De la chaleur à la ressource

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De la chaleur à la ressource géothermale
Page de présentation
1. De la chaleur de la Terre..
.............................................................................. 2
1.0 Structure interne du globe
1.1 La chaleur interne
1.1.a Flux interne et flux solaire
1.1.b Radioactivité et refroidissement
1.1.c Le flux de chaleur et ses deux composantes
1.2 Les transferts de chaleur dans la Terre
1.2.a Conduction, convection et géotherme terrestre
1.2.b Variations en conduction thermique
1.2.c Variations en convection thermique
1.2.d Variations dûes à l’advection thermique
2. ...à la ressource géothermale
........................................................................ 9
2.1 Le flux de chaleur continental
2.1.a Mesure du flux de chaleur
2.1.b Causes des variations
2.2 Allure des géothermes du sous-sol
2.2.a Perturbations en surface
2.2.b Perturbations paleoclimatiques
2.2.c Réservoirs de chaleur du sous-sol
2.3 Système géothermal
2.3.a Défintions et classifications
2.3.b Du système à la ressource
3. Références bibliographiques
........................................................................ 15
4. Pages « en savoir plus » :
-
Propriétés thermiques des matériaux géologiques
Des panaches convectifs dans le manteau
Variations du climat et température du sous-sol
1
-
De la chaleur à la ressource géothermale
Le volcanisme, les tremblements de terre, la formation des montagnes, et la plupart
des phénomènes associés à la tectonique des plaques sont contrôlés par les transferts de
chaleur dans la terre. Notre planète, souvent qualifiée de « machine thermique », est le siège
de processus variés (échanges entre l’atmosphère et la surface, magmatisme dans la
croûte, dorsales et rifts déchirant la lithosphère, courants ascendants de type « panache »
dans le manteau, inversions du champ magnétrique, etc). Parmi ces processus, l’activité
géothermale comme on l’observe en Nouvelle Zélande ou en Italie, représente de façon
spectaculaire l’évacuation de l’énergie géothermique stockée dans le sous-sol.
Toutefois, la chaleur interne de la Terre ne s’évacue pas de façon homogène en
surface. C’est la connaissance du comportement thermique de la croûte terrestre qui a
permis de mieux évaluer les caractéristiques des réservoirs d’énergie. Par exemple, il est
possible d’estimer la durée de vie des systèmes géothermaux, paramètre qui est
indispensable avant toute exploitation. De même, on comprend aujourd’hui pourquoi
certaines régions ne feront jamais l’objet d’exploration géothermique.
Dans certains cas, la chaleur de la Terre est stockée en subsurface (à des
profondeurs accessibles pour l’homme) dans des réservoirs poreux ou fracturés. Il est alors
possible d’utiliser les contrastes de températures pour en retirer les calories nécessaires à la
production de chaleur ou d’électricité. Des étapes préliminaires à l’exploitation géothermique
sont toutefois nécessaires, comme la caractérisation géologique de la ressource
géothermale, ou encore l’évaluation du potentiel géothermique et des besoins économiques.
1. De la chaleur de la Terre...
1.0 Structure interne du globe
Avant de détailler l’origine de la source de chaleur à l’intérieur du globe ou de
préciser les différents modes de transferts de la chaleur, il est nécessaire de rappeler les
principales caractéristiques de la structure interne de la Terre. Un grand nombre d’ouvrages
et de sites internet peuvent être consultés pour plus de détails.
C’est par l’étude des ondes sismiques que l’on a pu caractériser les grandes
discontinuités de la planète et définir les grandes enveloppes de la Terre. La croûte terrestre
est limitée à environ 30 km sous les continents et 6 km sous les océans (comprendre
« croûte océanique »). La limite inférieure de la croûte est appelée discontinuité du Moho. Au
dessous se situe le manteau terrestre, constitué d’un manteau « supérieur » et d’un manteau
« inférieur ». La frontière entre les deux manteaux est appelée la zone de transition et se
situe à 660 km de profondeur. Au dessous du manteau terrestre se trouve le noyau, lui aussi
2
divisé en noyau externe, de 2880 à 5150 km de profondeur, et la graine, entre 5150 et 6370
km de profondeur. La discontinuité manteau-noyau est appelée la couche D’’.
Si l’on s’intéresse aux déformations des matériaux terrestres, on distingue la
lithosphère, comprenant la croûte et la partie rigide du manteau terrestre, et la partie
déformable du manteau, appelée asténosphère. Dans la lithosphère, les transferts de
chaleur se produisent par conduction thermique, alors que dans l’asténosphère, la chaleur
s’évacue par convection thermique. Au sein du noyau terrestre, on distingue également la
partie liquide du noyau (le noyau externe) animée de mouvements convectifs de sa partie
solide (graine ou noyau interne).
Enfin, d’autres discontinuités sismiques ont été reconnues, comme la discontinuité à
410 km de profondeur. Toutes ces discontinuités correspondent à des changements de
densité ou de composition des matériaux terrestres, et elles sont pour la plupart associées à
des modifications importantes du régime thermique de notre planète.
Figure 1 : Schéma simplifié de la structure interne du globe.
1.1 La chaleur interne
1.1.a Flux interne et flux solaire
La température à la surface de la Terre est contrôlée par le flux d’énergie apporté par
le rayonnement solaire. Bien que ce flux soit mille fois plus important que la chaleur interne
3
de la Terre évacuée en surface, il est réfléchi vers l’atmosphère et ne joue qu’un seul rôle
dans le bilan thermique de notre planète, à savoir le maintien d’une température constante à
la surface. La chaleur du soleil et les variations climatologiques sont à la source des
processus modelant la topographie, mais c’est bien la chaleur interne qui est à la source du
magmatisme, de la tectonique des plaques et de la plupart des phénomènes géologiques.
Les plus grandes crises climatiques qu’auraient subi la planète (comme les grands épisodes
glaciaires d’il y a 500 millions d’années) n’auraient pénétré la surface que sur quelques
kilomètres et sur une courte période de temps, inférieure au million d’année. A l’opposé, la
fusion des roches crustales provoquée par des processus profonds peut donner naissance à
un système volcanique, qui va modifier l’équilibre thermique de l’ensemble de la croûte
pendant plusieurs millions d’années. Ainsi, si la température à la surface du globe reste
constante, autour de 20°C en moyenne, elle augmente régulièrement avec la profondeur,
pour atteindre probablement plus de 6000°C en son centre.
1.1.b Radioactivité et refroidissement
Les mesures de température dans les mines profondes ont montré depuis de début
du 19
ème
siècle que la température augmente avec la profondeur. En considérant une
augmentation moyenne de 30°C tous les kilomètres, William Thompson (Lord Kelvin) utilisa
la théorie de la conduction thermique pour calculer l’âge de la Terre. Il obtint 65 millions
d’années en considérant que notre planète se refoidit uniquement par conduction. Cet âge
était en contradiction avec les observations géologiques, qui militaient en faveur d’une Terre
âgée de plusieurs centaines de millions d’années. La découverte de la radioactivité (1896) et
son application à la Terre permit alors à Rutherford de préciser que le calcul de Kelvin
ignorait la contribution de la chaleur produite par désintégration radioactive. La présence
d’éléments radioactifs dans les roches terrestres nécessite en effet l’addition d’un terme
supplémentaire dans le bilan thermique de la Terre. Enfin, nous savons aujourd’hui que
l’excès de chaleur interne est évacué par convection thermique (avec mouvement de
matière) et que l’hypothèse de conduction pure n’est pas valide.
La production de chaleur à l’intérieur de la Terre est dûe à la décroissance des
éléments radioactifs comme l’uranium, le thorium et le potassium. Ceux-ci ne sont présents
qu’en très petite quantité dans les roches terrestres (en parties par millions (« ppm ») pour
l’uranium et le thorium, et en pourcent (%) pour le potassium), mais ils contribuent
aujourd’hui jusqu’à près de la moitié du flux de chaleur mesuré en surface. Le flux de chaleur
évacué par la surface terrestre est de 42 terawatts (42 1012 W), et la production de chaleur
interne atteint 20 terawatts. En d’autres termes, la Terre évacue plus de chaleur qu’elle n’en
produit : elle se refoidit. On estime son refroidissement à environ 130 °C par milliard d’année.
4
En fait, à cause de la lenteur du mécanisme de diffusion thermique, la Terre perd aujourd’hui
en surface la chaleur qu’elle a produite dans le passé.
1.1.c Le flux de chaleur et ses deux composantes
Le flux de chaleur terrestre évacué à la surface de la Terre est calculé à l’aide du
produit de deux quantités mesurées, le gradient de température et la conductivité thermique.
Le gradient de température (en °C/km) se mesure dans les profondeurs des forages miniers,
et la conductivité thermique (en W/m/°C) se mesure sur des échantillons de roches (des
carottes de forage si possible) représentatives des formations géologiques rencontrées. De
manière générale, ces deux quantités varient peu, et le flux de chaleur terrestre a une
moyenne globale de 80 mW/m². Toutefois, dans certaines régions où des anomalies
thermiques sont présentes, on peut mesurer plusieurs centaines de mW/m². Les régions à
fort potentiel géothermique peuvent évacuer plusieurs milliers de mW/m², comme à Wairakei
en Nouvelle Zélande.
Le flux de chaleur mesuré en surface se décompose en deux parties : la contribution
crustale au flux de chaleur, qui correspond à la production de chaleur à l’intérieur de la
croûte terrestre, et le flux de chaleur mantellique, qui correspond à l’évacuation de la chaleur
du manteau. La croûte océanique ne contenant que très peu d’éléments radioactifs, on
assimile le flux de chaleur océanique à celui du manteau sous-jacent. La contribution
crustale du flux océanique est négligeable, alors qu’elle est importante et variable au sein
des continents. Sous la plupart des continents, et en dehors des anomalies thermiques, le
flux de chaleur mantellique reste faible avec une valeur qui varie peu, comprise entre 10 et
30 mW/m². Cette valeur correspond à une valeur d’équilibre entre la partie profonde du
manteau terrestre qui est en convection thermique, et la croûte continentale où les transferts
de chaleur sont régis par la conduction thermique.
1.2 Les transferts de chaleur dans la Terre
1.2.a Conduction, convection et géotherme terrestre
Au sein de la lithosphère, c’est la conduction thermique qui régule les transferts de
chaleur, alors qu’au sein de l’asténosphère, les transferts se réalisent par mouvement de
matière, c’est-à-dire par convection thermique. Dans le cas de la conduction thermique, la
chaleur se diffuse sans qu’il y ait transfert de masse. A l’échelle d’une seconde, le manteau
terrestre est solide puisqu’il laisse passer les ondes sismiques de cisaillement ; cependant, à
l’échelle des temps géologiques, il se comporte comme un fluide visqueux : ses mouvements
profonds permettent en effet à la chaleur interne de s’évacuer vers la surface. On distingue
également les transferts de chaleur par advection thermique, où des transports de matière à
5
grande échelle se traduisent par des transferts de chaleur. Par exemple, lorsqu’une unité
lithologique vient chevaucher une province voisine, lorsque l’érosion fait remonter les
couches crustales intermédiaires, ou lorqu’un magma profond pénètre la croûte supérieure,
on dit qu’il y a transport de masse et de chaleur, ou advection thermique (on n’évoque pas
dans ce cas de mouvement de fluide). A l’inverse, la convection thermique est associée, elle,
au transport de chaleur par mouvement d’un fluide.
La variation de la température en fonction de la profondeur (le « géotherme »)
dépend du mode de transfert de chaleur. En régime conductif, la température augmente
régulièrement avec la profondeur alors que dans un milieu en convection thermique, les
mouvements du fluide tendent à homogénéiser les températures. En revanche, au niveau
des limites inférieure et supérieure du fluide en convection, qui sont appelées « couches
limites », le transfert de chaleur s’effectue par conduction. Ainsi, la lithosphère correspond à
la couche limite supérieure du manteau convectif, et la couche D’’, à la limite noyaumanteau, correspond à la couche limite inférieure du manteau. Au sein de chacune de ces
limites, la température varie fortement avec la profondeur, alors que le gradient de
température au sein des milieux convectifs reste très faible.
Figure 2 : Allure du géotherme terrestre avec domaine d’incertitude (zone grisée)
6
1.2.b Variations en conduction thermique
Les variations de comportement associés à la conduction thermique restent limitées,
notamment en raison de la faible variation des propriétés thermiques des roches. Par
exemple, la diffusivité thermique des roches crustales est généralement considérée comme
constante. En revanche, les variations de conductivité thermique peuvent expliquer
l’apparente variabilité du flux de chaleur mesuré en surface. Ainsi, une couverture
sédimentaire de plusieurs kilomètres d’épaisseur aura un effet d’isolant thermique par
rapport à une couche de lave. De même, certains gisements métallifères représentent de
véritables anomalies conductrices de plusieurs centaines de mètres d’épaisseur, et peuvent
ainsi perturber le signal thermique régional. Ces effets dus aux variations de conductivité
thermique sont connus et peuvent être corrigés par modélisation de la réfraction thermique
associée. Ainsi, la chaleur profonde qui provient du manteau terrestre et qui se propage en
surface par conduction thermique, se trouve capturée sous les isolants thermiques, ou
pompée par les conducteurs.
D’autres manifestations de réfraction thermique peuvent être identifiées en
caractérisant la variation latérale de la production de chaleur des roches. Par exemple, un
massif granitique pourra produire une quantité de chaleur 10 fois plus importante qu’une
roche encaissante typique. Les variations de composition des roches impliquent donc des
transferts latéraux de chaleur, qu’il faut savoir identifier pour bien comprendre le régime
thermique d’une région donnée.
1.2.c Variations en convection thermique
Au sein du manteau terrestre (dans sa partie non rigide), la convection thermique se
traduit par des mouvements de grande échelle. Des circulations convectives de plusieurs
milliers de kilomètres sont probablement superposées aux courants ascendants qui
traversent l’ensemble du manteau. D’une part, la taille de la plaque Pacifique fait penser que
des mouvements horizontaux de grande échelle sont présents dans le manteau. D’autre
part, les « points chauds » de la planète (Hawaï, Tahiti, La Réunion, Cap Vert, etc) tendent à
militer en faveur d’une convection de type « panache », comme les expériences de
laboratoire peuvent l’illustrer. En ce qui concerne les courants descendants, représentés par
les zones de subduction, on observe différents régimes de déformation. Il semble que les
plaques océaniques qui plongent dans le manteau puissent s’épaissir lorsqu’elles
rencontrent la zone de transition du manteau, ou s’y étaler sans épaississement, ou encore
pénétrer cette barrière avec ou sans grande déformation. La connaissance précise du
régime convectif du manteau dépend d’un nombre important de paramètres qui varient dans
le temps et dans l’espace, et malgré l’avancée rapide des techniques de modélisation
numérique, la figure de convection dans le manteau terrestre reste encore mal comprise. On
7
assiste toutefois dans les années 2001-2003 à plusieurs tentatives de représentations
destinées à réconcilier l’ensemble des observations (exemples ci-dessous).
Figure 3 : Modèles récents sur les transferts de chaleur convectifs dans le manteau terrestre, mettant
l’accent sur diférents types de panaches (d’après Forte & Mitrovica, 1999 (à gauche), et Courtillot et al.,
2003).
1.2.d Variations dûes à l’advection thermique
Au sein de la croûte terrestre, divers phénomènes peuvent modifier fortement l’allure
des géothermes. Lors d’une érosion rapide (de l’ordre du mm/an), les roches profondes et
donc chaudes, remontent vers la surface. De même, l’extension horizontale qui se produit
lors de l’ouverture d’un bassin a pour effet d’amincir rapidement la croûte, et donc d’accroîte
la valeur du gradient géothermique. Ces perturbations, bien que non permanentes, peuvent
subsister pendant plusieurs millions d’années. En outre, plusieurs processus peuvent
engendrer la fusion des roches crustales (source de chaleur profonde, réchauffement de la
croûte à la suite d’un chevauchement, etc). Le magma ainsi créé devient plus léger que les
roches encaissantes et tend à remonter vers la surface, soit par le biais de fractures soit par
ascension globale du réservoir de magma. A quelques kilomètres de profondeur, le réservoir
de magma s’installe (son ascension est bloquée par la rigidité de la croûte supérieure) et ne
refroidit qu’après plusieurs centaines de milliers d’années (voire plusieurs millions d’années
pour les grands réservoirs). Généralement, la présence d’une telle source de chaleur (au
moins 650°C) engendre des circulations convectives des fluides qui proviennent de la
surface. Un système géothermal se met ainsi en place, comme on l’observe dans la plupart
des systèmes volcaniques actifs.
8
2. ...à la ressource géothermale
Une ressource géothermale étant destinée à être utilisée comme source d’énergie
pour produire de la chaleur ou de l’électricité, cette deuxième partie se focalise sur la chaleur
du sous-sol continental.
2.1 Le flux de chaleur continental
2.1.a Mesure du flux de chaleur
Pour connaître le flux de chaleur qui s’évacue à la surface de la Terre, il faut mesurer
la variation de la température en fonction de la profondeur, c’est-à-dire le gradient
géothermique, exprimé en °C/km, et la conductivité thermique, exprimée en W/m/°C. Le
produit de ces deux valeurs donne le flux d’énergie par unité de surface (en mW/m²). Le
gradient géothermique se mesure le plus souvent dans les forages (miniers ou pétroliers) à
l’aide d’une sonde thermique, dont la précision est meilleure que le dixième de degré. Il est
préférable de disposer de plusieurs dizaines de mesures de températures à différentes
profondeurs afin d’estimer un gradient thermique stable. La conductivité thermique se
mesure en laboratoire, avec si possible un appareil « à barres divisées », permettant
d’obtenir une précision supérieure au dixième de mW/m².
Afin d’éliminer toute perturbation thermique du sous-sol qui ne serait pas reliée à la
chaleur profonde, le gradient géothermique est généralement estimé avec des mesures de
températures au dessous de 300 mètres de profondeur. Dès que le gradient reste stable sur
plusieurs centaines de mètres, on utilise les mesures de conductivité correspondant aux
profondeurs des mesures afin d’obtenir la valeur stable du flux de chaleur. Dans une région
donnée, il est courant de disposer de plusieurs forages à proximité les uns des autres, et
dans ce cas, c’est la moyenne des estimations qui est retenue. En effet, diverses sources de
variation du flux de chaleur peuvent ainsi être éliminées, et le signal retenu représente mieux
le régime thermique de la croûte.
2.1.b Causes des variations
Le flux de chaleur continental varie selon la nature des roches sous-jacentes : les
granites contiennent de grandes quantités d’éléments radioactifs (par rapport aux autres
roches) pouvant résulter à une contribution crustale importante du flux de chaleur mesuré en
surface. Par exemple, une intrusion granitique de 5 km d’épaisseur, et dont la production de
chaleur (mesurée en laboratoire à partir d’échantillons) atteint 5 µW/m3, évacuera en surface
25 mW/m², valeur pouvant représenter la moitié du flux mesuré. A l’inverse, certaines roches
intrusives comme les anorthosites, ne produisent que très peu de chaleur (de l’ordre de 0.1
µW/m3), ce qui permet d’approcher plus facilement la valeur du flux de chaleur en profondeur
(la contribution crustale est alors très faible).
9
Le flux de chaleur continental varie également selon l’histoire géologique de la région.
Dans les terrains continentaux très anciens, qui n’ont pas subi d’évènements thermiques ou
tectoniques depuis des centaines de millions d’années, le flux de chaleur profond (provenant
du manteau) est généralement faible, autour de 15 mW/m². A l’inverse, dans les régions
actives, des valeurs bien plus élevées pour le flux profond semblent nécessaires pour
expliquer le signal en surface, comme pour le cas du Massif Central par exemple.
Enfin, le flux de chaleur continental peut montrer des variations plus subtiles, reliées
à la structure de la croûte sous-jacente. La présence de formations conductrices, comme les
quartzites, ou comme certains gisements métallifères, peut engendrer des phénomènes de
réfraction thermique, impliquant une variation du signal en surface, allant du simple au
double et sur une distance de quelques kilomètres. De même, une variation graduelle de la
composition de la croûte peut également modifier de façon régulière le flux de chaleur en
surface. L’interprétation des variations du flux de chaleur en surface nécessite donc une
connaissance de la géologie régionale, ainsi qu’une compréhension des transferts de
chaleur dans la croûte terrestre.
Figure 4 : Illustration de différentes causes de variations du flux de chaleur,en l’absence de magmatisme
ou de volcanisme.
10
2.2 Allure des géothermes du sous-sol
2.2.a Perturbations en surface
Lorsqu’on analyse la variation de la température avec la profondeur, il est nécessaire
de préciser le domaine de profondeur considéré. En effet, à l’échelle de la croûte, la
production de chaleur des roches tend à courber le géotherme vers le bas (le gradient est
plus fort vers la surface), mais à l’échelle du kilomètre, cette courbure n’est pas perceptible.
L’allure linéaire du géotherme est généralement obtenue au-dessous de 300m, mais le
domaine des premières centaines de mètres est en revanche le lieu de processus plus
complexes puisqu’il fait intervenir les échanges thermiques entre l’atmosphère et le sous-sol,
mais aussi les transferts de chaleur associés aux variations de topographie ou au régime
hydrologique régional. En outre, les variations des conditions thermiques en surface
(présence d’un lac, différences d’ensoleillement, etc) peuvent engendrer des perturbations
discernables en profondeur.
D’autres processus peuvent également perturber le géotherme. Localement, de
brusques augmentations ou diminutions de la température peuvent être reliées à des
écoulements de fluide dans des failles qui recoupent le forage. Les écoulements de grande
échelle, associés à une topographie importante, peuvent aussi perturber le signal thermique
d’équilibre. Enfin, les signatures de la subsurface sont fortement dépendantes de l’histoire du
couvert végétal. En effet, il a été montré que la déforestation ou les incendies de forêt
pouvaient se traduire en profondeur par des signatures thermiques ressemblant à celles
dûes au réchauffement climatique récent.
2.2.b Perturbations paleoclimatiques
Parmi l’ensemble de ces perturbations qui masquent la valeur réelle du flux de
chaleur, l’effet des changements climatiques récents est le plus important. La lenteur de la
diffusion thermique permet aux variations de la température du sol de se propager en
profondeur et de rester discernable jusqu’à 300 m environ. Au-delà, la perturbation reste
présente mais négligeable. Par conséquent, des modèles paleoclimatiques permettent de
corriger les profils de température mesurés dans les premières centaines de mètres afin de
se rapprocher des valeurs non perturbées.
Les effets paleoclimatiques récents (comme les petits âges glaciaires du 18ème siècle
ou le réchauffement climatique actuel) perturbent le géotherme, et ce de façon d’autant plus
marquée que la perturbation est récente. Sur la figure ci-dessous, tirée de mesures réelles
dans un forage du Canada, on mesure en subsurface un gradient de température négatif : la
température diminue avec la profondeur jusqu’à quelques dizaines de mètres de profondeur.
Cette diminution représente en réalité le réchauffement climatique du siècle dernier. Au-
11
dessous, le géotherme se courbe pour rattraper l’allure linéaire en profondeur ; le gradient
montre même un maximum qui est supérieur à la valeur d’équilibre: on devine ici le
refroidissement lié aux petits âges glaciaires.
Bien que ces perturbations soient reconnues dans la plupart des régions du globe,
elles diffèrent en amplitude selon les conditions locales. En général, elles n’affectent le signal
de subsurface que de quelques degrés au maximum, mais il faut garder à l’esprit que
l’existence d’un gradient faible, voire négatif, ne représente pas une anomalie dûe à la
mesure, mais bien un processus de transfert de chaleur entre la surface et le sous-sol. C’est
en analysant et en comprenant ces signaux qu’il est possible de les éliminer pour retrouver
le gradient thermique représentatif des profondeurs.
Figure 5 : Allure typique d’un géotherme dans les premières centaines de mètres de
profondeur.
2.2.c Réservoirs de chaleur du sous-sol
Par définition, puisque la température augmente avec la profondeur (en ignorant les
effets décrits précédemment), le sous-sol est potentiellement un réservoir de chaleur. Les
faibles différences de températures entre la surface et quelques centaines de mètres de
profondeur sont parfois utilisées pour le chauffage d’habitations. Pour mieux définir la notion
de réservoir, où les contrastes de température sont élévés, on s’intéresse aux
caractéristiques géologiques du site. La figure ci-dessous montre quatre cas de figure où la
température dans le forage B est nettement plus élevée que dans le forage voisin (A). Un
massif granitique, ou plus exactement une unité géologique qui produit bien plus de chaleur
12
que les roches encaissantes, peut se traduire par une élévation locale de la température. De
même, une intrusion magmatique en cours de refroidissement produira le même type de
géotherme. Une couverture sédimentaire, avec donc un caractère d’isolant thermique,
réchauffera le milieu. Enfin, les circulations de fluides crustaux peuvent être piégés dans un
réseau de failles, privilégiant le stockage des températures élevées à faible profondeur.
Les réservoirs les plus intéressants pour la production d’électricité sont probablement
ceux qui rassemblent les 4 caractéristiques, et qui peuvent donc cumuler les différents effets
à la source de l’excès de température. Il est en effet imaginable que dans une structure
d’effondrement, à remplissage sédimentaire, une intrusion magmatique fortement radioactive
se soit mise en place à faible profondeur, et que cette mise en place se soit accompagnée
d’une farcturation intense au toît du réservoir, permettant le piègeage de fluides chauds. Il se
pourrait que le site de Soultz-sous-Forêts en Alsace réponde partiellement à ce schéma.
Figure 6 : Différents cas géologiques pour lesquels un réservoir de chaleur peut être reconnu
dans le géotherme du forage B (par rapport au géotherme du forage A, non affecté).
13
2.3 Système géothermal
2.3.a Défintions et classifications
La définition d’un système géothermal a évolué depuis les années 1970-1980.
Auparavant, toute notion de géothermie impliquait non seulement une source de chaleur,
mais aussi la présence de fluides, et celle d’un milieu poreux ou fracturé permettant la
circulation hydrothermale. Depuis les avancées technologiques permettant la création de
fractures, l’injection et le pompage de fluides, il est possible d’envisager toute source de
chaleur accessible comme une ressource géothermale potentielle. L’exploration des
systèmes dits « roche chaude et sèche », ou « Hot Dry Rock » en anglais (HDR), se focalise
ainsi sur l’accessibilité de températures élevées à faible profondeur, typiquement 200°C à
moins de 5 km, comme dans le cas du site pilote de Soultz-sous-Forêts en Alsace.
Plusieurs critères de classifications des systèmes géothermaux ont été proposés. Si
on s’intéresse à la situation géologique des systèmes, on distingue (1) les systèmes reliés
aux systèmes volcaniques récents (la caldeira de Valles en Californie, le système de
Bouillante en Guadeloupe, le champ de Wairakei en Nouvelle Zélande), (2) les systèmes
reliés à des évènements tectoniques plus anciens (Larderello en Italie, Reykjavik en
Islande), (3) les systèmes reliés aux bassins sédimentaires (bassin de Paris, bassin de
l’ouest canadien). En considérant l’absence ou la présence de fluide, on obtient trois
catégories : (a) les systèmes à dominante vapeur (The Geysers en Californie, Larerello en
Italie), (b) les systèmes à dominante liquide (Wairakei en Nouvelle-Zélande, bassin de Paris,
Banff au Canada), et (c) les systèmes secs (Valles en Californie, Carnmenellis en
Angleterre). Enfin, il est aussi possible de classifier les ressources géothermales selon leur
usage, et dans ce cas, on distingue les systèmes produisant de l’électricité (Cerro Prieto au
Mexique), ceux permettant l’utilisation directe de la chaleur (Islande, Nouvelle-Zélande),
ceux produisant du chauffage pour les habitations ou les serres (France, Japon), et ceux
utilisés pour les piscines ou l’aquaculture.
2.3.b Du système à la ressource
Un système géothermal, au sens géologique du terme, ne constitue pas
nécessairement une « ressource » au sens energétique. Tout d’abord, l’énergie que l’on peut
récupérer au sein d’un système doit être considérée comme inépuisable à l’échelle de
l’homme. Ce point ne pose généralement pas de problème car les systèmes géologiques ont
des durées de vie dépassant d’au moins 100 fois une vie humaine. Toutefois, lorsque l’on
utilise une ressource de chaleur, en la refroidissant par exemple par injection de fluide froid,
la durée de vie diminue fortement. On peut calculer par un bilan des échanges thermiques,
le temps nécessaire pour puiser toute l’énergie disponible dans un système géothermal. Par
14
exemple, le système de Wairakei en Nouvelle Zélande, refroidi naturellement par la
circulation hydrothermale, a une durée de vie estimée à plus de 7000 ans.
Le système géothermal devient effectivement une ressource énergétique à partir du
moment où l’exploitaion de l’énergie du sous-sol devient « rentable ». Cette notion de
rentabilité, indispensable à celle de ressource, vient biaiser celle de « système géothermal ».
Par exemple, l’eau chaude que l’on peut extraire des tunnels en Suisse représente une
réelle ressource géothermale, alors qu’aucune structure géologique particulière n’y est
associée. Dans ce cas, c’est simplement l’accessibilité (provoquée par l’homme) à des
différences de températures et des débits suffisants qui permettent l’exploitation de la
chaleur du sous-sol. Toutefois, un grand nombre de systèmes géothermaux montrent
aujourd’hui leur potentialité à se transformer en véritables ressources énergétiques. La
connaissance des systèmes géologiques associés, ainsi que celle des transferts de chaleur
dans le sous-sol ouvrent ainsi des perspectives de développement pour la géothermie.
3. Références bibliographiques
Images ou figures tirées des références bibliographiques suivantes :
™ Courtillot, V., A. Davaille, J. Besse and J. Stock, Three distinct types of hotspots in the Earth ‘s
mantle, Earth and Planetary Science Letters, 205, 295-308, 2003
™ Forte, A.M. and J.X. Mitrovica, Deep mantle high-viscosity flow and thermochemical structure
inferred from seismic and geodynamic data, Nature, 410, 1049-1056, 2001
™ Griffiths, R.W., and I.H. Campbell, Stirring and structure in mantle starting plumes, Earth and
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™ Guillou, L., and C. Jaupart, On the role of continents on mantle convection, Journal of
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™ Olson, P., Hotspots, swells and mantle plumes, in « Magma transport and storage », pp33-51,
M.P. Ryan (ed.), John Wiley and Sons Ltd, Chichester, UK, 1990
™ White, D.B., The planforms and onset of convection with a temperature-dependent viscosity,
Journal of Fluid Mechanics, 191, 247-286, 1988
Ouvrages spécialisés :
™ A.M. Jessop, « Thermal Geophysics », Elsevier, Amsterdam, 306p., 1990
™ Schubert, G., Turcotte, D., and Olson, P., « Mantle Convection in the Earth and Planets »,
Cambridge University Press, UK, 940p., 2001.
™ J. Elder, « Geothermal Systems », Aca&demic Press, London, 508 p., 1981
15
Propriétés thermiques des matériaux géologiques
Les caractéristiques spatiales et temporelles des transferts de chaleur dans la
Terre dépendent des propriétés thermiques des roches. Par exemple, la constante de temps
de diffusion donne un ordre de grandeur sur la durée nécessaire pour qu’une perturbation
thermique soit ressentie à une certaine distance. Cette constante dépend de la diffusivité
thermique des roches, qui reste identique pour la plupart des roches. La valeur de la
diffusivité étant très faible (10-6 m²/s), les transferts de chaleur par conduction sont lents. On
peut estimer qu’une perturbation thermique met 10,000 ans à parcourir 1 km, ou 1 million
d’années à parcourir 10 km.
Contrairement à la diffusivité thermique, la conductivité thermique et la
production de chaleur varient selon le type de roche. Quelques valeurs sont données cidessous, à titre d’information, mais ne représentent en aucun cas des valeurs moyennes. En
effet, si l’on considère les granites, où les éléments radioactifs sont concentrés, on peut
trouver des exemples où la production de chaleur dépasse 10 µW/m3 (cas de certains
granites en Australie). De même, la valeur de la conductivité thermique pour les sédiments
est généralement considérée comme faible, mais on trouve également des valeurs autour de
3.0 mW/m².
Nature de la roche
sediments
Conductivité thermique
(W/m/K)
Production de chaleur
(µW/m3)
< 2.0
3.1 – 3.5
0.6
> 2.5
granodiorite
2.6
0.4 – 2.0
monzonite
3.3
2.5
basalte
1.7 - 2.0
0.2 - 0.5
gabbro
2.6 – 3.0
0.1
anorthosite
3.2 – 3.6
0.1
granite
A l’opposé, on considère généralement que la capacité calorifique des roches reste
voisine de 1000 J/kg/K, et que leur dilatation thermique est d’environ 2 10-5 °C-1.
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Des panaches convectifs dans le manteau
Les mouvements horizontaux des plaques lithosphériques nécessitent un mécanisme
moteur. Les contrastes thermiques entre les limites inférieure et supérieure du manteau
terrestre, et les estimations de la viscosité des roches mantelliques permettent d’affirmer que
la chaleur interne s’évacue par convection thermique. En d’autres termes, les contrastes de
températures engendrent des variations de densité qui se traduisent par des mouvements
lents de grande ampleur au sein du manteau : les corps froids et denses plongent dans les
profondeurs du manteau alors que les corps chauds et légers remontent vers la surface.
Dans les sytèmes naturels, la convection thermique peut prendre différentes figures.
Selon la vigueur de la convection (quantifiée par le « nombre de Rayleigh »), les courants
ascendants et descendants s’organisent en une géométrie permettant une évacuation de
chaleur optimale. Ainsi, selon la valeur du nombre de Rayleigh, et selon les contrastes de
viscosité présents dans la couche de fluide, on obtient diverses géométries : rouleaux,
carrés, hexagones, triangles, et « panaches ». La figure ci-dessous montre certaines de ces
géométries obtenues dans un fluide à viscosité variable. La figure suivante montre d’autres
expériences de laboratoire, focalisées sur les diverses géométries des panaches convectifs.
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Dans le cas du manteau terrestre, le calcul du nombre de Rayleigh indique que les
courants ascendants et descendants prennent la forme de panaches convectifs. Si cela
semble être le cas pour les courants ascendants, il n’en est pas de même pour les courants
descendants : le manteau terrestre est en effet plus complexe qu’une simple couche de
fluide soumis à un gradient thermique. Si l’on tient compte de la production de chaleur
interne du manteau, de la présence de plaques insubmersibles (les continents), et de la
mobilité des plaques, on explique mieux pourquoi les mouvements descendants s’organisent
en plaques descendantes, alors que seuls les mouvements ascendants forment des
panaches. La figure ci-dessous montre quelques exemples de panaches convectifs
ascendants obtenus au laboratoire, pour différentes conditions expérimentales.
Expériences de laboratoire où les conditions expérimentales varient : de gauche à droite :
panache résultant de la convection thermique dans un fluide à viscosité constante (Guillou &
Jaupart, 1995) ; panache provoqué par injection d’un fluide chaud et léger (Campbell &
Griffiths, 1990) ; idem, pour un panache de très faible viscosité (Olson, 1990).
Le modèle de panache mantellique a permis aux géophysiciens de proposer un
mécanisme responsable d’un grand nombre d’observations. Les « points chauds », comme
ceux que l’on propose comme à l’origine des chapelets d’îles volcaniques dans le Pacifique
(exemple d’Hawaï), seraient reliés en profondeur à l’arrivée d’un panache mantellique. Les
bombements topographiques de grande longueur d’onde qui sont mesurés (jusqu’à 3 km
d‘élévation sur une distance de 3000 km) s’expliquent par le support dynamique d’un tel
panache mantellique arrivant sous la lithosphère. Dans le détail, les conditions de formation
des panaches mantelliques sont différentes de celles imposées en laboratoire, et c’est
pourquoi un certain nombre de paramètres sont testés, qu’il s’agisse de modélisation
analogique ou numérique. On dispose aujourd’hui d’un éventail de manifestations de type
« panache » permettant d’expliquer les anomalies de composition chimique des laves
associées aux panaches, les deux phases d’éruptions séparées de 20 à 40 millions
d’années lors des épanchements basaltiques, les anomalies topographiques associées, ou
encore le dédoublement des alignements insulaires.
La proposition initiale de J. Morgan (en 1971) qui consistait à évoquer une série de
panaches traversant le manteau reste toujours d’actualité. Toutefois, les preuves sur
l’existence même de telles structures manquent cruellement, alors que le modèle dynamique
permet d’expliquer la plupart des données géologiques, géochimiques et géophysiques. Au
cours des années 2001 à 2003, plusieurs équipes ont proposé des modèles simplifiés pour
intégrer différentes formes d’écoulement ascendant dans le manteau, allant du
« superpanache » aux « panaches de deuxième ordre ». Dans la même période, le débat sur
l’existence (ou le rôle réel) des panaches mantelliques a repris par le biais d’un site internet
focalisé sur le sujet (lien vers http://www.mantleplumes.org).
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Variations du climat et températures du sous-sol
La température du sous-sol est déterminée à la fois par le gradient géothermique
profond, et par la température en surface. Alors que le gradient géothermique varie peu au
cours du temps, la température en surface peut varier, et son effet en subsurface va
dépendre de la durée considérée. Par exemple, les variations journalières de la température
du sol sont atténuées d’un facteur 1/e (=0.36) à partir d’une vingtaine de centimètres sous la
surface, mais les variations annuelles, de plus longues durées, sont atténuées du même
facteur à 3.30 m du sol. Les périodes anormalement froides ou chaudes des siècles derniers
restent encore décelables à plusieurs dizaines de mètres de profondeur. Enfin, les périodes
glaciaires d’il y a 20,000 à 100,000 ans sont toujours imprimées dans le signal thermique
mesurable à plus d’un kilomètre de profondeur.
Au cours des années 1980, plusieurs méthodes numériques ont été mises au point
pour utiliser les signaux géothermiques afin de déduire l’histoire climatique d’une région. Le
principe consiste à soustraire du profil thermique la partie linéaire de la variation, afin de ne
conserver que les signaux provenant des perturbations de la température du sol. Alors, les
profils réduits sont « inversés », c’est-à-dire que l’on recherche le modèle climatique
permettant de retrouver le signal mesuré. La figure ci-dessous montre le principe de ces
études, de la mesure initiale au modèle paleoclimatique.
Les corrections paleoclimatiques sur les données de flux de chaleur modifient
généralement la valeur de quelques mW/m² (environ 10% de la valeur initialement estimée),
mais dans le cas des régions nordiques, où le glacier épais est resté présent plus longtemps,
la correction peut atteindre 100% de la valeur mesurée (cas de la Karélie, à l’est de la
Finlande).
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