Arabie Saoudite Juillet 2013 Arabie Saoudite Chômage persistant malgré la croissance Les performances économiques saoudiennes sont solides. La croissance est soutenue, principalement dans le secteur non pétrolier. La situation financière du gouvernement est confortable mais la vulnérabilité aux prix du pétrole s’accroît. Cela pourrait causer certaines difficultés à long terme. Malgré cette situation positive, le problème du chômage des Saoudiens reste entier. Une politique active et dirigiste a été mise en place. Ses résultats sont incertains sans le développement de secteurs économiques véritablement créateurs d’emplois. ■ Des perspectives de croissance favorables 1- Croissance réelle du PIB L’Arabie Saoudite bénéficie d’une croissance économique soutenue depuis 2010 (7,5% en moyenne), alimentée par la demande domestique (publique et privée), et dans une moindre mesure par le secteur pétrolier (+5% en 2012). La dépense publique reste un puissant moteur de la croissance malgré un ralentissement des dépenses à partir de 2012 (+3,2% de hausse nominale contre +27% en 2011). Au-delà des mesures de redistribution (création d’emplois et hausse des salaires dans la fonction publique), les investissements publics dans les domaines sociaux (logements) et des infrastructures (notamment transport) sont en forte progression, à un rythme supérieur aux dépenses courantes. Cette politique budgétaire expansionniste a naturellement un effet important sur la demande privée. La hausse du pouvoir d’achat (la majorité des Saoudiens travaillent dans le secteur public) et le maintien de la progression du crédit à un niveau assez élevé (+16% en 2012) alimentent la consommation des ménages. Du point de vue sectoriel, la croissance industrielle est soutenue, principalement dans les secteurs de l’aval pétrolier (rafinage, pétrochimie). Par ailleurs, la construction bénéficie des programmes d’investissements publics. % █ PIB Pétrolier █ PIB Non-Pétrolier ▬ PIB Total 15 10 5 0 -5 -10 05 06 07 08 09 10 11 12e 13p 14p Sources : FMI, IFI, BNPParibas 2012), tandis que les avoirs extérieurs publics sont considérables. Les reserves de change de la banque centrale ont atteint 664 Mds d’USD fin 2012, et les dépôts du gouvernement à la banque centrale s’élevaient à 405 Mds d’USD (56% du PIB) fin 2012. Les perspectives de croissance restent très positives, même si on attend un léger ralentissement (+5% attendu en 2013 contre 7% en 2012). L’indice PMI de juin 2013 confirme la baisse débutée en mars (56.6 contre 58.9) mais reste largement en territoire positif (supérieur à 50). La production pétrolière (environ 20% du PIB) pourrait légèrement décroître en 2013 étant donné les perspectives mitigées de croissance au niveau mondial et les hausses de production de pétrole des Etats-Unis et de l’Irak. A contrario, l’ensemble des composantes du PIB non pétrolier devraient continuer de progresser, notamment le secteur immobilier avec la mise en place depuis 2012 de prêts hypothécaires pour les particuliers. Cependant, on peut constater une hausse de la vulnérabilité des finances publiques aux prix du pétrole, mesurée par l’évolution du prix du baril de pétrole équilibrant le budget. Le point mort du budget est passé de 33 USD/b en 2005 à environ 77 USD/b en 2012. Ce mouvement de hausse devrait se poursuivre dans les prochaines années. A moyen terme, le gouvernement devrait conserver une marge de manoeuvre étant donné une certaine flexibilité des dépenses budgétaires (investissements notamment), et l’écart maintenu relativement important entre le point mort et le prix du marché. Néanmoins, à plus long terme, cette vulnérabilité pourrait devenir insoutenable. En effet, les recettes budgétaires issues des revenus pétroliers (90% du total) seront défavorablement affectées par la hausse constante de la consommation pétrolière dans le royaume. La consommation de pétrole y a doublé depuis 2000. ■ Risques limités Dans ce contexte de croissance des dépenses budgétaires, le maintien des prix du pétrole à un niveau élevé a permis des excédents budgétaires records ces dernières années (environ 12% du PIB en 2001 et 2012). Même en cas de retournement brutal et durable des prix du pétrole, la solvabilité du gouvernement saoudien ne peut être remise en question. La dette publique est à un niveau négligeable (3,5% du PIB en 21 economic-research.bnpparibas.com Arabie Saoudite mise place une politique incitative de quotas de nationaux dans les entreprises du secteur privé. Cependant, jusqu’en 2011, cette politique n’a eu que des résultats très limités. ■ Réformes sur le marché de l’emploi La problématique du chômage est ancienne en Arabie Saoudite , mais les politiques de l’emploi ont pris une nouvelle dimension depuis 2011. La politique de l’emploi mise en place depuis 2011 est beaucoup plus volontariste et use de méthodes plus dirigistes que précédemment. Des cibles de quotas d’employés saoudiens ont été fixées par secteur d’activité et les pénalités en cas de non-respect sont potentiellement sévères (refus de nouveaux visas pour l’embauche de travailleurs expatriés, exclusion des contrats publics, impossibilité d’obtention de permis ou de licence d’activité). Par ailleurs, un salaire minimum a été institué dans le secteur public qui servira indirectement de salaire de base pour les Saoudiens dans le secteur privé. Il n’est pour le moment pas possible de tirer de conclusions de ce programme de saoudisation renforcée de l’emploi. D’une part, le gouvernement a annoncé la création de 300 000 emplois pour les nationaux durant les 18 derniers mois, d’autre part, seuls un tiers des entreprises atteint les cibles de quotas, et le programme a dû être revu à la baisse pour les entreprises à effectifs réduits. Au-delà de l’impact positif à court terme, il semble que ces mesures auront un rythme d’implantation assez lent – au risque de perturber le fonctionnement des entreprises – et n’auront qu’un effet limité sur le chômage étant donné le nombre d’emplois à créer et les rigidités structurelles du marché du travail saoudien. La préférence pour l’emploi public restera forte à moyen terme. Officiellement, le taux de chômage est à environ 10% de la population active. Le niveau réel est a priori sensiblement plus élevé étant donné le nombre important de personnes en âge de travailler mais ne recherchant pas activement un emploi. En 2012, la mise en place d’une allocation chômage a révélé un taux de chômage supérieur à 20% de la population active. L’économie doit absorber environ 400 000 nouveaux entrants annuellement. Le marché du travail saoudien a des spécificités communes à l’ensemble des pays du Golfe qui sont sources de rigidités importantes. La majorité de la population nationale est employée dans le secteur public (c’est une forme de redistribution de la rente), tandis qu’une main-d’œuvre expatriée forme l’essentiel des travailleurs du secteur privé, quel que soit le niveau de qualification. Etant donné la gestion prudente des finances publiques, l’emploi des nationaux dans le secteur public continue de progresser mais à un rythme moindre qu’auparavant. La politique mise en place par le gouvernement vise donc à faciliter l’insertion des nationaux dans le secteur privé. Cependant, malgré la forte croissance du secteur non pétrolier (8% en moyenne en termes réels en 2007-12), le potentiel de création d’emplois reste largement en deçà des besoins du marché de l’emploi des nationaux. Une part importante des activités du secteur non pétrolier est peu créatrice d’emplois (industries de l’aval pétrolier) ou à potentiel de développement limité (services à faible valeur ajoutée). En 2011, 844 000 Saoudiens étaient employés dans le secteur privé sur une main-d’œuvre employée totale d’environ 4 millions de personnes. En supposant une croissance annuelle de 10% de l’emploi dans le secteur privé (11,3% en 2011) et à structure inchangée (11% des emplois privés sont occupés par des nationaux), la capacité d’absorption du secteur privé est de 84 400 personnes, à comparer aux 400 000 nouveaux entrants annuels sur le marché du travail. Face à la nécessité d’aller au-delà de la croissance naturelle du marché du travail, a été Etant donné une certaine rigidité à la baisse des salaires pour les nationaux, le développement de l’emploi passe par une hausse de la productivité et donc par une amélioration du niveau de capital humain. Les efforts d’éducation de la part du gouvernement sont importants depuis plusieurs années, mais ne peuvent produire d’effets immédiats (les dépenses d’éducation ont augmenté de 14% en moyenne depuis 2008). Pour le moment, l’implantation d’industries manufacturières intensives en travail ou de services à forte valeur ajoutée qui pourraient à la fois créer des emplois et diffuser leur contenu technologique dans le reste de l’économie reste limitée. Pascal Devaux [email protected] 2- Prix du pétrole et équilibre budgétaire USD/baril ▬ Brent spot Juillet 2013 Prévisions ▬ Prix d’équilibre du budget 120 2011 100 80 8,5 6,5 5,0 4,5 Inflation, IPC, v ar. annuelle, % 3,7 2,9 4,9 4,4 14,0 15,0 9,7 7,3 5,4 3,6 3,5 3,5 Balance courante, % du PIB 23,0 26,5 19,0 16,0 Dette ex terne, % du PIB 14,0 13,0 12,0 12,0 Réserv es de change, mds USD 741 863 992 1 111 Réserv es de change, en mois d'imports 32,0 38,0 41,0 43,0 Taux de change SAR/USD (fin d'année) 3,8 3,8 3,8 3,8 Solde budgétaire, % du PIB Dette du gouv . central, % du PIB 60 40 20 0 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12e13p14p 2012 2013f 2014f PIB réel, v ariation annuelle, % Sources : FMI, IFI, BNPParibas f : prévisions BNP Paribas Sources : FMI, BNPParibas 22 economic-research.bnpparibas.com Arabie Saoudite 23 Juillet 2013 economic-research.bnpparibas.com