M1-FLE 2008-2009
LINGUISTIQUE TEXTUELLE
Jean-Marc COLLETTA
Corrigé des travaux proposés
et recommandations utiles
Travail n°1 :
Le texte suivant (texte 4 du recueil) est extrait de « Le capitaine Fracasse » de Théophile Gauthier.
Consigne :
Faire l’analyse du réseau référentiel du marquis de Bruyères dans le premier paragraphe, et celui de la Soubrette dans le
second paragraphe.
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I. Explications préliminaires de l’enseignant :
1. Faire l’analyse d’un réseau référentiel demande d’identifier l’ensemble des informations linguistiques présentes dans
le texte qui ont valeur de co-référence, c’est-dire qui :
- désignent le référent visé et ses liens privilégiés avec d’autres référents,
- servent à le caractériser,
- marquent les reprises au fil du texte de ces divers éléments à l’aide d’expressions anaphoriques.
2. On peut distinguer :
- le réseau référentiel, qui couvre les deux premiers points
- le réseau anaphorique, qui couvre le troisième point
3. Analyser un réseau référentiel ou un réseau anaphorique demande de :
- faire un relevé des marques pertinentes,
- faire apparaître les relations entre ces marques à l’aide d’un schéma légendé,
- Analyser ces marques et ces relations, les définir, les caractériser
4. Analyser les marques et les relations au sein d’un réseau référentiel. Voici un petit lexique de base à utiliser (voir le
cours pour davantage d’informations) :
Exophore = marque qui désigne un référent externe au texte, par exemple un référent présent dans la
situation : le référent est identifiable en contexte et on parle alors de déixis : « je te donne ce livre », « cette
maison que vous voyez », « nous choisirons la première photo ».
Endophore = marque qui, à partir de la présence dans le texte d’un référent verbalisé (en gras), dénote à
nouveau ce férent par le biais d’une autre information linguistique à l’intérieur du texte (soulignée) :
« Mon père était médecin. Il nous enseigna l’attention à autrui » ; « j’ai acheté ma maison, qui est très
bien située, chez un notaire » ; « J’ai toujours adoré mes parents, si bons, lesquels me le rendaient bien ».
Coréférence : phénomène de reprise d’un référent à l’intérieur d’un texte, dont la portée est variable. A
l’écrit, contrairement à l’oral où la notion de « phrase » est problématique, on distingue :
- la coréférence intra-phrastique : la marque de reprise renvoie à un férent dénoté dans la me
phrase du texte, bien que pas forcément dans la même proposition.
- la coréférence inter-phrastique : la marque de reprise renvoie à un référent dénoté dans une autre
phrase du texte.
Au regard du défilement (ou de la progression) du texte, il existe deux types de marques de reprise :
- l’anaphore ou marque anaphorique qui renvoie à un référent dénoté en amont dans le texte, comme
dans : « Mon père était médecin. Il nous enseigna l’attention à autrui ».
- la cataphore ou marque cataphorique qui renvoie à un férent dénoté en aval dans le texte, comme
dans : « Bien qu’elle fut la fille du souverain, la princesse Lisandre était modeste en tous points ».
Parmi les marques de reprise on distingue les anaphores (ou cataphores) pronominale, déterminative,
nominale, adverbiale, verbale et adjectivale selon la nature de l’information linguistique considérée.
Certaines marques de reprise sont des marques directes :. D’autres marques de reprise sont des marques
indirectes (voir l’anaphore nominale associative ci-après).
L’anaphore pronominale (reprise par un pronom, personnel, relatif ou autre) peut être :
- totale : « mon pèreil », « ma maisonqui », « mes parentslesquels », ces pommes… je les ai
achetées »,
- partielle : « mes parentsl’un habite Paris », « mes trois invitées l’une est coiffeuse, lautre est
médecin, la troisième est enseignante », « ce riz… j’en ai consommé »,
- intégrative : « Mylène était ici. Arnold aussi, sans doute, puisque je viens de les croiser dans
l’entrée » les » reprend les deux référents pour les fondre en un tout constituant une nouvelle unité
référentielle).
L’anaphore nominale (reprise par un substantif ou un groupe nominal) peut être directe, c’est-à-dire
qu’elle reprend le référent, tout le référent, mais rien que le référent :
- fidèle, par répétition : « Félix était… Félix aimait le soleil », « j’aime le Portugal Le Portugal est
un pays »,
- déterminative, marquée par un changement de déterminant : « des pommes les pommes… ces
pommes », « un roice roi… notre roi »,
- infidèle, avec reformulation : « Félix était… le chat aimait le soleil », « j’aime le PortugalCe pays
est accueillant »,
- conceptuelle, par nominalisation et venant résumer l’information précédente : « une fillette du village
s’est fait renverser par une voiture Cet accident a ému tout le monde », « les chefs d’état du G20
doivent se rencontrer prochainement à Genève. Le sommet portera notamment sur… » .
L’anaphore nominale peut aussi être indirecte ou associative, construite sur la base d’une relation
sémantique entre le référent initial et sa reprise (il s’agit en fait plus d’une -évocation que d’une reprise
au sens strict), laquelle peut introduire un nouveau référent lui-même susceptible d’être repris
ultérieurement dans le texte. La ‘reprise’ rappelle le référent initial par le biais d’un déterminant possessif,
d’un déterminant démonstratif, ou simplement en vertu du lien sémantique qui les unit. L’anaphore peut
reposer sur les relations suivantes :
- relation liant la partie et le tout, soit hyponymique : « la bourse a vu ses taux augmenter
aujourd’hui », « La jeune fille marchait d’un pas léger. Son visage ses yeux sa robe », soit
hypéronymique : « Il avait un fils étudiant à… et une fille encore au lycée. Les jeunes gens se voyaient
fréquemment… » ;
- relation métonymique : « une moto tourna brusquement dans la rue devant lui… il ne put éviter le
guidon qui le fit tomber » ; « la bourse a vu ses taux augmenter aujourd’hui. L’indice du CAC 40 à est
passé de… ».
- relation métaphorique : « on aperçut alors le sorcier sortant de la fumée. Le prince noir arborait un air
de triomphe ». « Au salon, on présent également la toute dernière des Audi. Cette pure merveille aux
lignes galbées de chez Bertone… »
- ou d’autres relations et associations encore, la liste n’est pas close !
On peut identifier une anaphore verbale lorsqu’un verbe reprend l’information linguistique supportée par
un autre verbe, ce qui est le cas de bien des emplois du verbe « faire » : « Elle aimait marcher jusqu’à son
travail. Elle l’a fait durant des années » ; « tu ne sais pas parer ta machine, mais si tu veux je peux le
faire ».
On peut identifier une anaphore adverbiale lorsqu’un adverbe reprend une information linguistique du
texte : « Elle aimait marcher jusqu’à son travail. Son mari pareillement ». Plus fréquemment, l’anaphore
adverbiale s’appuie sur l’emploi d’un adverbe de lieu : « La décision a déjà été prise. C’est ce que je
viens d’apprendre » ; « Il va falloir s’entendre sur de nouvelles règles en matière d’exploitation des
ressources maritimes. C’est ici que subsiste des désaccords entre pêcheurs et scientifiques ».
On peut identifier une anaphore adjectivale lorsqu’un adjectif reprend une information linguistique du
texte. C’est le cas de l’adjectif « tel », comme dans : « La décision de clore l’unité a été prise. Telle
n’était pas la bonne décision à prendre ! ».
Les reprises directes d’un référent sont généralement signalées par des indices grammaticaux (soulignés et
en italiques dans les exemples) :
- terminaisons verbales rappelant la personne (au sens linguistique) du référent repris : « Mon père était
médecin. Il nous enseigna l’attention à autrui, et nous apprit la fragilité des êtres ».
- terminaisons adjectivales rappelant le genre et le nombre du référent repris : « j’ai acheté ma maison
chez un notaire. Elle est ancienne mais en bon état, vaste, très bien située et elle est très accueillante ».
Mais ces marques grammaticales sont des indices de second ordre et ne réfèrent pas, à l’instar des marques
de reprise, au référent initial. Une terminaison verbale ou adjectivale signale simplement la psence
éventuelle d’une marque de co-référence (le nom, groupe nominal ou pronom duquel dépend le verbe ou
l’adjectif en question).
5. Enfin, on ne perdra pas de vue les perspectives didactiques attachées à ce type d’analyse : il s’agit bien de faire
étudier aux apprenants les moyens linguistiques par lesquels, dans une langue donnée, on devient capable :
- de comprendre des textes (parlés ou écrits) en sachant en identifier les référents et les reprises en réseau,
- de produire des textes (parlés ou écrits) en sachant assurer leur cohésion et cohérence.
Donc : en profiter pour se demander si tel ou tel texte, tel ou tel paragraphe, peut s’avérer trop complexe pour des
apprenants, ou s’il paraît est exploitable tel quel ou non, ou encore, en quoi il est intéressant comme support
didactique.
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II. Proposition de corrigé du travail n°1
II.1 Analyse du réseau « marquis de Bruyères » (1er paragraphe du texte).
Relevé des marques (ligne après ligne) :
L1 (ligne 1)
Le marquis de
Bruyères
qui
L4
Il
L7
Il
il
Schéma du réseau (2 possibilités : en mode « dessin » ou en mode « texte », noter que le second est plus facile à mettre
en œuvre avec un traitement de texte) :
Légende : référent initial en caractères gras, marques de reprises en polices normale (la flèche pleine ou le « ^ » indique
une reprise directe). Les marques de reprise se succèdent du haut vers le bas en respectant leur ordre d’apparition dans le texte.
Le marquis de Bruyères
^
qui
^
Il
^
Il
^
il
Analyse du réseau :
Le marquis de Bruyères
qui
Il
Il
il
Le réseau férentiel du marquis de Bruyères est un réseau simple, constitué de la mention du férent puis de 4
reprises directes, toutes anaphoriques (référent placé en amont dans le texte) :
- le « qui » (L1) est une reprise intra-phrastique par pronom relatif,
- Les trois occurrences de « il » (L4 et L7) sont des reprises pronominales, les deux premières de portée inter-
phrastique, et la dernière de porté intra-phrastique, et toutes les trois réactualisent le référent initial (le marquis).
Chacune de ces reprises est signalée au plan grammatical par une terminaison verbale de troisième personne : « qui
avait vu », « Il descendit », « Il s’arrêta », « il fit ».
Précisons pour terminer que deux expressions (non anaphoriques) permettent en outre de caractériser le référent :
- l’expression attributive de la première phrase : « debout sur le perron… rubans assortis » qui donne une
description du personnage référent,
- la comparaison « comme un hôte poli… ses invités », qui éclaire sur son attitude.
A priori, sur le plan de la construction référentielle, pas de difficulté au plan didactique.
II.2 Analyse du réseau « la Soubrette » (2nd paragraphe du texte).
Relevé des marques (ligne après ligne) :
L9 (ligne 9)
la Soubrette
sa tête
L10
qui se
ses yeux
L11
sa bouche
Elle se
L12
sa gorge
L13
sa guimpe
son secours
L14
la rusée coquine
qui
Schéma du réseau (2 possibilités au choix : en mode dessin ou en mode texte) :
Légende : référent initial en caractères gras, marques de reprises en polices normale (la flèche pleine ou le « ^ » indique
une reprise directe ; la flèche en petits traits ou le « < » indique une reprise indirecte). Les marques de reprise se succèdent du haut
vers le bas en respectant leur ordre d’apparition dans le texte.
la Soubrette
qui
Elle se
sa tête
qui se
ses yeux
sa bouche
sa gorge
sa guimpe
son secours
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