tholiques démocrates, ni catholiques socia-
listes, ni catholiques nationalistes. Lorsque
les constitutions ou les législations des
États devinrent laïques (autrement dit
athées de fait), lorsque la brèche de Porta
Pia et la prise de Rome eurent détruit le
dernier État vraiment catholique qui était
aussi l’État catholique par excellence, les
catholiques se trouvèrent dans une situa-
tion inédite. Ce n’était plus la croix mais la
Franc-Maçonnerie qui triomphait, et le mi-
litant catholique était par le fait même
considéré par l’État comme subversif, et
ce, non seulement dans les pays infidèles
ou protestants, mais aussi dans les pays qui
pouvaient se vanter de posséder une tradi-
tion catholique bimillénaire, et une popula-
tion quasi intégralement catholique.
Il faut le dire et le rappeler : qui est-ce
qui réorganisa le mouvement catholique,
qui donna naissance à l’action catholique,
qui fonda et diffusa la presse catholique,
les banques populaires et une myriade
d’œuvres sociales ? Ce ne furent pas les
catholiques libéraux, ni les catholiques dé-
mocrates, ni les catholiques modérés et
transigeants ; ce furent par contre les véri-
tables catholiques intransigeants, les catho-
liques du Syllabus, les adversaires résolus
de la révolution : c’est-à-dire ceux qui au-
jourd’hui sont totalement exclus et mis en
marge du mouvement qui se dit (ou se
disait) catholique.
Deux périodes seront donc examinées.
La première va plus ou moins de 1864 avec
la publication du Syllabus, ou “somme des
principales erreurs de notre temps”, jus-
qu’à la fin du pontificat de Léon XIII
(1903). C’est l’époque de l’intransigeance
et de la “Question romaine”, de la lutte de
l’Église contre l’État libéral bien vite domi-
né par la Franc-Maçonnerie. La dernière
proposition condamnée par le Syllabus
présente – a contrario – le programme de
ces catholiques : “Le Pontife Romain NE
peut et NE doit PAS se réconcilier et
transiger avec le progrès, le libéralisme et la
civilisation moderne”. Tel est le résumé du
programme intransigeant. Le 17 septembre
1867, à Bologne, naissait l’œuvre de Mario
Fani et Giovanni Acquaderni, la “Società
della Gioventù Cattolica Italiana” (GCI)
[Société de la Jeunesse Catholique Italien-
ne] avec pour devise “preghiera, azione, sa-
crificio” [prière, action, sacrifice]. La date
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de la fondation n’est pas un hasard : c’est
celle de l’anniversaire de la bataille de Cas-
telfidardo, où, en 1860, près de Lorette, les
troupes pontificales affrontèrent les trou-
pes italiennes ; ce fut une défaite, il est
vrai, mais aussi le début de cette “croisade”
qui vit des volontaires du monde entier (et,
in primis, des Français et des Italiens) pren-
dre les armes pour l’Église et le Pape. Un
grand nombre d’entre eux (comme Fani, ci-
té plus haut ou, en 1870, Sacchetti) seront
parmi les protagonistes du premier mouve-
ment catholique. C’est la Gioventù Cattoli-
ca Italiana qui, en 1874, après la chute de
Rome, organisa à Venise le premier
Congresso Cattolico Italiano. Bien vite,
sous la conduite de Paganuzzi, se constitua
une véritable Opera dei Congressi [Œuvre
des Congrès] qui fut de 1874 à 1904 l’âme
du Catholicisme intransigeant. Un catholi-
cisme qui, contrairement aux temps de la
Restauration, ne pouvait compter sur l’ap-
pui des gouvernements (pas même de
quelques-uns), mais qui avait l’avantage,
sur les catholiques de la Restauration affai-
blis par le fidéisme “traditionaliste”, de la
redécouverte voulue par Léon XIII, de la
philosophie et de la théologie de saint Tho-
mas d’Aquin. C’est Léon XIII toujours qui
pointa le doigt sur l’ennemi : le Judaïsme
et la Franc-Maçonnerie, et qui, aux Socia-
lisme et Communisme naissants (déjà
condamnés dès leur naissance par Pie IX
en 1849) opposa – toujours dans la ligne de
saint Thomas – les principes sociaux catho-
liques. Au Congrès de Milan de l’année
1897, Mgr Jacopo Scotton put exposer,
dans le rapport sur la situation de l’Œuvre,
qu’en un an seulement, avaient été fondés
1 830 nouveaux Comités paroissiaux, 310
sections de jeunes, 160 nouvelles caisses ru-
Paolo Prodi, frère de Romano, et Gustavo Raffi, grand
maître de la Franc-Maçonnerie