FIN DE VIE - Une centaine de députés PS, écologistes et radicaux estiment que la proposition de loi ne va pas assez loin. L'INFO. Le gouvernement est rassuré. Les députés, comme l'espérait la ministre de la Santé, Marisol Touraine, ont en effet rejeté mercredi, par 89 voix contre 70, des amendements visant à légaliser le suicide médicalement assisté et l'euthanasie, dans le cadre de l'examen d'une proposition de loi sur la fin de vie. Une "sédation profonde et continue" mais pas d'euthanasie.La proposition de loi élaborée par les députés Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (UMP), qui complète la loi de 2005, prévoit une "sédation profonde et continue" pour les patients en phase terminale, sans aller jusqu'à l'euthanasie, et rend contraignantes pour les médecins les directives anticipées laissées par les malades. Cette proposition de loi, soutenue par l'UMP et le PS, est relativement consensuelle mais une centaine de députés PS, des écologistes et des radicaux de gauche estiment qu'elle ne va pas assez loin. Un amendement socialiste prévoyait ainsi que "toute personne majeure et capable, en phase avancée ou terminale d'une maladie incurable, provoquant une douleur physique ou une souffrance psychique insupportable, peut demander (...) à bénéficier d'une assistance médicalisée active à mourir". A la fin janvier, une proposition de loi écologiste allant dans ce sens avait déjà été rejetée, seuls les groupes écologiste et des radicaux de gauche ainsi que quelques élus PS votant pour. "Ne pas brusquer la société française". Les deux auteurs de la proposition de loi, Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (UMP), ont appelé au rejet de cette série d'amendements et réaffirmé "l'équilibre" de leur texte issu de leur rapport présenté l'an dernier. Marisol Touraine a elle aussi appelé au rejet de ces amendements, estimant qu'il ne fallait "pas brusquer la société française". Fin de vie : la proposition de loi votée à l'Assemblée 17 mars 2015 © MARTIN BUREAU / AFP PREMIÈRE LECTURE - La proposition de loi d'Alain Claeys (PS) et de Jean Leonetti (UMP) a été votée mardi par 436 voix contre 34. L'Assemblée nationale a largement adopté mardi en première lecture, par 436 voix contre 34, la proposition de loi PS-UMP sur la fin de vie, qui instaure un droit à un endormissement pour les malades en phase terminale. Ce vote dans l'hémicycle a été perturbé par un bref incident, des inconnus ayant jeté sur des députés de gauche, depuis les tribunes, des bouts de papier sur lesquels était imprimé "Non à l'euthanasie" et "R comme résistance". Le texte arrivera au Sénat en mai. 83 abstentions. Les groupes PS, UMP, UDI et Front de gauche ont massivement voté en faveur de ce texte soutenu par le Premier ministre, Manuel Valls, qui le juge "équilibré". Les élus écologistes et du groupe des radicaux de gauche ainsi que plusieurs députés PS se sont abstenus. Ils avaient défendu en vain des amendements identiques qui proposaient de légaliser le suicide médicalement assisté, "l'assistance médicalisée active à mourir". A droite, des députés de l'Entente parlementaire, l'aile droitière de l'UMP, qui avait mené bataille contre le mariage pour tous, se sont également abstenus. Ils jugent le texte "inutile et dangereux" et s'élèvent, tout comme les responsables des principales religions, contre ce qu'ils considèrent comme "un droit à la mort". >>>Quels sont les deux points essentiels du texte ? "Sédation profonde et continue". L'article central de la proposition de loi UMP-PS sur la fin de vie autorise le recours à "une sédation profonde et continue" jusqu'au décès. Cette possibilité de "dormir avant de mourir pour ne pas souffrir", selon l'expression de Jean Leonetti; l'un des deux auteurs du texte, sera réservée à des malades atteints "d'une affection grave et incurable". La sédation pourra être décidée par l'équipe médicale lorsque la souffrance du malade, "dont le pronostic vital est engagé à court terme", ne peut être apaisée par des traitements analgésiques. Elle pourra aussi être mise en oeuvre lorsque le patient décide, comme la loi actuelle lui en donne déjà le droit, d'arrêter tout traitement et que cette décision "engage son pronostic vital à court terme". Les députés ont aussi accepté de donner un caractère contraignant aux "directives anticipées". Equivalent d'un "testament médical", elles permettent à toute personne, majeure et capable, de faire connaître ses souhaits relatifs à sa fin de vie et notamment son refus de tout acharnement thérapeutique pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Les directives anticipées. Elles existaient déjà dans la loi Leonetti de 2005, mais n'étaient valables que trois ans et pouvaient ne pas être suivies par le médecin. Le nouveau texte prévoit qu'elles s'imposeront au médecin "sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation" et qu'elles seront sans limite de validité mais révisables et révocables à tout moment. SANTE - A l'avenir, ces directives anticipées s'imposeront aux médecins. Vendredi matin, les députés Jean Leonetti (UMP) et Alain Claeys (PS) ont présenté à François Hollande leurs propositions pour améliorer la fin de vie en France. Leur rapport est appelé à devenir un texte de loi, réformant ainsi la loi Leonetti de 2005. Les deux parlementaires ont proposé que les directives anticipées, l'équivalent d'un "testament médical", s'imposent aux médecins. >> LIRE AUSSI - Fin de vie : ce que préconise le rapport Claeys-Leonetti De quoi parle-t-on exactement ? Derrière ces mots techniques de "directives anticipées", on parle d'un sorte de testament de fin de vie, qui permet à chacun d'exprimer à l'avance son opposition à tout acharnement thérapeutique. Cette possibilité offerte à chacun est prévue depuis la loi Leonetti de 2005. "Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie concernant les conditions de la limitation ou l'arrêt de traitement. Elles sont révocables à tout moment", peut-on lire dans le Code de la santé publique. Pourquoi est-ce si peu appliqué ? 2 % des Français seulement, contre 10 % des Allemands, ont rédigé leurs directives anticipées, selon l'Observatoire national de la fin de vie. Un chiffre dérisoire qui révèle un tabou sur la fin de vie. "Tout se passe comme si on ne voulait pas en connaître l’existence. C’est moins un problème d’information que d’appropriation dans une société où le jeunisme est roi", analyse sur Slate le professeur Régis Aubry, président de l’Observatoire national de la fin de vie. "Il faut affronter le frein de cette page blanche : comment rédiger ce que je peine à imaginer ? Il faut aussi balayer le tabou, et la pensée magique qu'en envisageant les choses, on risque de les provoquer", estime, de son côté, Jean Leonetti, interrogé dans Le Parisien. © Europe 1 Comment les rédiger ? Seule une personne majeure peut laisser des directives anticipées. Elles doivent être consignées par écrit, datées et signées par leur auteur (nom, prénom, lieu de naissance). Elles peuvent être modifiées ou révoquées à tout moment et sont valables 3 ans. Qui garde ce document ? Ces directives anticipées peuvent être conservées dans le dossier médical ou gardées par le patient lui-même, une personne de confiance ou le médecin traitant. La Société française d'accompagnement et de soins palliatives milite pour que ce document soit enregistré sur la carte vitale. Quelle valeur ont ces directives ? Aujourd'hui, la loi Leonetti oblige seulement le médecin à en tenir compte. Mais en aucun cas, ces directives anticipées n'ont de valeur contraignante. "Les directives anticipées n’ont pas de valeur contraignante pour le médecin. Celui-ci reste libre d’apprécier les conditions dans lesquelles il convient d’appliquer les orientations que vous aurez exprimées, compte tenu de la situation concrète et de l’éventuelle évolution des connaissances médicales", précise le ministère de la Santé. Qu'est ce qui pourrait changer ? Les députés Jean Leonetti et Alain Claeys proposent que les directives anticipées s'imposent désormais aux médecins.