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Commentaire :
La séparation de ces deux démarches, lorsqu’elle est justifiée, s’appuie sur l’idée générale qu’il
existe une stricte séparation entre le fait et la valeur, et l’argument selon lequel de ce qui est (dont
s’occupe entre autres les sciences sociales, et notamment la sociologie) on ne peut tirer aucune
conclusion relative à ce qui doit être (domaine des théories normatives). On en vient dès lors à
exclure toute possibilité de relations étroites et fécondes entre philosophie morale et politique
d’une part, sciences humaines et sociales de l’autre.
Pour en rester sur le plan philosophique, Ruwen Ogien (2005) montre, de manière
convaincante à mon avis, qu’une telle perspective ignore certains principes du raisonnement
moral : par exemple celui qui veut que l’on traite des cas similaires de façon similaire, ce qui
conduit à devoir prêter attention à ce que sont les cas et à disposer de critères factuels permettant
de distinguer les cas similaires des autres. Et qu’il est également des théories normatives qui
permettent le passage, et même le favorise, entre raisonnement éthique et démarche de sciences
sociales. Il en va notamment ainsi de différentes sortes (i) d’éthiques des vertus, qui s’intéressent
essentiellement à la personne (et accessoirement aux actes et conséquences) et dont la question
principale est « Quel genre de personnes dois-je être ? » ; et (ii) d’éthiques conséquentialistes, qui
se centrent sur les états de choses qu’il faut promouvoir. Dans l’un et l’autre cas, il est possible de
tirer des conclusions normatives à partir de prémisses factuelles sur ce qu’est la personne ou l’état
de chose, ou du moins que les secondes participent de ce qui conduit aux premières.
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a) La philosophie morale et politique peut
être une source d’inspiration pour la
recherche empirique, par exemple en
portant à l’attention des questions
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