Un exemple en CM : dire, raconter, réciter. http://www.charmeux.fr/travailvocabul.html Corpus de départ (il peut être proposé par l’enseignant, ou avoir fait l’objet d’une recherche préalable des enfants auprès de leur famille, ou dans leurs lectures). Il peut se présenter sous la forme de la liste suivante : 1 : Pierre nous a raconté ses vacances. 2 : Pierre nous a dit qu’il partait en vacances. 3 : Pierre dit la vérité. 4 : Pierre a récité la liste des conjonctions de subordination 5 : Nous avons écouté un comédien célèbre dire des Fables de La Fontaine 6 : Je n’aime pas qu’on me dise des secrets 7 : Il a fallu que je raconte toute mon aventure 8 : On ne te demande pas de raconter ta vie, mais de nous dire pourquoi tu es en retard 9 : Récite-moi tes leçons 10 : Pierre dit très mal ce poème : on croirait qu’il récite une poésie en classe. Consigne de travail sur ce corpus : Consigne de travail , proposée aux enfants réunis en petits groupes de trois élèves : À partir du tableau suivant, vous essayez de voir si les deux autres verbes sont possibles pour chaque phrase. S’ils sont possibles, vous mettez une croix dans la colonne, sinon, vous mettez un petit trait ; si ce n’est pas clair, vous mettez un point d’interrogation, et on en discutera en grand groupe. (On n’a pas inscrit les sujets (ou les actants) dans le tableau, car, ils serviront à la discussion ; et l’enseignant donne, avant le travail, un ex) 1 2 3 4 dire — + + ? raconter + — ? — réciter — — — + 5 6 7 8 9 10 11 + ? — + — + ? ? + + ? — — — — — — — + ? + ses vacances qu’il part en vacances la vérité la liste des conjonctions de subordination des secrets mon aventure ta vie pourquoi tu es en retard tes leçons un poème des poésies en classe Le travail en grand groupe : mie en commun des trouvailles des élèves. Il s’agit ici, à partir de ce que les petits groupes ont présenté, de reprendre ensemble les points d’interrogation ou de divergence entre les rapports de groupes. Pour le tableau qui est présenté ici, les points de discussion se trouvent sur les questions suivantes : Peut-on dire des poésies en classe ? réciter un poème ? raconter pourquoi on est en retard ? dire son aventure ? raconter des secrets ? dire la liste des conjonctions ? raconter la vérité ? Pour répondre à ces questions, il faut considérer les données de la situation de communication auxquelles ces formules correspondent et les effets de sens provoqués par les mots environnants. Ainsi le terme de poésies, au pluriel ou sans majuscule, au singulier, — surtout s’il est accompagné de l’expression “en classe” — garde une valeur scolaire, qui va mal avec le verbe “dire”, généralement utilisé pour les professionnels, ou pour les situations véritablement poétiques . C’est aussi la raison pour laquelle le verbe réciter, sonne mal accompagné du mot “poème”. À l’école ; on devrait toujours dire des poèmes, et jamais, réciter des poésies (ou, pire, des récitations !). Mais pour la liste des conjonctions, seul le verbe réciter convient. On se rend compte aussi que ce verbe implique un savoir par cœur, dégorgé un peu tel quel, par opposition à dire, qui peut convenir aussi bien à une lecture à haute voix. Quant à l’opposition dire / raconter, les exemples font bien apparaître un sème de durée pour raconter. Pour justifier le verbe raconter, il faut modifier la situation de communication en y intégrant cette notion, soutenue, au besoin, de formules comme “en détail” ; ou “toute” : Il m’a raconté toute la vérité en détail. Il m’a raconté ses secrets dans tous leurs détails. Mais si l’on se contente de dire son aventure, cela implique qu’on reste dans les grandes lignes. L'élaboration de la grille sémique et rédaction des constats. On commence par rechercher le ou les sèmes communs aux trois verbes, puis, ceux que les analyses ont fait apparaître, et on remplit ensemble les colonnes du tableau : Grille sémique de dire, raconter, réciter Les sèmes dire raconter réciter Communiquer au moyen du langage + + + Oral + + + Ecrit + + — hors de l’école + — — à l’école + + + pour informer seulement + — — pour intéresser — + — pour montrer qu’on a bien appris par cœur pour partager un plaisir poétique ou littéraire Avec tous les détails + — + + — — — + — Précisons bien qu'il n'est nullement question de trouver une vérité quelconque sur les sèmes qui composent la signification des mots étudiés. Il ne s'agit pas de rédiger une thèse de linguistique ! L’important est de manipuler, observer, discuter et formuler... Pas du tout de "trouver". Donc cette activité ne doit déboucher sur aucune évaluation, et donc sur aucune "note" scolaire. On aura auparavant noté, dans la grille ou ailleurs, le fonctionnement grammatical des mots. Ici, rien à dire, ils fonctionnent tous les trois de la même manière, selon le schéma de la cinquième phrase de base, celle dont le verbe a deux compléments, le premier sans préposition et le second avec préposition : on dit, on raconte, on récite quelque chose à quelqu'un. Mais si l’on travaille sur l’opposition : aviser, annoncer, informer, la première chose à signaler devrait être, à partir du corpus proposé ou trouvé de mettre en lumière, le fonctionnement syntaxique différent : On annonce quelque chose à quelqu’un ; mais on avise ou on informe ou on avertit quelqu’un de quelque chose. Pour ce groupement de verbes, il sera intéressant de faire apparaître que les données de la situation (qui parle, de quoi et en quel type de lieu) sont déterminantes pour passer de avertir à informer, ou aviser. On peut ainsi travailler des oppositions intéressantes, comme écouter, entendre ou examiner, scruter, observer, regarder, voir ; demander, questionner, interroger, interviewer, poser des questions. Dans ce dernier exemple, le fonctionnement syntaxique est important : on interroge quelqu’un sur quelque chose, mais on demande quelque chose à quelqu’un. Il est intéressant aussi de comparer les transformations nominales des uns et des autres : interroger peut donner interrogation ou interrogatoire… ! Les usages sociaux sont également à repérer : par exemple, seul un journaliste peut interviewer, en principe ; si bien que lorsque ce verbe a comme sujet une personne différente, l’emploi est,, comme on dit, “marqué”, c’està-dire qu’il y a un effet, produit par un verbe inadapté en apparence et dont il faut interpréter la présence : Ma concierge m’a interviewée ce matin sur mes fréquentations. Ici, l’emploi du verbe, pour la situation décrite produit incontestablement un effet comique, que les élèves doivent apprendre à repérer. À côté de ces oppositions de verbes, on peut de la même manière travailler sur des oppositions de substantifs, comme pile, tas, monceau, amoncellement etc. ou d’adjectifs comme gros, gras, adipeux, obèse etc. , ou encore, la série : toxique, dangereux, vénéneux, empoisonné, nocif, pollué etc.