récemment repris par la CJCE (A) en son arrêt Mediakabel du 2 juin 2005 (a) en parfaite conformité avec la
réglementation communautaire existante (b).
A- Un critère à géométrie variable durablement employé en droit interne
a) L’existence d’un public comme élément traditionnel de définition de la communication
audiovisuelle
Le fait que la communication audiovisuelle se définisse par référence à l’existence d’un public n’est
pas un phénomène neuf. La loi du 29 juillet 19822 disposait en effet déjà en son article premier que « […] la
communication audiovisuelle est la mise à disposition du public, par voie hertzienne ou par câble, de sons,
d’images, de documents, de données ou de messages de toute nature ». Par ailleurs, l’article 77 de cette
même loi portait en son sein une précision des plus importantes, puisqu’il soumettait à déclaration préalable
« tout service de communication audiovisuelle avec le public en général ou avec des catégories de public
par lequel chaque utilisateur du service proposé interroge lui-même à distance un ensemble d’écrits, de
sons, d’images ou de documents ou messages audiovisuels de toute nature, à l’exclusion des œuvres
cinématographiques, et ne reçoit en retour que les éléments demandés ». La lecture croisée de ces
dispositions, désormais toutes deux abrogées3, démontre que le législateur de l’époque entendait définir la
communication audiovisuelle d’une manière très large, en prenant en compte l’existence d’un public du
point de vue du diffuseur. Si ce dernier adressait un message à un public ou à une catégorie de public son
activité relevait de la communication audiovisuelle, même si le message était en réalité transmis sur
demande individuelle.
La loi fondatrice du 30 septembre 19864 n’est pas venue bousculer cette conception, précisant
simplement en son article deux qu’« on entend par communication audiovisuelle toute mise à disposition du
public ou de catégories de public, par un procédé de télécommunication, de signes, de signaux, d’écrits,
d’images, de sons ou de messages de toute nature qui n’ont pas le caractère d’une correspondance privée ».
Le domaine de la communication audiovisuelle demeurait donc très large, puisque défini par opposition à la
communication privée. A condition de transiter par le biais d’un moyen de télécommunication5, tout
message destiné au public ou à une catégorie de public relevait donc de la communication audiovisuelle.
Face au développement rapide des services audiotel et minitel, une circulaire du 17 février 19886 vint
préciser les intentions du législateur de 1986. Aux termes de ce texte, « la communication audiovisuelle se
définit […] par opposition à la correspondance privée », de sorte qu’ « il y a communication audiovisuelle
lorsque le message est destiné indifféremment au public en général, ou à des catégories de public, c'est-à-
dire à un ensemble d’individus indifférenciés sans que son contenu ne soit fonction de considérations
fondées sur la personne » ou encore lorsque « le message transmis est à l’origine mis à la disposition de
tous les usagers du service, à titre onéreux ou gratuit ».
La communication audiovisuelle demeurait donc définie par opposition à la notion de
correspondance privée. En ce sens, l’existence d’un public, si elle figurait dans la définition, n’avait en fait
qu’une portée limité. Peu importait en substance qu’il existe réellement un public de récepteurs, c'est-à-dire
un ensemble indifférencié de personnes recevant simultanément le message, l’essentiel étant que le
diffuseur s’adresse à un public potentiel auquel il délivre le même message. La célèbre affaire Midratel du
13 octobre 19927 constitue à ce titre une illustration topique, la Cour d’appel de Paris jugeant que « les
kiosques téléphoniques, mettant à la disposition du public des messages pré-enregistrés, font partie des
services de communication audiovisuelle et se trouvent à ce titre soumis aux dispositions de la loi du 30
septembre 1986 ». Le fait que le service soit fourni sur demande individuelle ne remettait donc en aucun cas
en cause son rattachement à la catégorie de la communication audiovisuelle : le diffuseur s’adresse à un
public et lui destine un message pré-enregistré non individualisé, de sorte que de son point de vue il y a bien
communication audiovisuelle. Le rôle du public, qui décide en pareille hypothèse du moment auquel le
transfert d’information a lieu demeurait donc neutre.
2 Loi n°82-652 du 29 juillet 1982, JORF du 30 juillet 1982, pp. 2431 et s.
3 Abrogées par les dispositions de l’article 110 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication, JORF 1er octobre 1986, pp. 11755 et s.
4 Loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, JORF du 1er octobre 1986, pp. 11755
et s.
5 Tel que défini à l’article 2 al. 1 de la loi de 1986.
6 Circulaire du 17 février 1988 prise en application de l’article 43 de la loi du 30 septembre 1986, JORF du 9 mars
1988, pp. 3149 et s.
2
7 CA Paris, 1ère ch., A, 13 octobre 1992, SA Midratel c/ société France Télécom, confirmation de TGI Paris 1ère ch., 15
octobre 1991. V. Dalloz, IR, 1993, 6ème cahier, p. 32 ; Petites Affiches, 18 novembre 1992, n°139, pp. 11 et 12.