PROPOSITIONS SUBORDONNEES CIRCONSTANCIELLES
Source: Grammaire méthodique du français (Riegel et al)
0. La catégorie générale des subordonnées circonstancielles
Toutes les propositions subordonnées qui ne sont ni des relatives ni des complétives sont des
propositions circonstancielles. L’analyse de la phrase en constituants peut correspondre à cette
représentation et assimiler ces propositions aux compléments circonstanciels de la phrase simple.
0.1. Identification des circonstancielles
La plupart des conjonctions introduisant les circonstancielles sont des locutions conjonctives (on
admet parfois parmi elles des expressions comme du jour où, etc. mais ces expressions ne sont
pas figées : du jour décisif où…)
Il est préférable de regrouper avec l’étude des circonstancielles conjonctives celle des
circonstancielles non-conjonctives (propositions participiales, formes dites gérondif, groupes
infinitifs prépositionnels) qui partagent avec les premières (avec une classe déterminée d’entre
elles) nombre de propriétés syntaxiques et sémantiques.
0.2. Place des circonstancielles
Certaines d’entre elles sont mobiles comme les compléments circonstanciels dans la phrase
simple : certaines subordonnées circonstancielles temporelles, causales, finales, concessives.
D’autres de ces subordonnées ont une mobilité limitée (causales introduites par « puisque »,
conditionnelles introduites par « si »), voire nulle (consécutives, certaines comparatives, etc.)
On distinguera les circonstancielles proprement dites de divers systèmes corrélatifs (où la
subordonnée n’est pas complément de phrase, ou en interdépendance avec l’autre proposition qui
lui est associée, ou en quasi coordination.)
Rôle dans la dynamique communicative : certaines font automatiquement partie du thème,
d’autre du propos. L’emploi thématique favorise la position en tête de phrase.
0.3. Sens des circonstancielles
Notion de circonstance = pas claire
Parallélisme entre les compléments circonstanciels simples (GN ou GP) et les subordonnées
circonstancielles = très imparfait (ex : les subordonnées exprimant le lieu sont des relatives
substantivées).
Classements fondés sur le sens des subordonnées (comme des circonstants simples) = très
difficiles à établir : mieux vaut un classement selon la mobilité des subordonnées, l’emploi des
modes, la possibilité de substitutions.
0.4. Circonstancielles elliptiques
Propositions introduites par dès que / aussitôt que / sitôt que / parce que / bien que / quoique /
encore que, quand leur sujet est coréférentiel à celui du verbe principal et quand leur verbe est le
verbe être suivi d’un adjectif, d’un participe ou d’un nom sans déterminant, peuvent être amputées
de ce sujet et de ce verbe. [Il était, quoique riche, à la justice enclin]. Ici sitôt et aussitôt = dès
que.
Propositions comparatives connaissent des possibilités d’ellipse encore plus étendues.
I. Circonstancielles décrivant une situation
Parmi les subordonnées conjonctives mobiles, certaines sont à l’indicatif = une partie des
temporelles, des causales et des conditionnelles. Mêmes nuances sémantiques que celles
exprimées (sans marque formelle spécifique) par les propositions participiales et les gérondifs : on
a affaire aux circonstances (au sens strict) du fait principal : c’est à dire que la subordonnée décrit
la situation influant sur la réalisation du procès désigné dans la matrice.
Les conjonctions (ou locutions conjonctives) intéressées sont généralement polysémiques, à la
fois temporelles et causales : « comme, dès lors que, quand, si », etc. On peut donc considérer
que les causales sont un sous-groupe des temporelles, et les conditionnelles (introduites par « si »)
un sous-groupe des causales :
- condition = cause hypothétique
- cause = fait antérieur ou simultané qui donne la raison d’un autre fait
1.1. Circonstancielles introduites par une conjonction
1.1.1. Type QUAND (sous-types PENDANT QUE, APRÈS QUE)
Dans les phrases où figure quand (ou lorsque) : c’est le jeu des temps, simples ou composés, qui
précise le rapport chronologique entre la principale et la subordonnée.
Certaines conjonctions spécialisées dans l’expression de la simultanéité : pendant que / tandis
que / comme / tant que / aussi longtemps que / chaque fois que / toutes les fois que (avec
diverses nuances) ; comme et maintenant que = difficilement compatibles avec le passé simple et
le futur.
Certaines conjonctions spécialisées dans le rapport de succession : après que / dès que / aussitôt
que. Depuis que = difficilement compatible avec le passé simple et le futur.
Temporelles de situation en général en tête de phrase, très souvent thématiques : donnent le
cadre dans lequel intervient le fait essentiel. Postposées, elles peuvent être propos de la phrase
(mis en valeur par la négation) et peuvent se prêter à l’effet de subordination inverse, pour peu
que la principale soit à un temps de l’inaccompli [Cinq heures sonnaient lorsque la marquise sortit
> Principale = le thème de la phrase et représente les circonstance du propos exprimé dans la
subordonnée].
1.1.2. Type PARCE QUE, PUISQUE
Conjonctions introduisent des propositions qui expriment les causes du fait principal ou, en ce qui
concerne puisque (et vu que / attendu que / étant donné que) qui justifient l’énonciation de la
proposition principale ou en affirment la validité (et introduisent le thème : pas extractible dans
une phrase clivée).
Parce que peut appartenir aussi bien au thème (antéposé) qu’au propos (postposé, sauf si séparé
du GV par une virgule, et extractible dans phrase clivée) de la phrase.
1.1.3. Type SI
Conjonction peut entraîner plusieurs effets de sens (emplois hypothétiques, temporels itératifs
[= toutes les fois que], adversatifs [voire concessifs, = il est vrai que… mais]), selon la
construction de la phrase (formes verbales, contenus propositionnels.)
Son emploi de base est de poser le cadre situationnel, sans l’asserter comme fait particulier.
C’est le contexte qui permet d’interpréter ce cadre de façon logico-sémantique (comme
conditionnel, implicatif ou contrastif).
La proposition subordonnée introduite par si a toujours un verbe à l’indicatif :
- SI + présent / présent : phrase générique.
- SI + imparfait / imparfait : répétition dans le passé.
- SI + présent / futur (présent à valeur de futur) : hypothèse envisagée comme probable.
- SI + imparfait / conditionnel présent : hypothèse envisagée comme contraire à l’état de chose
actuel (potentiel ou irréel du présent).
- SI + P. Composé / P. Composé ou présent : hypothèse portant sur un fait passé hors de toute
vérification possible ; s’interprète facilement comme une structure concessive.
- SI + Plus que parfait / conditionnel (passé ou présent) : hypothèse sur un fait passé qui s’est
révélé faux : irréel du passé dans la subordonnée et irréel du passé/présent dans la principale.
- SI + tps. quelconque de l’indicatif / tps. quelconque de l’indicatif : valeur d’opposition qui peut
être soulignée par un terme comme pourtant dans la principale : c’est le seul cas où si peut être
suivi d’un PS, futur ou conditionnel.
1.2. Alternance avec les constructions infinitives et participiales
Constructions infinitives = rares, concernent exclusivement après que sous la forme [après+
infinitif composé] et parce que sous la forme [pour+ infinitif composé], et ne sont possibles que si
les sujets sont coréférentiels. En revanche, le gérondif (variante conditionnée de l’infinitif après
en), peut se trouver avec presque toutes les valeurs circonstancielles de situation (temps, cause,
condition) lorsque les sujets sont coréférentiels [C’est en forgeant qu’on devient forgeron].
Propositions participiales (participe présent ou passé, sujet exprimé et distinct de celui du verbe
principal) et participes apposés : ils peuvent avoir toutes les valeurs évoquées ci-dessus (temps,
cause, condition). La valeur temporelle de ces propositions peut être soulignée par dès / aussitôt /
à peine / une fois ; les participes passés apposés peuvent être introduits par dès que, aussitôt que,
etc. et parce que (fonctionnent alors comme une proposition circonstancielle elliptique du verbe).
II. Circonstancielles décrivant une perspective
Propositions subordonnées mobiles, normalement au subjonctif. Elles ne peuvent se voir substituer
de propositions participiales ni de gérondifs. Elles ouvrent une perspective, une « vue à distance »,
souvent subjective, à partir du fait principal : elles décrivent ainsi ce qui est à venir, soit par une
anticipation purement chronologique (avant que), soit en y ajoutant l’idée d’une intention (afin
que) ou d’un souhait (pourvu que) ; ou encore elles décrivent un fait dont le lien situationnel, voire
causal, qui pourrait l’attacher au fait principal est repoussé (nié : non que ; dénié dans sa valeur de
cause : bien que.)
2.1. Par anticipation
2.1.1. Type AVANT QUE
Parfois avec un ne explétif, trace d’une négation à un autre niveau de l’énonciation [La bombe a
été désamorcée avant qu’elle n’explose > elle n’a pas explosé]. La construction infinitive est
obligatoire quand les sujets sont coréférentiels.
Variante conjonctive : jusqu'à ce que (établit une coïncidence entre la limite chronologique d’un
état et l’événement circonstanciel).
2.1.2. Type POUR QUE, DE PEUR QUE
Pour que et afin que expriment le but positif
De peur que et de crainte que expriment le but négatif (parfois avec ne explétif).
Seul pour utilisé comme préposition devant un GN mais toutes ces conjonctions connaissent une
forme infinitive obligatoire lorsque les sujets des deux propositions sont coréférentiels, sous la
forme pour / afin de / de peur de / de crainte de.
2.1.3. Type POURVU QUE, À MOINS QUE
Pourvu que, / à moins que / pour peu que peuvent toujours se voir substituées par si (si ... ne ...
pas pour à moins que), à condition de procéder aux ajustements nécessaires des formes verbales,
mais l’inverse n’est pas nécessairement vrai ;
Pourvu que exprime une idée de souhait incompatible non seulement avec des propositions
axiologiquement négatives, mais aussi avec l’irréel du présent ou du passé [Pourvu que je me
réveille, je pourrais avoir mes écrits !]
À moins que / pour peu que ont des usages argumentatifs qui en font des substituts plus
spécifiques de si.
Seul à moins possède une construction infinitive dans le cas de sujets coréférentiels [À moins de
toucher le gros lot, je ne me ferai pas construire une maison].
2.2. Par élimination
2.2.1. Type SANS QUE, NON QUE
Une orientation négative unit sans que (négation d’un procès concomitant ou consécutif), non
que (négation d’une cause ou d’une explication) et au lieu que (négation d’une autre possibilité
alternative.) Tous relèvent d’une orientation argumentative, ou même polémique, opposant la
réalité des faits à une perspective attendue.
Sans et au lieu de + infinitifs sont obligatoires quand les sujets sont coréférentiels. Sans +
infinitif est l’inverse du gérondif [Sans boire / en buvant], mais il n’est pas exactement équivalent
au gérondif négatif : sans = négation d’une situation attendue.
2.2.2. Type BIEN QUE
Propositions « concessives » (introduites par bien que / quoique / encore que, *malgré que)
manifestent la polyphonie (cf. Ducrot) du discours : elles supposent que quelqu’un quelque part
(un « on dit ») asserte le lien causal que pour sa propre part le locuteur refuse. Le subjonctif, de
règle, écarte le fait mentionné de la situation qui conditionne le fait principal [Bien qu’elle soit
encore jeune, elle a beaucoup d’expérience].
Lorsque la proposition concessive = phrase attributive, on peut la réduire par effacement du
verbe ou utiliser les tours quelque ... que / si ... que / quel(le)(s) ... que / tout ... que : c’est alors
l’évaluation positive qui est faite de l’attribution de qualité qui est mise en cause [Quelque
intelligent qu’il soit, il n’a pas pu s’en sortir]
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