Ces actions ont un certain succès, ce qui montre la force de Radio-Londres.
De plus, elles sont relayées, racontées ensuite, par la presse clandestine. Et reprise par d’autres postes : Radio-
Moscou, qu’on peut capter en France, « La voix de l’Amérique », Radio-Brazzaville ou Radio-Alger (quand
l’Algérie sort de la sphère de Vichy…)
Ainsi, le 14 juillet 1942, suite à appel, il y a 150 000 personnes dans les rues de Lyon, 100 000 à Marseille, et
30 000 à Grenoble. On signale des manifestations dans 71 villes. Des témoignages montrent des rassemblements
dans de petits villages. Et des querelles de chiffres opposent les estimations faites par les mouvements de
Résistance et celles des Allemands ou de Vichy !
Les manifestants courent des risques. Le préfet de Lyon demande à Vichy « Pouvons-nous tirer à blanc ? ». On
peut être arrêté, déporté.
Les mots d’ordre donnés par les émissions de Londres, les slogans, y sont répétés, pour contrer les risques de
brouillage. On donne la consigne de les prendre en sténo, de les diffuser…
On entend dans les rues des chansons entendues à la BBC qui sont fredonnées comme autant de signes de
connivence.
Vichy dénonce la « dingaullite » : ceux qui sont touchés par la folie de Gaulle.
Mais le succès se poursuit. On écoute la radio en famille. Malgré la répression qui se durcit contre ceux qui
écoutent. (Loi du 18-11-1942, parue en janvier 1943).
Toutefois, le ton général bascule à l’automne 1942.
L’opération alliée sur Dieppe a échoué le 19 août 1942. En 1942-43, le ton n’est plus à la blague ou à l’humour.
Les auditeurs veulent des informations.
Et un malaise se développe : en 1942, les Anglais s’engagent dans une campagne « hasardeuse », en sous-
entendant qu’un débarquement est proche. Ils lancent des avis, demandant à la population d’évacuer si possible
les zones côtières, de la frontière belge aux Pyrénées.
De Gaulle est hostile à cette « campagne des avis », il pense qu’elle va faire des déçus. Ce qui est le cas. La BBC
est alors fragilisée aux yeux des auditeurs.
Ex : un courrier du 5 avril 1943 : « Vous nous faites espérer depuis un an », « Les français avaient confiance »,
« N’entretenez pas chez nous un rêve chimérique ».
De plus, les Français sont alors confrontés au STO. Des lettres reçues montrent des réactions au slogan « N’allez
pas en Allemagne », répété en cadence du bruit d’un train… Tous sont contre la Relève et ce STO… Mais, en
gros, les auditeurs, confrontés aux difficultés de la vie quotidienne, pensent, « facile à dire » ! Comment se
ravitailler, s’habiller, en cas de désobéissance ?
Radio-Londres, par ses diverses émissions, va alors solliciter autrement les Français :
Elle en appelle à la police, aux gendarmes, aux maires : il faut perdre les listes, faire appel à ceux qui peuvent
cacher des jeunes.
Jusqu’où la radio peut-elle d’ailleurs pousser ? Le maquis des Glières, dans les Alpes, est constitué en 1944. Il est
assailli par la milice et succombera. Mais sur la BBC, les maquisards sont devenus des héros Ils se sentent
soutenus, et ne « décrochent » pas…
Radio-Londres demande aussi aux Français de préserver leurs postes de radio, précieux, fragiles, et dont
l’entretien est cher. Les TSF sont des postes à lampe.
Un poste coûte, d’occasion, entre 5000 et 7000 francs. Une lampe vaut 800 francs. (Quand un OS parisien,
« ouvrier spécialisé », gagne 10 francs de l’heure).
Une campagne est lancée pour que les Français les écoutent ensemble…
Il est en effet important pour les Alliés qu’il y ait suffisamment de radios au moment du débarquement
programmé.