Auguste Comte, Discours sur l’Esprit positif (1842) 5
populaire lui-même issu du « Cours annuel d'Astronomie populaire » professé gratuitement à
la Mairie du troisième arrondissement.
A. Comte attachait la plus grande importance à son enseignement gratuit d'astronomie
populaire. Il le poursuivit pendant dix-sept années consécutives (1831-1847-8). Membre
fondateur en 1830 de l'Association Polytechnique, société d'instruction populaire, il en fut
vice-président jusqu'en 1834. Le 14 décembre 1830 il écrivait au Président de l'Association
polytechnique pour lui proposer un cours élémentaire d'astronomie générale destiné aux
ouvriers de Paris. Lorsqu'il avait été question, pour la première fois, à l'Association
d'organiser des cours scientifiques pour les ouvriers de Paris, Comte avait regretté que ses
occupations lui interdissent toute 1 coopération immédiate. Lorsqu'il apprit que son Cours de
Philosophie positive à l'Athénée lui laisserait une soirée disponible, il s'empressa de l'offrir à
l'Association. Il était persuadé que l'aptitude des ouvriers à recevoir un tel enseignement était
supérieure à celle des « gens du monde ». Bien qu'institué dans le cadre des cours de
l'Association polytechnique, le cours d'astronomie populaire fut présenté par Comte comme
indépendant de toute association et ne relevant que de son initiative propre. Cette précaution
lui permit de ne pas être touché définitivement en 1832 par la mesure gouvernementale
suspendant tous les cours destinés aux ouvriers.
L'initiative de Comte se rattache à une conviction doctrinale très profonde et très ancien-
ne. Il estimait que les es spéculatifs doivent « faciliter déjà la systématisation ultérieure de
l'éducation universelle en consacrant une partie de leur activité continue à une sage
propagation de l'instruction positive, soit scientifique, soit esthétique, chez les classes
maintenant dépourvues de toute culture mentale ». (Cours VI, pages 600-601). Une longue
note du Cours Philosophie positive (Cours VI, page 601) mentionne expressément le cours
populaire d'astronomie. Comte précise à ce propos : « J'ai voulu, par cet exemple, donner
autant qu'il est en moi le signal anticipé de cette combinaison directe entre la puissance
spéculative et la force populaire, qui doit ultérieurement déterminer la réorganisation
politique, quand la raison publique sera convenablement préparée ».
Depuis son origine le cours d'astronomie avait été « précédé et dominé » par un
préambule philosophique qui en signalait la portée mentale et la destination sociale » (Lettre
à Vieillard, 13 janvier 1849, Corresp. Inéd. pp. 167-168). Il se limitait d'abord à une ou deux
séances. En 1842, Comte résolut de rédiger son cours d'astronomie pour satisfaire à une
demande qui lui était faite depuis dix ans (lettre à Valat, 27 octobre 1842, p. 315; lettre à S.
Mill, 5 novembre 1843, p. 94). Il comptait se mettre au travail en mars 1843. La publication
du « préambule », sous le titre de Discours sur l'esprit positif en un opuscule distinct du cours
a pour origine le désir de riposter à une attaque de la presse religieuse qui en 1842 avait
demandé la destitution de Comte de ses fonctions à l'École Polytechnique, coupable d'avoir
soutenu dans son « préambule » au cours d'astronomie, « la nécessité et la possibilité d'établir
la morale sur des bases réelles, indépendantes de toute croyance théologique... L'an dernier,
[il s'agit en réalité du dernier cours, la séance incriminée a eu lieu le 16-1-42] le ministre a
été forcé par eux d'envoyer surveiller mon cours... » (Lettre à Mme Comte, novembre 1842.
Lettres et Fragm. de Lettres, p. 160). En décembre 1942, Comte annonce à Stuart Mill, après
lui avoir relaté le même incident: « Mon discours d'ouverture traitera donc, en grande partie,