EN ALLIER
FEMMES
DANS LA
RÉSISTANCE
Femmes
Exposition réalisée sur la
base du mémoire de maîtrise
«Les Bourbonnaises dans la
Résistance » de Julie Chantelot,
enseignante d’histoire-géographie,
par l’Association des maires et
des présidents de communautés,
le Service départemental de
l’Office national des anciens
combattants et la Délégation
départementale aux droits des
femmes et à l’égalité, dans le but
de faire connaître le rôle des
femmes de l’Allier dans la
guerre (1939-1945).
1
La faible proportion de femmes dans la vie publique du départe-
ment pourrait nous conduire à penser qu’il y a, dans cette
répartition des rôles entre hommes et femmes, un penchant
naturel ou une fatalité. L’étude du passé nous montre cependant qu’à
certaines occasions, dans certains contextes, les femmes ont participé
activement à la vie publique du département et ont même contribué à
l’écriture des pages les plus nobles de son histoire.
La période 1939-1945, pendant laquelle les femmes s’engagèrent dans
des actions de résistance, est l’un des plus beaux exemples de ce phéno-
mène. La plupart de ces actions, bien que stratégiques, furent discrètes
et diffuses (panneaux 3 à 8), mais certaines Bourbonnaises apparaissent
aujourd’hui comme des figures d’exception et c’est à ce titre qu’elles
sont présentées dans l’exposition (panneaux 9 à 13). Méconnu ou passé
sous silence, le rôle des femmes dans cette période de l’histoire devait
être porté à la connaissance de tous, dans un souci de justesse histo-
rique, mais aussi dans un souci de justice à l’égard de celles qui (trop ?)
modestement donnèrent leur tribut à la libération de la France. Que
ces femmes puissent donc retrouver la place qui leur revient dans la
mémoire collective et que leurs parcours inspirent à l’avenir les
femmes de l’Allier et d’ailleurs !
Un enjeu
pour la mémoire
collective
Le contexte de l’engagement
des femmes dans la Résistance
La condition de la femme sous le
gouvernement du maréchal Pétain
Résistantes
et résistances
La Résistance
dans la sphère privée
Résistance politique
et manifestations
Des activités
typiquement féminines
Des figures d’exception :
Simone Léveillé
Des figures d’exception :
Alice Arteil
Des figures d’exception :
Fernande Valignat
Des figures d’exception :
Jacqueline Penot
Des figures d’exception :
Marie-Jeanne Bouteille
Les Bourbonnaises
à la Libération
Les résistantes dans la vie
publique d’après-guerre
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DANS LA
RÉSISTANCE
Femmes
LES SOURCES
DE L’EXPOSITION
SOURCES ÉCRITES :Chantelot Julie, 2004, Les
Bourbonnaises dans la Résistance, mémoire de
maîtrise, Université Blaise-Pascal de Clermont-
Ferrand, 276 p. • Archives du service départemental
de l’ONAC de l’Allier • Archives départementales de
l’Allier et de la Lozère • Archives de la Direction
interdépartementale chargée des Anciens
Combattants • Recherches des Amis de la Fondation
pour la Mémoire de la Déportation de l’Allier.
SOURCES ORALES :Témoignages de Mesdames
Marguerite Livernais, Irène Cordat, Suzanne
Cluzel, Emilienne Bidet, Jeanine Dufour,
Huguette Favier, Augustine Chicois, Jacqueline
Penot, Jeanine Depresles, Yvette Burlaud, Amélie
Brancher, Simone Garnier, Geneviève Laurent,
Suzanne Bidault, Angelita Bettini, Arlette Baena.
FONDS ICONOGRAPHIQUES :Collection de la Société
d’émulation du Bourbonnais • Fonds Jean-Gabriel
Séruzier - collection musée Yves-Machelon, Gannat
• Photographies de Marie-Élisabeth Rat/ONAC •
Collections privées de Mme Lelong-Léger, de M. et
Mme Bidault, de Mme Laurent, de Marc Saint-Denis
et de Mme Bettini • Collection AGMG (Association
des mutilés, réformés et anciens combattants
réunis) • Archives départementales de l’Allier.
SITES INTERNET :
• Site du ministère de la Défense
http://www.defense.gouv.fr
et http://www.memoiredeshommes.
sga.defense.gouv.fr/
•Sur les camps de Brens et Rieucros :
http://membres.lycos.fr/apsicbr/divers.htm
et http://www.rieucros.org/femmescamp
/femmes_camp
BIBLIOGRAPHIE :Georges Rougeron, Le Département
de l’Allier sous l’État Français (1940-1944),
Imprimerie Typocentre, Montluçon, 1969
Sérézat André, Et les Bourbonnais se levèrent,
Editions Créer, collection Forum – Massif
Central, Nonette, 1985 • Fallut Robert, Faits
divers 1939-1945 dans le canton de Bourbon
l’Archambault, Imp. Guériaud, Lapalisse, 2003 •
Moncorgé Raymond, Montagne Bourbonnaise
1939-1945, recueil et témoignages, Imp.
Nouvelle, Saint Pourçain sur Sioule, 2004 •
Touret André, Montluçon 1940-1944, la mémoire
retrouvée, Editions Créer, Nonette, 2001 •
ANACR, ARAC, FNDIRP – Loire, Puy de Dôme,
Allier, Les années noires 1940-1942-1943 Les
internés du château de Mons Arlanc. •
Bourbonnais Hebdo, Supplément au n°786 -
Organe de la fédération de l’Allier du
PCF,1994 • Amis de la Fondation pour la
Mémoire de la Déportation Livre-Mémorial des
déportés de France arrêtés par mesure de
répression et dans certains cas par mesure de
persécution 1940-1945, Fondation pour la
Mémoire de la Déportation, Editions Tirésias,
2004. • G.Chatard, Bulletin de la Société
d’Emulation du Bourbonnais, « Un groupe franc
dans la Résistance et la Libération du
Bourbonnais », tome 68, p. 538 et suivantes,
1996. • Charles-Louis Foulon, article
“Résistance” in Encyclopaedia Universalis.
Jean Carrier-Les Amis du groupe franc Alice, Le
Groupe Franc Alice,dactylographié, 2003. •
Marie-Madeleine Fourcade, L’Arche de Noé
Réseau Alliance 1940-1945, Librairie Arthème
Fayard, 1968, réédition Librairie Plon, 1982, 1998.
• Mechtild Gilzmer, Camps de femmes -
Chronique d’internées Rieucros et Brens
1939–1944. • Georges Rougeron, Les administra-
tions départementales de l’Allier (1940-1945),
s.l., 1960 • Le 15.2 - 152eRégiment d’Infanterie -
Histoire des Diables Rouges, sous la direction
du colonel Rosenblatt, 1994.
SOMMAIRE
Les partenaires tiennent à remercier chaleureusement toutes
celles et tous ceux qui ont permis, par leurs témoignages, leurs
documents, leur aide et leur soutien, de réaliser cette exposition.
La société d’avant-guerre est loin d’être une société paritaire,
voire égalitaire. Du point de vue de leur statut civil, les femmes
sont encore soumises à l’autorité de leur père ou de leur mari :
d’après le code napoléonien de 1804, « la femme doit obéissance à son
mari ». Au plan de la vie publique, les femmes n’ont toujours pas le
droit de vote, puisque le suffrage est encore exclusivement masculin.
Paradoxalement, les femmes sont éligibles et peuvent même faire
partie du gouvernement (voir ci-contre) mais elles ne peuvent pas
voter.
Le travail des femmes n’est pas généralisé, mais les femmes ont déjà
montré leurs compétences professionnelles. À l’occasion de la
Première Guerre mondiale, elles ont occupé la place laissée vacante
par les hommes dans les usines (les « munitionnettes »), avant de rega-
gner leurs foyers au retour des soldats. Rappelons également qu’à
cette époque l’armée est exclusivement masculine. La loi du 11 juillet
1938, dite “Paul Boncour”, sur l’organisation de la nation en temps de
guerre, instaure un engagement féminin, mais les premières femmes
dans l’armée ont un statut civil et sont exclusivement chargées de
tâches annexes (cantinières, infirmières, etc.).
LA PRÉPARATION
DES FEMMES DE L’ALLIER
À L’ENGAGEMENT DANS LA RÉSISTANCE
Malgré ce contexte peu favorable à l’émancipation des femmes et à leur
engagement dans la vie publique, les femmes de l’Allier vont se mobiliser
pendant la guerre et certaines vont s’engager dans la Résistance. Plusieurs
événements internationaux ayant eu des retombées locales ont pu
préparer leurs esprits.
La Guerre d’Espagne amène, de 1936 à 1939, un afflux de réfugiés répu-
blicains, opposants au général Franco, en France et notamment dans
l’Allier. Certaines communes sont sollicitées et réquisitionnent des bâti-
ments pour loger les exilés.
C’est le cas de beaucoup de communes et même de petites communes
comme Teillet-Argenty, près de Montluçon, qui héberge deux familles
(femmes et enfants) d’Algésiras. Outre l’accueil des réfugiés, les
communes de l’Allier soutiennent les Républicains espagnols en organi-
sant des collectes et des ventes d’objets. Ces opérations sont souvent
initiées et conduites par des femmes engagées dans des associations cari-
tatives.
Les accords de Munich, le 30 septembre 1938, permettent à Hitler d’an-
nexer le territoire des Sudètes. Sous l’influence du parti communiste, à
l’époque très établi dans le département, les Bourbonnais s’opposent
plus nettement que la moyenne des Français à ces accords.
La guerre est déclarée le 3 septembre 1939. Des Bourbonnais sont mobi-
lisés et laissent derrière eux autant de sœurs, filles, amies, mères et
épouses. Le 10 mai 1940, les Allemands attaquent et, en deux mois,
l’armée française est vaincue. Des hommes sont faits prisonniers et les
femmes doivent attendre leur retour.
Le contexte
de l’engagement
des femmes
dans la Résistance
3
LA CONQUÊTE
DES DROITS DES FEMMES
EN QUELQUES DATES
1792
Instauration du mariage civil et autorisation
du divorce par consentement mutuel
1836
Organisation de l’enseignement primaire
pour les filles
1861
Première femme autorisée à se présenter
au baccalauréat, qu’elle obtient
en l’ayant préparé seule
1876
Hubertine Auclert, journaliste et première
suffragette, fonde l’association “Le droit des
femmes”et se bat pour l’égalité politique
1900
Jeanne Chauvin devient la première avocate
1907
La loi du 13 juillet accorde aux femmes
mariées la libre disposition de leur salaire
1909
La loi institue un congé de maternité
de huit semaines, sans rupture de contrat
de travail mais sans traitement
1924
Les programmes de l’enseignement secondaire
ainsi que le baccalauréat deviennent
identiques pour les filles et les garçons
1936
Cécile Brunschvicg, Suzanne Lacore et Irène
Joliot-Curie sont nommées sous-secrétaires
d’État (à l’Éducation nationale, la Protection
de l’enfance et la Recherche scientifique)
dans le gouvernement de Léon Blum
1938
Suppression de l’incapacité civile :
les femmes peuvent s’inscrire à l’université
sans l’autorisation de leur mari
1944
Par ordonnance du 21 avril, signée
du général de Gaulle, « les femmes sont
électrices et éligibles dans les mêmes
conditions que les hommes »
EN ALLIER
DANS LA
RÉSISTANCE
Femmes
Le gouvernement du maréchal Pétain donne de véritables leçons de
sexisme éducatif. Trop fragile, trop naïve, trop maternelle, la
femme est trop féminine pour subir l’école. Trop arriviste, agres-
sive ou calculatrice, elle ne l’est pas assez pour la mériter. Les stéréotypes
sexistes sont développés et radicalisés avec l’aide d’idéologues virulents.
Citons pour mémoire quelques extraits portant sur l’éducation des filles.
René Benjamin, contradicteur de l’école républicaine, qui écrit en 1941 : « Il
faut y regarder deux fois avant d’instruire les filles. Leur donner toutes les
sciences sans la règle pour les contenir, c’est les charger d’explosifs. Je n’offenserai
personne en disant que ce sont des créatures fragiles : on ferait mieux de
préserver leurs nerfs. C’est grâce à leurs nerfs qu’elles comprennent si vite,
qu’elles s’assimilent si bien, qu’elles devancent si merveilleusement les garçons. »
Abel Bonnard, dans son Éloge de l’ignorance, écrit en 1926 : « La façon dont
certaines sont attirées par le vocabulaire des sciences ne laisse pas de rappeler
l’avidité avec laquelle les filles des tribus sauvages se jettent sur la pacotille
qu’un marchand étranger déballe sous leurs yeux. » Propos d’importance, car
Abel Bonnard sera ministre de l’Éducation nationale d’avril 1942 à 1944…
Alexis Carrel, Prix Nobel de médecine de 1912, qui sera le “régent” de la
Fondation française pour l’étude des problèmes humains créée par la loi du 17
novembre 1941, énonce dans L’homme cet inconnu la répartition des rôles entre
hommes et femmes : «Les sexes doivent de nouveau être nettement définis. Il
importe que chaque individu soit, sans équivoque, mâle ou femelle. Que son
éducation lui interdise de manifester les tendances sexuelles, les caractères
mentaux et les ambitions du sexe opposé.... N’est-il pas étrange qu’une grande
partie du temps des jeunes filles ne soit pas consacrée à l’étude physiologique et
mentale des enfants ? La femme doit être rétablie dans sa fonction naturelle, qui
est non seulement de faire des enfants mais de les élever. »
À lire également ces propos extraits du journal Le Temps : « Des journaux, ce
matin, s’emplissent des bacheliers d’octobre. Au long de ces listes, beaucoup de
noms de jeunes filles... Un jour se lèvera peut-être où le nom des femmes sera
publié dans les journaux parce qu’elles auront donné un quatrième enfant à leur
époux et à la Patrie, parce que, de l’aveu unanime, leurs enfants seront les mieux
élevés ou parce que la maison sera la mieux tenue dans le village. »
La condition
de la femme
sous le gouvernement
du maréchal Pétain
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EN ALLIER
DANS LA
RÉSISTANCE
Femmes
CE DISCOURS VA SE DONNER LES MOYENS
DE DEVENIR UNE POLITIQUE
Le 11 octobre 1940, l’acte relatif au travail féminin interdit l’embauche des
femmes dans la fonction publique, met en congé sans solde les mères de
trois enfants dont le mari travaille et à la retraite les femmes de plus de 50 ans.
• Le 2 avril 1941, une loi sur le divorce réaffirme la domination du mari
sur la femme et une autre précise les droits et devoirs des conjoints en
renforçant la puissance maritale et paternelle.
La loi du 18 mars 1942 rend l’enseignement ménager familial obligatoire
pour les jeunes filles.
En 1942, l’avortement est considéré comme un crime d’État passible de
la peine de mort. Une femme, reconnue comme avorteuse, est guillotinée
en 1943.
Collection de la Société d’émulation du Bourbonnais
La Résistance est un phénomène difficile à saisir. Il n’y a pas une
mais des résistances. Pour la plupart d’entre nous, la résistance se
définit par des actions armées. Mais cette définition exclut les
femmes. Il faut en réalité distinguer deux sortes de résistance :
UNE RÉSISTANCE MILITAIRE ET ARMÉE
(les maquisards, les combattants de la France libre, etc.)
UNE RÉSISTANCE CIVILE
Elle rassemble tous ceux et celles qui ont mené des actions individuelles
ou collectives et dont les actes de solidarité ont été essentiels à la
Résistance organisée.
Et, si cette résistance civile est difficile à saisir, elle est aussi difficile à
comptabiliser : ainsi, dans l’Allier, les demandes de carte de Combattant
volontaire de la Résistance (CVR) ont été principalement déposées par
des hommes (245 femmes seulement sur 4.000 dossiers) ce qui ne reflète
peut-être que partiellement le rôle des femmes à cette période.
LA DATE D’ENTRÉE
DES FEMMES EN RÉSISTANCE
L’entrée des femmes dans la Résistance est très différente de l’entrée en
résistance masculine qui se concentre à partir de 1943 et se prolonge après
le débarquement. On peut penser que les femmes qui sont entrées dans la
Résistance dès le début de la guerre étaient déjà des militantes.
LA PART DES FEMMES
DANS LES MOUVEMENTS RÉSISTANTS
La répartition des femmes dans les mouvements résistants est à peu près
similaire à celle des hommes. Comme eux, elles rejoignent majoritaire-
ment le Front national de lutte pour l’indépendance de la France créé en
mai 1941 par le Parti communiste clandestin dissous en septembre 1939 et
les Francs-Tireurs Partisans français, créés en avril 1942 et qui sont la
branche armée du Front national. C’est là une caractéristique départe-
mentale qui tient à la place importante du Parti communiste dans le
département à cette époque.
L’ÂGE DES RÉSISTANTES
La Résistance a recruté des femmes de tous âges alors que les hommes
étaient principalement des jeunes gens. Cela s’explique par le poids relatif
de l’absence des hommes d’âge moyen (prisonniers de guerre en
Allemagne) et le refus de ces jeunes hommes de partir travailler outre-Rhin
pour le STO, ce qui les contraint à la clandestinité.
LA PROFESSION DES RÉSISTANTES
De même, alors que les résistants masculins sont surtout des travailleurs du
monde agricole (l’Allier est alors un département essentiellement rural), des
ouvriers et des étudiants (métiers et classes d’âge touchés par le STO et
ayant une pratique de l’organisation), les femmes avaient des professions
plus variées.
Résistantes
et résistances
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EN ALLIER
DANS LA
RÉSISTANCE
Femmes
LES ÉTAPES DE L’ENTRÉE
DES FEMMES EN RÉSISTANCE
Sur les 245 femmes titulaires de la carte
de Combattant volontaire de la Résistance :
14% sont entrées en résistance avant le 22 juin 1941
(invasion de l’URSS par l’Allemagne)
24% sont entrées en résistance entre le 23 juin 1941
et le 11 novembre 1942 (invasion de la zone libre
par les Allemands : l’Allier est entièrement occupé)
17% sont entrées en résistance entre le 12
novembre 1942 et février 1943 (création du STO)
44% sont entrées entre mars 1943 et le 6 juin 1944
(débarquement allié en Normandie).
Brassard de combattant FFI
Archives du Service départemental de l’ONAC
Archives du Service départemental de l’ONAC
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