Liberté Samedi, 16 Mars 2013
La directrice du FMI a animé, jeudi à Alger, une conférence
“Les chemins de la prospérité pour l’Algérie”
Par : Meziane Rabhi
La directrice générale du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, a ani jeudi une
conférence à la résidence d’État Djenane El-Mithak (Alger) ayant pour thème “Les chemins de la
prospérité pour l’Algérie”.
La directrice générale du FMI a rappelé que durant la décennie écoulée, l’Algérie a affiché de bons résultats
économiques, souvent sur fond d’incertitude mondiale. Grâce à des politiques macroéconomiques avisées et
notamment à une gestion prudente des recettes pétrolières et gazières, l’Algérie a pu surmonter la crise
mondiale et les incertitudes régionales. La directrice du FMI a constaté que l’économie algérienne est ainsi
devenue plus robuste à divers égards.
“En effet, rares sont les pays qui peuvent se targuer d’avoir une dette extérieure de l’ordre de 2% du produit
intérieur brut (PIB), un déficit du même niveau, des réserves internationales équivalentes à 40 mois
d’importations et une croissance économique qui tourne autour de 3,5%” a-t-elle indiqué. Sur ce dernier point,
Christine Lagarde estime que le FMI considère que le potentiel de croissance de l’Algérie est nettement
supérieur à 3,5%. La directrice du FMI a, par ailleurs, qualifié la décision de création du fonds de régulation
des recettes de “judicieuse”.
Mme Lagarde relève que l’Algérie est, néanmoins, “très dépendante des exportations des hydrocarbures”,
avertissant sur les tensions “qui sont toujours à l’œuvre” qui mettent à l’épreuve cette stabilité de l’économie
algérienne. La première résulte d’un facteur exogène, lié au caractère international de la crise financière.
L’Algérie a été préservée de la contagion, en raison de la constitution de son secteur bancaire et de “l’excellente
supervision effectuée par un gouverneur d’une banque centrale qui a fait preuve d’une réelle indépendance”. Si
les conditions financières se sont peut-être stabilisées, la reprise de l’économie réelle est encore trop lente. Cette
reprise fragile de l’économie mondiale ne garantit pas à l’Algérie une accélération des exportations des
hydrocarbures et n’assure pas un maintient du prix du pétrole élevé.
Les facteurs économiques qui mettront à l’épreuve la stabilité algérienne ne sont pas tous de nature exogène.
Certains son endogènes”, analyse la directrice du FMI, citant les tensions inflationnistes et le taux de chômage.
Sur ce dernier (le taux de chômage estimé à 10%), Mme Lagarde s’interroge sur “sa pertinence statistique” et
relève que chez les jeunes, il est deux fois supérieur. Ces tensions, avertit la directrice du FMI, risquent de
compromettre la croissance et, avec elle, la création d’emplois.
Mme Lagarde indique que la maîtrise de l’inflation exigera un bon dosage de mesures. Des initiatives allant
dans le bon sens ont déjà été prises, que ce soit dans le budget de cette année, d’où la décision, en mai dernier,
de resserrer la politique monétaire. “Il ne sera cependant pas facile d’atteindre l’objectif d’une baisse
significative de l’inflation. Nous, dans notre prévision, nous considérons qu’elle devrait se rétablir autour de
5%. On a un léger désaccord sur ce chiffrage avec les autorités qui préfèrent voir l’inflation autour de 4%. Cela
me paraît un peu plus délicat”, estime Mme Lagarde, indiquant que d’autres décisions sont nécessaires.
“Je pense notamment à la poursuite du resserrement de la politique monétaire, mais aussi à la nécessité de
résister à toute nouvelle pression tendant à une augmentation des dépenses courantes de l’État, notamment de la
masse salariale”, recommande la directrice générale du FMI.
Comment développer les possibilités d’emploi, de croissance et de prospérité ?
Mme Lagarde constate que si le pétrole et le gaz, qui contribuent pour environ 40% au PIB total, représentent
98% des exportations du pays et fournissent environ deux tiers des recettes budgétaires, ces secteurs
n’emploient qu’environ 2% de la population occupée. Elle estime qu’un secteur privé dynamique doit exister à
côté d’un secteur public responsable. Cela signifie, explique la directrice générale du FMI, “s’ouvrir afin
d’accéder aux marchés mondiaux, mais aussi s’ouvrir au monde extérieur, à ses investissements, ses biens, ses
services et son savoir-faire”.
Il faut améliorer le climat des affaires et faciliter l’accès aux services financiers. Des réglementations
complexes freinent la croissance et la création d’emplois dans le secteur privé.
Malgré les mesures prises par le gouvernement pour remédier à certains problèmes, disons-le franchement, il y
a encore trop de formalités administratives”, constate-t-elle, révélant que le Premier ministre a demandé
l’instauration d’un guichet unique “pour qu’en matière d’importation, il n’y aura plus quatre ministères comme
interlocuteurs, mais un seul”. “Je pense qu’il va venir, le 15 avril, vérifier, sur place et sur pièces”, a-t-elle
révélé. Atténuer les restrictions qui sent sur l’investissement étranger contribuera aussi à développer les
perspectives du secteur privé. Quelles sont donc les priorités d’une croissance mieux partagée ? Pour la
directrice du FMI, “tout d’abord, il faut mettre en place des institutions modernes et transparentes qui
nourrissent la responsabilisation et la bonne gouvernance”.
M R
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