B) Descriptif du projet - GIP

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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des
Tourbières de Montagne (ClimTourb)
Un projet porté par 5 laboratoires de recherche et 3 Parcs Nationaux
Orienté vers l’étude écologique et la gestion conservatoire des biocénoses dans les
tourbières de montagne du pourtour méditerranéen en réponse aux changements
climatiques et des paysages
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
A) Récapitulatif du projet
Titre du projet :
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne (ClimTourb)
Mots-clés :
Biodiversité, Bio-indicateurs, Changements climatiques, Fragmentation/altération des habitats,
Ectothermes, Tourbières, Modèles prédictifs, Parcs Nationaux, Suivi à long terme, Vulnérabilité.
Thème de l’APR concerné :
Gestion et Impacts du changement climatique, troisième appel à proposition :"Atténuation,
adaptation et régionalisation"
Responsable scientifique :
Ferrière, Régis, Dr., Professeur, Ecole Normale Supérieure
CEREEP – ECOTRON Ile de France, UMS 3194
Ecole Normale Supérieure
46 rue d’Ulm
75005 Paris
Téléphone : 01 44 32 23 40
Fax : 01 44 32 38 85
Courriel : [email protected]
Laboratoires et Parc Nationaux impliqués dans le projet :
Laboratoire « Fonctionnement et évolution des systèmes écologiques », UMR7625, CNRS
CEREEP – ECOTRON Ile de France, UMS 3194, Ecole Normale Supérieure
Station d’écologie expérimentale du CNRS à Moulis, USR 2936, CNRS
Equipe d’écophysiologie, Centre d’Etudes Biologiques de Chizé, UPR 1934
Laboratoire « Fonctionnement, évolution et mécanismes régulateurs des écosystèmes
forestiers », UMR 5176, Muséum National d’Histoire Naturelle
Parc National du Mercantour
Sous-contractants UMR 7625
Parc National des Cévennes
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Sous-contractants USR 2936
Parc National des Pyrénées
Pr. Christophe Thébaud, Université Paul Sabatier, Toulouse
Pr. Barry Sinervo, Université de Californie, Santa Cruz
Dr. Benoit Heulin, Station biologique de Paimpont, CNRS
Coût Provisionnel total :
922,120.64 € (TTC) dont 337,758.94 € de frais de personnel permanent
Montant de l’aide demandée au programme GICC :
Montant de l’aide demandé au MEEDDAT (6 contractants) : 584.361.70 kEuros (TTC)
Cofinancements assurés ou prévus (TTC) : 2,089,536.79 € essentiellement pour les équipements
lourds et les frais de personnel et de fonctionnement des expériences qui sont incorporées au
projet de recherche ci-dessous et qui sont toutes déjà subventionnées soit sur fonds propres, soit
sur des contrats ANR commencés en 2008.
Durée : 3 ans
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Détail de l’enveloppe budgétaire du projet (montant € TTC estimé – hors
dépenses de personnel permanent)
Contractant
ENS
Organisme responsable
Motif de dépense
CEREEP
Colloque ; Personnel ; Missions ;
ECOTRON Ile de France
Fonctionnement
Obtenu
Demandé
50,280.00
Plan Etat Région pour équipements
1,008,990.00
Fonds propres pour fonctionnement
112,060.00
et personnel
Parc National
PNM
60,000.00
Fonctionnement
Mercantour
CNRS
Personnel ; Missions ;
UMR 7625
Contrat de thèse ; Missions ;
190.260.00
Fonctionnement ; Sous-contractant
Paris B
avec le PNC
ANR Jeunes Chercheurs pour les
150,000.00
expérimentations et personnel
Fonds propres pour mission
CNRS
SEEM
9,000.00
Contrat de post-doctorat ; Missions ;
242,637.70
Fonctionnement ; Sous-contractant
Midi-Pyrénées
PNP et experts
Fonds propres pour équipement et
163,011.59
personnel
ANR Blanche pour les
446,475.20
expérimentations et personnel
CNRS
CEBC
Personnel ; Missions ;
31,200.00
Fonctionnement
Poitou Charentes
ANR Jeunes Chercheurs pour les
200,000.00
expérimentations et personnel
Muséum National
UMR 7179
Missions ; Fonctionnement
9,984.00
Histoire Naturelle
Colloque ; Personnel ; Missions ;
Total
2,089,536.79
584,361.70
Fonctionnement ; Sous-traitance ;
Equipement
Les justificatifs des demandes de financement au programme GICC2 sont fournis en annexe de
même que les devis
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Résumé du projet de recherche
Les activités humaines sont la cause de profonds changements du paysage et des conditions
climatiques qui perturbent le fonctionnement des biocénoses. Nous manquons malheureusement
d'une capacité prédictive de ces perturbations à une échelle régionale de telle sorte à les mitiger.
Une bonne gestion des biocénoses régionales exige que nous soyons capables de détecter
précocement des réponses écologiques, de prédire l’effet de mesures de gestion sur le moyen
terme et d’agir à une échelle régionale. Ici, nous proposons une étude intégrative de la
dynamique et de la conservation de tourbières de montagne en réponse aux changements
anthropiques à l’échelle de trois massifs montagneux gérés par des Parcs Nationaux. Ces
tourbières ont une valeur patrimoniale élevée et sont menacées dans toute l’Europe de par
l’emprise des activités humaines et leur grande sensibilité au réchauffement climatique.
Notre projet regroupe des scientifiques et trois Parcs Nationaux autour de quatre objectifs
complémentaires : 1) la caractérisation de populations d’espèces indicatrices de l’altération des
tourbières, 2) l’étude des capacités d’adaptation d’espèces ectothermes de tourbières par la
manipulation des conditions environnementales, 3) la modélisation prédictive des impacts des
activités humaines et du changement climatique, et 4) la mise en place de plans de gestion
adaptés à chaque Parc. Des suivis semi-quantitatifs par protocoles standardisés fourniront des
renseignements cruciaux sur l’état et la dynamique des biocénoses de tourbières, en particulier
les plantes, les vertébrés ectothermes, les papillons et la faune du sol. Des études démogénétiques plus précises sur certains vertébrés et invertébrés ectothermes permettront de
disséquer les mécanismes de réponses au changement climatique et de mesurer le potentiel
d’adaptation physiologique et démographique de ces communautés. La modélisation statistique
et mathématique intégrera les informations obtenues lors de ces suivis dans le but de développer
des modèles de gestion pour les trois régions de montagne. Ces outils viseront à améliorer les
efforts de conservation et de restauration en optimisant l’usage de ressources locales limitées. Le
réseau offrira le meilleur cadre pour un dialogue direct entre scientifiques et gestionnaires afin
d’identifier les efforts de conservation qui sont susceptibles d'être les plus fructueux dans le
contexte humain, financier et politique propre à chaque Parc National.
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
B) Descriptif du projet
Justifications du projet de recherche
Le réchauffement climatique actuel et son origine anthropique ne font plus guère de doutes
(Solomon et al. 2007). De par son ampleur et sa rapidité, ce changement planétaire est une
menace majeure pour la biodiversité (Parmesan & Yohe 2003, Thomas et al. 2004). De
nombreuses études ont abouti au constat que certains organismes et milieux ont déjà eu une
grande réactivité à la première phase du réchauffement climatique actuel (Walther et al. 2002,
Root et al. 2003, Parmesan 2006, Rosenzweig et al. 2007). Les conséquences montrées ou
attendues du réchauffement climatique sur les différents aspects et niveaux d’organisation du
vivant sont diverses. Elles s’inscrivent dans une chaîne d’effets en cascade dont les points de
départ pour les espèces sont soit des effets physiologiques liés à la température (effets directs),
soit des effets liés au cortège de conditions environnementales biotiques et abiotiques associées à
la température (effets indirects). La menace des effets du changement climatique sur le devenir
de nombreuses espèces est à considérer tout particulièrement en interaction avec la
fragmentation/altération/destruction des habitats naturels puisque ces deux perturbations
anthropiques devraient agir avec une grande synergie (Da Fonseca et al. 2005, Lovejoy 2005).
Même si certaines espèces peuvent s'adapter rapidement à de tels changements (Charmantier et
al. 2008), le potentiel d’adaptation d’une espèce est souvent aussi limité par la structure du
paysage, les contraintes génétiques, ou les interrelations avec d’autres espèces (Visser 2008).
Afin d'atténuer les impacts anthropiques, nous avons besoin non seulement d'une bonne
connaissance des changements en cours dans les habitats sensibles, mais également de
modèles prédictifs des réponses écologiques aux changements d'habitat et du climat. Notre
capacité à produire de tels modèles est restreinte en raison de connaissances encore incomplètes
des réponses évolutives et écologiques. Tout d'abord, nous manquons d’informations sur le
potentiel d’adaptation de la physiologie, de la phénologie, et du comportement d’espèces au sein
de leurs habitats naturels (Pörtner & Farrell 2008). De plus, nous disposons de peu d'exemples
d’études de l’effet du réchauffement climatique qui incluent les interactions biotiques (prédation
et compétition) et les conditions abiotiques qui affectent la dynamique des populations. Les liens
trophiques et les effets abiotiques sont critiques puisqu'ils peuvent générer des non-linéarités
dans les effets du changement climatique (Ibanez et al. 2007, Massot et al. 2008). Finalement, la
grande majorité des études des impacts écologiques du changement climatique est corrélative et
s’intéresse rarement aux mécanismes démographiques. Une bonne connaissance mécanistique est
pourtant essentielle pour distinguer les effets directs et indirects et in fine produire des
prédictions plus robustes (Parmesan 2006, Biro et al. 2007, Lyon et al. 2008). Une priorité
essentielle pour l’atténuation des effets des changements globaux sur la biodiversité ainsi que
pour la mise en œuvre des programmes internationaux tels que Natura 2000 nécessite donc à la
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
fois à une bonne connaissance des réponses démographiques de chaque espèce et une
compréhension des processus écologiques au niveau des biocénoses.
Nous proposons la constitution d’un réseau de recherche et de gestion pour la
conservation d’espaces menacés, les biocénoses des tourbières de milieu montagnard, qui
concilie science fondamentale et approches appliquées de gestion à une échelle régionale.
Au plan de la science fondamentale, le projet vise à combler un manque dans notre
compréhension des effets mécanistiques du climat et du paysage sur des communautés
d’espèces. Ce programme repose sur un réseau de recherche dont l’ambition est de perdurer sur
le long terme au travers de deux protocoles de suivi dans les tourbières de trois Parcs
Nationaux de montagne. Des expérimentations à plus court terme dans trois centres de
recherche vont compléter les suivis de ce réseau. Les données de suivi fourniront une meilleure
connaissance de la façon dont les biocénoses s’adaptent et sont vulnérables au changement
climatique et à l’altération des habitats naturels. Certains protocoles de suivi des populations sont
déjà utilisés dans les laboratoires associés au projet, parfois depuis plus de 20 ans (ChamailléJammes et al. 2006, Massot et al. 2008). Les projets expérimentaux, déjà en cours et financés
par les laboratoires associés, aborderont trois échelles écologiques des effets du climat et du
changement d’habitat sur les tourbières : (1) au niveau d’une espèce indicatrice, (2) au niveau
d’une communauté d’espèces indicatrices, et (3) au niveau du fonctionnement de la biocénose.
Les données obtenues par le suivi et les expérimentations seront utilisées pour développer des
modèles permettant de prédire les impacts écologiques du changement climatique et de
modes alternatifs de gestion du paysage sur les biocénoses de tourbières. Le deuxième
objectif du projet est l’implémentation de plans de conservation pour les tourbières de
montagne dans les trois Parcs Nationaux associés au projet. Nos suivis fourniront des
informations qui permettront de mettre en place un plan de gestion construit sur des bases
scientifiques et adapté à chaque contexte régional.
Notre étude est ambitieuse parce qu'elle intègre des approches complémentaires
(physiologie, démographie, biogéographie) et est conduite à une échelle régionale dans trois
Parcs Nationaux en France de moyenne et haute montagne autour du bassin méditerranéen.
Cependant, notre projet est unifié autour de l’objectif de comprendre les effets du changement
climatique dans les biocénoses des tourbières montagneuses. Cet effort consenti à l’étude des
tourbières est particulièrement approprié puisque que ces habitats sont très sensibles aux
variations de température, d’humidité, ou d'utilisation de l’habitat qui peuvent altérer leurs
profils hydrologiques avec des effets majeurs sur les communautés de plantes et d’animaux
(Manneville 2001). Notre effort taxonomique pour caractériser les biocénoses dans les tourbières
portera sur des espèces ectothermes, en particulier des vertébrés (amphibiens, lézards et serpents)
et certains arthropodes (papillons et micro-arthropodes du sol), mais aussi sur des plantes. Ceci
nous permettra de suivre un ensemble d’espèces plus ou moins liées et structurées le long d’un
réseau trophique (Figure 1). Ce groupe d’espèces est particulièrement adapté à l’étude du
changement climatique et des altérations d’habitats puisque les ectothermes sont très sensibles
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
aux changements de température et d'utilisation du sol. Nos sites d'étude incluront trois régions
importantes de montagnes en France, incorporant les Parcs Nationaux des Cévennes, du
Mercantour, et des Pyrénées. Ces régions offrent l'avantage de contenir des zones plus ou
moins intactes, de couvrir de grands gradients altitudinaux (et donc thermiques) et de disposer
d’informations historiques sur l’utilisation du paysage. De plus, les Parcs Nationaux se doivent
de mettre en œuvre une politique durable et pertinente de gestion de leurs espaces naturels. Du
fait de ce partenariat, le dialogue entre scientifiques et acteurs régionaux (direction, services et
agents des Parcs) sera établi comme une condition nécessaire à l’établissement des protocoles et
des objectifs lors de la mise en place du réseau.
Figure 2. Schéma de l’étude des effets du changement climatique et des altérations anthropiques
des habitats sur une communauté d’espèces structurées par des relations trophiques (flèches
pleines). Les flèches pointillées indiquent les relations compétitives (grenouilles-lézards, sphaignesplantes supérieures), les transitions de cycle de vie (chenilles-papillons), les relations de facilitation
(papillons-plantes, sphaignes-plantes supérieures) et de fonctionnement du sol (décomposeurs).
Plan de recherche détaillé
Le programme de recherche sera conduit en trois étapes:
1. Mise en place du réseau de recherche
2. Implémentation des protocoles de suivis observationnels, en synergie avec les résultats
d’expériences en conditions semi-naturelles et de modélisation prédictive
3. Mise au point de stratégies de gestion des effets du changement climatique dans le contexte
régional des trois Parcs Nationaux
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
1. Mise en place et fonctionnement du réseau
Lors de cette première étape, nous allons structurer un réseau de recherche multidisciplinaire ;
élaborer et mettre en place les protocoles de suivi au niveau des trois Parcs Nationaux ; définir
un système de collecte, d’exploitation et de diffusion des données. Dans cette perspective, nous
recruterons dès le début du programme un chercheur post-doctorant pour coordonner le travail
du réseau, organiser les groupes de discussion, centraliser et analyser les données collectées sur
le terrain. Notre groupement de recherche comprend actuellement 5 équipes de recherche
recouvrant les compétences nécessaires pour le suivi de certains groupes taxonomiques (cf.
section suivante) et de certaines caractéristiques de l’habitat. Ce réseau de recherche sera élargi
pour inclure des spécialistes d’écologie du sol des tourbières, de reconstitution historique des
milieux et de pratiques agricoles. Une discussion sera initiée avec le Pôle Relais Tourbière
(http://www.pole-tourbieres.org/) et les partenaires des trois Parcs Nationaux impliqués dans
l’étude des tourbières. Notre programme de recherche ne recouvre pas les mêmes ambitions que
ce réseau dans la mesure où nous ne visons pas à l’exhaustivité à l’échelle nationale mais
proposons un programme de recherche sur trois régions faisant l’objet d’une politique forte de
protection et de gestion. Dans un souci d’efficacité et de bénéfices mutuels, nous rechercherons
les meilleures synergies avec ce programme national.
Serpents
Lourdais
Lézards
Le Galliard
Amphibiens
Schmeller
Papillons
Baguette
Définition d’une méthodologie de suivi
Parc National du Mercantour
Coordination UMS 3194
Coordinateur national
Post-doctorant 1
Arthropodes sol
Tully
Hydrologie
Fournier
Application de la méthodologie à l’échelle régionale
Parc National des Cévennes
Coordination UMR 7625
Problématiques scientifiques
Adaptation et réponses écologiques des ectothermes
Doctorant 1
Plantes
Thebaud
Parc National des Pyrénées
Coordination USR 2936
Partenaires à identifier avec les Parcs
Sols, pratiques agricoles, gestion
Responsable scientifique
Pr. Régis Ferrière
Développement de mesures de gestion
Statut et dynamiques écologiques des communautés
Post-doctorant
Stratégies d’adaptation et de gestion conservatoire
Coordination nationale et Parcs Nationaux
Figure 2. Structure du réseau de suivi des effets du changement climatique sur les biocénoses des
tourbières de montagnes méditerranéennes (CLIMTOURB)
Une discussion approfondie des protocoles sera conduite dans les premiers mois du projet en
organisant un atelier au CEREEP – ECOTRON Ile de France, sous la houlette du responsable
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
scientifique et du coordinateur national (cf. Figure 2). Les protocoles seront définis par les
chercheurs à l’échelle des trois territoires en complète coordination avec les services
scientifiques des Parcs Nationaux. Ces protocoles seront ensuite déployés dans les trois Parcs
nationaux sous la responsabilité d’un partenaire scientifique. Il est crucial que ce contrat puisse
subventionner l’emploi des personnels devant assurer les suivis et rembourser les frais de
mission induits. Les ressources humaines des Parcs Nationaux sont limitées, mais des agents des
Parcs pourront aussi contribuer à la conception et l’exécution des protocoles.
2. Suivis et caractérisation des réponses écologiques in natura
a. Caractérisation de l’habitat et suivi des tourbières à long terme
Un protocole général d’échantillonnage des tourbières sera mis au point afin de (1)
caractériser les conditions abiotiques, (2) inventorier la biodiversité animale et végétale dans
chaque tourbière, et (3) suivre des bio-indicateurs sensibles aux perturbations anthropiques
(ectothermes). Le protocole général utilisera la méthode de sélection aléatoire hiérarchisée pour
sélectionner des tourbières représentatives de la diversité des trois Parcs Nationaux. Les critères
de hiérarchisation seront a priori la typologie des tourbières (Manneville 2001), l’altitude, la
géologie du sous-sol, le mode d’usage et la dégradation des terrains, ainsi que le degré
d’influence méditerranéenne. Les tourbières sélectionnées pour l’étude seront géo-localisées et
les habitats entourant les tourbières seront caractérisés sur carte (par exemple, norme CORINE
Landcover) et sur le terrain. Dans sa version générale, le protocole comprendra en outre une
caractérisation des conditions abiotiques, soit au minimum la température et l’humidité au sol et
dans le sol et la pédologie. Par ailleurs, des inventaires de plantes et d’animaux seront conduits
dans chaque tourbière à l’aide de protocoles standardisés permettant d’estimer la présence ou un
indice d’abondance relative de divers groupes taxonomiques (voir le Tableau 1 pour la liste des
protocoles standardisés). Il est possible d’envisager un suivi impliquant de l’ordre de 50 à 100
tourbières par Parc National. Le nombre de tourbières retenu pour l’étude sera déterminé lors de
l’atelier-pilote dans un souci de faisabilité à long terme du suivi.
Un sous-échantillon des tourbières d’étude fera l’objet de suivis démo-génétiques
approfondis sur la base de méthodes de capture-marquage-recapture (CMR). Ces méthodes
permettent d’estimer l’abondance absolue des populations, les paramètres démographiques
annuels (survie, reproduction) et la dispersion génétique (ou migration) entre tourbières. Trois
protocoles de CMR pourront être mis en œuvre sur des espèces cibles : (1) reptiles : le lézard
vivipare Zootoca vivipara, la vipère péliade Vipera berus, le lézard des souches Lacerta agilis,
(2) amphibiens : la grenouille rousse Rana temporaria et le triton Triturus alpestris, et (3)
papillons : le Nacré de la Bistorte Proclossiana eunomia. Des protocoles de marquage par CMR
non-invasifs ont été mis au point et utilisés avec succès par les partenaires scientifiques du projet.
Etant donné l’ampleur logistique de la mise en œuvre de ces protocoles, ils seront appliqués à 510 tourbières par Parc National.
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Tableau 1. Protocoles standardisés de suivi de la biodiversité dans les tourbières
Groupe taxonomique
Méthode semi-quantitative
Expert
Microarthropodes du sol
Echantillonnage aléatoire par carottage
Tully
Araignées
Echantillonnage aléatoire par cadrats
Tully
Plantes supérieures
Echantillonnage aléatoire par cadrats
Thébaud
Bryophytes (dont sphaignes)
Echantillonnage aléatoire par cadrats
Thébaud
Amphibiens
Suivi d’adultes par observation le long de transects
Schmeller
Reptiles
Suivi par observation le long de transects et sous
Le Galliard
plaques
Lourdais
Suivi par observation le long de transects
Baguette
Papillons
b. Analyse de la structure et de la dynamique des communautés
Dans le cadre du projet postdoctoral, les informations sur l’habitat et les données semiquantitatives sur les communautés végétales et animales serviront à la caractérisation de la
variation de la biodiversité entre tourbières selon les conditions climatiques, géographiques
et l’habitat entourant les tourbières. Ceci nous permettra d'examiner comment les
changements du climat (réchauffement, précipitations et évènements extrêmes) et la gestion
des sites affectent la composition de la biocénose et la biodiversité. En utilisant des techniques
statistiques utilisées en écologie des communautés, notamment l’analyse des pistes causales
(Wooton 1994), nous pourrons séparer les effets liés aux caractéristiques physiques des effets
directs et indirects des interactions entre espèces (Figure 1). Cette méthode statistique nous
permettra d’aborder des questions telles que :
(1) comment l’utilisation des paysages affecte t’elle les caractéristiques physiques et
biologiques d’une tourbière?
(2) comment le climat affecte t’il la dynamique des communautés?
(3) quelles espèces et stade de vie sont les plus sensibles aux effets anthropogènes ?
(4) quelle est l’importance des effets indirects et des cascades trophiques dans le maintien de
la biodiversité ?
Si les caractéristiques des tourbières incluses dans le protocole de suivi s’expliquent relativement
bien par les caractéristiques locales de l’habitat, de la géographie et/ou du climat, on pourra
utiliser nos modèles statistiques pour caractériser et prédire la qualité des tourbières à l’échelle
de l’entièreté des Parcs Nationaux. Cette caractérisation a posteriori utilisera les fonds de cartes
d’habitat, du climat et de la géomorphologie. Une telle catégorisation pourra alors être validée
par un suivi complémentaire et ponctuel de nouveaux sites.
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
c. Analyse du potentiel adaptatif d’espèces ectothermes indicatrices
Dans le cadre d’un projet de thèse, les informations démo-génétiques récoltées pendant les trois
années du projet formeront la base du travail d’analyse des dynamiques démographiques en
réponse à la variabilité climatique temporelle et spatiale dans les tourbières de montagnes
méditerranéennes. Les questions scientifiques abordées lors de ces analyses seront: (1)
l’influence respective du climat et de l’habitat sur les paramètres démographiques des espèces
indicatrices, (2) la variation de la sensibilité au climat et à l’habitat le long des gradients
géographiques et altitudinaux, entre espèces et entre traits d’histoire de vie au sein d’une espèce,
et (3) le degré de covariation dans les réponses démographiques des espèces.
En parallèle, nous mènerons des tests permettant de caractériser le potentiel
d’adaptation de la physiologie d’espèces indicatrices à des changements climatiques
simulés en laboratoire. La température et l'humidité vont changer de manière significative avec
le réchauffement global et peuvent exercer des effets importants sur la physiologie, et en
conséquence sur la dynamique des populations et les interactions entre espèces (Pörtner &
Farrell 2008). Nous effectuerons ces tests expérimentaux de plasticité sur des vipères péliades,
des lézards communs, des grenouilles rousses, et un papillon commun des tourbières. Ces
expériences seront effectuées au Centre d'Etudes Biologiques de Chizé qui dispose des chambres
de contrôle de la température et d'humidité, ainsi que des instruments de mesure nécessaires.
Pour chaque espèce, les données seront recueillies sur les individus capturés en nature de chaque
classe de sexe et d'âge. Notre impact sur les sites de capture sera minime car ces études
réclameront de petits effectifs, et les animaux seront relâchés dans leurs populations naturelles
d’origine en fin d’expérimentation (localisation GPS précise des sites de capture pour des lâchers
à moins de 3 m des points de capture). Des juvéniles nés en laboratoire et issus d’appariements
contrôlés de femelles et mâles connus permettront une estimation de l’influence des gènes sur les
réponses physiologiques aux effets de climat. Nous envisageons d’imposer trois niveaux de
température et humidité : niveau moyen des populations d'origine, niveau élevé et niveau
diminué. Les mesures physiologiques considérées seront la température corporelle, la
consommation d'oxygène (taux métaboliques), les niveaux hormonaux (corticostérone,
testostérone, hormone juvénile), les réponses immunitaires et les capacités anti-oxydantes. Ces
mesures sont déjà effectuées pour plusieurs espèces dans le laboratoire d’Olivier Lourdais à
Chizé et elles sont directement liées aux performances écologiques chez beaucoup d’organismes
(Ricklefs et Wikelski 2002). Les réponses physiologiques des animaux fourniront des données
critiques pour aider à construire les modèles prédictifs de la répartition d'espèces et de la
persistance des communautés sous le changement climatique (Pörtner & Farrell 2008).
3. Caractérisation expérimentale de l’impact des changements climatiques
Les travaux expérimentaux présentés dans cette partie sont déjà financés (personnel et
frais de fonctionnement entièrement pris en charge hors subvention du GICC2) et ne sont
12
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
présentées ici que pour expliquer leurs apports au projet présenté. Les résultats de ces
travaux expérimentaux seront discutés et incorporés au travail du réseau CLIMTOURB.
a. Effets de la destruction de l’habitat sur une espèce indicatrice
L’impact de la dégradation de l’habitat sur la dynamique de petites populations animales d’une
espèce indicatrice des tourbières sera caractérisé de manière expérimentale. Dans ce but, nous
manipulerons la qualité de l’habitat naturel en altérant la taille d’habitat disponible et la qualité
d’habitat (humidité du sol le long d’un gradient de qualité faible à forte). Le travail expérimental
sera mené sur le lézard vivipare au Centre de Recherche en Écologie Expérimentale et Prédictive
(École Normale Supérieure, St-Pierre-les-Nemours, Seine et Marne). Le système expérimental
est composé d’enclos situés dans une prairie naturelle et contenant des écosystèmes
complètement fonctionnels dont des proies naturelles et des prédateurs. Ce dispositif
expérimental a été utilisé avec succès pour étudier la dynamique de populations du lézard
vivipare dans le passé (Le Galliard et al. 2003, 2005). Les lézards d’origine seront marqués
individuellement et relâchés dans des enclos de 10x10m. Afin de déterminer les réponses
démographiques, nous contrôlerons chaque population annuellement en utilisant des méthodes
de capture-marquage-recapture. Les impacts de la dégradation de l’habitat et des changements
climatiques sur la dynamique et les probabilités d’extinction seront évalués avec dix populations
expérimentales par traitement. Les lézards d’origine seront obtenus à partir de l’élevage du
CEREEP où le pedigree des lézards peut être complètement déterminé. Ce projet est financé par
le CEREEP – Ecotron Ile de France et par un projet ANR Jeunes Chercheurs à Jean-François Le
Galliard de l’UMR 7625.
b. Effets du changement climatique sur une communauté d’espèces indicatrices
Pour comprendre les effets du changement climatique sur un ensemble d’espèces indicatrices des
tourbières, nous devons manipuler des variables de climat. L’infrastructure de métapopulations
expérimentales de la Station d’Ecologie Expérimentale de Moulis (CNRS, Saint-Girons, Ariège)
nous permet d’effectuer de telles expériences sur des populations semi-naturelles. Notre
installation expérimentale est composée de 48 enclos (10x10m) qui contiennent de l’habitat et de
la végétation naturels avec une communauté réduite d’espèces des tourbières comprenant le
lézard vivipare (Zootoca vivipara), la grenouille rousse (Rana temporaria) et la piéride des
choux (Pieris brassicae). Chaque enclos peut supporter une population de 30-50 lézards, 100
papillons dont le stade larvaire est une proie pour les lézards, et environ 2-5 grenouilles rousses
qui sont des prédateurs potentiels des stades juvéniles des lézards. Les enclos sont reliés pars des
couloirs et les mouvements de papillons, reptiles, et amphibiens entre enclos peuvent donc être
contrôlés. L'humidité et l’ensoleillement peuvent être modifiés indépendamment pour chaque
enclos à l’aide d’arroseurs automatiques et de stores mobiles. Cette infrastructure expérimentale
est actuellement en construction et les premiers systèmes sont utilisés pour une mise au point du
13
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
protocole depuis l’automne 2008. Le projet et deux post-doctorants qui dirigent les expériences
sont financés par un projet ANR Blanc coordonnée par Jean Clobert de l’USR 2936.
Les études expérimentales seront basées sur des gradients environnementaux d'humidité
(conditions sec à humides) et d’ensoleillement (ensoleillement faible à élevé). Ces gradients
seront appliqués sur les populations reliées de 3 enclos pour produire un plan d’expérience
entièrement croisé de 2 niveaux d'humidité et température. Des individus de chaque espèce
seront suivis par marquage-recapture (le lézard et les grenouilles communs) ou par observation
directe (papillon). On introduira différentes fréquences de chaque espèce du réseau trophique
qu’on traitera comme des covariables dans les analyses statistiques. Ce protocole nous permettra
d'étudier l'effet de l'interaction entre l'humidité, la température et des interactions trophiques sur
(1) la démographie d'un système prédateur-proie, (2) la dynamique d'immigration et
d'émigration, (3) les traits individuels (physiologie, morphologie, histoire de vie), et (4)
l'adaptation locale et l'évolution des fréquences génétiques.
c. Effets du changement climatique à l’échelle de l’écosystème
Les tourbières de montagnes étudiées ici sont des milieux humides sur sol acide caractérisés par
la décomposition lente de la biomasse végétale, en particulier des sphaignes. Leur réponse au
forçage climatique et aux modifications du paysage devrait donc dépendre à la fois des effets
directs sur la production et la dégradation de biomasse végétale, ainsi que des processus
hydrologiques dans les bassins versants et donc in fine de l'humidité du sol. Une bonne
caractérisation de ces effets écosystémiques nécessite une approche expérimentale centrée sur les
interfaces entre le sol et les végétaux et sur les modifications de température et d'humidité du
milieu. Les chambres climatiques du CEREEP - ECOTRON Ile de France
(http://www.foljuif.ens.fr/) offrent la possibilité de manipuler des volumes importants de sol de
tourbière (colonne de 1,5 m de haut et surface au sol de 4 m2) dans des environnements
climatiques entièrement contrôlés. Nous utiliserons ces chambres climatiques pour des
expériences de quelques mois permettant de caractériser les effets de la température ambiante et
des apports en eau sur le fonctionnement des interfaces entre sol et végétaux (production de
biomasse, recyclage des nutriments, dynamique de la faune des décomposeurs) dans les
tourbières de montagne. Les équipements de ce projet sont financés par un plan état Région Ile
de France et sur les fonds propres du CEREEP. Ceci constituera la première expérience grandeur
nature avec L'ECOTRON d'Ile de France.
4. Modèles généralisés de persistance des communautés
Un des enjeux majeurs du projet est de pouvoir prédire les perturbations de la biodiversité avant
qu'elles se produisent et d’atténuer ces perturbations par la mise en œuvre de plans de gestion.
Une bonne capacité prévisionnelle exige des modèles de projection qui combinent différents
scénarios de changements climatiques (Araujo et al. 2005) et différent scénarios de gestion
14
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
(Manneville 2001) pour donner aux gestionnaires des Parcs une vision réaliste et adaptable. Nous
envisageons tout d’abord de développer des modèles statistiques de la répartition des espèces
et de la biodiversité basées sur le suivi observationnel des communautés de tourbière (cf.
section 2b). La collecte de données à long terme permettra aussi de disposer d’indicateurs
dynamiques de l’état des tourbières et de prédire la sensibilité des tourbières selon leur état
écologique original, la géographie ou l’histoire climatique passée. On pourra en retour utiliser
ces données pour cartographier les niveaux de risque pesant sur les tourbières selon différents
scénarios de changement climatique et d’usage des habitats.
Une des difficultés de cette approche statistique prédictive est qu’elle ignore les
mécanismes démographiques par lesquels l’impact de l’homme agit sur la biodiversité. Pour
pallier à cette limitation, nous développerons aussi des modèles mécanistiques de dynamiques
de communautés des tourbières sous l’effet des changements climatiques. Certains membres
du projet ont une expérience reconnue en modélisation (R. Ferrière, J. Clobert, J.-F. Le Galliard).
De plus, une bonne connaissance mécanistique des effets de la température, de l'humidité, et de
la fragmentation des habitats sur la physiologie, les comportements, et le succès reproducteur
d’un ensemble d’espèces sera obtenue à l’aide d’études démographiques et expérimentales.
Comme cette information sera seulement disponible après plusieurs échantillonnages en nature et
l’accomplissement d’un premier volet expérimental, nos premiers modèles démographiques
prédictifs se focaliseront sur une espèce pour lesquelles les données existent déjà, le lézard
vivipare (Chamaillé-Jammes et al. 2006, Massot et al. 2008). Des modèles plus généraux de
dynamique des communautés qui incluent plusieurs niveaux trophiques seront construits dans la
suite. Les données des suivis à long terme dans les trois Parcs seront utilisées à l'avenir pour
valider et affiner ces modèles. Ces modèles démographiques prédictifs de changement climatique
et d’utilisation des habitats viseront deux objectifs prioritaires : 1) une prévision générale de
l’impact du climat et de l'usage des milieux sur les tourbières montagnardes afin d’organiser les
efforts de conservation et 2) l'identification des espèces et des étapes de cycle de vie les plus
sensibles aux effets anthropiques qui déclenchent non seulement des changements dans les
populations d’une espèce donnée, mais aussi des cascades d’effets sur d'autres membres de la
biocénose. Ces projections des impacts du changement global aideront les Parcs Nationaux à
identifier des zones de risque élevé et les relations biologiques critiques qui exigeront des
adaptations dans les politiques de gestion et de conservation d’habitats.
5. Un dispositif scientifique au service des espaces régionaux
Pour atténuer pro-activement, par des efforts de gestion et de conservation des habitats sensibles,
les risques posés par les changements climatiques et d’habitat, le projet se fonde non seulement
sur l’intégration des données et des modèles décrits ci-dessus, mais il portera aussi une attention
plus spécifique aux situations régionales particulières. La mise en place de suivis standardisés
à long terme de tourbières dans les trois Parcs Nationaux permettra de moduler l’approche
scientifique commune à tous les Parcs par le contexte de gestion propre à chaque Parc. Ce
15
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
dispositif est donc utile dans une perspective de comparaison des projets de conservation entre et
au sein de chaque Parc National. Les Parcs Nationaux tireront bénéfice de l'établissement des
suivis à long terme sur des espèces sensibles (ectothermes, la plupart d'entre elles étant
protégées) dans les habitats sensibles (tourbières) qui pourraient servir d'indicateurs précoces des
effets à venir du changement climatique dans d'autres biocénoses.
Une bonne connaissance fondamentale peut améliorer les efforts de conservation et de
restauration en optimisant l’usage de ressources limitées au sein de chaque Parc National.
En effet, les prédictions de gestion formulées par le réseau de scientifiques peuvent aider à
réduire les dépenses d’argent, de temps et les efforts d'organisation en se concentrant sur les
éléments critiques qui auront le plus grand impact écologique. Les choix du réseau seront établis
pour répondre aux questions des chercheurs et aux exigences des gestionnaires pour une
identification partagée des objectifs et actions à mettre en œuvre dans chaque Parc National. Les
plans de gestion d’adaptation aux changements globaux envisagés dans ce projet sont (1) des
changements des pratiques d'utilisation de l’habitat (pâturages, utilisation du feu et de l'eau) dans
le temps et l'espace (notamment le lien entre les tourbières et leurs milieux adjacents), (2) la
restauration des tourbières le long des gradients environnementaux, et (3) une gestion
démographique active (réintroduction, renforcement,…) de populations d’espèces menacées pour
atténuer les impacts des changements climatiques. L’approche scientifique, intégrant
observation, expérimentation et modélisation, peut également aider les Parcs Nationaux à
identifier les sites menacés avant que leur dégradation ne soit trop avancée. Le réseau offrira le
cadre pour un dialogue direct entre les scientifiques et les gestionnaires des Parcs, ce qui
pourra faciliter l’identification des habitats sensibles contrôlables par chaque Parc National, les
habitats périphériques critiques, et les efforts de conservation qui seront susceptibles d'être les
plus fructueux dans le contexte humain, financier et politique propre à chaque Parc National.
Références citées
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Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
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conservation. Naconex, 35-41.
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Wootton, J. T. (1994) Ecology, 75, 151-165.
Contributions de chaque partenaire
Coordination nationale
Ferrière, CEREEP – ECOTRON Ile de France
Echantillonnage et gestion en milieu naturel
Parc National du
Mercantour
PNM & CEREEP
PNM ; Post-Doc;
sous-contrat Fournier
PNM ; Post-Doc; ST
Ferrière
Parc National des
Parc National des
Cévennes
Pyrénées
Coordination
PNC & UMR 7625
PNP & SEEM
Caractérisation d’habitat
PNC ; Post-Doc;
PNP ; Post-Doc; soussous-contrat Fournier contrat Fournier
Suivis à long terme
PNC ; Post-Doc; ST
PNP ; Post-Doc; ST
Suivis démographiques
Thèse, Massot, Le
Clobert, sous-contrats
Galliard
Heulin & Sinervo
Gestion adaptées au site PNM ; Ferrière, Post- PNC ; Le Galliard,
PNP ; Clobert, PostDoc
Post-Doc
Doc
ST = spécialistes taxonomiques (Lourdais, Le Galliard, Schmeller, Baguette, Tully, sous-contrat
Thébaud, voir Figure 1)
Projet post-doctoral
Caractérisation diversité: Post-doctorant, Ferrière, Clobert, Le Galliard
Modélisation et analyse des pistes causales: Post-doctorant, Ferrière, Clobert, Le Galliard
17
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Projet doctoral
Changements démographiques : Thèse, Massot, Clobert, Le Galliard, Ferrière
Changement climatique et écophysiologie : Thèse, Lourdais, Clobert, Massot, Le Galliard
Expériences complémentaires :
Destruction de l’habitat : Le Galliard, Ferrière, Massot
Changement climatique sur communautés: Clobert, Baguette, Schmeller
Changement climatique sur écosystème: Ferrière
Calendrier provisionnel
2009: Printemps (réception des fonds): Réunion d’organisation et rencontre entre partenaires
scientifiques et des Parcs ; Eté : Etablissement des sites à caractériser, et mise au point des
méthodes de suivi à long terme. Engagement de l’étudiant de thèse ; Automne : Echantillonnage
des sites de suivi ; début des expériences physiologiques ; Expériences en cours :
Métapopulations multi-espèces, dégradation habitat et écosystème.
2010: Echantillonnage de suivi à long terme ; Suivis démographiques ; Ecophysiologie ;
Premiers modèles statistique et validation de caractérisations d’habitats adjacents par des
paramètres environnementaux ; Expériences en cours
2011: Echantillonnage de suivi à long terme ; Suivis démographiques ; Ecophysiologie ;
Modèles mathématiques sur biodiversité et aires de répartition ; Expériences en cours
Expérience et moyens des équipes
Parcs Nationales du Mercantour, Cévennes, et Pyrénées : expertise et maîtrise des sites,
gestion des usages, de politique de développement durable des Parcs, et gestion de la biodiversité
des parcs. Coparticipation à la définition des protocoles, des sites d’étude et des objectifs.
Régis Ferrière (ENS ; CEREEP) : Expertise en modélisation et biologie de la conservation ;
suivi des populations de lézards en Mercantour ; Responsable du CEREEP ; Co-encadrant du
post-doc financé par le GICC.
Ferrière R, Guionnet A, Kurkova I. 2006 Timescales of population rarity and commonness in random
environments. Theor Popul Biol. 69:351-66.
Champagnat N, Ferrière R, Méléard S. 2006 Unifying evolutionary dynamics: from individual
stochastic processes to macroscopic models. Theor Popul Biol. 69: 297-321
Dieckmann U & Ferrière R 2004 Adaptive dynamics and evolving biodiversity. In: Evol. Cons. Biol.,
eds. Ferrière R, Dieckmann U & Couvet D, p188-224. Cambr. Univ. Press
Chapron G, Legendre S, Ferrière R, Clobert J, Haight RG. 2003 Conservation and control strategies
for the wolf (Canis lupus) in western Europe based on demographic models. C. R Biol. 326:575-87.
18
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Jean-François Le Galliard (CNRS ; UMR 7625 & CEREEP) : Expertise en modélisation, suivi
démographique de lézards/rongeurs, et expériences ; Co-responsable du CEREEP ; Co-encadrant
de l’étudiant de thèse financé par le GICC.
Le Galliard J.-F., Cote J., Fitze P.S. 2008. Lifetime and intergenerational fitness consequences of
harmful male interactions for female lizards. Ecol. 89: 56-64.
Fitze P.S., Le Galliard J.-F. 2008. Operational sex ratio, sexual conflict and the intensity of sexual
selection. Ecol. Lett. 11: 432-439.
Le Galliard J.-F., Fitze P.S., Ferrière R., Clobert J. 2005. Sex ratio bias, male aggression, and
population collapse in lizards. PNAS 102: 18231-18236.
Manuel Massot (CNRS, UMR 7625) : Expertise en suivi à long terme et effets du changement
climatique sur ectothermes. Co-encadrant de l’étudiant de thèse financé par le GICC.
Chamaillé-James S., Massot M., Aragon P., Clobert J. 2006. Global warming and positive fitness
response in mountain populations of common lizards Lacerta vivipara. Global Change Biol. 12: 392402.
Lepetz V, Massot M., Chaine A., Clobert J. 2008. Climate warming and the evolution of morphotypes
in a reptile. Global Change Biol. sous presse.
Lepetz, V., D. Schmeller, M. Massot and J. Clobert (2008) Biodiversity management: how to
adequately study species’ responses to climate warming. Biodiv. Cons. sous presse
Marquis O., Massot M., Le Galliard J.-F. 2008. Intergenerational effects of climate generate cohort
variation in lizard reproductive performance. Ecol. 89: 2575-2583.
Massot M., Clobert J., Ferrière R. 2008. Climate warming, dispersal inhibition and extinction risk.
Global Change Biol. 14: 461-469.
Jean Clobert (SEEM) : Expertise en démographique, dispersion, suivi a long terme, marquagerecapture, biologie de la conservation, organisation et participation aux projets nationaux (Projet
Seine et Marne) et internationaux (EuMon, SCALES). Directeur de la Station d’Ecologie
Expérimentale de Moulis. Co-encadrant du post-doc financé par le GICC.
Schmeller D. S., P.-Y. Henry, R. Julliard, J. Clobert, S. Lengyel, B. Gruber, F. Dziock, T. Kull, K.
Tali, B. Bauch, A. Kobler, E. Déri, V. Babic, P. Nowicki, E. Papastergiadou, C. van Swaay and K. Henle
(2008) Volunteer-based biodiversity monitoring (in Europe): good choice or inadequate compromise?
Cons. Biol. sous presse
Henry, P.-Y., Lengyel, S., P. Nowicki, R. Julliard, J. Clobert, T. Èelik, B. Gruber, D. Schmeller, V.
Babji and K. Henle (2008). Integrating ongoing biodiversity monitoring: potential benefits and methods.
Biodiversity and Distribution. sous presse
Grosbois V, Gimenez O, Gaillard JM, Pradel R, Barbraud C, Clobert J, Moller AP, Weimerskirch H
(2008) Assessing the impact of climate variation on survival in vertebrate populations. Biol. Rev. 83:
357-399
Sous-contractants (SEEM) :
19
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
Dirk Schmeller (SEEM) : expertise en batracologie, conservation, suivi multi-espèces, biologie des
invasions, et projets internationaux (4 projets Européens : EuMon, SCALES, EBONE, TenLamas) ;
organisation des suivis d’amphibiens
Matthieu Fournier (SEEM) : expertise en hydrogéologie ; organisation des études hydrologiques.
Christophe Thébaud (UPS, Toulouse) : expertise en botanique ; organisation des échantillonnages.
Benoit Heulin (Université Renne) : expertise en herpétologie, suivi à long terme en Pyrénées et
Européen des lézards.
Barry Sinervo (Université de Californie Santa Cruz) : expertise en herpétologie, suivi à long terme
en Pyrénées et Européen des lézards.
Michel Baguette (MNHN) : expert papillons, métapopulation et biologie de la conservation ;
organisation des suivis de papillons.
Polus, E., Vandewoestijne, S., Choutt, J. & M. Baguette 2007. Tracking the effects of one century of
habitat loss and fragmentation on calcareous grassland butterfly communities.Biodiv. Cons.16: 34233436.
Schtickzelle, N., Choutt, J., Goffart, P., Fichefet, V. & M. Baguette 2005. Metapopulation dynamics
and conservation of the Marsh Fritillary butterfly: modelling landscape dynamics and management
options for a critically endangered species in Western Europe. Biol. Cons. 126: 569-581.
Schtickzelle, N., Turlure, C. & M. Baguette 2007. Grazing management impacts the viability of the
threatened bog fririllary butterfly Proclossiana eunomia. Biol. Cons. 136: 651-660.
Olivier Lourdais (CEBC) : expertise en écophysiologie des reptiles, changement climatique, et
serpents. Co-encadrant de l’étudiant de thèse financé par le GICC.
Lourdais O., Shine R., Bonnet X., Guillon M., Naulleau G. 2004 Climate affects embryonic
development in a viviparous snake, Vipera aspis. Oikos., 104: 551-560
Ladyman M., Bonnet X., Lourdais O., Bradshaw D., Naulleau G. 2003 Gestation, thermoregulation
and metabolism in a viviparous snake, Vipera aspis: evidence for fecundity-independent costs. Physiol.
Biochem. Zool. 76: 497-510
Valorisation
Ce projet s’inscrit dans les stratégies nationales et européennes de suivi et d’inventaire de la
biodiversité en se focalisant sur des milieux d’intérêt prioritaire de conservation qui sont aussi
caractéristiques des Parcs Nationaux partenaires du projet. Ces Parcs Nationaux sont impliqués
dans une démarche de remise à plat de leurs protocoles de suivi (par exemple, le programme
ATBI/M dans le Parc National du Mercantour). La co-construction de protocoles de suivis
propres aux milieux de tourbières entre scientifiques et Parcs Nationaux bénéficiera donc à la
fois aux Parcs Nationaux dans la définition globale de leurs protocoles de suivi et aux
scientifiques dans l’harmonisation des protocoles avec les dispositifs nationaux et
internationaux. A ce titre, les responsables scientifiques des Parcs constitueront des
20
Impact des Changements Globaux sur les biocénoses des Tourbières de Montagne
interlocuteurs privilégiés pour assurer la cohérence de l’ensemble de nos protocoles avec les
outils en place ou en développement.
Ce projet se place dans la continuité des inventaires de tourbières conduits dans chaque
Parc National dans le passé, comme le programme d’Atlas des zones humides du Mont Lozère
du Parc National des Cévennes. Il est aussi dans le prolongement des actions d’inventaire et de
gestion du Pôle Relais Tourbières, en particulier des programmes « Tourbières des Pyrénées »,
« Tourbières des Alpes » et « Tourbières du Massif Central » (http://www.poletourbieres.org/documentation.htm). Toutefois, notre programme de recherche se distingue de ces
actions par notre volonté affichée de mettre en place un protocole de suivi standardisé des
biocénoses de tourbières de telle sorte à développer des indicateurs dynamiques. Par ailleurs,
nous proposons un programme de recherche intégré de suivi, d’expérimentation et de
modélisation afin de fournir aux gestionnaires des outils prédictifs du devenir de ces milieux. Ce
projet fera donc à la fois des contributions concrètes à la science fondamentale aussi bien
qu’à la conservation et gestion de la biodiversité dans les trois Parcs Nationaux. Les
résultats des travaux de recherche seront publiés dans des revues reconnues au niveau
international, intégrés dans les programmes de conservation des Parcs Nationaux et diffusés
auprès des gestionnaires et des politiques en charge de la gestion des tourbières au sein de
chaque Parc National. Nos contributions à la science fondamentale couvrent de multiples
disciplines telles que l'écologie, l'évolution, la physiologie, et la biologie de conservation. Elles
fourniront une meilleure compréhension des mécanismes liant changements anthropiques et
fonctionnement des biocénoses à une échelle régionale, sur le long terme, et dans un contexte de
gestion appliquée.
Une plateforme internet d’explication du projet, de diffusion des protocoles et des
données, et de communication des résultats sera développée dans la première année du
programme. Les conclusions de notre travail de co-construction des protocoles (section 1) seront
mises à la disposition de tous sous la forme de plaquettes sur le site et d’actes de colloques.
Les données récoltées lors du suivi et les outils prédictifs développés lors de notre projet seront
partagés et mis à la disposition des Parcs Nationaux et de leurs services. Les données de suivi à
long terme (section 2), collectées sur une base de données centralisée, peuvent contribuer à des
réseaux d’observatoire de la biodiversité nationaux ou européens (par exemple EuMon et
EBONE). Nous lancerons une réflexion commune au début du projet pour discuter des échanges
possibles de données avec d’autres réseaux. Les modèles statistiques développés au cours du
projet (section 2b et 2c) fournissent des outils intégrés pour prédire l’impact environnemental
d’aménagements et seront intégrés dans un logiciel informatique disponible pour chaque Parc
National. De tels modèles seront donc particulièrement utiles aux trois Parcs Nationaux qui sont
impliqués dans ce projet puisque les résultats s'appliqueront directement aux habitats qu'ils
gèrent. Les modèles mathématiques mécanistiques et prédictifs (section 4) seront aussi
implémentés sur des plateformes logiciels à usage convivial ce qui permettra de rendre un usage
facilité pour les gestionnaires.
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