Les melkites et l’unionisme
Les rapports de Mgr Vanutelli et du consul Gallian se trouvaient confirmés par les
ouvertures orientales des Pères blancs (Misionnaires d’Afrique)
et par les
propositions des Assomptionistes
qui contribuèrent aussi à l’élaboration du plan
pontifical en vue de la régénération de l’Orient, projet que Léon XIII prenait à cœur.
Cette première période du pontificat de Léon XIII est marquée par le congrès
eucharistique de Jérusalem (1893) et culmine avec la publication de l’encyclique
Praeclara Gratulationis qui couronnait l’année du jubilé épiscopal du pape.
A. Un prélude au renouveau oriental uniate
Le congrès eucharistique de Jérusalem revêt une importance particulière dans la
politique orientale de Léon XIII puisqu’il fut à l’origine d’un grand mouvement
d’idées, d’initiatives ecclésiastiques et unionistes
. Mais malgré l’impression
d’optimisme ingénu qui s’en dégagea, cet événement révéla plutôt l’ambiguïté de la
situation ecclésiastique des catholiques en Orient due à l’opposition des Orientaux
catholiques aux efforts de latinisation déployés par la majorité des missionnaires.
a) La latinisation et le maintien des rites orientaux
Le conflit qui opposait les Orientaux catholiques aux missionnaires latins, à la fin du
19e siècle, eut des répercussions sur la conception même de la mission et entraîna
l’affrontement entre deux tendances qui divisaient les missionnaires du Proche-
Orient entre eux, celle de la latinisation sous toutes ses nuances et celle du maintien
des rites orientaux
. Cet affrontement s’est manifesté lors du congrès de Jérusalem
malgré la limitation des interventions et des discussions à la conception « ritualiste »
de l’Eucharistie.
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À l’instar de leur fondateur le cardinal Lavigerie (1825-1892), les Pères blancs prônaient une
politique de rapprochement avec les Orientaux et cherchaient à s’adapter à leur mentalité et
leurs coutumes. Ils se chargènt de défendre les Orientaux catholiques contre l’excès de zèle
manifesté par les latinisants. À partir des précieuses conclusions tirées de leur apostolat en
Orient, les Pères blancs contribuèrent à approfondir le débat sur la régénération catholique de
l’Orient. Ils érigèrent en question de principe la nécessité de conserver les rites orientaux et la
justifièrent par l’enjeu du « retour en corps » des Églises orientales à l’unité catholique.
Les Pères Assomptionistes œuvraient pour la mission en Orient. Ils lancèrent l’idée d’un
congrès eucharistique oriental et la poussèrent d’une manière énergique, voire décisive, grâce à
l’intervention du Père Picard, leur supérieur général.
Pour une étude approfondie des enjeux de ce congrès, nous renvoyons à l’étude de
C. SOETENS, Le congrès eucharistique international de Jérusalem (1893) dans le cadre de
la politique orientale du pape Léon XIII, (UCL, Recueil de travaux d’histoire et de philologie,
Série 6, 12), Louvain, 1977.
À l’époque, alors que la tendance générale des missionnaires latins considérait le rite oriental
comme un obstacle pour le retour des dissidents, le mouvement unioniste naissant tenait au
respect et à la revalorisation de tout le patrimoine spirituel de l’Orient dont le rite liturgique
n’est qu’un aspect parmi d’autres. Voir N. EDELBY, Pour le soixantième anniversaire de
l’Encyclique «Orientalium Dignitas», dans Proche-Orient Chrétien (POC), 4 (1954), p. 197.