CH XV – INTRODUCTION AUX LASERS
I – OBJECTIF DE CE CHAPITRE
Nous allons ici utiliser un grand nombre de notions introduites tout au long du cours
d’optique pour vous décrire quelques aspects de la physique et de la technologie des lasers.
Nous passerons également en revue les « modes de fonctionnement » des lasers ainsi que la
description de quelques uns des lasers les plus usuels.
Enfin nous décrirons quelques exemples d’application des lasers, le champ étant bien plus
vaste que le panorama donné ici (c.f. : l’introduction de ce cours).
II – AMPLIFICATION – OSCILLATION
Pour avoir un effet d’amplification du rayonnement entre deux états i et j
d’une transition d’un système (atome, molécule, ion, solide, etc) il faut que la population n
()
EiEj
j de
l’état j soit supérieure à ni population de l’état i.
Dans ce cas l’émission stimulée sera supérieure à la contribution de l’absorption et de
l’émission spontanée et le système fournira plus d’énergie au rayonnement qu’il n’en reçoit. Il
y a « gain optique ».
Nous avons vu (CH XIV A) qu’entre deux niveaux 0 et 1 de populations n0 et n1, avec
(ce qui est justifié pour une transition du domaine optique où
et ) on avait :
kTEEE 01 >>=
14cm10E
1
cm200~kT
(
)
()
νρ+
ν
ρ
=1010
10
0
1BA
B
n
n
Un système à deux niveaux ne peut donc conduire à l’amplification puisqu’à la
saturation .
()()
νρ 01 nn
Pour réaliser ce gain il faut utiliser un système à plus de deux niveaux que l’on va placer hors
d’équilibre thermodynamique par une excitation spécifique du niveau excité de la transition.
Même si en pratique de très nombreux niveaux d’énergie peuvent être mis en jeu on
représente le « pompage optique » du système par des schémas à 3 ou 4 niveaux.
1
2
3
νL
n3 > n1
Systèmes à
3 et 4
Niveaux
(inversion de population)
Rq : le pompage direct
1 3 est aussi possible
1
2
3
νL
n3 > n4
4
1
Dans le schéma à 3 niveaux on part de l’état fondamental 1) et on excite le système
vers un état (ou un ensemble d’états) 2) qui perdent rapidement leur énergie au profit de l’état
3) qui est l’état excité de la transition . L’inversion est faite lorsque n
133>n1.
Dans le schéma à 4 niveaux les 3 premières étapes sont identiques mais l’état final de la
transition n’est pas l’état fondamental mais un état 4) d’énergie supérieure.
L’intérêt de cette dernière approche est de réaliser l’inversion beaucoup plus facilement avec
un état final qui est moins (voire beaucoup moins) peuplé que l’état fondamental. Là encore
pour que l’inversion puisse être maintenue il faut que la transition soit très rapide
pour ne pas accumuler de population dans 4). )1)4
Le gain est fonction de la fréquence de la lumière, donc de la largeur de la raie correspondant
à la transition . Pour un niveau de pompage supposé stationnaire on obtient
une 1)3)ou )4)3
courbe de gain du milieu amplificateur.
1
Gain -Pertes
νν
0
1
∆ν
0
ne
c
2
0=
ν
Nous savons qu’un amplificateur convenablement contre réactionné (c’est-à-dire dont
la sortie est réinjectée sur l’entrée) peut osciller. Le système se cale en général sur la
fréquence correspondante au gain maximum (c.f. les montages d'électronique, l’effet larsen
lorsqu’un microphone reçoit le signal d’un haut parleur, ou l’éblouissement d’une caméra
électronique placée devant un téléviseur qu’elle filme – cette dernière expérience étant à
éviter pour ne pas risquer d’endommager la matériel !). Dans le domaine optique le moyen le
plus employé pour réaliser cette contre-réaction est de placer le milieu amplificateur dans une
cavité Fabry Pérot. Le système oscillera si le gain est supérieur aux pertes : c’ est l’effet
LASER (Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation)
* Comment l’oscillation démarre-t-elle ?
L’oscillation se crée à partir d’un «
bruit » (parasite engendré par l’interrupteur, ou bruit
acoustique dans les exemples précédents) qui ici est l’émission spontanée. Dès que quelques
photons « accordés sur la cavité » sont émis dans la direction de la normale aux miroirs ils
sont amplifiés constituant ainsi l’amorce du phénomène de résonance.
* Quelle est l’origine des pertes ?
2
Avant tout, dans la mesure où l’on souhaité récupérer à l’extérieur du Fabry Pérot une partie
de l’énergie de la cavité le facteur de transmission T=1-R du « miroir de sortie » constituera
une cause de perte.
Des réflexions parasites, des diffusions, des déformations du front d’onde, de l’absorption
éventuelle entre le niveau 3) et un niveau excité, etc, peuvent également induire des pertes.
III – LASERS : QUELQUES MODES DE FONCTIONNEMENT
5
10
15
20
25
E
(10
3
cm
-1
)
2 E
4 T
1
4 T
2
6927 Å 6934 Å
20 cm-1
Cubique Trigonal
1) Un système à 3 niveaux « historiques » : le laser à rubis.
Il est étonnant, compte tenu de ce que nous avons déjà dit sur les lasers à 3 et 4 niveaux que le
premier système qui ait fonctionné soit un laser à 3 niveaux. Cela tient peut-être au fait que le
rubis (ions Cr3+ dans une matrice d’alumine – Al2O3 – appelé parfois saphir blanc lorsqu’elle
n’est pas dopée) a quelques qualités remarquables :
- Deux grosses bandes (état 2) correspondant à 4T1 et 4T2) très larges couvrant tout le
visible et capable d’absorber efficacement la lumière blanche d’un flash (c.f.
figure) ;
- Les états excités correspondants à ces bandes perdent très vite (qq ps) leur énergie
potentielle au profit d’un état 3) (2E) de durée de vie longue* (~ 2 ms). En fait l’état
3) 2E donne 2 états séparés de 20 cm-1 par couplage spin orbite au second ordre.
- La transition est très fine car l’ion Cr
2
42 AE3+ a sensiblement le même rayon
ionique que Al3+ et il s’intègre de ce fait très bien dans la matrice sans distorsion
de la maille qui créerait un élargissement inhomogène.
- Le rendement quantique est également excellent c’est-à-dire qu’un photon absorbé
a une bonne probabilité de donner un photon émis à partir de l’état 2E (par contre
la différence d’énergie entre le photon absorbé et photon émis peut-être grande et
dissipée sous forme de transitions non radiatives donc de chaleur qu’il va falloir
évacuer).
* Pour ceux qui seraient intéressés par l’origine de cette relativement longue durée de vie entre deux niveaux
d’énergie de la configuration associée à la couche incomplète 3d3 il faut noter : a) que le caractère de la transition
n’est pas dipolaire magnétique mais dipolaire électrique b) que ceci est du au fait que dans un cristal non centro-
symétrique (l’inversion n’est pas un élément de symétrie) la parité n’est pas un « bon nombre quantique » c)
enfin la transition est peu intense car interdite de spin (au premier ordre).
3
Le laser à rubis fonctionne généralement en mode impulsionnel en étant pompé par un flash
dont la durée est de l’ordre de la ms.
Montage Typique
Rubis Rose
Cr3+/Al3+ = 10-4
2) Fonctionnement en relaxé, déclenché (Q-Switch), à modes synchronisés, monomode ou
multimode.
Ces différents modes de fonctionnement sont applicables à l’ensemble des lasers, nous en
discutons ici dans le cas du rubis.
a) Régime relaxé.
P (Flash)
t
t
P (Rubis)
1µs
1ms
4
C’est un régime que l’on peut observer lorsqu’on cherche à remplir un réservoir avec
une pompe qui possède à la fois des fuites et un trop plein de type siphon. Le rôle de la pompe
est tenue par le flash, les fuites représentent l’émission spontanée et le siphon représente
l’émission laser.
Dans l’analogie hydraulique on observe une mise en route périodique du siphon et donc la
baisse rapide du niveau associé du réservoir, ici l’émission laser va avoir tendance à vider le
niveau 2E de sa population et à diminuer le gain du système qui n’oscillera plus jusqu’à ce que
le pompage rétablisse le gain , etc… Pendant la durée du flash, soit environ 1 ms, on
observera une suite un peu erratique d’impulsions (n’oubliez pas le caractère aléatoire de
l’émission spontanée) de largeur typique 0,1 µs séparés d’environ 1 µs.
Le rendement d’un tel laser est assez mauvais, on stock environ 2 000 J d’énergie électrique
dans les capacités d’alimentation du flash (il faut près d’un m3 de capacités !) pour récupérer
10 J d’énergie dans l’impulsion optique. De plus cette impulsion dure 1 ms et la puissance
crête (mal contrôlée) est de l’ordre de quelques dizaines de W ce qui est insuffisant pour
beaucoup d’applications (effets non linéaires, perçage, etc…). Pour palier cet inconvénient on
change de régime de fonctionnement.
b) Régime déclenché (Q-switched).
M ilieu Amplificateur
Interrupteur
Rapide
Interrupteur
Fermé
Ouvert
P
t
Revenons à l’analogie hydraulique, il suffit de bloquer le siphon pour voir l’eau
s’accumuler dans le réservoir et de l’ouvrir brusquement pour avoir un écoulement violent. Ici
on utilisera un système d’interrupteur (modulateur à effet Pockels avec polariseur optionnel)
qui bloque le fonctionnement du laser pendant presque toute la durée du flash et permet
d’obtenir une impulsion « géante » de quelques joules pendant 10 ns soit une puissance crête
de l’ordre de 109 W (l’équivalent d’une centrale nucléaire mais pendant seulement 10 ns !)
capable d’engendrer les très nombreux effets non linéaire interdits par le mode relaxé.
c) Régime « à modes synchronisés »
Dans la courbe de gain du laser que nous avons montrée au début de ce chapitre
(environ 0,1 cm-1 pour un bon rubis) plusieurs modes peuvent osciller (par exemple pour une
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