comme furent caractérisées les œuvres américaines de Lubitsch – permet, tout en riant
avec les personnages, et en riant des personnages, de mettre en lumière cette
interrogation fondamentale : l’art peut-il changer le monde ? Le cadre fourni par le théâtre
de l’Orangerie, et de ses saisons estivales, est idéal pour s’amuser avec tout cela. Mais
derrière le rire se retrouve toujours le réel, et ici, l’horreur de l’absolutisme.
Aujourd’hui, en ce mois de mars, les questions d’absolutisme, d’horreur et de barbarie,
mêlées au rire salutaire sont malheureusement plus que jamais d’actualit́ . Alors non,
nous ne serons pas Charlie comme il est bon ton de le proclamer partout en tant qu’artiste
notamment, mais nous chercherons en quoi l’art et l’humour peuvent aussi être aussi une
arme. Words are swords écrivait Shakespeare dans Hamlet. « Les mots sont des
couteaux. » Mais au théâtre, la fin, heureusement, les morts se relèvent toujours. C’est
peut-être que la fiction est en définitive plus puissante que le réel.
Note d’intention sous forme de réflexions sur le cinéma et le théâtre : Réel
versus fiction
Un rire ce n’est pas rien, certes, mais ce n’est pas tout ! Et c’est ce qu’il s’agit de découvrir,
de mettre en jeu, dans l’adaptation que je propose. Car ce qui sous-tend le rire, c’est le
réel. A savoir, notre ralit́ d’aujourd’hui, le regard que l’on peut porter sur l’histoire du
monde. Comment est-ce que la comédie nous amène nous questionner – toujours – sur
l’acte théâtral et notre rapport au monde ?
On connait, chez Shakespeare, la mise en abyme du théâtre par le théâtre. Lubitsch a
pouss une incandescence rarement égalée cet artifice dans To be or not to be. La
réalisation du film a eu lieu en 1941, pendant la guerre, ou pour mieux dire sous la ralit́
de la guerre, bien que les Etats-Unis étaient loin du théâtre des opérations. La distance
entre la Pologne (Varsovie) et l’Angleterre, l’intérieur de la narration du film, est aussi
bien distance réelle que distance mentale entre le danger et le salut, entre le Mal et le
Bien.
Nous organiserons notre tour un triple vertige : jouer une pièce de théâtre, la ralit́ de
Genève, la mythologie d’un régime totalitaire. Le passage subtil de l’une l’autre de ces
instances pour l’esprit du spectateur caractérisera la magie de cette œuvre. Nous nous
amuserons rendre brusque et visible, de petits instants de décalage, le passage de la
pièce de théâtre Nouilles froides Pyongyang la ralit́ de la situation de la Corée du
Nord, ralit́ historique donc, mais aussi référence une ralit́ extérieure matérielle dont