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CONCLUSIONS
PHILOSOPHIQUES
I ] DEFINITIONS
A ANALYSE DES NOTIONS HISTORIQUES
1) La philosophie est une science
La philosophie est donc une sagesse humaine qui consiste à connaître. Cette connaissance doit être
parfaite, c’est-à-dire qu’elle doit connaître avec certitude ; et la meilleure façon de connaître une chose,
c’est de la connaître par ses causes.
La philosophie est loin de la simple opinion, ou même de la conviction, car connaître par les causes, est
une connaissance scientifique.
Comme toute science, la philosophie ne répond pas à toutes les questions concernant son domaine. Il
peut rester des zones d’ombres, des solutions probables. Bien que ce ne soit là que des exceptions et non
un cas général.
2) Son moyen d’investigation
Quel moyen utilise la philosophie pour ce travail ? La philosophie se sert de la seule raison, c’est-à-dire
de la lumière naturelle de l’intelligence humaine. Ce que fait d’ailleurs toutes sciences (à contrario de la
théologie.)
Certes, chaque science a sa lumière propre, et chaque lumière répond à des principes formels propres
qui permettent d’atteindre l’objet voulu (ainsi quelqu’un d’intelligent peut être très doué dans une
science, et ne rien y entendre dans une autre.)
3) L’objet de la philosophie
On serait tenté de dire que l’objet de la philosophie est toute chose, puisque jusqu’ici, nous avons vu
qu’elle avait abordé des questions aussi diverses que le bien, le mal, le mouvement, le monde, les êtres
vivants et non vivants, les hommes, Dieu, etc…
La philosophie, est-elle une science universelle ? Absorbe-t-elle toutes les autres sciences ? Serait-elle
la science unique dont dépendent toutes les autres ? Non ! car la philosophie a sa nature propre et son
objet propre qui la distinguent des autres sciences. Et cependant, comment la philosophie peut-elle être
une chose à part, si elle s’occupe de toutes choses ?
Parce que son point de vue est à part : en effet, si elle s’occupe de l’homme, ce n’est pas pour savoir
combien il a de vertèbres (affaire qui regarde l’anatomie et la médecine), mais plutôt s’il a une
intelligence qui le distingue des autres animaux (par exemple.) Nous voyons donc d’après cet exemple,
que la philosophie pose une question plus haute, moins particulière. Ainsi, la philosophie ne travaille
donc pas sur ce qui est le plus immédiat à nos sens, mais bien au contraire, elle cherche les explications
les plus élevées au-delà desquelles on ne peut pas remonter : le « pourquoi » ultime !
Ce que l’on appelle en langage philosophique les causes premières, les principes suprêmes ou encore,
les raisons les plus élevées. Lesquels s’opposent aux causes secondes, aux raisons prochaines.
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B CONSEQUENCES
1) Conclusion
Ainsi parmi toutes les connaissances humaines, la philosophie est la seule qui a pour objet : tout ce qui est.
Elle le connaît par la lumière naturelle de la raison, et ne s’intéresse donc qu’à l’ordre naturel qu’elle
considère sous les causes premières. D’où que la philosophie est plus qu’une simple connaissance, mais une
véritable sagesse.
Dans un petit nombre de principes elle tient la nature entière.
D’où la CONCLUSION 1 :
2) Problème consécutif
De cette conclusion, Descartes en a tiré de mauvais principes, puisqu’il pensait que la philosophie
constituait la seule science unique, dont toutes les autres ne seraient que des parties (Il faut dire à sa
décharge que les anciens appelaient philosophie l’ensemble des grandes disciplines scientifiques : physique,
mathématiques, logique éthique, etc…)
Au sens contraire, Auguste Comte et les positivistes, affirmaient que la philosophie était absorbée dans
toutes les autres sciences.
Quel est le fond du problème ? Ni les uns, ni les autres n’ont pas distingué l’objet matériel et l’objet formel
de la philosophie. Ce que fit pourtant Aristote et S. Thomas.
ARISTOTE
STA
La philosophie et les autres sciences ont
* Même objet matériel : tout ce qui connaissable
* Objet formel différent : causes premières / secondes
DESCARTES A. COMTE
La philosophie absorbe les sciences Les sciences absorbent la philosophie
La philosophie est toute science Il n’y a pas de philosophie
3 ) Texte d’illustration
« Ce mot de philosophie signifie l'étude de la sagesse, par la sagesse on n'entend pas seulement
la prudence dans les affaires, mais une parfaite connaissance de toutes les choses que l'homme peut
savoir, tant pour la conduite de sa vie que pour la conservation de sa santé et l'invention de tous les arts.
Afin que cette connaissance soit telle, il est nécessaire qu'elle soit déduite des premières causes, en sorte
que pour étudier à l'acquérir, ce qui se nomme proprement philosopher, il faut commencer par la
recherche de ces premières causes, c'est-à-dire des principes.
La philosophie est la connaissance scientifique qui par la lumière naturelle de la raison
considère les causes premières de toutes choses.
3
Toute la philosophie est comme un arbre, dont les racines sont la métaphysique, le tronc est la
physique, et les branches qui sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences, qui se réduisent à trois
principales, à savoir la médecine, la mécanique et la morale ; j'entends la plus haute et la plus parfaite
morale, qui présupposant une entière connaissance des autres sciences, est le dernier degré de la
sagesse. »
Descartes, Œuvres philosophiques.
II ] LA PHILOSOPHIE ET LES SCIENCES
Comment préciser la relation de la philosophie avec les autres sciences ?
A UNE CAPACITE A JUGER
Une science en tant que tel est maîtresse en son domaine. Elle est autonome, c’est-à-dire qu’elle est
capable, qu’elle a les moyens d’atteindre la vérité de ce qu’elle étudie.
Est-ce à dire que toute science est infaillible ? Bien sûr que non ! Un savant peut évidemment se
tromper dans son propre domaine. En ce cas, la science en question pourra juger et rectifier cette erreur. Mais
une science plus élevée est tout aussi fondée à juger et rectifier cette erreur si cette erreur vient heurter
quelqu’une de ses vérités.
Or, la philosophie est la science naturelle la plus élevée ; donc elle peut juger toutes les autres sciences
humaines si celles-ci émettent des propositions scientifiques incompatibles avec ses vérités philosophiques.
Evidemment la philosophie est exercée par des philosophes qui eux, sont faillibles.
B UNE CAPACITE A DIRIGER
1) Les raisons de cette direction
Cette possibilité découle logiquement de ce qui précède. Une science plus élevée peut diriger
une moins élevée. Ainsi les principes philosophiques tiennent sous leur dépendance les principes de
toutes les sciences humaines ; et ce, puisque les principes de la philosophie sont les premiers de toute la
connaissance humaine. La philosophie dirige donc les autres sciences.
Il ne s’agit pas d’une dépendance directe : c’est-à-dire qu’en fait les principes de ces sciences
humaines doivent supposer les principes philosophiques. Ils peuvent être connus sans qu’ils soient pour
autant expliqués par la science en question, ou connus de façon explicite. Mais si ces principes sont
vrais, c’est que les principes philosophiques supérieurs inclus sont vrais.
Exemple : si un mathématicien disait que A est différent de B, que B serait égal à C, mais que A serait
égal à C, il nierait le principe de non-contradiction.
2) Les façons de diriger
Que veut dire diriger ? Diriger une chose, c’est lui assigner son but ou sa fin. On comprend
bien que les sciences ne soient pas dirigées par la philosophie vers leur fin propre, puisqu’elles n’ont
pas besoin de la philosophie pour tendre vers leur objet (l’arithmétique n’a pas besoin de la philosophie
pour être dirigée vers les vérités du nombre.) Mais si une science dérive de son objet, de sa fin propre,
en empiétant sur une autre science, c’est la philosophie qui préviendra de ce désordre.
On peut considérer une autre façon de diriger. Dans le sens où la philosophie, puisqu’elle est
s’attache au bien ultime (connaissance la plus haute), peut être regardée comme la fin commune et
transcendante vers laquelle les autres sciences convergent. Toutes les sciences sont ainsi ordonnées à la
sagesse.
Picasso disait : « Je ne cherche pas je trouve. » Phrase qui
pourrait fort bien convenir à Einstein. Le chercheur scientifique
trouve en effet, dans l’expérimentation, la vérité. Et ce, avant
l’étincelle du génie. Edison voyait dans le génie scientifique de la
découverte : 1% d’inspiration contre 99% de transpiration…
L’expérience de laboratoire, n’est-elle pas d’abord imaginé, conçu et
pensé ?
« La philosophie a une tendance à la solitude, à l'isolement systématique, à l'introspec-
tion passionnée. La philosophie est impopulaire aux yeux des profanes, car toute son activité
mystérieuse et intime semble dénuée de sens pratique ; elle passe pour enseigner la magie, et
ses incantations ont un air solennel, parce qu'on ne les comprend pas.
Mais les philosophes ne sortent pas de terre, tels des champignons ; ils sont le produit de
leur temps, de leur peuple, qui leur inspire les idées philosophiques. L’esprit qui construit les
systèmes philosophiques dans le cerveau des philosophes est identique à celui qui construit les
lignes de chemins de fer par les bras des ouvriers. » Karl Marx,
Œuvres philosophiques
.
Questions :
1 Que pensez-vous de la première phrase de Marx ?
2 L’auteur explique que la philosophie est impopulaire. Que répondriez-vous aux accusa-
tions citées par Marx (2ème phrase.)
3 Marx réfute lui aussi ces accusations. Mais quelle raison donne-t-il ? Etes-vous d’accord ?
4 Expliquez le sens de la dernière phrase. Qu’en pensez-vous ?
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3) Conclusion
Il n’a pas été dit qu’il fallait être philosophe, pour qu’un savant avance dans sa science. Il n’a pas, non plus à
demander conseil aux philosophes. Mais sans la philosophie, on encourt deux dangers :
- Mal saisir la portée des découvertes scientifiques dans l’ensemble des connaissances
humaines.
- Ignorer les principes de l’expérience elle-même, et les fondements réels des sciences
particulières.
Ces dangers peuvent paraître dérisoires, mais en réalité, ce manque entraîne fatalement pour
l’intelligence : désordre et confusion générale (à laquelle nous assistons aujourd’hui.)
4) Problèmes consécutifs
Descartes, puisqu’il avait déjà absorbé toutes les sciences dans la philosophie, considérait la Science
comme étant une. Ainsi, pour Descartes les principes de toutes les sciences dépendent directement des
principes de la philosophie.
A l’opposé, ceux qui refusent toute connaissance scientifique à la philosophie (la considérant comme
une simple opinion), considèrent que les principes des sciences sont absolument indépendants des principes
de la philosophie. Les sciences ne forment donc pas un édifice ordonné.
ARISTOTE
STA
Les principes des sciences
particulières sont subordonnés
indirectement à ceux de la philosophie.
La philosophie dirige les autres sciences.
DESCARTES NEGATEURS DE
LA PHILOSOPHIE
Les principes des sc. part. sont Les principes des sc. part. ne sont subord.
directement subordonnés à ceux à aucune science plus élevée, car elle n’exis-
de la philosophie. te pas. Aucune direction.
La philosophie dirige de façon
Absolue les autres sciences.
C UNE CAPACITE A DEFENDRE
Les sciences humaines développent leurs démonstrations à partir de principes qu’elles ne défendent pas, ni
n’expliquent. Il revient donc à une science supérieure de défendre ces principes. Tel est l’exemple de la science
de l’architecte qui défend celle du maçon.
Or, toutes les sciences développent leurs démonstrations à partir de principes qu’elles ne défendent pas : la
physique ne se demande pas ce qu’est la matière, les mathématiques le nombre. Toutes ? Non ! La science qui se
trouve au sommet est la plus haute et ne peut donc être défendue que par elle-même, cependant elle défend
toutes les autres sciences.
Ainsi, si quelqu’un venait à nier que 2 quantités égales à une 3ème sont égales entre elles, ou si quelqu’un venait à
nier que l’espace a 3 dimensions, ce ne serait ni à la physique, ni aux mathématiques de lui répondre, car ses
sciences supposent ces principes. C’est donc à la science supérieure d’en traiter, ici en l’occurrence : c’est la
philosophie !
D UNE SCIENCE LIBRE
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Nous l’avons vu, la philosophie à titre de sagesse et de science suprême dirige et défend les autres sciences.
A ce titre, elle ne peut pas être sous la dépendance des sciences qu’elle commande. Cependant, n’est-il pas
apparent que la philosophie se serve des connaissances scientifiques ?
1) Explication
La philosophie s’appuie sur les faits, sur les données de l’expérience, aussi se sert-elle des propositions
des sciences comme on se sert d’instruments. Ainsi, la philosophie ne dépend de la science que comme un
supérieur dépend de son inférieur quand celui-ci veut s’en servir.
La philosophie dépend de façon absolue de l’évidence sensible, car de cette évidence sensible, elle tient
des propositions fondamentales qui elles-mêmes servent des prémisses à ses démonstrations.
A l’égard des sciences par contre, sa dépendance n’est que relative et contingente.
2) La nécessité de l’expérience sensible
La philosophie ne peut absolument pas se passer de l’expérience sensible, car elle ne peut pas se passer
des propositions qu’elle en a tiré. Ex : L’expérience sensible a permis de tenir comme proposition : « il y a
du mouvement dans le monde. » Prémisse ayant permis de diviser l’être en acte et en puissance, et qu’il y a
un premier moteur.
La philosophie a donc besoin de propositions vraies, pour que ces conclusions soient certaines.
3) La nécessité de la science
Cette nécessité de l’expérience sensible, n’entraîne pas la nécessité de la science pour la philosophie.
Certes, les travaux scientifiques peuvent enrichir le domaine d’expérience de la philosophie, mais elle n’est
pas tenu d’en user, et d’ailleurs ne doit pas le faire pour établir des conclusions certaines (sans quoi sa
dépendance serait alors totale.) Elle peut par contre s’en servir d’illustration.
Une philosophie sainement construite peut donc fort bien se passer du système des propositions
scientifiques (dont elle use en pratique.) Aussi, si un jour ce système de propositions scientifiques est trouvé
faux, la vérité de cette philosophie n’en sera pas atteinte pour autant (ce qui arrive chez Aristote ou STA.)
4) Conséquence
Ainsi, il faut bien comprendre que le donné expérimental sur lequel se fonde la philosophie est
essentiel. Comment est-il atteint ? Pas par la science ; sans quoi, elle dépendrait de cette science. Ce donné
est fourni par un instrument antérieur à l’observation scientifique : l’évidence sensible !
L’évidence sensible est infiniment plus sûre que les propositions scientifiques, car elle est plus
fondamentale, elle antérieure… elle est première. En plus, elle est à la portée de tous. Ce donné
expérimental fourni par l’évidence sensible, constitue des vérités tellement simples, qu’elles ont une valeur
générale. Parce qu’immédiates et évidentes, leurs certitudes dépasse celles des conclusions scientifiques.
5) Conclusion
La philosophie est donc distincte des sciences particulières, mais elle n’est ni séparée, ni isolée d’elles.
Il est donc important qu’un philosophe s’informe de l’état des sciences de son temps tout en veillant à ce
que la vérité philosophique demeure libre : il n’a pas à user de celles-là pour établir ses propres certitudes .
Il s’en servira donc pour illustrer ses principes, confirmer ses conclusions, interpréter les travaux
scientifiques et réfuter les erreurs qui pourraient en surgir.
Il est donc normal de constater que les grands philosophes avaient versé dans les sciences de leur temps.
Quelques-uns uns même, ont été de grands savants (Aristote, S. Albert le grand, Leibniz), et de surcroît, ont
été pour certains, auteurs de découvertes scientifiques très importantes (Pythagore, Descartes, Leibniz.)
CONCLUSION 2
La philosophie étant la plus haute des connaissances humaines, est une sagesse.
Les autres sciences lui sont soumises puisqu’elle les juge, les dirige et défend leurs
principes.
Elle-même est libre à leur égard, et ne dépend d’elles que comme d’instruments dont
elle se sert.
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