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Cependant, face à la baisse annoncée, l’Église de France ne pourra faire l’économie
d’une adaptation radicale de ses structures et de sa manière d’envisager la mission.
Dans certains diocèses, les étrangers sont majoritaires chez les prêtres de
moins de 75 ans.
En 2004 déjà, La Croix avait mis en évidence la baisse qui s’annonçait. Les diocèses
français rassemblaient alors 13 500 prêtres – diocésains et religieux – de moins de
75 ans et se préparaient à voir fondre ce nombre. Depuis, ils ont mis en place
différentes stratégies pour, sinon juguler la baisse, du moins s’y adapter. La première
d’entre elles aura été de faire appel à des prêtres étrangers, pour beaucoup des
étudiants venus en France parfaire leurs études de théologie mais qui, une fois
celles-ci terminées, prennent parfois en charge des paroisses.
En octobre 2013, 1 589 d’entre eux étaient recensés sur le territoire français. Dans le
diocèse de Tulle, l’étude menée en 2004 par La Croix prévoyait 13 prêtres actifs en
2014 : ils sont aujourd’hui 19 de moins de 75 ans, 13 Français et 6 étrangers, des
Africains pour la plupart. Dans certains diocèses, les étrangers sont même
majoritaires chez les prêtres de moins de 75 ans : ainsi à Belfort (10 sur 17) ou à
Verdun (10 sur 19).
L’appel aux prêtres « venus d’ailleurs » ne peut toutefois être qu’une solution
provisoire. Un jour ou l’autre, ceux-ci retourneront vers leurs pays d’origine où leurs
Églises ont besoin d’eux. Si on considère d’ailleurs le nombre de catholiques par
prêtre, la France reste encore bien lotie par rapport aux jeunes Églises : 2 527
catholiques par prêtre, contre 4 959 en Afrique et 7 883 en Amérique du Sud.
À l’inverse, le diocèse de Luçon qui devait, toujours selon notre enquête de 2004, ne
plus compter que 30 prêtres actifs, en affiche aujourd’hui 49, dont 39 Français. Signe
que les marches catholiques de la Bretagne, Vendée en tête, gardent une certaine
vitalité : le diocèse de Luçon a ordonné une douzaine de nouveaux prêtres depuis
2000, auxquels s’ajoutent 9 séminaristes. Du coup, l’appel à 10 prêtres étrangers
apparaît presque marginal dans ce tableau.
Certains diocèses se sont fait une spécialité d’appeler des prêtres étrangers au
bénéfice de leur vitalité. Ainsi celui de Fréjus-Toulon. Toujours selon notre enquête
de 2004, il devrait compter aujourd’hui 144 prêtres actifs : ils sont aujourd’hui 190 en
activité dans le diocèse, mais on compte parmi eux une soixantaine d’étrangers, dont
beaucoup issus de communautés nouvelles. « Beaucoup de communautés diverses
et variées dont le séminaire de la Castille est la matrice de la communion »,
reconnaît Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus et Toulon, qui n’hésite pas, aussi, à
accueillir des séminaristes venus d’autres diocèses : une cinquantaine de ses
prêtres, sur les 130 Français, viennent d’un autre diocèse.
L’automne dernier, à Lourdes, les évêques de France ont abordé à mots feutrés ce
sujet délicat que, deux ans plus tôt, Mgr Jean-Louis Bruguès, alors secrétaire de la
Congrégation pour l’éducation catholique, appelait les « chasses de séminaire en
séminaire ». Si, en France, comme le rappelait un évêque à Lourdes, « la règle est
de toujours prendre contact avec le diocèse d’origine du candidat », certains
évêques comptent dans leur presbyterium un nombre important de prêtres issus
d’autres diocèses. Ainsi, parmi les 64 prêtres de moins de 75 ans du diocèse de
Bayonne, on compte 54 Français dont 15 issus d’un autre diocèse mais qui ont sans
doute trouvé dans les Pyrénées-Atlantiques une Église à l’identité sacerdotale plus
affirmée.
En 2012, « La Croix » avait recensé 9 446 laïcs en mission ecclésiale, c’est-à-
dire ayant reçu une lettre de mission de leur évêque, soit plus que le nombre
de prêtres actifs.