parole abondante, il se laissait tout de suite aller à son tempérament d’orateur de réunion publique,
utilisant les gros effets faciles ».
En mai 1914, toujours dans cette deuxième circonscription de l’Allier, la profession de foi de
Brizon ne permet aucune ambiguïté racoleuse : « Mon programme ? Et d’abord, à bas les trois ans ! A
bas le militarisme qui nous écrase ! A bas le Maroc ! A bas les conquêtes coloniales par le fer, le feu,
par le sang ». Ses électeurs nullement effrayés par son radicalisme lui renouvellent leur confiance.
La guerre de 14/18 révèle en Brizon un des premiers et très rares opposants à la politique
d’Union sacrée. Retenons quelques dates caractéristiques :
- Début novembre 1915 il adhère au Comité pour la reprise des relations internationales, au
côté des pèlerins de Zimmerwald : Bourderon et Merrheim (voir Aide-mémoire n°30)
- Le 28 janvier 1916 il interpelle le gouvernement sur les mesures nécessaires pour conduire la
guerre à sa fin « la plus rapide et la meilleure possible »
- Le 21 novembre 1916 il dénonce à la Chambre les responsabilités de la Russie dans le
déclenchement du conflit et pousse l’incongruité, en ce lieu et à cette heure, jusqu’à s’écrier : « A bas
la guerre ! ». Exclamation vaine sans doute mais notable pour son caractère unique.
- Le 11 décembre 1916, l’exclusion temporaire de l’Assemblée stigmatise sa prétention de
chiffrer publiquement les pertes humaines et matérielles de la guerre.
- Le 25 octobre 1917 il demande l’étude immédiate de toute proposition de paix.
Son activité parlementaire se double d’un militantisme actif. Du 24 au 30 avril 1916 il participe
avec Alexandre Blanc et Raffin-Dugens (également enseignants et également parlementaires) à la
seconde conférence socialiste internationale de Kienthal (Suisse). Sans souscrire à la condamnation
du principe de défense nationale, préconisée par Lénine, Brizon s’attache à défendre l’idée de la paix
immédiate assurant liberté et indépendance des peuples. De retour en France Brizon, épaulé par ses
deux compagnons de Kienthal va, au cours de la séance houleuse du 24 juin 1916, refuser le vote
des crédits de guerre, saluant à l’occasion l’action parallèle des minoritaires allemands groupés autour
de Liebknecht. Au président qui constate que dans la Chambre française il n’y a que trois socialistes
pour approuver de pareilles paroles, Brizon rétorque : « Il y a beaucoup de soldats qui pensent
comme nous ». Il participe aussi à la rédaction du « Populaire », organe des minoritaires, avant de
pouvoir créer son propre hebdomadaire, « la Vague » dont le 1er numéro paraît le 5 janvier 1918. Il
parvient, avec l’aide de Marcelle Capy qu’il va épouser, à maintenir le combat socialiste et féministe
de sa feuille jusqu’en 1923.
En désaccord avec sa fédération de l’Allier, en majorité hostile à l’adhésion à la Troisième
Internationale, Brizon est battu aux législatives de 1919 et n’est pas mandaté pour participer au
congrès de Tours de 1920. Il adhère au Parti Communiste et en est exclus en 1922 peu de temps
avant sa mort.
Cf. « Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier »
Article de J. Raymond
« Histoire de l’arrière » de Ch. Fraval
Jideher éditeur – 1930