7) Module à effet Peltier-Seebeck

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TPn°7
ETUDE D'UN MODULE THERMIQUE A EFFET PELTIER-SEEBECK
(Paola Giura, Frédéric Moulin)
I) Introduction
Les effets Peltier et Seebeck sont connus depuis très longtemps. Ils mettent en oeuvre une ou
plusieurs jonctions entre deux conducteurs électriques de nature différente:
L'effet SEEBECK découvert en 1821 par le physicien allemand Thomas Johann Seebeck qui
démontre qu'une différence de température entre deux soudures de métaux différents, génère un
courant électrique ou une différence de potentiel. La principale application est la mesure de
température par thermocouple.
L'effet PELTIER découvert en 1834 par le physicien français Jean-Charles-Athanase Peltier qui
met en évidence le phénomène inverse de l'effet Seebeck. Un courant qui circule entre deux
soudures de métaux différents, génère une différence de température dépendant du sens de
circulation du courant. La principale application est la fabrication de petits systèmes de
refroidissements pour l'électronique, les lasers, la biologie ...
II) Préambule théorique
a) Rappels sur les lois d'Ohm et de Fourier
r
Lorsqu’un conducteur est soumis à l’action d’un champ électrique E , on observe localement une
r
densité de flux de courant j , obéissant à la relation vectorielle:
r
r
j =σE
(loi d'Ohm locale)
ou σ ( S .m −1 ) est la conductivité électrique du matériau.
Une situation semblable existe en conduction thermique, lorsqu’un conducteur est placé entre deux
r
températures différentes, on observe localement une densité de flux de chaleur q proportionnelle à
r
la différence de température via son gradient ∇T tel que :
r
r
q = −λ0 ∇T
(loi de Fourier locale)
où λ0 ( W .m −1 .K −1 ) est la conductivité thermique du matériau à champ électrique nul (le signe
négatif présent dans la loi de Fourier, traduit l'orientation du flux thermique des hautes vers les
basses températures)
TPn°7
Le module thermoélectrique Peltier-Seebeck que vous utiliserez, est un dispositif qui nous
permettra de mettre en évidence les effets croisés qui peuvent se manifester lorsqu’un matériau est
r
r
en présence à la fois d’un champ électrique E et d’un gradient en température ∇T . On aura donc
une possible influence du champ électrique sur le flux de chaleur, et une possible influence du
gradient de température sur le courant électrique. Ces effets restent linéaires et on peut toujours
écrire les relations générales suivantes:
r
r
r
q = −λ0 ∇T + ME
r
r
r
j = σ E − L∇T
Les quatre coefficients λ0 , M ,σ , L sont appelés les coefficients cinétiques du matériau et par
certaines considérations théoriques (Onsager), il a été établi d'une manière générale que les deux
coefficients L et M sont reliés par une relation simple: M = L T .
Le système d'équation ci-dessus peut donc se réécrire d'une manière plus explicite en utilisant cette
r
dernière relation ainsi que le champ électrique E :
r
r
r
q = − λ ∇ T + Tε j
r
r
r
E = ρ j + ε ∇T
avec: ρ = 1 / σ la résistivité électrique du matériau, λ = λ0 − ρTL2 la conductivité thermique en
présence d'un champ électrique et ε = ρL le pouvoir thermoélectrique.
Le coefficient ε , est le paramètre qui va nous intéresser ici car il est à l'origine des effets Peltier et
Seebeck qui s'observent en utilisant une ou plusieurs jonctions (ou soudures) entre deux matériaux
conducteurs de natures différentes.
b) L'effet Seebeck
Voltmètre à T0
1
qui apparaît sous forme d'une tension, lorsque
les
soudures
entre
deux
matériaux
∆V
2
conducteur A
conducteur B
facile de mettre en évidence l'effet Seebeck
conducteur B
Sur le montage expérimental ci-contre, il est
conducteurs sont portées à des températures
différentes:
soudure à T1
soudure à T2
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r
En l'absence de courant ( j = 0 ) nous pouvons écrire la relation:
r
r
E = ε ∇T
qui devient le long des fils:
r
r r
r
dV = − E .dl = −ε ∇T .dl = −ε dT
La mesure de la différence de potentiel ∆V est effectuée avec un voltmètre classique qui
n'intervient pas dans l'effet Seebeck puisque ses contacts avec le conducteur B sont à la même
température:
2
2
T
T
T
T2
1
1
T0
T1
T2
T1
∆V = V1 − V2 = − ∫ dV = ∫ ε dT = ∫ 1ε B dT + ∫ 2 ε A dT + ∫ 0 ε B dT = ∫
(ε A − ε B ) dT
Si on se place dans un régime de température où la différence des deux pouvoirs thermoélectriques
ε A et ε B des deux conducteurs (A) et (B) dépend peu de la température elle même, on obtient la
relation usuelle:
∆V = ( ε A − ε B )∆T = α ∆T
Avec α représentant le coefficient de Seebeck donné par des tables.
D’un point de vue électrocinétique, la soudure se comporte comme un générateur de force
électromotrice fem= ∆V . Dans un module thermoélectrique la force électromotrice générée est
augmentée en mettant un nombre important de soudures en série.
c) L'effet Peltier
Cette fois-ci on fait passer un courant électrique à travers les jonctions. On observe alors à
l'interface une absorption ou un dégagement de chaleur suivant le sens du courant. Prenons en
considération une soudure de section S, à la température T, entre deux matériaux comme indiqué
sur la figure ci-dessous:
P=T(εA-εB)I
I
conducteur A
conducteur B
Fig 1: Effet Peltier avec dégagement ou absorption de chaleur au
niveau de la jonction entre deux conducteurs de natures différentes.
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r
En situation isotherme sur une seule jonction ∇T =0 et en présence de courant nous pouvons écrire
la relation:
r
r
q = Tε j
r
r
r
r
Plus précisément nous avons: q A = Tε A j dans A et q B = Tε B j dans B. Le courant I = jS est le
r
r
même dans les deux conducteurs. Il en résulte donc que q A ≠ q B et donc la puissance thermique P
qui traverse la soudure est non nulle et dépend du sens du courant:
P = (q A − q B )S = T (ε A − ε B )I
Dans un module Peltier cet effet est augmenté en mettant en série N soudures: P = NT (ε A − ε B )I
Pour des raisons pratiques, on introduit le coefficient Peltier: π (T ) dépendant de la température et
caractérisant le type de jonction:
π ( T ) = NT (ε A ( T ) − ε B ( T ))
ce qui nous permet de calculer directement les puissances thermiques absorbée ou dégagée aux
niveau des deux soudures:
P1 = π ( T1 )I
P2 = −π ( T2 )I
(le courant I circule de A vers B dans la soudure à T1 et de B vers A dans la soudure à T2 )
L'effet Peltier a une interprétation microscopique lié au transport d'entropie par les porteurs de
charge (électrons ou trous) au sein du matériau. En passant d'un conducteur A à un conducteur B, les
électrons ou les trous passent d'une entropie transportée s A à une entropie s B . Il y a donc
absorption ou libération de chaleur T ( s A − s B ) dépendant du sens de la traversée de la jonction par
la charge électrique. Une charge qui gagne de l'entropie absorbe de la chaleur.
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III) Manipulations
a) Expérience historique sur l'effet SEEBECK
Refaire l'expérience historique de Seebeck présentée ci-dessous et interpréter.
cuivre
aiguille aimantée
Tf
(soudure froide)
Tc
(soudure chaude)
fer
chauffage par
Bec bunsen
Fig2:
Expérience historique de Seebeck réalisée en 1821. Deux soudures FerCuivre sont soumises à des températures différentes.
b) Module de démonstration à jonction semi-conductrice p-n et n-p
Pour obtenir des effets Seebeck et Peltier importants, la technologie actuelle utilise des assemblages
de semi-conducteurs de types n et p pour lesquels les porteurs de charges sont respectivement des
p
n
p
n
Face à la température T2
Face à la température T1
électrons et des trous. Les jonctions sont de deux types: p-n sur une face et n-p sur l'autre face:
Fig3: Module thermoélectrique utilisant des jonctions de semi-conducteur
p-n et n-p reliés par des ponts métalliques en cuivre.
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- Dans un premier temps on branchera le petit module de démonstration directement sur un
voltmètre. On mettra alors expérimentalement en évidence l'effet Seebeck, en créant une
différence de température entre les deux faces du module (simplement avec les doigts).
- Pour mettre en évidence l'effet Peltier, on branchera directement le module sur une alimentation
en courant continu (vérifier la valeur nulle du courant avant de brancher le module et augmenter
très progressivement ce courant sans trop faire chauffer). On constate alors au toucher, une
différence de température qui apparaît entre les deux faces suivant le sens du courant
c) Utilisation du module thermoélectrique
L'appareil thermoélectrique à votre disposition est aussi constitué d'un module à jonction p-n et n-p
semblable à celui que vous venez d'étudier. Il peut donc fonctionner en effet Seebeck ou en effet
Peltier en maintenant une différence de température fixe entre les deux faces. La face froide est en
contact avec une circulation d'eau thermostatée (source froide à T f ) et la face chaude en contact
avec une résistance chauffante (source chaude à Tc ). Toutes les expériences qui suivront ne sont
pas indépendantes et doivent fonctionner aux mêmes températures pour la source chaude et pour la
source froide, de façon à garder le même régime de fonctionnement pour le module
thermoélectrique. Le montage expérimental ainsi que les températures préconisées sont indiqués sur
la figure ci-dessous:
!
Tmax source chaude < 80°C
mesure de Tc
mesure de Tf
Source froide
à Tf ≈ 20°C
Source chaude
à Tc ≈ 75°C
Circulation d’eau
thermostatée
Alimentation continue
pour la résistance chauffante
d’entrée Imax ≤ 2A
Sortie du module thermoélectrique en
circuit ouvert ou dissipation d’énergie
sur résistance RW
Fig4: Module thermoélectrique comportant N=71 jonctions p-n et n-p
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En dehors du fonctionnement en effet Seebeck, produisant une différence de potentiel V s aux
bornes de sortie du module en circuit ouvert, nous distinguerons deux autres régimes de
fonctionnement différents: le régime moteur produisant un travail sous forme d'un courant I w qui
sera dissipé dans la résistance de sortie RW et le régime de pompe à chaleur par effet Peltier
obtenue par l'intermédiaire d'un courant I w que l'on injecte cette fois-ci en sortie du module.
Fonctionnement en moteur
Le module reçoit une certaine quantité de chaleur de la part de la source chaude, par l'intermédiaire
de la résistance chauffante d'entrée alimentée par une alimentation électrique continue ( Pc = U c I c ).
Cette puissance thermique fournie est, pour partie, transformée en travail par le module
thermoélectrique sous forme d'un courant de sortie I w . La mesure de ce travail moteur est effectuée
en mesurant la puissance dissipée par effet Joule dans la résistance de sortie Rw :
Pw = Rw I w2 = U w I w . L'autre partie de la chaleur fournie au module par la source chaude est
restituée à la source froide sous forme d'une puissance Pf évacuée par la circulation d'eau:
Pc = Pf + Pw
Source froide Tf
(circulation d’eau
thermostatée )
Pf
Pc=UcIc
Source chaude
Tc (≈75°C)
(alimentation
continue:Uc , Ic)
PW=UWIW=RWIW2
(dissipée dans la résistance de sortie RW)
Fig5: Fonctionnement en moteur produisant un courant Iw par l'intermédiaire du
module thermoélectrique
- Déterminer expérimentalement le rendement donné par la relation:
ρ exp érimetal =
" travail fourni par le moteur" Pw
=
" chaleur fournie au moteur"
Pc
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(Les mesures expérimentales porteront sur des puissances plutôt que sur des quantités de chaleur
ou de travail)
- Comparer avec la valeur théorique qui correspond à une situation idéale (réversible, sans
dissipation) (Carnot):
ρ théorique =
TC − T f
TC
avec les températures exprimées en Kelvin. Incertitudes. Commentaires.
Évaluation des pertes
Nous pouvons distinguer plusieurs origines pour les pertes: conduction de chaleur directement de la
source chaude vers la source froide à travers le module, rayonnement et convection due à une
mauvaise isolation du système, effet Joule due à la résistance interne R du module.
Pertes par conduction, rayonnement et convection: Pp qui seront évaluées en ouvrant le circuit de
sortie ( Rw = ∞ ) et en travaillant toujours impérativement aux mêmes températures Tc et T f
qu'auparavant. La quantité de chaleur apportée par la source chaude, toujours par l'intermédiaire de
l'alimentation électrique ( U c , I c ), compense alors exactement les pertes: Pp = U c I c (n'oubliez pas
de baisser le courant d'entrée I c avant de débrancher la sortie et de toujours garder un oeil sur la
température de la source chaude):
par rayonnement
pertes
thermiques
Source froide Tf
(circulation d’eau
thermostatée )
compensation des
pertes thermiques
Pp=UcIc
par conduction
Source chaude
Tc (≈75°C)
(alimentation
continue:Uc , Ic)
RW=∞ circuit de sortie ouvert
Fig6: Evaluation des pertes thermiques par rayonnement, convection et
conduction thermique de la source chaude vers la source froide
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Pertes par effet Joule due à la résistance interne R du module: PR = RI w2 :
module Peltier
Vs
UR
R
Iw
Rw
Uw
Fig7: schéma équivalent du module Peltier pour la mesure de la résistance interne
Uw et Iw sont des valeurs déjà mesurées précédemment et V s est la mesure de la différence de
potentiel en sortie du module en circuit ouvert (effet Seebeck). On en déduit: R =
Vs − U w
Iw
Il est alors possible de calculer un rendement expérimental corrigé: ρ exp érimetal corrigé =
Pw + RI w2
Pc − Pp
Fonctionnement en pompe à chaleur: effet Peltier
Une pompe à chaleur est un dispositif qui transfère de la chaleur d'une source froide vers une source
chaude ce qui n'est possible qu'en recevant du travail. En injectant un courant I w directement dans
le module thermoélectrique sans passer par la résistance de sortie Rw , celui-ci fonctionne alors en
effet Peltier. Le courant qui circule dans les jonction n-p et p-n va créer une différence de
température entre les deux faces du module.
Source froide Tf
(circulation d’eau
thermostatée )
Pf
Pc
Source chaude
Tc (≈75°C)
(circuit ouvert:
pas d’alimentation
continue)
on injecte un courant Iw
(alimentation continue)
Pw=UwIw
Fig8: Fonctionnement en pompe à chaleur en injectant un courant I w directement à la
sortie du module thermoélectrique: effet Peltier
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En fait, comme il n'y a pas de système d'évacuation de la chaleur au niveau de la source chaude, on
ajuste le courant I w de façon à maintenir la même température constante pour la source chaude. On
travaille alors avec le même niveau de pertes thermiques
Pp
précédemment calculé:
P f + Pw = Pc = Pp . La température de la source froide est aussi maintenue constante par
l'intermédiaire de la circulation d'eau provenant du thermostat.
- Déterminer expérimentalement le rendement de ce dispositif:
η exp érimetal =
Pp − Pw
" chaleur pompée à la source froide" Pf
=
=
" travail fourni au mod ule"
Pw
Pw
- Comparer avec la valeur théorique:
η théorique =
Tf
Tc − T f
avec les températures exprimées en Kelvin. Incertitudes. Commentaires.
La puissance réelle effectivement utilisée par le module pour effectuer le travail, Pw( effective ) , doit
tenir compte de la perte par effet Joule dans la résistance interne: Pw( effective ) = Pw − RI w2 . De
même, une partie des pertes provient de la chaleur dissipée par la résistance interne R et donc ne
provient pas de la source froide: Pp( effective ) = Pp − RI w2 . Le rendement expérimental corrigé
devient alors:
η exp érimetal corrigé =
Pf ( effective )
Pw( effective )
=
Pp( effective ) − Pw( effective )
Pw( effective )
=
Pp − Pw
Pw − RI w2
Matériel:
- Plaquette démonstration thermocouple
- Système avec Fer-Cuivre soudés + aiguille aimantée + bec Bunsen
- Module thermoélectrique PASCO
- Appareil thermostatique avec circulation d'eau; chauffage, réfrigération (ENSC 418B)
- 2 lecteurs de thermocouple type K + 2 multimètres
- 1 alimentation stabilisée continue avec double affichage tension-courant (TTi ENSC 199)
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