L’expulsion des juifs d’Angleterre (1289)
et de France (1306) et ses conséquences sur les
juifs de Rouen et sur le quartier juif
Alain SADOURNY, doyen honoraire de la faculté
des lettres de Rouen
A la fin du XIIIe siècle et au début du XIVe, pour
des raisons quasiment identiques, Édouard Ier roi
d’Angleterre (en 1289) et Philippe IV le Bel roi de
France (en 1306) expulsent les juifs de leur royaume.
Cette communication essaiera de voir, pour les
Juifs d’Angleterre et surtout pour ceux de Rouen,
quelles conséquences eut cette expulsion. Pour ceux
de Rouen, cela signifia la vente de leurs biens et
leur cession à la Commune et au maire de Rouen,
la destruction progressive du Clos aux Juifs et
celle des bâtiments prestigieux qui s’y trouvaient
(notamment ce que l’on appelle la Maison sublime).
La communication se terminera par quelques
considérations sur la réinstallation de quelques Juifs
dans le quartier Saint-Sever dès la fin du XIVe siècle.
11h15-12h15 Débat
12h30-15h
Déjeuner à La Cave, 39 rue aux Ours
Visite guidée de la Maison Sublime
Après-midi (15h-18h30)
15h00 Le rayonnement de l’École rabbinique
de Rouen
Présidence de Max POLONOVSKI, conservateur en
chef du patrimoine, chargé de mission pour la protec-
tion du patrimoine juif au ministère de la Culture
De la Schola Judaeorum au Clos-aux-Juifs :
le quartier juif de Rouen au Moyen Âge
Jacques LE MAHO, chargé de recherche au CNRS
(Centre de recherches archéologiques et historiques
de Caen)
Les origines du quartier juif de Rouen remontent
vraisemblablement à la fin du IXe siècle, lorsque
la transformation de la cité en ville-refuge sous la
menace des incursions normandes entraîna une
restructuration de la voirie et du cadastre dans
le secteur intra-muros. Principalement destinée à
rassembler dans la cité la population des faubourgs
marchands, cette opération fut sans doute réalisée à
l’initiative du roi Eudes, vainqueur des Normands au
siège de Paris (885-887), pour permettre la reprise
des activités économiques sur l’axe de la Seine.
À l’instar des Scholae peregrinorum du bourg de
Saint-Pierre à Rome, mentionnées dans de nombreux
documents de l’époque carolingienne, la Schola
Judeorum de Rouen a d’abord désigné la communauté
juive de la ville, avant de désigner l’ensemble des terrains
et des édifices occupés par cette communauté. À la fin
du Moyen-Âge, ce quartier urbain est identifié comme
« l’École-aux-Juifs » et, au dernier stade de l’évolution
phonétique du vocable, comme le « Clos-aux-Juifs ».
Le quartier s’ordonnait en deux séries de parcelles
alignées de part et d’autre de l’actuelle Rue-aux-Juifs,
entre la paroisse de Notre-Dame-de-la-Ronde (au
sud) et la paroisse Saint-Lô (au nord). On ne dispose
d’aucune information sur l’habitat et son organisation
avant le XIIe siècle. À partir de cette date, l’archéologie
atteste l’existence de plusieurs grandes demeures de
pierre, offrant les caractéristiques habituelles des
manoirs urbains des XIIe et XIIIe siècles : implantation
en retrait de la rue, présence d’un vaste cellier en
partie basse, de puits et de latrines, accès privatifs.
Par leur ampleur et leur qualité architecturale,
par leur plastique murale et la présence de décors
sculptés (édifice de la cour du Palais-de-Justice), ces
belles demeures de notables procèdent d’un souci
de représentation semblable à celui des maisons
des chanoines de la cathédrale à la même époque.
L’École rabbinique de Rouen :
Une brève histoire de sa découverte, du travail
de ses érudits et des ramifications touchant
à l’histoire intellectuelle de la Normandie
et de la France
Norman GOLB, professeur à l’Université de Chicago,
auteur de Les Juifs de Rouen au Moyen Âge, portrait
d’une culture oubliée et de The Jews in Medieval
Normandy
Le véritable début des découvertes touchant à la
communauté juive de Rouen et aux activités de ses
érudits remonte au début des années 1960, avec
la découverte par l’auteur d’un document ancien,
provenant de la Geniza du Caire et conservé à
Cambridge, qui évoquait la figure de Reuben bar
Isaac de Rodom (Rouen/Rotomagus) et la tragique
confiscation de ses terres par le duc de Normandie
au XIe siècle. Cette découverte conduisit l’auteur
à l’identification ultérieure, dans des manuscrits
hébraïques médiévaux, d’une trentaine d’autres
textes ou fragments de texte mentionnés, dans ces
mêmes manuscrits, comme étant d’origine rouennaise.
La plupart de ces textes traitait des activités
académiques de certains érudits juifs rouennais,
activités s’exerçant principalement dans une école
d’enseignement supérieur (yeshiva ou école juive).
Quelques mois seulement après la publication par
l’auteur, au printemps 1976, d’un livre sur le sujet,
les vestiges d’une structure monumentale, datant
des débuts du XIIe siècle, furent découverts dans
la cour du Palais de Justice, à l’endroit précis où