DISCOURS
SUR
L'ESPRIT POSITIF
suivi de cinq documents annexes
PAR
Auguste COMTE (1842)
Un document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay,
professeur de sociologie
Courriel: jmt_sociolog[email protected]
Site web: http://pages.infinit.net/sociojmt
Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales"
Site web: http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html
Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque
Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi
Site web: http://bibliotheque.uqac.uquebec.ca/index.htm
Auguste Comte, Discours sur l’Esprit positif (1842) 2
TABLE DES MATIÈRES
Présentation
Schéma : la présentation de l’ordre ‘’encyclopédique’’ en 1830
Discours sur l'esprit positif
I Première partie
II Deuxième partie
III Troisième partie
Documents annexes
I Lettre de Comte proposant un cours d'Astronomie à l'intention des ouvriers de Paris
II Annonce de COMTE sur l'association libre pour l'instruction positive du Peuple dans
tout l'Occident européen
III Le fondateur de la Société Positiviste à quiconque désire s'y incorporer
IV Témoignage de Fabien Magnin, ouvrier menuisier, auditeur du Discours Préliminaire
sur l'esprit Positif
V Extrait d'une lettre de COMTE à Clotilde de Vaux sur l'éducation
Auguste Comte, Discours sur l’Esprit positif (1842) 3
LA GRANDE INITIATION
DU PROLÉTARIAT
.
Auguste Comte, Discours sur l’Esprit positif (1842) 4
La pire épreuve que puisse subir un texte digne de nourrir la réflexion ou d'enrichir la
sensibilité est d'être offert en proie habituelle aux générations scolaires et de figurer au triste
palmarès des programmes universitaires. Après quelques années de ce régime fatal il pourra
poursuivre, méconnaissable et exsangue, une carrière commerciale brillante sans le moindre
danger pour l'ordre social et le confort intellectuel.
Une semblable mésaventure a pesé sur le présent texte de COMTE. Des années de
service public ont énervé sa vertu au point de lui valoir l'épithète douteuse de texte « facile ».
D'aucuns, à l'attention plus malveillante, n'hésitent pas à ajouter « ennuyeux » et « périmé ».
On reconnaît le langage des fossoyeurs.
Les voies de la réanimation sont multiples. L'une d'elles - et sans doute la plus efficace -
consiste à rendre un texte à ceux pour qui il avait été écrit. COMTE ne visait à rien de moins
que d'atteindre « la masse des intelligences » et singulièrement, dans le cas présent, les
«prolétaires », ceux qui ne tirent leurs ressources que de leur travail. C'est à peine forcer la
réalité que de voir dans la présente collection un véhicule très favorable à la réanimation d'un
texte par voie de restitution à ceux auxquels il avait primitivement été destiné. Encore faut-il
que la tentative de restitution s'accompagne d'un minimum de restauration. Commençons par
celle du titre.
L'usage désigne le présent texte sous le nom de Discours sur l'Esprit positif. Cette
appellation parfaitement légitime se réfère à l'opuscule in-8 de 108 pages paru en 1844 chez
Carilian-Goeroy et Victor Dalmont à Paris. Le nom d'Auguste Comte était suivi du titre de :
« Auteur du Système de Philosophie Positive ». La couverture portait l'avertissement suivant:
« Ce discours vient d'être prononcé à l'ouverture du Cours annuel d'Astronomie populaire
que l'auteur professe gratuitement, depuis 1831, à la Mairie du troisième arrondissement de
Paris : il va former le préambule philosophique de l'ouvrage didactique résulté de cet ensei-
gnement oral. »
Lorsque la même année 1844, parut chez le même éditeur le Traité Philosophique
d'Astronomie Populaire, les 108 premières pages étaient occupées par le Discours présenté
sous le titre de DISCOURS PRÉLIMINAIRES sur l'esprit positif. La présentation typogra-
phique, la virgule après « PRÉLIMINAIRE » soulignaient l'importance que Comte attachait
au caractère introductif de son « Discours ». En fait, il est impossible de comprendre le sens
profond et l'intention du Discours sans l'associer au Traité philosophique d'astronomie
Auguste Comte, Discours sur l’Esprit positif (1842) 5
populaire lui-même issu du « Cours annuel d'Astronomie populaire » professé gratuitement à
la Mairie du troisième arrondissement.
A. Comte attachait la plus grande importance à son enseignement gratuit d'astronomie
populaire. Il le poursuivit pendant dix-sept années consécutives (1831-1847-8). Membre
fondateur en 1830 de l'Association Polytechnique, société d'instruction populaire, il en fut
vice-président jusqu'en 1834. Le 14 décembre 1830 il écrivait au Président de l'Association
polytechnique pour lui proposer un cours élémentaire d'astronomie générale destiné aux
ouvriers de Paris. Lorsqu'il avait été question, pour la première fois, à l'Association
d'organiser des cours scientifiques pour les ouvriers de Paris, Comte avait regretté que ses
occupations lui interdissent toute 1 coopération immédiate. Lorsqu'il apprit que son Cours de
Philosophie positive à l'Athénée lui laisserait une soirée disponible, il s'empressa de l'offrir à
l'Association. Il était persuadé que l'aptitude des ouvriers à recevoir un tel enseignement était
supérieure à celle des « gens du monde ». Bien qu'institué dans le cadre des cours de
l'Association polytechnique, le cours d'astronomie populaire fut présenté par Comte comme
indépendant de toute association et ne relevant que de son initiative propre. Cette précaution
lui permit de ne pas être touché définitivement en 1832 par la mesure gouvernementale
suspendant tous les cours destinés aux ouvriers.
L'initiative de Comte se rattache à une conviction doctrinale très profonde et très ancien-
ne. Il estimait que les es spéculatifs doivent « faciliter déjà la systématisation ultérieure de
l'éducation universelle en consacrant une partie de leur activité continue à une sage
propagation de l'instruction positive, soit scientifique, soit esthétique, chez les classes
maintenant dépourvues de toute culture mentale ». (Cours VI, pages 600-601). Une longue
note du Cours Philosophie positive (Cours VI, page 601) mentionne expressément le cours
populaire d'astronomie. Comte précise à ce propos : « J'ai voulu, par cet exemple, donner
autant qu'il est en moi le signal anticipé de cette combinaison directe entre la puissance
spéculative et la force populaire, qui doit ultérieurement déterminer la réorganisation
politique, quand la raison publique sera convenablement préparée ».
Depuis son origine le cours d'astronomie avait été « précédé et dominé » par un
préambule philosophique qui en signalait la portée mentale et la destination sociale » (Lettre
à Vieillard, 13 janvier 1849, Corresp. Inéd. pp. 167-168). Il se limitait d'abord à une ou deux
séances. En 1842, Comte résolut de rédiger son cours d'astronomie pour satisfaire à une
demande qui lui était faite depuis dix ans (lettre à Valat, 27 octobre 1842, p. 315; lettre à S.
Mill, 5 novembre 1843, p. 94). Il comptait se mettre au travail en mars 1843. La publication
du « préambule », sous le titre de Discours sur l'esprit positif en un opuscule distinct du cours
a pour origine le désir de riposter à une attaque de la presse religieuse qui en 1842 avait
demandé la destitution de Comte de ses fonctions à l'École Polytechnique, coupable d'avoir
soutenu dans son « préambule » au cours d'astronomie, « la nécessité et la possibilité d'établir
la morale sur des bases réelles, indépendantes de toute croyance théologique... L'an dernier,
[il s'agit en réalité du dernier cours, la séance incriminée a eu lieu le 16-1-42] le ministre a
été forcé par eux d'envoyer surveiller mon cours... » (Lettre à Mme Comte, novembre 1842.
Lettres et Fragm. de Lettres, p. 160). En décembre 1942, Comte annonce à Stuart Mill, après
lui avoir relaté le même incident: « Mon discours d'ouverture traitera donc, en grande partie,
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