« Argumenter, lire, dire, voir le théâtre contemporain »

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Sommaire
Le prix Collidram
p3
Année 2016 /17
Le déroulement
Les textes, les auteurs
p.4
p.5
Les collégiens lecteurs
p5
Mots d’auteur
p6
Parole de professeur(e)s
p7
Les textes sélectionnés
Le poisson belge
Tête de linotte
L’enfant sauvage
Delta charlie delta
p.8
p.9
p.10
p.11
Le règlement
p 12
Organisateur et partenaires
p 12
Annexe :
2007-2016 Tous les prix
p 13 à 18
2
Le Prix Collidram
Le prix Collidram est un prix national, décerné par les collégiens de différents établissements (majoritairement
« Ambition réussite » et « Zep »), au texte de théâtre qu’ils choisiront parmi quatre pièces sélectionnées dans les
parutions de l’année scolaire précédente*.
Le prix est remis lors d’une soirée à la Maison des métallos à Paris. Il est doté de 1500 €.
Comment aborder un texte théâtral, l’analyser, en rendre compte ? Quelles sont les différentes
méthodes de lecture ? Qu’est-ce que la littérature théâtrale, ses tendances actuelles, son
histoire récente ? Du texte à la représentation, quels écarts ?
Le principe du comité de lecture propose un éveil à la lecture du théâtre contemporain et à l’argumentation, et guide les jeunes
vers une posture critique. Il leur permet de découvrir une littérature vivante, souvent méconnue et d’en rencontrer les auteurs et les
acteurs. À l’image d’un comité de lecture professionnel, le groupe-classe se fixe des enjeux en suivant différentes étapes : lecture
des textes, discussion, et sélection. A chaque séance, les élèves sont invités à trouver leurs « outils », leurs « entrées » pour aborder
la littérature dramatique contemporaine : comment parler d’une pièce ? Comment parvenir à restituer son identité ? Comment
déterminer son avis et en fonction de quels éléments ? L’intervenant, accompagné par l’enseignant, incite les élèves à se poser
des questions sur la littérature et la théâtralité conjointement, en abordant tous les éléments qui participent d’une pièce de
théâtre (notions de fable, personnages, construction, rythme, langue, oralité etc…). Le comité de lecture se présente comme un
parcours de sensibilisation au théâtre d’aujourd’hui et aux auteurs vivants.
Les débats sont un moyen d’accès aux multiples sens des œuvres. Ils sont aussi un apprentissage de l’écoute de l’autre et
de la prise de parole en respectant l’opinion de chacun. Ils invitent les jeunes à développer leur sens critique, à préciser leur
prise de parole, à réfléchir et à choisir les mots pour dire ce qu’ils pensent et pour convaincre.
Si le débat n’aboutit pas à un accord, la sélection se fait en comptant les arguments positifs pour chaque pièce défendue : un
argument égale une voix. Un élève à lui tout seul peut ainsi, en énonçant plusieurs arguments, avoir autant de poids qu’un groupe
d’élèves, aussi nombreux soient-ils.
Parallèlement, aux différentes étapes du comité de lecture, les classes participantes sont incitées à découvrir au moins 2 spectacles
de théâtre contemporain choisis dans la programmation des théâtres partenaires afin de permettre aux élèves d’appréhender les
enjeux de la représentation théâtrale d’un texte. Ce lien avec un théâtre prolongera la découverte du théâtre par les élèves, en leur
permettant d’appréhender les enjeux de la représentation théâtrale d’une pièce.
* Voir règlement p.13
3
Année scolaire 2016-2017
Le déroulement
Novembre
Séances de présentation du prix et
des textes
Décembre /
Mars
Séances de discussion autour des
textes lus par les élèves
L’action touche 35 classes dans 8 grandes
régions : 3 classes dans le Grand Est, 2
classes Centre / Val de Loire, 4 classes en Îlede-France, 12 classes en Occitanie, 6 classes
en Nouvelle Aquitaine / Poitou-Charente, 1
classe dans les Hauts de France, 1 classe en
PACA, 6 classes en Auvergne / Rhône-Alpes 1250 élèves –1250 livres achetés.
Comité de lecture, 1er tour : chaque
classe choisit un texte
Mars / Avril
Mai
Les textes, les auteurs
16 mars : Rencontre entre les
collégiens d’Ile de France et les
auteurs des pièces sélectionnées
à la Médiathèque Marguerite Duras
(Paris 20ème) : Lecture d’extraits par
un(e) comédien(ne)
Les éditeurs
Ils adressent fin juin 2016 cinq titres (pas
nécessairement publiés dans une collection
jeunesse) au comité de sélection.
Le comité de sélection
Il se réunit en septembre 2016 pour choisir les
quatre textes dramatiques de langue française,
publiés durant l’année scolaire 2015-2016.
Ce comité de sélection est constitué de
représentants des partenaires du prix, des
enseignants ayant participé à des comités de
lecture en milieu scolaire, des théâtres et des
bibliothèques partenaires.
Le 2 mai : Comité de lecture final à
la SACD, Maison des auteurs.
Ce comité rassemble les suffrages et
commentaires de chaque classe par
le biais d’un délégué par classe.
Les pièces sélectionnées :
Rencontre des auteurs avec les
classes qui les ont choisis, dans les
collèges
Juin
Le Poisson belge de Léonore Confino (Actes
Sud-Papiers)
Tête de linotte de Laurent Contamin (Théâtre
l’Ecole des loisirs)
L’Enfant sauvage de Céline Delbecq
(Lansman éditeur)
Delta Charlie Delta de Michel Simonot
(Espaces 34)
6 juin : Remise du prix en public
au Moulin du Roc, scène nationale
de Niort avec les classes de PoitouCharente
20 mai : Rencontre publique /
restitution avec les auteurs choisis
en Rhône-Alpes au TNG à Lyon
Retrouvez Collidram dans l’émission
Ecoute, il y a un éléphant dans le jardin
sur Aligre FM 93.1, les mercredis 26 avril
et 17 mai de 10h à 11h
Rencontres publiques /
restitutions en Alsace
4
Les collégiens lecteurs
Académie d’Aix-Marseille - 1 classe
Collège Monticelli, Marseille (13)
)/4
Académie de Clermont-Ferrand – 1 classe
ème
Académie de Lille - 1 classe
Collège Paul Langevin / Avion (62) / 6ème
Académie de Limoges - 2 classes
Collège d’Arsonval / Brive (19) / 3 ème
Collège M. Faucher / Allassac (19) /
Collidram c’est de l’organisation.
Le comité de sélection, composé de professeurs, de
comédiens, d’intervenants et de partenaires choisit 4 pièces
parmi une vingtaine.
Académie de Lyon - 6 classes
Collège Colette / St Priest (69) / 3è
Collège Gabriel Rosset / Lyon 7 (69) / 6è
Collège Laurent Mourguet / Ecully (69) / 3è
Collège Martin Luther King / Moins (69)
Collège Louise de Savoie / Pont d’Ain (01) /
1 collège à Clermont-Ferrand
Collidram c’est intriguant.
Après la 1ère séance, lors de laquelle Geoffroy, le
comédien, a lu avec nous le début des pièces, nous étions
impatients de lire les textes mais il a fallu attendre que les
livres arrivent.
Académie de Paris - 3 classes
Collège J.Perrin (20ème) /
Collège Pierre Mendès France (20ème) /
Collège Robert Doisneau (20ème) /
Collidram c’est une découverte.
Geoffroy nous a aidés à approfondir nos connaissances sur
le théâtre et nous a parlé de son métier.
Académie de Poitiers - 5 classes
Collège Pierre et Marie Curie / Niort (79) / 3 classes
Collège Rabelais / Niort (79) / 4è
Collège G Philipe / Niort (79) / 4è-3è
Collidram c’est intéressant.
Les séances étaient régulières, elles nous ont aidés à lire
entre les lignes et à décortiquer les scènes.
Académie de Montpellier - 4 classes
Collège Eugène Vigne / Beaucaire (30)
Collège Mont Duplan / Nîmes (30)
Collège Voltaire / remoulins (30)
Collège Henri Bourillon / Mende (48) / 3ème
Collidram ça change nos premières impressions.
Au début, certains livres nous ont plus, mais nous avons
changé d’avis au cours de notre lecture. Et parfois, les
premières scènes ne nous ont pas attirés, et finalement
nous avons apprécié les pièces.
Académie d’Orléans - 2 classes
Collège Etienne Dolet / Orléans (45) / 3ème
Collège Pierre de Coubertin / Orléans (45) / 3ème
Collidram c’est apprendre à argumenter et défendre ses
idées.
Dire « j’aime / j’aime pas » ne suffisait pas, il fallait détailler
ce qu’on ressentait, nos pensées, et convaincre les autres.
Académie de Strasbourg - 3 classes
Collège Ch. De Gaulle / Seltz (67)
Collège Kléber / Strasbourg (67)
Collège Vauban / Strasbourg (67)
Collidram ça demande du courage.
Il ne faut pas avoir peur de dire ce qu’on pense.
Collidram ça nous a rapprochés.
Dans la classe, nous avons appris à nous écouter les uns
les autres.
Académie de Toulouse - 8 classes
Collège Les Clauzades / Lavaur (81) / 2 classes de 3ème
Collège D’Artagnan / Nogaro (32) / 4ème
Collège Jean Rostand / Eauze (32) / atelier théâtre
de la 6ème à la 3ème
Collège Jean Moulin / Toulouse (31) / 5è
Collège Bertholot / Toulouse (31) / 4è
Collège St-Michel / Belmont-sur-Rance (12) / 2
classes de 3e
Collidram c’est des rencontres.
Pendant la délibération finale à la SACD, nous avons
travaillé et discuté avec des élèves de toute la France,
qu’on ne connaissait pas.
Collidram c’est se confronter à des avis différents.
Il faut accepter les idées des autres, et accepter de se
laisser convaincre.
Académie de Versailles 2 classes
Collège Les Petits Ponts / Clamart (92) / 3ème
Collège Jean Zay / St Gratien (95)
Collidram c’est de nouvelles expériences :
Monter sur scène, passer à la radio, prendre la parole.
Pour des 3ème, Collidram c’est finir les années collège en
beauté !
Les élèves de 3ème à L’Haÿ les Roses
5
Mots d’auteur
Dans le train, tout à l’heure, en pensant à ce moment où j’allais me
trouver devant vous, je me suis fait cette réflexion qu’écrire une pièce
de théâtre était un processus étonnant et singulier. Ecrire, pour moi,
c’est révéler des morceaux de moi-même. Tous les personnages de
« Moi Arcan », excepté vraisemblablement Louis Loizeau, sont des
bouts de moi. Du coup, qu’un adolescent qui s’appelle Arcan né à
Bagatelle dans un quartier toulousain qu’aucun de vous ne connait
puisse vous émouvoir autant dans sa recherche d’identité témoigne
d’un partage assez extraordinaire entre des bouts de nous. Et je me
suis dit que c’était une belle chance de recevoir ce prix, une grande
chance, parce qu’il est, avant tout, le résultat de ce partage, votre
choix. Un choix argumenté, de filles et de garçons, tous collégiens,
choix qui m’honore, parce qu’il me raconte beaucoup sur vous, de ce
que nous avons en commun, sur
ce que vous êtes, sur ce que vous pensez, sur votre envie qu’on vous raconte, avec du théâtre, des histoires qui ont du
sens et qui vous touchent, des textes qui portent des valeurs, du textes qui questionnent le monde dans lequel nous vivons,
vous et moi.
Parmi ces valeurs il en est une à laquelle je crois profondément : la tolérance.
A l’inverse, me trouble infiniment le racisme que je ressens comme quelque chose d’insupportable. Le racisme qui crée
tant de peurs avec lesquelles nous nous débattons quotidiennement. Le racisme, capable de développer tant de violences,
de la haine, des conflits sanglants alors que chacun d’entre nous aspire à vivre en paix. Dans sa violence, si puissante, à
l’égard de l’autre, le racisme nous contraint à être constamment sur nos gardes, vigilants, pour être capables d’y faire face
à tout moment, pour le combattre. Il nous empêche tellement d’être libres.
Quand vous plébiscitez « Moi Arcan » j’éprouve en tant qu’auteur un sentiment de plaisir et de reconnaissance, mais audelà, singulièrement, je ressens l’espoir que vous serez des adultes vigilants face à l’immonde haine raciste. Je ressens
que nous partageons cela.
Merci à vous tous.
Bien sûr merci à Pascale Grillandini et à l’équipe de Postures qui, avec ce prix, a permis à « Moi Arcan » d’être lu par tant
de collégiens. Merci à mon éditeur Pierre Banos à Françoise Duchaxel et à l’équipe des Editions théâtrales. Ils me font
confiance depuis de longues années. Je n’oublie pas les enseignants, les théâtres, les nombreux artistes intermittents du
spectacle que je salue aujourd’hui dans leur lutte et qui ont contribué à rendre ce prix si vivant. Merci pour l’engagement de
tous à rapprocher les jeunes des écritures théâtrales d’aujourd’hui et d’avoir choisi parmi les pièces sélectionnées cette
année, toutes belles et fortes, de Pauline Sales, de Sylvain Levey, de Jean Cagnard - « Moi Arcan ».
Et merci à l’équipe de la Maison des métallos d’accueillir ce soir cette fête des écritures théâtrales.
Henri Bornstein
7 juin 2016
6
Parole de professeur(e)s
Aux acteurs du projet Collidram,
L’année s’achève et je n’ai pas encore pris le temps de vous remercier pour cette session 2015 toujours aussi riche
en découvertes. Je voulais vous dire combien j’avais apprécié de retravailler cette année avec vous et pourquoi j’espère
que ce projet perdurera.
Tout d’abord, pour mes élèves, Collidram a permis de rendre
concrète la profession d’écrivain et plus précisément de
dramaturge. Ce fut pour eux, une occasion unique de
découvrir des auteurs dramatiques contemporains : de les
lire, de les voir, de leur parler. Je me souviens, l’an passé de
cette très belle matinée avec Estelle Savasta, venue à la
rencontre des élèves qui avaient défendu Traversée.
Collidram a permis cet échange avec beaucoup de simplicité
et de proximité.
Ce fut aussi pour mes 5èmes une vraie éducation à la
connaissance du théâtre contemporain trop absent de nos
classes. Les élèves ont tout même lu 4 pièces, les ont
questionnées, commentées… De plus, les inter-ventions
d’Anne, comédienne de métier, ont permis un accès au sens
du texte théâtral par des entrées différentes de celles
proposées traditionnellement en classe.
[…] Par ailleurs, les élèves se sont rendus à la Maison des Arts de Créteil qui a eu la bonne idée de programmer deux
auteurs sélectionnés par le comité de lecture Collidram 2014 ! (Estelle Savasta avec Le préambule des étourdis et
Philippe Dorin avec Sœur je ne sais pas quoi frère.) Si je n’avais pas connu ces deux auteurs grâce à Collidram, je
n’aurais certainement pas pris le risque d’emmener mes élèves voir leur pièce. Je sais que bon nombre de mes élèves
iront maintenant les yeux fermés voir le prochain spectacle de Claudine Galea ou des auteurs sélectionnés cette année,
car ils sont maintenant connus de ce jeune public.
Merci donc à tous les acteurs de Collidram pour ce projet. Il marque durablement les élèves qui y participent. Il éduque
les collégiens (et les profs !) à la connaissance du théâtre contemporain, il met des visages sur l’acte de création, il
favorise la curiosité des élèves, il met en éveil leur sens critique. Et pour conclure, il donne envie d’aller au théâtre ! Je
laisse le dernier mot à Soufyane, Younès et Amine qui m’ont dit le soir de la remise du prix : « C’est notre meilleure
sortie ! »
Marie-Sabine de Saint-Albin, Collège Plaisance de Créteil.
Cinq années de Collidram au collège Jean Perrin. Cinq années de découvertes, d'émotions, de rires, de réflexion. Chaque
année, dès le mois de juillet, ça repart : juste avant les vacances apparaît dans la boîte mail le lien avec la Dropbox avec
toutes les pièces, une mine ! On lit, on lit, des pièces qu'on a envie de défendre, d'autres dont on se dit : « Oh non, pas
celle-là, j'espère qu'elle ne sera pas choisie ! » Et l'été fini, avec la rentrée arrive la grande réunion du comité de sélection,
une bouffée d'oxygène pour les enseignants. Ah non, ce n'est pas comme une salle des profs, il y a des gens de tous
horizons, des comédiens bien sûr, mais aussi des représentants de théâtres, d’institutions. Collidram, c'est l'ouverture sur
le monde, et les élèves le sentent bien.
Quand commence le projet pour de bon, quand l'intervenante de l'année, celle qui suivra la classe, arrive pour la première
fois, les élèves sont souvent interloqués : mais qu'est-ce que c'est que ces textes qui ne sont pas comme ceux qu'ils
étudient d'habitude, dans lesquels il y a parfois des gros mots, ou un langage familier, ah non c'est bizarre... Au fil des
années les pièces se sont succédées. Communiqué numéro 10 : dans une société des jeunes prennent le pouvoir.
Cupidon est malade : la ronde des amours dans des familles recomposées. Folkestone : un trio d'amours adolescentes.
Les jeunes : des parents irresponsables font le malheur de leurs enfants, en pensant les mener à la célébrité. Mon frère,
ma princesse : un petit garçon qui s'habille en fille. Tout ça ne laisse pas neutre, quand on a douze, treize ou quatorze
ans.
Collidram, c'est un ancrage, c'est faire comprendre aux élèves que le théâtre parle de la vie, de leur vie. Sur le moment,
il peut y avoir des rejets, mais toujours, au moment de défendre les pièces, on s'aperçoit que le propos a porté, et la
plupart des interventions au moment du comité de lecture pourraient se résumer ainsi : « Je choisis cette pièce, parce
qu'elle a parlé de ce qui me touche ! » Et justement, le fait de devoir formuler des arguments permet de prendre la distance
nécessaire, quand on a été touché d'un peu trop près par des mots, et ça, c'est un apprentissage qui est précieux.
Collidram, c'est de la joie, c'est des sourires, de l'émotion et du trac quand les élèves ont à monter pour la première fois
sur scène et clignent des yeux devant l'éclat des projecteurs, et, pourquoi pas, c'est des vocations qui naissent, dont nous
ne saurons rien. En tout cas, ce sont de beaux souvenirs qui, chaque année, se créent, pour une nouvelle génération
d'élèves.
Thierry Labruère, enseignant CDI au collège J. Perrin à Paris
7
Les textes sélectionnés
L’auteure
Actrice et auteure franco-suisse, Léonore Confino est née en 1981.
Son goût de l’écriture lui vient d’observations dans ses « boulots d’appoint », pratiqués
en parallèle de ses études de cinéma documentaire.
En 2009 et 2010, elle écrit Ring et Building respectivement sur les thèmes du
couple et du travail, publiées aux éditions l’Oeil du Prince. Catherine Schaub met
en scène Building qui reçoit le Grand Prix du théâtre 2011. Puis la metteur en
scène s’empare de Ring: création au petit Saint Martin en octobre 2013 avec
Audrey Dana et Sami Bouajila. La pièce est nommée aux Molières 2014 dans la
catégorie auteur. En 2012, Léonore termine sa trilogie avec le thème de la famille :
Les Uns sur les Autres est créée au théâtre de la Madeleine avec Agnès Jaoui.
La collaboration artistique avec Catherine Schaub est effervescente : elles codirigent ensemble les productions du Sillon et ont lancé en mai 2015 Parlons
d'autre chose, un geyser sur l'adolescence, et en septembre 2015 leur dernière
création, Le poisson belge, au théâtre de la pépinière avec Géraldine Martineau et
Marc Lavoine. Léonore est nommée aux Molières 2016 en tant qu’auteur et
Géraldine Martineau reçoit le Molière de la révélation féminine. Elle vient d’achever
sa dernière pièce 1300 grammes, autour du cerveau humain et de la plasticité
neuronale…
A l'étranger, Ring a été adaptée à New York, Rome, Athènes, Rio et San Francisco.
L’extrait
Noir. Respiration sifflante. Soubresauts dans l’eau. Battements
de cœur des fonds marins.
Lumière. C’est l’hiver aux étangs d’Ixelles à Bruxelles ;
Grande monsieur et Petit fille sont assis sur un banc face au
public. Grande monsieur porte une écharpe à carreaux et des
boucles d’oreilles en perles. Il mange une barre au chocolat.
Petit fille, dix ans, tient un énorme cartable dans ses bras. Ils
attendent. Ils s’ignorent. Il gèle.
Grande monsieur – Les « qui collent au » quoi ? Tu veux que
je t’en colle… (Petit fille éclate de rire, il se ravise. Temps.)
Ils ferment le manège.
Petit fille – J’ai faim.
Petit fille – De toute façon il est fermé.
Grande monsieur – Tes parents sont morts ?
Grand monsieur – Toutes façons, oui. (Temps.) Les étangs
noircissent.
Petit fille – Ils sot toujours en retard le vendredi.
Grande monsieur – Tu ne comptes pas sur moi pour les
attendre avec toi ?
Petit fille – J’ai rien demandé ;
Petit fille – Je déteste les manèges. Ça cafarde le cœur de
ma mère.
Grande monsieur – Je n’avais pas l’intention de te payer un
tour.
Petit fille – Ils viendront plus. Ça y est. Je suis en train de me
faire abandonner. C’est maintenant, là, que ça se passe. J’y
avais pensé plus petite comme un pire cauchemar. Et
maintenant, voilà que ça se pase en vrai. Ça fait drôle.
Temps
Grande monsieur – Ma date ne viendra pas non plus. C’est
sûr. C’est dur. Bon.
Grande monsieur – J’attends moi aussi quelqu’un. (Temps)
J’ATTENDS MOI AUSSI QUELQU’UN.
Petit fille – Si vous espérez me faire pitié…
Petit fille – Je suis pas sourde. Ne comptez pas sur moi pour
l’ttendre avec vous.
Grande monsieur – Tant mieux. Je n’aime pas la proximité des
petites clochardes qui font semblant d’attendre leurs parents ;
Petit fille – Et moi je me méfie des presque monsieurs qui
collent au banc.
8
Grand monsieur – Pour moi tu n’existes pas.
Grande monsieur se lève.
L’auteur
Laurent Contamin est né en 1968. Après des études d'ingénieur, il se tourne vers le
théâtre, à la fois comme acteur, metteur en scène et auteur. Il écrit pour la scène : la
marionnette et le théâtre d’objets (Chambre à air, La petite Odyssée), le jeune public
(Fasse le ciel que nous devenions des enfants, Les Veilleurs de jour, le théâtre hors
les murs (Fêtards et Précaires, Le Jardin, En verre et contre tout). Il écrit également
pour la radio (Et qu’on les asseye au rang des princes, La merveilleuse épice de
Tachawani, La Note blanche…) et reçoit en 2002 le prix du Meilleur auteur aux
Radiophonies, et en 2005 le prix Nouveau Talent Radio de la SACD. Pour sa pièce
Hérodiade, il est lauréat En quête d’auteurs AFAA/Beaumarchais en 2003 et reçoit
l’aide à la création du Ministère de la Culture en 2004 (aide qu'il recevra également en
2008 pour Devenir le ciel. Pour Sténopé, il reçoit l’aide d’encouragement à l’écriture
du Ministère de la Culture en 2001.
Il écrit également des nouvelles et de la poésie. Il anime de nombreux ateliers de
lecture, d’écriture et de théâtre et part parfois en résidences d'écriture (Suisse, EtatsUnis, Pologne, Québec,...). Il est élu en 2011 président des EAT (Ecrivains Associés
du Théâtre).
http://www.laurent-contamin.net
L’extrait
Pénélope – Normalement il devrait attendre le printemps
pour chanter mais je l’ai un peu stimulé.
1 – Chez les Stone
Pénélope, Jocelyn
Un soir de février. La pièce principale d’un appartement, dans un
immeuble, en ville. Une porte-fenêtre donne sur un balcon d’où on
peut voir le ciel. Jocelyn termine le repassage, il semble pressé
d’en finir. Pénélope est sur le balcon. On l’entend siffler, en grande
discussion avec un étourneau sansonnet. Jocelyn la surveille du
coin de l’œil, un peu contrarié.
Jocelyn – Dans un triangle…
Pénélope – Je le repasserai mon chemisier, laisse.
Jocelyn, formant un triangle avec le drap : Dans un
triangle rectangle…
Jocelyn – Pépé ?
Pénélope – Je le mettrai une dernière fois au car Fréhel –
après j’aurais trop grandi.
Pénélope, off, continue de siffler avec son étourneau -…
Jocelyn - … la somme des carrés des deux côtés…
Jocelyn – Dis donc, Pépé, j’aimerais bien que tu revoies ta leçon
de géométrie pour demain. (Pénélope continue de siffler.) Le
théorème de Pythagore. (Pénélope rit.) Oui oui, c’est très drôle…
Pénélope - … est égale à la… Non : est supérieure ou
égale au carré des angles…
Pénélope, off – Non mais on rigole avec Whistler.
Jocelyn – C’est quoi, ça encre, Whistler ? (Tandis qu’il prend une
chemise pour la repasser.) Dis donc, elle te va encore, cette
chemise ?
Pénélope – C’est pas une chemise, c’est un chemisier. Whistler,
c’est l’étourneau sansonnet qui niche dans l’bri que j’ai fabriqué, tu
sais ? Il me fait réviser mes leçons.
Jocelyn – Très bien. Tout est normaaal…
Pénélope – Stumus vulgaris – un lointain cousin à nous.
Jocelyn – Tiens aide-moi à plier les draps. (il lui tend deux coins
du drap et garde les deux autres, Pénélope quitte le balcon pour
le rejoindre, ils commencent à le plier.)
Pénélope – Je lui apprends, comme ça, après, il m’aide.
Jocelyn – Théorème de Pythagore.
Pénélope siffle vers Whistler, on entend Whistler répondre
depuis le balcon ;
Pénélope – Nous ne savons pas – désolés.
Jocelyn – C’est juste une phrase à apprendre par cœur,
ce théorème, c’est facile, quand même ! A force de la
répéter, ça rentrera ! (montrant le drap :) C’est comme les
plis, là, tu vois, à force de repasser toujours les mêmes
plis, ils sont marqués ! On n’oublie plus !
Pénélope – Interroge-moi sur des trucs que je
comprends ! Par exemple le conte qu’on doit apprendre
pour demain, tiens, puisqu’on dans les habits ! (Elle
commence son récit) Le tailleur et le géant.
Jocelyn – Comment veux-tu piloter un avion un jour si tu
n’es même pas ichue de retenir le théorème de
Pythagore ?
Pénélope – Il était une fois un géant qui terrorissait la
bonne ville de Sprung, tapie dans la vallée.
9
L’auteure
Issue du Conservatoire royal de Mons, Céline Delbecq est comédienne, auteure et metteure
en scène, née en 1986. Tiraillée entre le milieu social et le milieu artistique, elle fonde en
mars 2009 la Compagnie de la Bête Noire pour laquelle elle écrit et met en scène des pièces
de théâtre s'inscrivant dans un contexte social occidental. Son questionnement est celui de
la nécessité. Titulaire de plusieurs prix et éditée chez Lansman, elle a reçu diverses bourses
qui lui ont permis des résidences d'écriture en Belgique, en France et au Canada. Elle
participe également à l'organisation de plusieurs événements rassembleurs à Bruxelles
comme le Cocq'Arts Festival ou Le marathon des autrices.
Elle publie, depuis 2009 : Le hibou, Hêtre, Vikim, Seuls avec l'hiver, Eclipse totale, Poussière,
L'enfant sauvage, chez Lansman éditeur, et reçoit de nombreux prix et reconnaissances dont,
en 2015, le Prix de la pièce de théâtre contemporain pour le jeune public, Bibliothèque
Armand Gatti / Rectorat de Nice pour L'enfant sauvage, et le Prix d'écriture de la Ville de
Guérande pour Poussière.
L’extrait
1. Un gosse
Un homme – C’est parce que c’est un gosse que je me suis
arrêté. Je sais pas dire quel âge y a, mais c’est un gosse ça se
voit.
Y est là que je le trouve sur la place du Jeu de la balle, juste
après le marché, tous y remballent encore leurs puces et le
gosse y est là tout seul qui parle pas. Je lui demande : « tes
parents, ils sont où ? » Y répond pas avec des mots : y crie
quand je m’approche. Des cris qui sont pas des « d’enfants ». Y
en a qui se lèvent des terrasses, sortent des magasins voir ce
qui se passe, un gosse qui hurle comme ça, c’est pas normal. La
poissonnière, elle lui parle en flamand : « Waar zijn je ouders ? »
- ça marche pas non plus. Tout le monde y va de ses questions
en toutes les langues du quartier, portugais, arabe, flamand, sur
l’âge qu’y a ou si c’est un garçon ou une fille jusqu’à ce qui en ait
un qui dise : « Vos gueules, y comprend pas ! C’est un enfant
sauvage qui cause la langue des bêtes ». Là, y a un silence. Le
même pour toutes les langues. Je regarde le gosse avec de la
force comme on regarde un chien pour voir su y est gentil ou
pas, mais dans son regard… y a rien.
Je lui veux pas de mal : si je reste là, c’est que je trouve pas ça
normal qu’un gosse – parce que c’est un gosse, ça se voit – y
soit tout seul dans cet état sur la place du Jeu de balle à la fin de
la brocante. Comme si y était à vendre et que personne l’a pris.
Y est oublié sur la place du Jeu de balle, y se gratte la tête. Un
gosse trouvé comme ça, qui parle pas, qui a les cheveux qui vont
dans tous les sens, un enfant sauvage… je me dis qu’un gosse
comme ça, sauvage et quise gratte la tête, c’est normal que ça
ait des poux. Je peux pa rien faire
C’est pas mon genre de fouiner ou de me mêler de ce qui me
regarde pas. J’étais là pour dîner, rien d’autre. C’est la routine,
le vendredi on prend un stoemp chez Josiane avec quelques
collègues. C’est le hasard qu’a fait qu’on était là, le hasard aussi
que le gosse aussi y était là, qu’on était là pareil et qu’on
10
s’est arrêtés parce que c’est pas normal un gosse tout seul
dans cet état qui pousse des cris de bête. Est-ce que vous,
vous auriez continué votre route ?
Oui, pardon, oui, pardon, je poursuis ;
On est de plus en plus qui s’arrêtent et qui posent des
questions sur « T’es tout seul ? » et le gosse y fait rien que
pousser des cris de bête. Tout à coup, y se mord devant
nous ! Le gosse : y se mord ! Y s’attrape le poignet, y se mord
à pleines dents en grognant comme une bête qu’a la rage !
Avec tous les renards qui traînent en ville, on devrait as
s’étonner ; mais ces cris-là… ces cris-là, ça cristallise la foule,
tout le monde y se tait, y a personne qu’ose bouger, tout le
monde y a peur parce que c’est pas normal : un gosse
comme une bête qui salive, qui se mord et qui se gratte la
tête, c’est pas normal ! Je regarde autour les autres, y a
personne qui fait rien ; « On y va ? », je dis, « on fait quelque
chose ? » Y bougent pas, y répondent pas, le gosse y est là,
qui se mord que ça peut plus durer, alors j’y vais. Moi, j’y vais.
Est-ce que c’est là que ça a commencé ?
L’auteur
Homme de Théâtre, Michel Simonot est écrivain et metteur en scène. Il a écrit une
vingtaine de textes, tous portés à la scène ou réalisés à France Culture (à l’exception
de Le But de Roberto Carlos).
Actuellement en résidence à Anis Gras (Arcueil), il a été auteur-metteur en scène
associé au Théâtre Gérard Philipe de Saint Denis (C.D.N), sous la direction d’Alain
Ollivier. Il a été auteur associé à des compagnies de théâtre et de danse.
Il fait partie du Groupe PETROL, avec Lancelot Hamelin, Sylvain Levey et Philippe
Malone.
Il est actuellement dramaturge auprès du musicien Franck Vigroux, pour son spectacle
en création Aucun lieu.
Il a, entre autres, été adjoint d’Alain Trutat, à la direction des fictions de France Culture,
fondé et dirigé l’ ANFIAC, été responsable des formations au Ministère de la Culture
et codirigé la Maison de la Culture du Havre.
Il a accompagné Michelle Kokosowski dans la création et l’aventure de l’Académie
Expérimentale des Théâtres.
Sociologue de la culture, il a été Maitre de Conférence. Il a publié plusieurs livres et
articles sur l’écriture et la scène, ainsi que sur les politiques culturelles.
Site internet de l’auteur : http://photos.michelsimonot.fr/
L’extrait
deux sont morts
quatre parois autour des corps
ils resteront silhouettes
chairs noires
os blancs
déposés ici là
aucun couvercle
ouverts à la lumière de la nuit
à la pluie
aux orages
CHRONIQUEUR
trois ont franchi le seuil interdit
du dehors vers le dedans
du dedans vers un autre dedans
nulle autorisation
nul accueil
nulle hospitlité
nulle effraction
un mur le franchir
devenir invisibles
le troisième n’est pas mort
victimes ou vaincus
trois corps plaqués au mur intérieur
à s’y emboutir
dos collés nuques collées mains collées
à devenir ciment
doigts écartés tendus à se disloquer
à s’y fondre
quels mots ?
//
au pied du mur
des fleurs comme silence
devenir paroi intérieure
enfouis dans la matière
dissous dans l’épaisseur de l’enclos
sur internet
des blogs comme des mausolées
chants de colère comme deuil
//
pour deux enfants morts
deux visages dessinés
une image comme un manque
à ne plus percevoir que les bords de l’écran
sans fond
un trou
trois enfants
le noir l’arabe le turc
ont dit des journaux la télé
le turc n’est pas turc il est kurde
le noir l’arabe le kurde
ils ne regardent pas les têtes de mort
sur l’avertissement placardé
//
rien pour le survivant
ils courent
se hissent
franchissent
retombent
//
11
Le règlement
Organisateur
Article 1 - Objectifs
Le prix Collidram a pour objectifs de mettre en
contact les collégiens avec des livres de
théâtre en tant qu’objets littéraires et matière à
jouer, mettre en lumière les écrivains de
théâtre et valoriser le travail des éditeurs.
Cette action permet un éveil à la lecture du
théâtre contemporain. Les élèves découvrent
une littérature vivante, souvent méconnue et
en rencontrent les auteurs et les acteurs. Cette
action est relayée par les rectorats d’académie
et touche une classe par département,
proposée par les Délégations Académiques à
l’Education Artistique et à l’Action Culturelle
(DAAC), en accord avec les inspecteurs
d’académie.
Article 2 - Les éditeurs
Le prix porte sur les pièces d’expression
française éditées durant l’année scolaire
précédente. Pour l’année scolaire 2015-2016,
le prix porte sur les pièces éditées entre le 1er
juillet 2014 et le 30 juin 2015.
Les éditeurs proposent chacun 3 pièces de
théâtre. Les livres sont adressés à
POSTURES le 1er juillet 2015 au plus tard. Les
rééditions ne sont pas prises en compte.
Créée en 2008, Postures est une association agréée
Éducation nationale et Jeunesse-éducation populaire, qui a pour objet de
créer, organiser, susciter des manifestations culturelles qui favorisent le
lien social, la promotion et l’émancipation de la personne humaine.
L’association développe des actions de sensibilisation à l’écriture
contemporaine à travers l’organisation de comités de lecture en direction
de publics jeunes ou non initiés à la littérature d’aujourd’hui : des Mots
pour le théâtre, pour la poésie, Collidram, prix collégien de littérature
dramatique, l’inédiThéâtre, prix lycéen de pièces inédites, Inédits
d’Afrique et Outremer, prix lycéen de pièces francophones.
Elle suscite la création de journaux d’élèves Jeunes Pages de la
maternelle au lycée.
Elle propose des formations en direction des enseignants, bibliothécaires
et documentalistes.
Elle est productrice déléguée de spectacles qui s’inscrivent dans sa
mission d’éducation populaire et de lutte contre l’exclusion.
Ces actions fonctionnent grâce à un partenariat qui associe différents
acteurs culturels, éducatifs et sociaux établissements scolaires, théâtres,
bibliothèques, et autres associations, des collectivités territoriales et les
directions régionales des ministères de la Culture et de l’Education
Nationale.
Article 3- Le comité de sélection
Les pièces sont soumises à un comité de
sélection réunissant les organisateurs et leurs
partenaires afin qu’ils sélectionnent quatre
pièces à proposer aux élèves parmi le corpus
proposé par les éditeurs.
Partenaires
Article 4 - Les jurys de collégiens
1 -Chaque classe de collégiens élit un lauréat
à l’issue d’un comité de lecture. Le lauréat est
l’auteur ayant remporté la majorité des
arguments positifs des collégiens.
2 Un comité de lecture interclasses rassemble
les suffrages de chaque classe par le biais d’un
délégué par classe, et élit un auteur lauréat.
Le lauréat est l’auteur ayant remporté le plus
grand nombre de voix. Dans toutes les
délibérations, en cas d’égalité de voix entre
deux lauréats, ceux-ci sont déclarés ex aequo
et le montant du prix est divisé par deux.
Article 5 - Le montant du prix
Le prix est d’un montant de 1 500 euros.
Les Académies d’Aix-Marseille, Clermont-Ferrand, Créteil, Dijon, Lille,
Limoges, Lyon, Paris, Poitiers, Montpellier, Orléans, Strasbourg, Toulouse
et Versailles.
La Drac Ile de France, la DRAC Poitou-Charentes, les Conseils généraux
d’Île-de-France, les ADDA du Tarn, du Gers, de Haute-Garonne, de
Lozère et d’Aveyron, la SACD.
Le Moulin du Roc - scène nationale de Niort, les Treize Arches – scène
conventionnée de Brive, le Théâtre de Cachan, le Théâtre Jean Arp, le
Théâtre des Sources, le Théâtre de la Tête Noire, le Théâtre de la Vallée,
la Maison du théâtre à Jasseron, le théâtre du Périscope, le Théâtre du
Pélican, le TNG à Lyon, Traversant 3, Actémo, les Sentiers du Théâtre, la
médiathèque Marguerite Duras, la bibliothèque Lamartine, la bibliothèque
de La Plaine, Aligre FM 93.1, l’ANRAT.
Article 6
Le présent règlement ne vaut que pour
cette année scolaire 2015-2016
12
2007-2016 Tous les prix
Année scolaire 2006-2007 : Initiée par Aneth, l’action touche 3 classes, une dans
chaque département de l’académie de Créteil : Val de Marne, Seine Saint Denis, Seine
et Marne. 65 collégiens – 65 livres achetés.
Lauréat : Dominique Wittorski / Ohne ; Actes Sud-Papiers
« … Ce Prix m'honore bien sûr. J'en suis fier. Mais il indique une autre chose, infiniment
plus importante pour moi. J'ai écrit Ohne à la suite d'une commande de France Culture...
Et voilà qu'aujourd'hui, ce sont les collégiens qui distinguent Ohne parmi cinq textes. Ils
ont trouvé le texte à leur aune. Merci à eux. Merci pour ce geste qui ressemble au grand
écart.
Et puis non ! Il n'y a aucun grand écart justement. Il y a ce 31 mai 2007, et cette évidence
que nul ne devrait jamais plus remettre en cause : il n'y a pas de fossé entre la culture
exigeante et la soif des collégiens. Il n'y a pas de chose qui soit hors de portée.
Je suis fier de recevoir ce prix de ces collégiens, et ils peuvent être fiers d'eux : ils ont
démontré qu'elle n'existe pas cette jeunesse dont on nous rebat les oreilles, qui ne sait
plus lire, qui est paresseuse, qui glisse vers l'éternelle facilité, vers le consommable, vers
le vide... Une jeunesse au cerveau qui ne penserait pas...
Ah ! si la médiatisation pouvait être aussi intense que quand une voiture brûle...
Rêvons d'un rouleau compresseur médiatique qui dirait "les ZEP ont soif de France
Culture" !»
Dominique Wittorski
Année scolaire 2007-2008 : L’action touche 8 classes, une dans chaque
département d’Île de France. 220 collégiens - 220 livres achetés. Organisateur : Aneth
Lauréat : Dominique Richard / Une Journée de Paul ; éditions Théâtrales
« Je suis très honoré par ce prix. Aucun autre n'aurait pu me faire plus plaisir.
Je suis très heureux que ce soit vous, collégiens, qui me l'ayez décerné, après de longues
discussions passionnées. Je suis aussi particulièrement ému que ce soit ce texte-là,
justement, qui vous ait touché.
C'est un texte qui m'a échappé, qui s'est presque écrit malgré moi, un texte sur le deuil et
l'identité quand il était question des rêves d'une jeunesse d'aujourd'hui, comme si l'adulte
que je suis devenu se demandait ce qu'il pouvait bien vous transmettre, s'il en avait le
droit et la force.
C'est aussi une pièce sur le théâtre, car le théâtre est l'art de la cérémonie, de l'évocation
des morts, le rêve fou de faire revivre les absents, en chair et en os, dans le présent de la
représentation. Les plateaux de théâtre sont toujours remplis de fantômes, personnages
évanouis, acteurs qui les ont interprétés, spectateurs disparus...
On n'est jamais seul quand on écrit, toujours plein de tous ceux que l'on aime. On les
porte en soi et ils vous emmènent dans leurs rêves. Tout ce que je sais de moi, c'est ce
que j'ai tenté d'écrire, guidé dans ma nuit par la lumière de mon enfance, par le souvenir
de ces présences familières.
Continuez de devenir comme vous êtes, pleins d'enthousiasme et de générosité, remplis
de la gravité de la jeunesse, loin du sérieux des adultes, toujours plus convaincus que
"vivre est un privilège, pas un problème"...
Dominique Richard
13
Année scolaire 2008-2009 : L’action touche 8 classes, une dans chaque
département d’Île de France. 220 collégiens - 220 livres achetés.
Postures prend en charge l’organisation de Collidram.
Lauréat : Sébastien Joanniez / Désarmés, Cantique ; Espaces 34
« J’étais perdu, avec mon cantique sous le bras, au milieu du champ de bataille. J’avais
l’espoir, la tendresse, toutes ces faiblesses qui nous font presque la honte dans le monde.
Tellement le monde ressemble à rien, sauf au contraire d’un cantique.
Alors j’étais là, la peau d’espoir en chair de poule, et faible comme une bougie, comme
un crépuscule, comme un murmure. J’avais aussi l’impression d’être seul, et même un
peu moqué, à cause de mes histoires d’amour et de paix qui s’imaginent même pas sur
un champ de bataille.
Et puis Pascale Grillandini s’est approchée, elle a lu Désarmés, elle est repartie et elle est
revenue avec des élèves, des profs, des classes, des collèges, des théâtres, des
bibliothèques, des comédiens. On s’est vite retrouvés nombreux au milieu du bazar. On
a commencé à pousser un peu les combattants sur le côté pour avoir une place… Petit à
petit, ça nous a fait du silence, et on a pu discuter.
Ils avaient eu le temps de se poser des questions sur mon cantique, et des intelligentes,
spontanées, fraîches et même carrément franches. Ils ont toujours l’enfance avec eux les
jeunes, ils rebondissent. Pour peu qu’on les accompagne, ils se lancent.
Voilà pourquoi je vais maintenant moins seul avec mon cantique, je suis plusieurs
maintenant, une vraie foule avec moi, et des jeunes, des blancs, des noirs, des grandes
gueules et des timides. J’ai même un bandeau rouge sur le livre comme pour dire
attention ! Lu et approuvé par les futurs ! Je voudrais les remercier ici, les jeunes et
Pascale et les autres. De m’avoir donné la confiance, et l’espoir, et une belle leçon de
courage. Merci et… à bientôt sur la route du mieux ! »
Sébastien Joanniez
Année scolaire 2009-2010 : L’action commence à s’étendre à l’ensemble du
territoire français. Elle touche 9 classes en Île-de-France et 1 classe dans la région RhôneAlpes à Lyon, soit 10 classes participantes. 300 élèves – 300 livres achetés
Lauréate : Suzanne Lebeau / Le Bruit des os qui craquent ; éditions Théâtrales
« Oui, il est beau ce prix, il est précieux. Il dit ce que les mots souvent ne savent pas
expliquer. Il me rassure sur l’intelligence féroce des jeunes lecteurs, des jeunes
spectateurs. Il crie leur force morale, leur curiosité sans limites pour le monde qu’ils
habitent.
Ce sont les enfants qui m’ont donné le courage d’écrire ce texte, ceux de chez nous à qui
je suis allée montrer le documentaire qui m’avait tellement bouleversée. Ce sont les
enfants qui m’ont permis de croire à la résilience, ceux que je suis allée rencontrer en
RDC, deux ex-enfants soldats pendant 5 ans. Ce sont les jeunes spectateurs qui m’ont
donné le courage d’inviter les écoles et les jeunes publics aux représentations car ils ont
su lire l’histoire d’espoir dans Le bruit des os qui craquent quand les adultes se sentaient
désespérément coupables, responsables et impuissants.
Enfin, ce sont les collégiens, vous tous qui avez lu, analysé, commenté, discuté et choisi
une histoire dure, c’est vrai, une histoire dure mais vraie, qui malheureusement dure
encore dans un monde sans bon sens.
Merci d’être lecteurs d’abord, êtres humains et citoyens braves et clairvoyants.
Merci de ce courage que vous me donnez de croire encore à un monde meilleur, vous
tous qui êtes notre avenir. »
Suzanne Lebeau
Année scolaire 2010-2011 : L’action continue à s’étendre à l’ensemble du territoire
français. Elle touche 10 classes en Île-de-France, 8 classes en Rhône-Alpes, 3 classes
en Alsace, soit 21 classes participantes. 630 élèves – 630 livres achetés
Lauréat : Sylvain Levey / Cent culottes et sans papiers ; éditions Théâtrales
« C 'est pas du bidon ce prix, j'étais très fier de l'avoir après notamment
Sébastien Joanniez
et Suzanne Lebeau
14
et mes deux éditeurs aussi Pierre Banos et Françoise Du Chaxel.
O ô joie que d'apprendre la nouvelle alors que j’attends un train qui ne vient pas à la gare
Part Dieu à Lyon.
L comme livre, qui est au centre de ce prix et c'est rare et c'est bon et c'est important de
dire cela.
L comme lectures, qu'elles étaient belles ces lectures à Paris comme à Saint Priest, qu'ils
étaient beaux et touchants ces jeunes lecteurs apprentis acteurs d'un soir et comme ils
faisaient plaisir à voir.
I quelle belle idée que ce prix qui donne la parole la vraie, qui la déclenche, lui donne de
l'importance, loin des poncifs de la communication, ici nous sommes dans la vraie
démarche citoyenne de "je donne un avis".
D comme déception, oui je l'avoue il y a trois ans quand Alice pour le moment est arrivée
sur la deuxième marche du podium j'ai été déçu non pas par pure vanité mais pour toutes
les raisons évoquées ci-dessus.
R un rêve. I have a dream. Que ce prix puisse DONNER L'ENVIE, l'envie de lire, d'écrire.
Et si on touchait du doigt le rêve...
A ligre, la radio, autre très beau souvenir, quand des jeunes prennent la parole qui leur
est offerte sur une bonne radio associative humaine et intelligente.
M agique ces rencontres dans les classes, ces regards critiques qui vous sont adressés
avec fermeté, gentillesse et bonne humeur. »
COLLIDRAM c'est tout ça, c'est magique, c'est intelligent et simple à la fois. C'est
essentiel !
Sylvain Levey
Année scolaire 2011-2012 : L’action continue à s’étendre à l’ensemble du territoire
français. Elle touche 9 classes en Île-de-France, 6 classes en Rhône-Alpes, 6 classes en
Alsace, 2 classes en Lorraine, 1 classe dans le Nord Pas de Calais, soit 24 classes
participantes 750 élèves – 750 livres achetés
Lauréate : Françoise Du Chaxel / Ce matin, la neige ; éditions Théâtrales
« Mardi 19 Juin, je reviens de Strasbourg, dernière étape de mon tour de France Collidram
à la rencontre des collégiens. J'ai la tête pleine de visages et de regards, pleine de leurs
questions et de leurs silences aussi.
C'est si mystérieux et troublant le rapport entre un auteur et ses lecteurs. Comment ontils accueilli mes mots? De quoi ont-ils rêvé en les lisant?
Alors là, savoir que des collégiens, de 11 ans à 15 ans, ont choisi ce texte que je n'ai pas
écrit « pour » eux, mais où j'ai tenté, en mêlant l'histoire intime de deux adolescents à la
grande Histoire, de dire la difficulté de grandir surtout lorsqu'on a constamment des choix
à faire, c'était d'autant plus troublant.
Lorsque Pascale Grillandini m'a dit que Ce matin, la neige faisait partie de la sélection du
prix Collidram, j'ai été surprise et ravie, tant je trouve passionnante l'aventure que
représente ce prix, pas le prix lui-même bien sûr, mais ce voyage dans le théâtre qui s'écrit
aujourd'hui qu'il fait faire aux collégiens, les fans de lecture comme les si nombreux rétifs.
Et l'exigence de la sélection qui ne cherche pas à leur plaire mais à les emmener très loin.
Leurs questions font revivre Anna et Thomas, m'obligent à revenir sur la fabrique de
l'écriture.
Toutes les rencontres qui ont suivi m'ont fait faire ce chemin.
J'avais l'impression de ne pas répondre ce qu'il fallait, d'ouvrir encore plus de vides, mais
a–t-on vraiment besoin de tout savoir? Il y a eu des rencontres intimes dans une salle de
documentation ou dans une médiathèque et des rencontres plus solennelles dans des
salles de spectacle, et l'émotion de la remise du prix à Montreuil avec les surprises qu'ils
avaient préparées, mais j'ai toujours senti qu'ils étaient là, tout proches, même ceux qui
ne disaient rien ou qui faisaient ceux que ça n'intéresse pas.
Et puis je garde pour la fin ce moment précieux où une jeune fille est venu me dire lorsque
j'allais partir : "Voilà les deux phrases que je préfère dans votre texte: Mon père me
regarde devenir belle. Je le regarde devenir fier." Un beau cadeau! »
Françoise Du Chaxel
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Année scolaire 2012-2013 : L’action touche 13 classes en Île-de-France, 4
classes en Rhône-Alpes, 2 classes en Alsace, 2 classes en Lorraine, 2 classes
dans le Nord Pas de Calais, 1 classe en PACA, 2 classes en Poitou Charente, soit
26 classes participantes - 780 élèves – 780 livres achetés
Lauréate : Catherine Zambon / Mon frère, ma princesse ; L’Ecole des
loisirs
« Lorsque j’ai écrit Mon frère ma princesse, je n’avais aucune idée de la réaction d’un
lectorat d’enfants. N’était-ce pas trop audacieux cette histoire de petit garçon qui affirme
si fort son envie d’être une fille ? En écrivant les mots d’Alyan, je me suis dit quelques fois
que je risquais de surprendre, voire de déranger et, peut-être, de choquer.
Plus que vers le masculin/féminin, je tournais le regard vers le genre, l’identité profonde.
J’étais donc un peu inquiète. Je ne m’attendais certainement pas à ce qui s’est passé
avec les enfants que j’ai rencontrés et qui, découvrant Mon frère, ma princesse, ont fait
preuve d’une telle ouverture d’esprit. J’ai été bouleversée par ce sens de la justice affirmé
par beaucoup, par leur envie de reprendre pour soi cette parole de Nina : « Comme on
est, on a le droit », sans faire l’impasse sur de vrais débats singuliers, contradictoires,
riches. Lors des rencontres, j’ai vu des garçons venir habillés en fille et des filles habillées
en garçon, comme pour affirmer : « Nous aussi, on prend position, on défendrait Alyan
contre l’intolérance ». A eux tous, je dois des vrais moments de bonheur et de paix. A
tous, enfants, enseignants, équipe de Collidram, un grand merci. »
Catherine Zambon
Année scolaire 2013-2014 : L’action touche 9 classes en Île-de-France, 5 classes
en Rhône-Alpes, 4 classes en Alsace, 2 classes en Lorraine, 1 classe dans le Nord Pas
de Calais, 2 classes en PACA, 2 classes en Midi-Pyrénées, 4 classes en Poitou Charente,
soit 29 classes participantes - 870 élèves – 870 livres achetés.
Lauréate : Fabienne Swiatly / Annette, tombée de la main des dieux ; éd Color
Gang
La belle exigence
Exigence est le mot qui me revient sans cesse quand je me remémore les temps forts de
Collidram. Il peut paraître un peu sec mais l’exigence est une forme de confiance dans
l’intelligence de l’autre.
Ce n’est pas lui en demander trop mais surtout ce n’est pas se contenter du peu.
Etre lue avec exigence et puis avoir été reconnue dans son travail (avoir été compris)
donne le vrai courage, celui de dépasser les montagnes de bêtises et de suffisance qui
voudraient nous détourner du chemin des lumières pour nous entrainer vers les néons de
la consommation.
J’ai rencontré de nombreux élèves, à peine adolescents qui avaient leur mot à dire sur
mon texte. Des mots pour questionner, pour approfondir, pour soulever des doutes …
pour exister à leur tour dans mon écriture. Un texte n’est rien sans des lecteurs ou alors il
vient décorer quelques étagères poussiéreuses. J’ai aimé leur ingérence bienveillante.
Des élèves qui ne s’en laissent pas compter car le rugueux de la vie, ils connaissent. Il
n’y a que les adultes pour croire en l’innocence de leur jeunesse.
Et voir encore une fois combien ces jeunes peuvent s’impliquer dans une lecture si on sait
les accompagner et surtout si on leur fait confiance, me redonne le goût de l’avenir.
Mes mots directs parfois crus, ne leur ont pas fait peur et ils ont compris aussi la tendresse
qui pouvait s’en détacher.
J’espère qu’ils liront mon message ici posté car je veux encore leur dire combien leur
choix, leurs commentaires, leur implication me donnent du courage pour poursuivre mon
métier d’écrivaine.
J’emporte leurs mots, leurs regards, leurs sourires avec moi pour les jours gris de
l’écriture, les jours où le doute empêche d’avancer.
Et je veux également remercier ceux qui permettent que de telles rencontres aient lieu.
Ceux et celles qui pensent que la littérature n’est pas une distraction.
16
A chacun et chacune de Collidram, j’aimerais offrir ce slogan tout à fait personnel mais
soit 26 classes participantes pour qui nous ferons certainement cause commune :
« Non. Nous ne nous laisserons pas distraire ! »
Fabienne Swiatly
2015
32 classes participantes dans 9 régions : Alsace, Centre, Île-de-France, Languedoc,
Midi-Pyrénées, PACA, Poitou Charente, Nord Pas de Calais, Rhône-Alpes.- 960 élèves –
960 livres achetés
Lauréate : Claudine Galea / Au Bois; éd Espaces 34
« Lorsqu'en septembre dernier, Pascale Grillandini m'a téléphoné pour me dire que Au
Bois était dans la sélection du prix Collidram, je suis tombée des nues. Et j'étais dubitative.
Pour moi, il ne s'agissait pas d'une "pièce pour ados", comme on dit.
Je me suis dit qu'ils étaient gonflés à Collidram, ça m'a amusée, et j'étais curieuse de vos
réactions, mais je n'imaginais absolument pas que je pouvais avoir le prix.
Aujourd'hui je suis là avec vous et, oui, je suis très heureuse, mais je dois vous dire aussi
que vous m'avez fait réfléchir. Je me suis posé la question : est-ce que si j'avais voulu
écrire une pièce "pour adolescents", j'aurais fait ce
texte exactement ? Je crains que non. En partie, non. J'aurais eu peur de vous ennuyer,
j'aurais voulu vous rendre les choses plus faciles. Vous aurais-je finalement sousestimés ?
Qu'est-ce que j'aurais modifié ? Pas la langue, mais sans doute la forme de la pièce.
Est-ce que j'aurais balancé trois pages de monologue de la mère qui n'est pas l'héroïne ?
Est-ce que j'aurais imaginé ne pas distribuer la parole entre les protagonistes ? Est-ce
que j'aurais créé davantage de personnages adolescents ? Je ne me serais pas censurée
à propos du mot "sexe", de la scène de viol, j'aurais utilisé les mêmes niveaux de langage,
du poétique au plus familier – comme je l'ai dit à certains, si on parle d'un salopard on
l'appelle salopard, on ne dit pas monsieur !
Je n'ai jamais eu peur d'aborder les choses de front avec quelque public que ce soit. Je
n'aime pas prendre les jeunes pour plus naïfs ou inoffensifs qu'ils ne sont. Je ne cherche
pas à vous protéger car les livres m'ont sauvée quand j'étais adolescente, les livres m'ont
donné de l'audace, et ce sont les plus entiers, les plus radicaux, les plus cruels, les plus
forts qui ont joué ce rôle, parce que c'étaient en même temps des textes à la langue
superbe, aux histoires et aux sentiments complexes, et parfois je ne comprenais pas tout,
mais ils me parlaient, ils me parlaient très fort de ce qui m'intéressait, de ce qui nous
intéresse tous à partir d'un certain âge, votre âge, ils me parlaient de la passion, du désir,
de la rébellion, de la mort, de la liberté, du dépassement de soi, du désir d'ailleurs, du
courage, ils mettaient le monde et moi-même en questions, ils m'invitaient à l'aventure de
la vie.
Quand j'avais quatorze ans, la littérature "pour adolescents" n'existait pas. Je lisais donc
de grands auteurs tout court qui s'adressaient aussi à moi. Je me souviens du Barrage
contre le Pacifique de Marguerite Duras, Dune de Frank Herbert, Les Hauts de Hurlevent
d'Emily Brontë, Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos, Le blé en herbe de
Colette, Aurélien de Louis Aragon, Mrs Dalloway de Virginia Woolf, La Batarde de Violette
Leduc, L'Étranger de Camus, L'astragale d'Albertine Sarrazin, Frankie Addams de Carson
Mc Cullers. Il n'y avait pas Internet, le monde de l'image c'était la télévision. La télévision
me distrayait, mais on ne vit pas, on n'aime pas en étant seulement distrait, non ?!
Quand on est adolescente, adolescent, on se pose beaucoup de questions, et c'est la
même chose quand on est artiste, écrivain en ce qui me concerne. C'est en disant et en
montrant franchement les choses, en dévoilant ce qu'on nous cache, en libérant ce qu'on
censure, en créant des débats, en ouvrant des perspectives, en invitant au rêve et au
changement, sans confondre le rêve avec l'illusion, l'utopie avec la chimère, c'est en
offrant de la beauté – richesse de la langue, poésie, délicatesse des émotions, hauteur
de la pensée – qu'on mesure l'étendue, la complexité, l'inventivité de l'être humain. Vous
êtes des êtres humains en formation, quelle chance merveilleuse, vous avez votre vie à
construire et votre vie c'est aussi la vie des autres, notre vie.
17
Alors je vous dis merci. Merci d'être de vrais lecteurs, audacieux, gourmands, sans a
priori, prêts à essayer, à expérimenter, à "comprendre de l'intérieur" comme l'a dit l'un
d'entre vous - et c'est exactement mon travail, essayer tenter expérimenter chercher
creuser oser comprendre de l'intérieur -, prêts à en découdre, prêts à s'enthousiasmer, à
s'interroger, à argumenter, à mettre sur la place publique tout ce qui fait la vie, y compris
ce qui fait mal, ce dont on a peur ou honte, ce qui donne la rage. Merci parce que vous
confirmez ce que je pensais : la littérature pour les adolescents c'est de la littérature. Qu'on
vous la confie, qu'on mette les livres entre vos mains, vous savez vous débrouiller,
comprendre, deviner, critiquer, argumenter. Et si vous ne savez pas, vous apprenez. Et
vous apprenez vite. Il y a dans toute œuvre une porte par laquelle entrer, une porte
émotionnelle, une porte intime, une porte sensuelle, une porte collective, une porte
insurrectionnelle. Une porte vivante.
Alors merci aussi à Postures, à l'équipe du prix Collidram, car ce sont elles et eux qui ont
porté ces textes dans les classes parmi vous avec les enseignants qui l'ont voulu, et merci
à eux, à elles, ils ont osé, ils vous ont fait confiance, ils ne vous ont pas facilité la tâche,
ils ne vous ont pas raconté de sornettes, ils ne vous ont pas caressé dans le sens du poil.
Merci enfin à Sabine Chevallier, mon éditrice qui a eu l'idée de proposer pour la sélection
de ce prix
Rien ne vaut la liberté, toute la liberté d'écrire et de lire et de penser et de parler. Il ne faut
rien négocier en termes de liberté. Rien négocier en termes d'exigence et de beauté. Pour
vivre sa vie. »
Claudine Galea - Lauréate du prix Collidram 2015
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