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Son Excellence Monsieur l’Ambassadeur, Le Jury du Prix de Paris,
Mesdames et Messieurs,
C’est un grand honneur d’être ici, à la Résidence de l’Ambassadeur de France. Je suis très heureux et
honoré de recevoir ce prix. C’est un encouragement magnifique à continuer mes recherches, à mieux
connaître Paris et à approfondir mes liens avec la France.
Les dernières semaines, je suis allé à Paris pour m’y installer et pour y régler des choses pratiques.
J’ai ouvert un compte bancaire BNP Paribas, je me suis occupé de mon inscription à l’EHESS, je me
suis renseigné sur les abonnements d’une association sportive et je suis allé chez le médecin pour
obtenir un certificat médical d’aptitude à la vie en collectivité… Heureusement, il a conclu que je suis
« en pleine forme », donc je n’ai pas d’anomalies mentales qui m’empêcheront de vivre à Paris.
Mais c’était en me promenant au bord de la Seine, en voyageant dans le métro et en achetant une
baguette et du camembert, que j’ai vraiment réalisé que je vais vivre à Paris cette année. Que j’ai
une année entière pour mieux connaître la vie parisienne.
J’ai fait des études de langue et culture françaises. Pourtant je n’ai jamais habité en France, en raison
de mon programme d’études bien rempli, qui comprenait aussi la géographie humaine. Le Prix de
Paris m’offre donc la possibilité de réparer ce défaut. Après avoir étudié et enseigné la
communication interculturelle, je suis maintenant prêt pour une vraie expérience interculturelle moimême.
Mes premières semaines à Paris ont confirmé que le sujet de mes mémoires de master, qui sera aussi
le sujet de mon projet de recherche à Paris, est vraiment un sujet d’actualité : la représentation des
Musulmans dans les médias.
Dans les stations du métro, j’ai vu des grandes affiches pour le nouveau musée de l’Institut du
Monde Arabe. Le 22 septembre, samedi dernier, le musée du Louvre a ouvert son nouveau
département des Arts de l’Islam dans une galerie très spectaculaire, qui a été largement financée par
le mécénat des souverains arabes. Et la semaine dernière, le magazine Charlie Hebdo a créé une
véritable polémique avec la publication de nouvelles caricatures du prophète Mahomet.
Ce mélange de fascination pour l’islam d’un côté, et de mépris d’un autre, n’est pas du tout nouveau.
La France, c’est – selon le fameux théoricien littéraire Edward Said – le pays qui a quasiment inventé
l’Orientalisme, avec la campagne en Égypte menée par le général Napoléon en 1798. Un siècle plus
tard, le quotidien Le Petit Parisien associait l’islam surtout à la violence et des cruautés, au fanatisme,
à l’arriération politique et à la répression des femmes. Mais en même temps, ce quotidien favorisait
la construction d’une mosquée à Paris pour satisfaire les sujets musulmans. Laissez-moi vous lire un
passage du Petit Parisien du 9 mai 1895 :
« La France, qui compte, en Algérie seulement, plus de trois millions et demi de sujets mahométans,
est une des grandes puissances musulmanes du monde; il est donc assez naturel qu'on trouve à Paris,
parmi beaucoup d'édifices surmontés d'une croix, un édifice dominé par le croissant.
Les fidèles du Prophète résidant chez nous viendront volontiers s'y réunir, y chercher, en même temps
qu'un abri matériel, des coreligionnaires amis. Il se rendront compte que la France respecte et
protège leur foi. Il est à souhaiter que l'Etat ou la Ville de Paris seconde cette initiative en fournissant
un terrain pour l'érection du futur monument. Ce serait un acte de tolérance, de libéralisme, et aussi
de bonne politique. »
Fin de citation.
La France était donc très consciente de sa position comme grand pouvoir dans le monde islamique.
Malgré le fait que l’Indonésie, la grande colonie néerlandaise, comptait plus d’habitants musulmans
que toutes les colonies françaises ensembles, la presse néerlandaise n’a pas présenté les Pays-Bas
comme un tel pouvoir islamique. Le fait que l’islam était la religion de la plupart des Indonésiens
était pratiquement ignoré, sauf si elle servait comme source d’inspiration pour les militants
séparatistes en Aceh. La France voyait son empire coloniale comme une nouvelle empire romaine.
Elle tentait de se mêler dans les affaires religieuses de ses colonies et de transformer ses sujets
coloniaux en « Petits Français ». Les Pays-Bas, au contraire, ont choisi la stratégie d’ignorer l’islam
autant que possible afin de prévenir des perturbations et de maintenir la paix.
J’ai déjà analysé cette période, la fin du dix-neuvième siècle, dans mon dernier mémoire. De plus, j’ai
analysé la position de l’islam et des musulmans dans les quotidiens contemporains pour le mémoire
que j’ai écrit pour mon master en langue et culture françaises. Mais entre la fin du dix-neuvième
siècle et aujourd’hui, beaucoup d’événements importants ont influencé l’image des musulmans. De
plus, des grands nombres d’immigrés musulmans sont venus en Europe d’Ouest, surtout à partir des
années 60. L’islam est venu pour y rester.
Maintenant, je suis donc intéressé par les développements au cours du vingtième siècle. Parce que
la France et les Pays-Bas ont choisi des stratégies d’intégration complètement différentes. Dès le
début, la France a encouragé l’assimilation. Aux Pays-Bas, plusieurs stratégies se sont succédées : de
la pilarisation sociale des années 60 jusqu’à l’assimilationnisme plus récente.
Pendant mon séjour à Paris, je veux analyser les développements de l’image de l’islam et des
musulmans dans la presse française aux cours du vingtième siècle, et relier ces développements aux
débats politiques. Il est plus important que jamais de comprendre les origines des images, des
stéréotypes et des relations mutuelles.
Pour mieux comprendre la position des musulmans en France, je suivrai des séminaires à l’École des
hautes études en sciences sociales (l’EHESS).
Je m’intéresse à Paris dans toutes ses facettes culturelles , ses nombreux musées, monuments et
évènements. J’ai aussi déjà acheté des billets pour 5 matchs de Paris Saint-Germain, qui a l’ambition
de devenir le plus grand club de l’Europe, grâce aux investisseurs du Moyen-Orient. Peut-être qu’on
pourrait appeler cela « l’inversion de l’Orientalisme ».
Je me réjouis énormément de cette année à Paris et c’est avec beaucoup d’enthousiasme que je
chercherai de l’inspiration à Paris. Avec cette expérience en France et ma passion pour diverses
disciplines académiques, j’aspire à poser un fondement excellent pour ma future carrière.
J’espère que dans l’avenir, si je réussis à obtenir une belle position de doctorat, je peux contribuer au
renforcement des liens historiques et académiques entre la France et les Pays-Bas en tant que
scientifique. J’espère aussi que le nouveau cabinet néerlandais se rendrai vraiment compte de
l’importance des relations franco-néerlandaises.
Mesdames et messieurs, je voudrais encore une fois remercier Son Excellence l’Ambassadeur,
Monsieur te Velde et Monsieur Moerland pour leurs beaux discours et pour la réception dans cette
belle résidence. Je voudrais aussi remercier deux personnes qui m’ont inspiré considérablement :
Madame Kok Escalle et Monsieur De Pater, vous avez été très importants dans mon carrière
d’études.
Mesdames et messieurs, je vous remercie pour votre attention.
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