INSTITUT DES FILLES DE MARIE AUXILIATRICE Fondé par St Jean Bosco et par Ste Marie-Dominique Mazzarello N. 889 Avec Marie pour découvrir le visage de Dieu Au seuil de la nouvelle année liturgique, je voudrais continuer avec vous, chères Soeurs, la conversation que nous avions commencée sur l’importance d’être signes crédibles de l’amour de Dieu dans nos relations quotidiennes et sur la caractéristique de la douceur, en tant qu’expression du visage salésien de l’amour. Le temps de l’Avent nous invite à le faire en compagnie de Marie, femme de relation. Chez elle, la relation avec Dieu structure toute son existence, la fait devenir reflet le plus pur et le plus resplendissant de la bonté de Dieu dans une créature, image la plus ressemblante à celle de Jésus, son Fils. Le livre « Les FMA en prière » suggère cette invocation à Marie : « Comme toi, nourries de silence et de réflexion, nous apprendrons à découvrir dans l’histoire le visage de Dieu et ses interventions de salut » Le silence et la réflexion sont les conditions pour découvrir le visage de Dieu dans notre vie, dans les turbulences de la vie quotidienne et, en particulier, dans la vie des jeunes. Nourries de silence et de réflexion Silence et prière constituent le climat spirituel de la maison de Nazareth, où Marie médite la Sainte Ecriture et attend, comme tous les pauvres de Yahvé, que s’accomplisse la promesse annoncée par les Prophètes: la venue du Messie qui sauvera Israël. L’évangéliste Luc décrit Marie comme une vierge silencieuse dont la vie est habitée par la présence du Seigneur. L’écoute de sa parole, au milieu des diverses voix des occupations quotidiennes, la trouve prête à percevoir la surprenante annonce portée par l’ange : elle est bénie par Dieu qui l’a comblée de grâce et l’a choisie pour être la mère du Messie attendu. Une nouvelle incroyable qui suscite l’interrogation : Comment cela sera-t-il possible ? Les sécurités humaines ne lui sont pas données : c’est l’Esprit Saint qui agira en elle. Marie fait confiance à Dieu et se confie à Lui. Son « fiat » fleurit de la certitude que le Seigneur n’abandonnera jamais ses enfants et elle s’en remet totalement entre ses mains. L’événement de la naissance de Jésus attire sur le village de Bethléem l’attention de toute la région de Judée. Tous parlent de l’enfant à qui elle a donné le jour : les anges qui en donnent la nouvelle, les bergers qui parlent entre eux, les savants venus de l’orient, les chefs de la ville de Jérusalem. Marie, en silence, adore le mystère. Elle demeure concentrée sur la Parole qui, par son oui, est devenue chair. Elle l’avait accueillie dans son cœur avant de le recevoir dans son sein et maintenant elle le contemple petit enfant entre ses bras. Tout au long de sa vie, Marie se souviendra de l’annonce de l’ange et de la prophétie de Siméon. Elle reviendra sur les paroles qu’elle a entendues de son Fils et, en les reliant les unes aux autres, elle parviendra à les comprendre. Benoît XVI dit que « Marie apprenait Jésus à travers les longues années ordinaires de la vie cachée, à travers les infinis colloques silencieux … elle l’apprenait moment après moment » Marie nous accompagne, nous aussi, aujourd’hui sur le même chemin d’apprentissage. En la contemplant, nous retrouvons sur son visage les traits du Fils. Elle nous aide à faire nôtres les sentiments de Jésus, à vivre avec humilité et ouverture de cœur, en docile obéissance à sa parole. Nos Constitutions invitent à imiter Marie dans son attitude de contemplation : « Dans le silence de tout notre être, comme Marie, la Vierge à l’écoute, nous nous laisserons envahir par la force 1 de l’Esprit. Lui seul nous rend progressivement conformes au Christ Jésus, raffermit notre communion fraternelle et ravive notre élan apostolique » (art. 39) Ces paroles sont un appel à cultiver le silence comme attention à la présence de Dieu, disponibilité et soin pour tous ceux qu’Il aime. En effet, le silence ne signifie pas indifférence ou fermeture face aux personnes et ne nous éloigne pas du monde et de ses problèmes. Au contraire, en nous ouvrant à la vie nouvelle dans l’Esprit, il crée en nous un espace de communion pour Dieu et pour les autres, et nous réconcilie avec la création. L’attention à cette présence et l’écoute de la Parole disposent le cœur à l’obéissance de la foi, à l’humilité, au calme intérieur qui s’épanouissent dans des relations vraies et rendent plus fructueuses les initiatives de bien. Don Ceria rappelle que notre Fondateur, même au milieu des affaires, répondait comme une personne absorbée dans la méditation (cf. Don Bosco avec Dieu, 332) Sa tranquillité provenait du fait qu’il avait tout remis entre les mains de Dieu. Marie Dominique rappelle que nus sommes continuellement en présence du Seigneur et « qu’il faut rester recueillies dans notre cœur pour sentir la présence de Jésus » (L 19.15) Le prochain Synode des Evêques qui se célèbrera du 5 au 26 octobre 2008, portera sur la parole de Dieu. Nous voulons entrer dans ce chemin de l’Eglise pour favoriser la redécouverte pleine d’étonnement de la Parole. Nous le faisons en regardant Marie qui l’accueille dans la foi, l’intériorise, la traduit en vie. Comme elle, nous nous engageons à cultiver un climat de silence, de simplicité et de prière, conscientes que toutes les paroles de Dieu se résument et sont vécues dans l’amour (cf. Préface aux Lineamenta) Notre parler quotidien assumera alors un autre ton et nos paroles naîtront d’un silence pétri d’amour qui dispose à apprendre, réfléchir, approfondir. La qualité de nos relations est donnée aussi par la qualité de notre savoir rester en silence. Découvrir le visage de Dieu dans la vie quotidienne Après avoir été surprise par l’annonce de l’ange, Marie part en voyage vers la montagne, gardant dans son cœur et dans son sein le mystère qui lui a été révélé. Loin de la dispersion des occupations quotidiennes et des conversations curieuses des voisins de sa maison, dans le recueillement et dans la méditation, elle apaise le tumulte intérieur des émotions suscitées par l’annonce insolite. Dans sa marche, elle n’est pas seule : elle est concentrée sur le Fils qui grandit en elle avec la palpitation de son souffle, au rythme de son cœur. Elle avance, mais ses énergies intérieures contemplent le mystère et sont unifiées par cette attention. Elle rompt le silence quand elle entre dans la maison d’Elisabeth, où la contemplation devient rencontre, proclamation joyeuse des traits du visage de Dieu, de sa façon d’agir dans l’histoire. C’est dans la reconnaissance de la grandeur de Dieu qui œuvre dans l’histoire et dans les péripéties de sa petite vie de créature humaine, que se trouve la grandeur de Marie. Benoît XVI affirme que c’est seulement si Dieu est grand que l’homme aussi est grand. Quand nous laissons Dieu entrer dans notre cœur, notre humanité s’exprime en plénitude: nos pieds se mettent en marche, nos mains s’ouvrent pour le service et de nos lèvres jaillissent des paroles d’accueil et de communion. Il n’y a pas de place pour des paroles vaines qui révèlent le vide intérieur et nos meilleures qualités ne s’enorgueillissent pas, mais sont déployées pour la mission. La rencontre de Marie avec Elisabeth est le témoignage de l’action mystérieuse du Très Haut. Deux femmes : l’une est pour l’autre révélation du visage du Dieu-amour. Le signe qui en témoigne est l’exultation dans le sein d’Elisabeth du petit enfant qui va naître. C’est un signe de vie et de joie, de proximité de Dieu, toujours proche de ceux qui le cherchent. La recherche du visage de Dieu est le signe caractéristique de Marie : quand dans la maison de Nazareth, elle vaque aux humbles travaux domestiques et quand elle se rend disponible à un projet qui la dépasse ; quand elle se met en route pour porter de l’aide et quand elle contemple le Fils nouveau-né entre ses bras ; quand discrètement elle veille sur Jésus devenu adolescent et quand elle écoute sa prédication. Il n’est pas facile de gérer le grand mystère, 2 mais elle, qui s’est totalement remise à Dieu, apprend à mettre Jésus au centre de sa vie et à vivre chaque instant comme un don d’amour. En Marie, le petit et l’infini se rencontrent dans les événements de la vie quotidienne : dans l’espérance qui surmonte la peur, dans le silence qui garde un grand amour. Marie témoigne à chaque instant d’un style de vie où Dieu est reconnu comme le centre de la réalité. Lors la rencontre avec les jeunes à Lorette, le 2 septembre dernier, Benoît XVI commentait l’image de la maison de Nazareth avec ses trois murs : une maison qui s’ouvre sur la place, comme pour signifier que le recueillement et le silence intérieur – conditions pour que la Parole soit accueillie en profondeur – ont comme naturelle conséquence la rencontre avec les autres, le dialogue, l’échange, le don de soi. Comment est-il possible de conjuguer le recueillement avec une vie intense d’activités et, surtout, comment reconnaître le visage de Dieu dans la trame du quotidien ? Souvent la frénésie du faire ne laisse pas d’espace au recueillement. Quelquefois, l’intelligence se pose des questions qui ne trouvent pas de réponse. La réalité est complexe et il est difficile dans certaines situations de déchiffrer la présence de Dieu, le visage d’amour et de paix de Jésus. Nous sommes appelées à faire un effort mental pour trouver Dieu présent dans le monde : le cœur éduqué avec Marie à l’école de la Parole sait discerner dans les divers événements et dans les situations même les plus douloureuses les signes de Dieu et reconnaître que le monde a déjà été sauvé en Jésus. « Le Fils de Dieu par son incarnation est entré dans l’histoire en faisant de chaque heure un temps de salut » (C 42) Dieu nous devance toujours dans l’amour même quand nous ne parvenons pas à comprendre. Cette conscience ouvre à la confiance, réchauffe le cœur et donne sens à tout ce que nous sommes et à tout ce que nous faisons. … et dans la vie des jeunes générations L’écoute de la Parole permet de découvrir aussi le visage de Dieu dans la vie des jeunes qui parfois nous apparaît vide et banale, sans grands désirs ou rêves d’avenir, fermée à l’espérance et à l’amour. Certains jeunes, éprouvés par la dureté de la vie, sont devenus adultes trop vite. D’autres ont fait l’expérience des dérives d’une existence privée d’orientation et de sens, de la solitude, de la pauvreté d’affection et de soin. Les situations d’enfants abusés ou exploités par des adultes sont en augmentation. De nombreux enfants sont pauvres et abandonnés. Ils ne connaissent pas la lumière d’un sourire. Ils n’ont pas une enfance sereine et confiante. Devant ces situations, il semble que nos efforts ne servent à rien. Et pourtant non ! Le silence et la réflexion nous aident à aller en profondeur, à dénoncer, s’il le faut et, surtout, à découvrir le besoin latent de vie et d’amour chez les nouvelles générations. Celle qui est mère sait reconnaître le visage du fils même quand il est défiguré par la pauvreté matérielle ou spirituelle. Elle sait repérer, dans les éventuelles erreurs, de nouveaux chemins pour exprimer son amour. A l’école de Marie, nous apprenons l’alphabet de la foi et de l’espérance qui rend féconde notre mission dans les différentes frontières de l’éducation et aussi là où nous rencontrons de nombreux jeunes joyeux et sains. Marie nous aide à ouvrir nos petites espérances sur la grande espérance qui est Jésus. C’est Lui, le but, le Sauveur qui donne sens à notre vie et la comble de joie. Que l’âme de Marie soit en chacun – exhortait saint Ambroise. Nous voulons rencontrer ces jeunes avec son cœur de mère capable de découvrir en eux la nostalgie de quelque chose de grand, au-delà de toute apparence et contradiction, au-delà d’éventuels comportements qui déçoivent nos attentes. Marie et Joseph ne comprirent pas la réponse de Jésus adolescent, mais ils reconnurent que leur paternité et leur maternité devaient se vivre maintenant sur un autre plan, en respectant les choix de leur Fils, en se mettant de côté en tant que parents et en devenant ses disciples dans la foi. Marie ne réplique pas à la réponse de Jésus. Comme d’autres fois, elle conserve cela dans son cœur et elle médite. Ce fils ne lui appartient plus : il est donné à tous. Dans notre mission aussi il peut arriver de ne pas comprendre. Ces fils, que nous n’arrivons pas toujours à comprendre et qui peut-être ne comprennent pas nos paroles, ils observent notre vie, 3 ils saisissent notre regard, ils lisent sur notre visage la bienveillance à leur égard et notre désir qu’ils soient heureux dans le temps et dans l’éternité. La bonté désarme les personnes et a sa racine dans l’humilité. Si nus sommes humbles, nous laissons de l’espace au dialogue avec Dieu et avec les autres. En effet, l’humilité est une vertu contemplative qui ouvre à la communion. Une pensée constamment douce et aimable envers tous finit par forger même notre physionomie. Le regard bienveillant, tandis qu’il accepte de découvrir le visage de Dieu dans les jeunes, leur donne la possibilité de voir en nous son reflet. Le témoignage de personnes unifiées dans l’amour les aide, à leur tour, à regarder le monde avec espérance, à découvrir le positif présent dans les situations complexes qu’ils ont à vivre. Sans crier, ils peuvent arriver à contrer les opinions dominantes parce qu’ils en ont une à témoigner avec conviction : Dieu est amour et nous avons une Mère qui nous prend par la main. Avec Marie, - FMA, jeunes, laïcs – nous désirons : - - avoir un cœur capable de silence et d’écoute, un cœur en attente et donc ouvert pour reconnaître le passage de Dieu dans notre vie ; réveiller la nostalgie d’une beauté lumineuse, non contrefaite parce qu’expression de notre harmonie intérieure ; nous rendre disponibles face aux grands choix missionnaires de la vie pour pouvoir exprimer sans trop de crainte notre oui à la vie. Dieu cherche des cœurs jeunes (l’âge ne compte pas), capables de faire de l’espace pour lui, de se laisser interpeller chaque jour par sa nouveauté : reconnaître dans ce qui est petit et humble un germe d’espérance ; apprendre que la voie de l’humilité n’est pas avant tout la voie du renoncement, mais du courage, du service à la vie et à la joie. L’approche des fêtes de l’Immaculée et de Noël me suggère de proposer à vote méditation, à celle des jeunes et des communautés éducatives la prière que Benoît XVI a adressée à Marie dans le sanctuaire de Lorette, le 1er septembre dernier : Marie, Mère du oui, tu as écouté Jésus Et tu connais le timbre de sa voix et le battement de son cœur. Etoile du matin, parle-nous de Lui Et raconte-nous ton chemin pour le suivre sur la route de la foi. Marie, toi qui as habité Nazareth avec Jésus, Imprime dans nos vies tes sentiments, Ta docilité, ton silence qui écoute Et fait fleurir la Parole dans des choix de vraie liberté. Marie, parle-nous de Jésus, pour que la fraîcheur de notre foi Brille dans nos yeux et réchauffe le cœur de ceux qui nous rencontrent, Comme tu l’as fait en allant visiter Elisabeth Qui dans sa vieillesse a eu, avec toi, la joie du don de la vie. Marie, Vierge du Magnificat, Aide-nous à porter la joie au monde et, comme à Cana, Incite chaque jeune, engagé dans le service des frères, A faire seulement ce que Jésus dira. Un cordial souhait de Bon Noël à vous, à vos parents, aux frères salésiens, aux divers groupes de la Famille Salésienne, aux membres des communautés éducatives, à tous les jeunes. Rome, 24 novembre 2007 Avec affection Mère Antonia COLOMBO 4