant des atomes, des électrons, un espace-temps courbe, etc., avant
que m’expérience soit en mesure de trouver ces entités dans le monde physique. Ces
entités sont d’abord de nature virtuelle. Les idéalistes estiment les substances
inutiles, parce que inconnaissables et indéfinissables, faute de propriétés par quoi les
définir : nous ne connaissons que les rapports. En d’autres termes, réalisme et
1
Cf. Largeault J., Enquête sur le nominalisme, éd. Nauwelaerts, Louvain, 1971