Olmue - 2012

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Lucie JOMAIN
Etudiante en 4ème année de Médecine à Grenoble
Eté 2012
Rapport de stage
Quel étudiant n’a pas rêvé de partir à l’étranger dans le but de découvrir un pays et en
plus son système de santé ? Ayant déjà fait des stages avec des médecins aux Etats Unis et en
Angleterre, je voulais découvrir la pratique de la médecine en Amérique du Sud.
En juillet 2012 j’ai eu la chance, par l’intermédiaire d’IFMSA, d’effectuer un stage à côté de
Vina del Mar, au Chili.
Mon stage se déroula dans la campagne Chilienne à une heure trente de Vina del Mar,
dans une clinique publique du village d’Olmué. Cette dernière regroupe médecins généralistes
et l’équipe paramédicale : infirmières, puéricultrices, kinésithérapeutes, nutritionnistes, aides
soignantes, chauffeurs… Les médecins se répartissent entre les « postes ruraux », visites
médicales à domicile, consultations et urgences à la clinique même.
Lors de mon stage j’ai travaillé dans l’un des postes ruraux et dans la clinique.
Je vais détailler l’organisation de la clinique d’Olmué :
Les postes ruraux, qui se trouvent loin dans la montagne, permettent aux patients qui n’ont
pas de moyen de transport d’accéder aux soins. En effet, nombreux sont ceux qui n’ont pas de
voiture, et la fréquence des bus publics est seulement de un à deux bus par jour.
Ces postes se présentent ainsi : un espace pour les infirmières et deux espaces pour les
médecins. Cela permet à l’interne de recevoir un patient en même temps que la consultation
du médecin.
Chaque jour, un médecin va dans un des trois postes ruraux de la vallée mais il y a une
infirmière assure une permanence journalière afin de soigner les patients et de juger s’il est
nécessaire de revoir le médecin lors de sa prochaine visite.
Le médecin est donc entouré de cette équipe qui essaye de le soulager au maximum : contrôle
des constantes par l’aide soignante avant toute consultation médicale, suivi régulier des
patients par l’infirmière qui peut ainsi avertir le médecin en cas d’anomalies…
Au Chili, les médecins ont 12 minutes pour une consultation normale, 15 si c’est une
consultation d’une pathologie chronique ( hypertension, diabète..) et 45 si on intègre un
patient dans une pathologie chronique.
Durant ce mois, j’ai pu suivre 3 médecins généralistes durant les consultations, les visites à
domicile et les urgences. N’ayant que peu de temps par patient, les médecins me demandaient
seulement de faire l’examen clinique en général mais ils prenaient le temps d’expliquer toutes
les choses que je ne comprenais pas ou que je ne savais pas.
J’ai néanmoins eu la chance de pouvoir interroger toute seule des patients dans un box alors
que le médecin se trouvait avec un autre patient. Je devais ensuite rapporter l’anamnèse pour
faire ensemble le diagnostic avec la prescription.
Le fait d’avoir une médecine à deux vitesses, avec d’un côté le système publique (gratuit) et
privé a des conséquences directes sur la médecine et les patients. Une radiographie du thorax,
faite dans un hôpital publique se faite seulement sur un hémi thorax, le côté demandé, et non
les deux poumons. Ceci pour économiser de l’argent.
Les consultations chez les spécialistes illustrent également ce principe : un patient dans le
système publique attend en général plus d’un an pour avoir sa consultation si le pronostic vital
n’est pas en danger. Néanmoins, une lésion de la peau peut se transformer en un an en un
carcinome sans que le patient n’ait eu le temps de voir un dermatologue ! Alors que dans le
privé, une consultation se prend beaucoup plus facilement et avec les meilleurs médecins.
Chaque jeudi après-midi est consacré à une réunion axée sur la discussion des cas les
plus préoccupants :
- patients dépressifs qui ne viennent plus en consultation depuis un an, que sont ils devenus ?
Sont ils toujours sous traitement ? Pour la patiente en question, un médecin et un psychologue
sont allés lui rendre visite sans l’aviser pour voir comment elle allait. Le faite de voir des
personnels médicaux qui s’inquiétaient d’elle l’a vraiment touché et elle a accepté de
reprendre des rendez vous réguliers avec le psychologue !
- parents ayant pris de la pasta base (un dérivé de la cocaïne qui entraine par les suites une
agressivité..) et dont on ne voit plus les enfants à l’école. Ces enfants sont ils en danger, sont
ils victimes de sévices, sont ils en train de travailler alors que cela est interdit ? Un médecin
est donc allé voir si les enfants allaient bien.
- Un patient atteint de schizophrénie non traitée qui se prend pour le président du Chili et
devenant agressif s’il est confronté à un refus d’autrui. Ce patient est il devenu une menace
pour la société, doit on le faire interner dans un service de psychiatrie ? Donc visite à domicile
par un psychologue.
Ceci ne sont que les quelques cas dont l’équipe a discuté pendant mon mois avec eux.
J’ai également assisté à des consultations faites par les nutritionnistes pour conseiller
les patients atteints de diabète, d’hypercholestérolémie, obésité etc. En effet, la population
présente 80% de surpoids et 30% d’obésité!!! Ceci s’explique par le faite que le sport n’est
pas dans les coutumes, associé à une alimentation très riche en graisses (avocat, friture..). De
plus, les personnes n’ont pas l’habitude de cuisiner des légumes, qui servent juste à
assaisonner les plats, et ne parlons même pas des poissons (cela coûte trop cher pour un
individu de salaire bas ou moyen).
Dans cette clinique, se trouve un centre de rééducation, avec des kinésithérapeutes.
Les patients viennent donc pour se rééduquer avec des machines, se soigner avec des
manipulations... Les kinésithérapeutes adaptent les patients aux béquilles, une chose
important puisque cette clinique se trouve dans la campagne (beaucoup de côtes et de chemins
non entretenus).
J’ai suivi une infirmière lors de visites à domiciles qui avaient pour but de coter le
degré de handicap de certains patients. Si un patient a au-delà d’un certain degré, on l’intègre
au programme « immobilité » qui permet aux patients d’avoir des visites de médecin, kiné,
infirmières, aides soignants, au minimum une fois par mois.
C’est à ce moment la que se note les inégalités sociales qui sont présentes dans ce village :
une femme a sa chambre toute équipée pour elle, salle de bain incluse, avec une infirmière
privée qui vient tout les jours. Cinq minutes plus loin, se trouve une adolescente ayant des
malformations congénitales qui ont empirées suite à l’absence de soins, dans une maison qui
n’a même pas de fenêtres…
Ayant fait que 5 mois de stage (pédopsychiatrie et réanimation médicale) en France, ce fut la
première fois que j’étais en contact avec des patients. En effet, j’ai fais des anamnèses sur des
pathologies les plus variées : hypertension et suivi du traitement, diagnostic de syndrome
carpien, palpation de la thyroïde chez un hypothyroïdien…
Les enfants ne vont pas voir le pédiatre, comme cela coûte cher et prend beaucoup de temps.
Ainsi, nous avons en consultation des nouveaux nés, des nourrissons et enfants en bas âges. Il
existe en ce moment une grande campagne sur le brossage des dents régulier et l’hygiène
corporelle.
Je n’aurai jamais pensé qu’une équipe locale fasse autant pour les incomings… Le LEO de
Valparaiso m’attendait lors de mon arrivée, m’a montré la ville, sa fac et m’a même accueilli
comme la personne qui devait m’accueillir s’était délisté !
L’équipe avait organisé des sorties pour nous tous les weekends : une visite de Santiago avec
guide (découverte de parcs et du célèbre Terremonte dans les bars), une visite de Valparaiso
pendant un weekend entier ! Au programme, balade dans « los cerros », visite de la maison
de Pablo Neruda, dégustation de fruits de mers, sortie en bars et boîtes…
Le weekend phare fut d’aller dans le sud dans une grande maison louée spécialement pour
nous, on était 40 étrangers dans un beau parc national !!! Nous avons donc pu allier
découverte du parc avec connaissance des autres étudiants. Pendant la journée, toutes les
langues se mélangeaient : espagnol, anglais, français, allemand, portugais mais tout le monde
se parlait. Ce fut pour moi un de mes meilleurs moment de mon séjour puisque j’ai pu
apprendre à connaitre des personnes venant d’horizons très diverses. De plus, j’ai appris des
différences qui existent entre tous les systèmes de santé à travers le monde : chaque pays a
son système bien à lui. Cela montre que la médecine peut s’apprendre de beaucoup de
manières différentes.
La local team avait également prévu un weekend de « wine tasting » et un weekend de ski !
Je prends ce moment pour remercier encore une fois l’équipe qui m’a permise de rencontrer
toutes ces personnes et qui était présente si jamais on avait un problème.
La famille qui m’a accueilli est devenue comme une famille pour moi, la maman m’appelait
même « ma fille » à la fin. Je pouvais me servir dans le frigo et je mangeais avec eux le midi
et le soir donc j’ai pu beaucoup partager avec eux. Ils répondaient à toutes mes questions, me
proposait d’aller avec eux s’ils allaient quelque part (donc la messe qui commémorait la mort
de la grandmère maternelle). L’étudiant en médecine était toujours d’accord pour
m’accompagner en ville ou sortir !
A Grenoble, j’étais LEO donc je m’occupais de trouver les services qui acceptaient les
incomings, gérer les logements et les dossiers des outgoings.
Malheureusement, lors du séjour de l’incoming que j’accueillais, j’étais partie en vacances
donc je n’ai pu le voir que les derniers jours d’aout. A ce moment la je lui ai présenté mes
amis, on a fait des choses ensembles etc
Je regrette à postériori de n’avoir pas pu accueillir et passer le mois avec mon incoming
parcequ’il l’a passé seul…
Mon choix du Chili s’est fait sur un coup de tête : je voulais partir en Amérique du Sud
puisque je parle bien Espagnol et que j’avais bien aimé l’Equateur lors d’un précédent
voyage. Je ne savais pas quel pays choisir et ce fut la forme du Chili, longue, qui m’a plu et
donc j’ai décidé de partir au Chili sans rien connaître sur ce pays. J’ai été surprise d’apprendre
que c’est le pays le plus riche et développé d’Amérique du Sud, avec moins de différences
que ce que j’avais pensé. Ceci signifie également que la vie est plus cher que dans les autres
pays, car ce sont presque les mêmes prix qu’en France pour certaines choses.
Cependant, circuler au Chili, même pour une femme seule est très simple et agréable. Je ne
me suis jamais sentis en insécurité, au contraire, les gens sont très avenants et t’aident dès que
tu as besoin (sans demander d’argent en retour bien sur..).
Conclusion
Ce mois de stage en médecine générale m’a permis d’entrevoir le travail qu’effectue
un médecin généraliste au sein d’une communauté. Son travail est fondamental pour prévenir
et traiter les pathologies chroniques ( et aigües bien sur) qui sont en recrudescence.
Le médecin général doit donc savoir diagnostiquer toutes sortes de maladies dans des
domaines les plus variées et savoir quand demander l’avis d’un spécialiste.
L’organisation de cette clinique m’a beaucoup plu, chaque personnel médical faisant une
partie d’une plus grande image qui est la prise en charge du patient. Ainsi, toute l’équipe est
impliquée pour le bienêtre du patient.
Je remercie chaleureusement IFMSA, l’équipe accueillante avec les LEO et l’équipe médicale
de la clinique d’Olmué qui m’ont permis de faire ce stage inoubliable et enrichissant. En effet,
je pense que l’accueil donné par l’équipe était au dessus de ce qui était attendue mais a rendu
mon séjour d’autant plus agréable.
Je vous conseille de partir avec IFMSA, ce fut pour moi une expérience unique dont je doute
avoir la possibilité de refaire dans ma vie, sur le plan humain et médical.
Le Chili est une destination à envisager si veut un pays d’Amérique du Sud qui possède des
techniques pointues et à jour en médecine. Voyager à partir du Chili pour aller dans les pays
alentours est également à la portée de tous et méritent d’être vus.
Cordialement,
Lucie JOMAIN
Externe en 4ème année à Grenoble
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